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D’ALLIAGES METALLIQUES

II. 1-2 Le rayonnement synchrotron

Quand une particule chargée est accélérée (ou ralentie), elle émet un rayonnement électromagnétique. Il en est ainsi d’un faisceau d’électrons. Lorsque la vitesse du faisceau d’électrons est faible par rapport à celle de la lumière (v << c), il émet un rayonnement monochromatique dans toutes les directions de l’espace, de basse fréquence et de très faible intensité (Fig.II-2a). En revanche, quand v ≈ c, l’intensité et la fréquence du rayonnement émis augmentent considérablement. L’émission pointe alors selon une direction bien définie, tangente à la trajectoire des électrons, dont l’angle d’ouverture typique est de l’ordre de 10-5 radian dans le repère du laboratoire (Fig.II-2b). On dit alors que le rayonnement synchrotron est très collimaté, ce qui explique qualitativement l’extrême brillance des sources synchrotron. De plus, le rayonnement n’est plus monochromatique comme à basse vitesse, mais polychromatique (ou blanc).

trajectoire des électrons accélération

trajectoire des électrons accélération

Les principaux avantages d’une source de rayonnement synchrotron sont les suivants : Le flux de photons très élevé, et donc également la brillance spectrale (définie comme

le nombre de photons émis par unité de surface, de temps, d’angle solide et par 0,1% de largeur de bande spectrale), ce qui réduit considérablement le temps de pose des images ;

Le spectre continu, qui permet soit d’enregistrer en une seule exposition plusieurs taches de diffraction (topographie aux rayons X en faisceau blanc), soit de sélectionner une longueur d’onde donnée avec un monochromateur.

La faible ouverture angulaire du faisceau, qui permet de positionner l’échantillon à une grande distance de la source, tout en gardant une forte intensité du rayonnement incident.

La polarisation du faisceau : le rayonnement est linéairement polarisé dans le plan de l’orbite, et il est donc possible de changer la polarisation. Ceci permet d’obtenir une sensibilité différente aux déformations (par exemple en faisant varier la longueur d’extinction en géométrie de Bragg).

La structure temporelle pulsée du faisceau (flashes très courts d’environ 100 ps séparés par des intervalles de 3 ns), qui peut être exploitée pour des expériences de stroboscopie.

Afin d’augmenter considérablement la brillance du faisceau, trois générations de sources de rayonnement synchrotron se sont succédées (Fig.II-3). Les sources de première génération étaient utilisées pour l’étude des collisions de particules. Les sources de deuxième génération ont été les premières dédiées à la production du rayonnement synchrotron. Ces sources ont été spécialement conçues à partir d’aimants de courbure permettant de produire un faisceau de faible émittance (= taille du faisceau × divergence). La brillance a atteint alors des valeurs de l’ordre de 1015 (photons /s /mm² /mrad²/ 0.1% largeur de bande spectrale). Les sources de troisième génération ont apporté un grand changement quant aux systèmes employés, avec l’introduction dans l’anneau de stockage de dispositifs d’insertion (ID) appelés wigglers et onduleurs. La brillance a été encore considérablement accrue, jusqu’à des valeurs de l’ordre de 1019 (photons /s /mm² /mrad²/ 0.1% largeur de bande spectrale).

Brillance du faisceau de rayons X Année 1900 1920 1940 1960 1980 2000 106 108 1010 1012 1014 1016 1018 1020 1022 Tubes à rayons X Sources de 1ère génération Sources de 2ème génération ESRF (1994) ESRF (1996) ESRF futur Sources de 3ème génération Limite de diffraction

Figure II-3 : Evolution de la brillance des sources synchrotron au fil des trois générations

Actuellement, il existe de part le monde environ 84 sources de rayonnement synchrotron opérationnelles ou en construction, dont 17 de 3ème génération. Les trois synchrotrons considérés comme les plus grands et les plus puissant dans le monde sont : APS au Etats-Unis, Spring-8 au Japon et l’ESRF en Europe. Nous allons maintenant nous intéresser plus particulièrement à l’European Synchrotron Radiation Facility (ESRF) qui est situé à Grenoble (France) et dans lequel toutes nos expériences de solidification ont été effectuées.

II.1-3 L’ESRF (European Synchrotron Radiation Facility)

A l’ESRF, un faisceau d’électrons de 6 GeV circule dans un anneau de stockage de grande taille (844 m de circonférence). Dans un tel anneau, la trajectoire des électrons est constituée d’une alternance de parties courbées en arc de cercle, obtenus par des aimants de

courbure, et des sections droites. L’énergie perdue par rayonnement par les électrons au

Les électrons sont émis par un canon à électron, puis accélérés dans un accélérateur linéaire (Linac), jusqu’à une énergie de 200 MeV. Ils sont ensuite injectés dans un accélérateur circulaire, le synchrotron (300 m de circonférence), qui les amène à l’énergie finale (6 GeV). Ils sont alors transférés dans l’anneau de stockage, où ils circulent à énergie constante pendant des heures (Fig.II-4).

Figure II-4 : Représentation schématique de l’installation ESRF.

Cependant le rayonnement issu des aimants de courbure est limité en intensité. Afin d’accroître le flux, les machines de 3ème génération accueillent dans leur sections droites des dispositifs magnétiques spéciaux appelés Wigglers et Onduleurs. Avec ces dispositifs d’insertion (ID pour « Insertion Device »), la brillance du rayonnement X est renforcée d’un facteur ≈ 104 pour certaines longueurs d’onde. Les ID sont constitués d’une série d’aimants, à polarités alternées, que l’on place dans les sections droites de l’anneau. Les électrons suivent alors une trajectoire sinusoïdale dans le plan de l’orbite. Ceci permet d’extraire le long de l’axe de la trajectoire un flux 2N fois plus intense avec les wigglers et N² fois plus intense avec les onduleurs, avec N égal au nombre de périodes de la trajectoire.

La distinction entre onduleur et wiggler se fait au niveau de l’angle de déflexion α que subissent les électrons (Fig.II-5). Dans le cas des wigglers l’angle de déflexion des électrons est bien supérieur à l’angle d’émission naturel (20″ à l’ESRF). L’intensité des cônes de lumière s’additionne simplement et tous les effets d’interférence sont négligés puisque l’on peut considérer l’ensemble des sources comme incohérentes. Le spectre d’émission est alors continu. En revanche, dans le cas des onduleurs l’angle de déflexion est de l’ordre de l’angle d’émission naturel des rayons X ou plus petit. Le rayonnement total apparaît comme issu d’une source cohérente dont le spectre d’émission ne sera pas continu mais composé de pics

Onduleur

Wiggler

β

β α<β

α>β

Figure II-5 : Régimes onduleur et wiggler.

Le rayonnement synchrotron ESRF est finalement extrait dans 40 « lignes de lumière », placées tangentiellement à la trajectoire du faisceau d’électrons. A chaque passage du faisceau d’électrons, un éclair de rayonnement X est émis. Le rayonnement synchrotron est donc pulsé : flashes très courts d’environ 100 ps séparés par des intervalles de 3 ns. Le rayonnement est se propage dans des tubes de protection jusqu’au niveau des stations expérimentales où sont menées les observations (Fig.II-6). Celles-ci sont composées :

d’une cabine optique qui dispose de miroirs et de systèmes optiques permettant de modifier les caractéristiques du faisceau, en particulier de rendre monochromatique le rayonnement synchrotron polychromatique.

Une cabine expérimentale dans laquelle les dispositifs expérimentaux et les détecteurs sont installés.

Enfin, la salle de contrôle qui contient les systèmes de collecte de données et de commandes des appareils placés dans les autres cabines.

Chaque ligne de lumière de l’ESRF possède ses caractéristiques propres et peut être dédiée à une discipline particulière d’observation. La ligne de lumière ID19 dans laquelle nos expériences se sont déroulées est particulièrement consacrée aux techniques d’imagerie X comme la topographie haute résolution et la microtomographie.

Figure II-6 : Schéma des cabines composant une ligne de lumière.