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D’ALLIAGES METALLIQUES

II. 2-2 Topographie aux rayons X avec rayonnement synchrotron

La topographie par diffraction de rayons X est une technique d’imagerie non destructive, qui permet la caractérisation des défauts et des déformations à longue distance dans des monocristaux de taille millimétriques ou plus [6]. C’est une méthode d’investigation de volume, basée sur la diffraction : le faisceau de rayons X incident de longueur d’onde λ est diffracté par les plans réticulaires du monocristal étudié suivant la loi de Bragg :

λ

θ n

dhklsin( B)=

2 (II.7)

où dhkl est la distance entre les plans (hkl) du réseau cristallin, θB (nommé angle de Bragg) est l’angle entre le faisceau incident et les plans réticulaires et n un nombre entier (ordre de réflexion). La différence de pouvoir diffractant entre le cristal parfait et les régions distordues par la présence de défauts est à l’origine de la formation de contrastes.

Comparée à la microscopie électronique, elle est caractérisée par une plus basse résolution spatiale (micronique) mais a une sensibilité plus élevée aux faibles déformations (<≈ 10-7). Elle permet donc d’imager le champ de déformation à longue distance de défauts individuels. Le grand volume d’observation (quelques cm2 x 0.1 cm) rend cette technique particulièrement adaptée à l’étude des effets mécaniques présents dans l’échantillon et mis en jeu lors de la solidification dirigée d’alliages métalliques.

Grâce aux caractéristiques des sources synchrotron, il est possible d’utiliser la technique de topographie aux rayons X en faisceau blanc (SWBXRT : Synchrotron White Beam X-Ray Topography). Cette technique permet de caractériser en une seule expositionle cristal en fournissant un diagramme de Laue constitué de plusieurs taches de diffraction (Fig.II-12). Chaque tache de diffraction correspond à une image topographique et toutes les parties de l’échantillon sont imagées simultanément, chacune sélectionnant la longueur d’onde pour laquelle la loi de Bragg est vérifiée. En utilisant l’ensemble des taches du diagramme de diffraction, il est possible de spécifier entre autres l’orientation des échantillons et de caractériser les distorsions présentes dans le solide.

(a)

(b)

Figure II-12 : (a) Principe de la topographie aux rayons X en faisceau blanc.

Chaque tache hkl sur le détecteur correspond à une topographie, (b) Exemple de topographie enregistrée lors de la solidification d’un alliage Al-3,5 % pds Ni montrant la croissance

h k l Faisceau direct polychromatique Echantillon Détecteur Taches de diffraction 1 cm

La technique de topographie en faisceau blanc a cependant ses limites. Elle ne peut être utilisée qu’avec un nombre limité de grains (deux à trois) dans le solide sous peine de voir une superposition des taches de diffraction, rendant l’analyse très difficile. De plus, compte tenu de son faible pouvoir de résolution spatiale, elle nécessite des cristaux d’excellente qualité cristalline. Une densité de dislocations supérieure à 104 cm/cm3, rend une topographie difficilement exploitable. Cependant, cette technique se révèle particulièrement efficace pour estimer la qualité cristallographique d’un cristal : pour un cristal de très grande qualité (ne contenant quasiment pas de défauts c’est-à-dire jusqu’à 10 cm/cm3), des franges d’égale épaisseur (franges de Pendellösung) sont visibles en géométrie de Laue.

Contrairement à la microscopie électronique, la topographie aux rayons X a connu un développement relativement limité. L’une des principales raisons est certainement sa résolution spatiale plus faible. Une seconde raison est la difficulté d’interprétation des contrastes visibles en topographie. On peut distinguer différents types de contraste en topographie que l’on peut analyser en utilisant la théorie de la diffraction des rayons X :

a) Contraste d’orientation :

Le contraste d’orientation se produit lorsque des régions du cristal sont désorientées de façon à ne pas pouvoir diffracter en même temps que le reste du cristal, ou quand les faisceaux diffractés par ces régions ont des directions de propagation différentes dans l’espace. La désorientation peut être générée aussi bien par des contractions-dilatations que par des rotations du réseau cristallin.

Dans l’exemple de la Fig.II-12a pour un faisceau monochromatique, la région du milieu n’est pas en condition de diffraction, et donc ne produira pas d’image sur le détecteur. Si le faisceau incident est blanc et parallèle, on est dans le cas de la Fig.II-12b, et l’image montrera des régions avec un déficit ou un surplus d’intensité enregistrée, qui correspondent aux contours des régions désorientées. Les contours qui donnent des faisceaux divergents amènent à un déficit d’intensité (contraste blanc, avec la convention habituelle des clichés pour rayons X), tandis qu’on aura une intensité supplémentaire (contraste noir) là où les faisceaux se superposent. La taille des régions montrant un gain ou une perte d’intensité dépend de l’angle de désorientation et de la distance échantillon-détecteur (D). Il est possible, en mesurant la taille de ces régions en fonction de D, d’évaluer la composante de la

Figure II-12 : Diagramme montrant l’origine du contraste d’orientation pour (a) un faisceau monochromatique faiblement divergent et (b) un faisceau blanc et parallèle.

b) Contraste d’extinction :

Ce contraste provient de la modification des conditions de diffraction dans des zones déformées autour d’un défaut cristallin comme une dislocation. Pour s’assurer d’une interprétation complète et correcte de la topographie en transmission, il faut faire appel à la

théorie dynamique qui tient compte de la re-diffraction dans le matériau. Par la théorie

dynamique, on montre que le contraste dans une image de topographie X dépend autant de l’absorption que de la diffraction du rayonnement par le cristal. La théorie dynamique suppose qu’une onde plane incidente X excite dans le cristal deux champs d’onde (approximation à deux ondes). Pour chaque champ d’ondes, l’énergie se propage suivant un rayon AR situé à l’intérieur du triangle de Bormann, défini par le rayon transmis et le rayon de diffraction de Bragg (Fig.II-13). A la sortie du cristal, chaque champ d’onde se décompose en 2 ondes planes progressives se propageant l’une dans la direction d’incidence, l’autre dans la direction de diffraction. Ces deux champs d’onde interfèrent et sont absorbés différemment par le cristal. L’un subit une absorption normale alors que l’autre subit une absorption anormalement faible : c’est l’absorption anomale ou effet Borrmann.

Il existe trois types de contraste dits d’extinction suivant la valeur de µx (µ coefficient d’absorption linéaire du cristal et x l’épaisseur du cristal). Pour simplifier les explications, je vais maintenant discuter des contrastes d’extinction induits par une dislocation.

Considérons un faisceau incident très étroit, faiblement divergent et rencontrant un Détecteur Région de non Détecteur

contraste Perte

d’intensité

Surplus d’intensité

diffractée et se propage suivant la direction d’incidence. Dans la zone déformée par la dislocation, certains rayons de ce faisceau transmis satisfont à la condition de Bragg, ils sont donc diffractés et traversent le cristal parfait dans la direction de diffraction, subissant une absorption normale. Pour des épaisseurs faibles, il en résulte une augmentation de l’intensité diffractée par la matrice parfaite: c’est l’image directe, ou image cinématique (1 sur la Fig.II-13). Elle est prépondérante dans des conditions d’absorption faible (µx petit devant 1). Dans le cas d’une dislocation, celle-ci apparaitra en noir sur fond blanc.

Prenons maintenant un des deux champs d’onde excités par le faisceau incident. Au voisinage de la dislocation, ce champ se décompose en 2 ondes progressives suivant les directions d’incidence et de diffraction. Lorsque ces 2 ondes se propagent dans le cristal parfait, elles vont elles-mêmes exciter de nouveau champ d’ondes qui se propagent dans une direction RR’. La dislocation provoque donc une baisse de l’intensité transmise suivant AR et la isse une ombre sur la topographie. L’image est alors dite image

dynamique (3 sur la Fig.II-13). La dislocation a un effet d’écran sur la propagation des champs d’onde et va apparaitre avec une intensité plus faible (contraste blanc) par rapport à la matrice parfaite. Le contraste d’une image dynamique est donc inversé par rapport au contraste d’une image directe. Dans des conditions d’absorption modérée (µx voisin de 1), l’image d’une dislocation est constituée d’une ligne sombre (image directe) bordée par une ligne claire (image dynamique). Quand l’absoprtion est très forte (µx grand devant 1), l’image dynamique reste la seule visible.

Dans certain cas, on peut distinguer l’image intermédiaire (2 sur la Fig.II-13) qui est provoquée par les interférences entre les champs d’ondes excités au voisinage d’une dislocation et ceux qui s’établissent dans le cristal parfait.

Figure II-13 Mécanisme de formation des images directes (1), dynamique (3) et intermédiaire (2) dans un cristal contenant un défaut ayant un gradient de déformation

important.

c) Contraste dû au facteur de structure :

Un autre mécanisme de formation du contraste est lié au facteur de structure et ne met pas en cause la perfection cristalline. Ainsi des régions qui n’ont pas le même facteur de structure diffracteront avec une intensité différente. Un exemple de ce type de contraste est donné par la visualisation de régions connectées entre elles par un élément de symétrie telles qu’une faute d’empilement ou une mâcle.