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Topographie des différences cibles – distracteurs dans les deux tâches Si la latence et l’amplitude des

VARIATIONS AUTOUR DE LA CATEGORISATION VISUELLE RAPIDE

A. Topographie des différences cibles – distracteurs dans les deux tâches Si la latence et l’amplitude des

activités différentielle ‘Animal vs Non-Animal’ et ‘Carrés vs Ronds’ sont identiques, leur topographie est proche mais distinctes. Les processus différenciant les cibles des distracteurs ne semblent donc pas partager les mêmes bases cérébrales dans les deux tâches.

B et C. Activité ‘Animal vs Non Animal précoce’. En (B) sont représentées les différences ‘Animal vs non-

Animal’ sur les électrodes où cette activité est clairement visible avant 150 ms. C : cartes du t-test apparié de ‘Animal vs non-Animal’ sur 110-140 ms pour chaque sujet. Cette activité est clairement significative, de topographie et d’amplitude comparable à celles observées dans les expériences précédentes. Elle est cependant plus frontale que pariétale, mais la localisation des sources de cette activité chez ces nouveaux sujets est cependant identique à l’activité précoce déjà observée (figure suivante). Aucune différence ‘carrés vs ronds’ n’est observable avant 150 ms.

-1.5 -1 -0.5 0 0.5 1 1.5 FZ F3 CZ C4 F4 F7 C3 50 100 150 200 ms -50 !V

A

B

C

Figure 39 : Modèles des activités lors de l’expérience ‘formes simples’

Sources de l’activité ‘Animal précoce’. Malgré la topographie de l’activité ‘Animal vs Non-Animal’ à 110-

140 ms déplacée en frontal, la localisation des sources est compatible avec les localisations précédemment obtenues : l’activité précoce modélisée sur 110-140 ms résulte de processus temporaux.

Sources de l’activité différentielle à partir de 150 ms. La localisation des sources de l’activité différentielle

principale est ici légèrement plus haute, mais compatible avec celles observées dans les expériences précédentes.

4.2 discussions et conséquences

résumons

• La tâche ‘Carrés vs Ronds’ est mieux réussie (5%) que la tâche ‘Animal’ et effectuée plus rapidement (40ms), sans que cette rapidité n'apparaisse aussi clairement sur les essais les plus rapides.

• Les traitements visuels des stimuli simples et des scènes complexes sont clairement différentiés à partir de 100 ms.

• Malgré cela, les activités liées aux cibles et aux distracteurs n’apparaissent qu’à partir de 150 ms, et ce de manière identique dans les deux tâches jusqu’à 210 ms, malgré des stimuli fondamentalement différents. Ces activités semblent résulter des mêmes processus de décision cibles vs distracteurs, quelle que soit la complexité des stimuli.

• Une activité différentielle précoce [110-140 ms] pour ‘animal vs non-animal’ est observée comme lors des expériences précédentes ; elle en possède toutes les caractéristiques (amplitude, signe, latence, topographie, sources).

a) l’encodage précoce des formes simples et des scènes

La présence d’une activité électrophysiologique précoce entre 110 et 140 ms, différente pour les scènes contenant des animaux et celles n’en contenant pas, se confirme dans cette expérience. Les résultats des études précédentes ont suggéré que cette activité pouvait refléter un encodage visuel différent pour les deux types de scènes, sans lien direct avec la tâche à accomplir. Ce dernier point a été démontré par une étude de R. van Rullen précédemment cité. Cet encodage visuel différent pour des catégories visuelles ne s’observe cependant pas dans le cas d’images contenant des formes simples.

Cette absence d’encodage différent pour carrés et ronds reflète-t-elle une identité de catégorie visuelle entre les deux types de stimuli ? Nous croyons que la question se pose plutôt en termes de bases neuronales sous-tendant la représentation de ces formes : en effet, étant donné la physiologie du système visuel, la présence de formes simples peut être simplement encodée par des activités de neurones de toutes les aires visuelles (de V1 à IT et V4). Dans chacune de ces aires, de nombreux neurones peuvent répondre préférentiellement à ces formes, et les données disponibles (Fujita et al. 1992; Vogels et Orban 1993 ; Tanaka 1996 ) ne montrent pas que les colonnes corticales répondant à des formes différentes soient disposées en groupes différenciés. Ceci rend peu probable l’émergence à la surface du scalp de potentiels évoqués différents pour des formes telles que carrés et ronds.

Un second aspect distingue les deux tâches : autant la tâche ‘carrés vs ronds’ fait intervenir deux types de formes bien différenciées et des stimuli binaires (contenant soit des carrés, soit des ronds), la tâche ‘animal vs non-animal’ oppose une catégorie (visuelle ou sémantique) à un ensemble d’autres scènes dont le seul point commun est l’absence de cette catégorie. Ainsi, même si l’on peut douter d’une aire « spécialisée » dans l’encodage visuel d’animaux, il est certain que la présence d’un ensemble de traits visuels communs ou très probables dans cette catégorie (yeux, pattes, plumes etc.) permet d’impliquer des neurones et des aires corticales différentes en fonction des deux types de scènes. Une différence entre potentiels évoqués par les deux types de scènes est donc beaucoup plus probable dans la tâche ‘animal’ que dans le cas de la tâche ‘formes simples’.

D’autre part une même dispersion est possible pour les neurones répondant à l’ensemble des traits animaux. Ceci nous engage à douter des bases cérébrales obtenues par modélisation dipolaire, pour les activités différentielles précoces ‘animal’. Les colonnes corticales impliquées peuvent être en très grand nombre et dispersées dans des lieux éloignés (l’aire 31 pouvant être l’analogue de V4 chez l’homme est très grande (Sereno et al. 1995 ; Tootell et al. 1997), et d’une distance au cortex inféro-temporal très variable.

b) décision et comportement

Nous avons vu que le début des activités différentielles des deux tâches ne différaient pas en latence. Pourtant, les résultats comportementaux montrent que les images contenant des formes simples sont catégorisées plus rapidement en médiane. Comment concilier ces deux résultats apparemment contradictoires ?

Une possibilité est d’interpréter la décision de répondre cible contre distracteur comme un phénomène périodique, comme l’a développé S. Dehaene dans une étude comportementale (Dehaene 1993). L’auteur propose que le traitement d’information ne soit pas un phénomène continu, et que l’accès à ces informations soit le fait d’un phénomène périodique. Cette proposition s’appuie sur un très grand nombre de données comportementales obtenues chez plusieurs sujets et dans différentes tâches. Les résultats de cette étude montrent que l’aspect indenté des histogrammes de temps de réaction est la juxtaposition d’un histogramme de type gaussien et d’une oscillation périodique ; cette oscillation possède une période propre pour chaque sujet d’environ 40 ms. Le point marquant de cette étude est que la fréquence de ces oscillations est pour chaque sujet une fonction des conditions expérimentales (tâche à accomplir et stimuli). L’auteur propose un modèle dans lequel l’accès de l’information perceptive pour décider de l’action à accomplir soit soumis à ces oscillations.

Nous proposons que ce phénomène soit considéré en regard du type d’information perceptive porté par le système visuel. Dans la tâche ‘carrés vs ronds’, les stimuli sont caractérisés par une grande cohérence de contenu : les formes sont clairement délimitées, et l’information de forme est redondante dans l’ensemble de l’image. Ainsi l’information

extraite par le système visuel est très probablement dénuée de toute ambiguïté sur le contenu des stimuli : la décision ‘cible vs distracteur’ de la tâche peut-être prise de manière certaine dès que le contenu de l’image est disponible pour ce traitement, c’est-à-dire dès le « premier accès » d’un traitement de type décisionnel à l’information visuelle redondante. A l’inverse, les scènes de la tâche ‘animal vs non-animal’ sont plus complexes et bien moins redondante, et peuvent porter des informations ambiguës sur la présence d’un animal dans l’image. La décision ‘cible vs distracteur’ de la tâche pourrait alors être prise rapidement dans des cas particulièrement aisés, mais généralement soumis à un effet de seuil ne pouvant être atteint que par « accumulation d’évidence » (Perrett et al. 1998) de neurones encodant l’animal présent dans l’image1. Cette hypothèse permet ainsi d’expliquer à la fois le décalage de 30 ms du temps de réaction médian, et l’ambiguïté observée sur les temps de réactions les plus rapides pour lesquels il n’est pas sûr qu’un tel décalage soit présent. Cette proposition est aussi compatible avec les résultats électrophysiologiques, qui montrent une latence identique pour le début des activités différentielles des deux tâches.