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2-2 Diminution de la taille des grains avec la vitesse de solidification

L’ALLIAGE Al – 3,5 % pds Ni

IV. 2-2 Diminution de la taille des grains avec la vitesse de solidification

Comme on peut le voir Fig.IV-8, la morphologie de la microstructure change considérablement en fonction de la vitesse de solidification. Les grains deviennent de plus en plus petits et globulaires (moins allongés) quand la vitesse de solidification augmente, comme observé par Vandyoussefi et col. au cours d’analyses post-mortem d’alliages Al-Mg [4]. Dans le but de quantifier cette évolution, nous avons dans un premier temps mesuré le diamètre équivalent (défini comme le diamètre d’un cercle occupant la même surface que le grain mesuré) moyen des grains en fonction de la vitesse de solidification. La mesure du diamètre équivalent ne prend pas en compte le caractère plus ou moins allongé des grains qui sera discuté par la suite.

Expérimentalement, une mesure de ce diamètre équivalent peut être obtenue à partir d’analyses post-mortem en utilisant la technique d’anodisation (Fig.IV-9b). Cependant, le mûrissement des dendrites et le fait d’effectuer les mesures sur des coupes métallographiques peuvent fortement affecter les résultats. De plus, l’attaque chimique réalisée au cours de l’anodisation pour révéler la structure de grains est délicate à effectuer et peut endommager l’échantillon. Grâce à la radiographie synchrotron, le diamètre équivalent peut être directement mesuré sur les images à partir de la taille des grains équiaxes peu après leur capture par le front eutectique (Fig.IV-9a). Les résultats de ces mesures sont présentés Fig.IV-10.

(a) (b)

Figure IV-9: (a) radiographie d’une microstructure dendritique peu après sa capture par le front eutectique et (b) anodisation de la même zone après traitement métallographique.

0 200 400 600 800 1000 1200 1400 0 10 20 30 40 50 60

Figure IV-10: Evolution du diamètre équivalent des grains équiaxes en fonction de la vitesse de solidification. Le diamètre équivalent diminue d’abord rapidement puis tend vers une

valeur asymptotique.

Vitesse de solidification (µm/s) Diamètre

équivalent (µm)

La taille des grains (resp. le nombre) diminue (resp. augmente) rapidement puis tend vers une valeur asymptotique. Deux effets peuvent expliquer la rapide diminution de la taille des grains :

Une première explication de la rapide diminution du diamètre fait intervenir la distribution en taille des particules affinantes. Cette distribution en taille existe toujours dans les situations réelles, comme montré par Greer et col. [5] qui ont mesuré des diamètres de particules variant typiquement entre 0,2 et 10 µm. La surfusion de germination des particules dépend de leur taille : les particules les plus grosses ont besoin d’une surfusion plus faible que les plus petites particules. Pour les basses vitesses de tirage, seules les grosses particules seront actives c’est-à-dire donneront naissance à des grains équiaxes. En augmentant la vitesse de solidification, la surfusion de constitution devant le front colonnaire augmente et une plus grande gamme de particules devient active.

Une seconde explication a été récemment avancée par A. Badillo et C. Beckermann [6], qui expliquent ce comportement par une augmentation de la vitesse de croissance des grains équiaxes qui conduit simultanément à une augmentation locale de la surfusion et une réduction de la longueur de diffusion autour des grains. L’augmentation de la surfusion favorise la germination de nouveau grains. La réduction de la longueur de diffusion autour des grains réduit les interactions solutales pouvant empêcher la germination de nouveaux grains. Comme dans nos expériences, leurs simulations numériques montrent une augmentation du nombre de germinations quand la vitesse de solidification augmente.

Pour les grandes vitesses, la taille des grains tend vers une valeur asymptotique, ce qui indique une saturation de l’efficacité de l’affinage, ce qui est en accord avec les modèles analytiques et les études expérimentales [1][5]. Ceci peut être expliqué en considérant que l’amplitude et l’étendue de la surfusion de constitution devant le front dendritique sont de moins en moins modifiées par l’augmentation de vitesse. Ainsi, le nombre de particules actives devient plus ou moins constant.

Une autre explication possible [6] est que le rejet de nickel par un grand nombre de grains peut augmenter la concentration locale du liquide autour des grains équiaxes et diminuer l’amplitude de la surfusion de constitution. Les particules affinantes au voisinage de ces grains peuvent alors ne plus être activées. Ce mécanisme d’ « écrantage » est similaire au phénomène de recalescence analysé par Maxwell et Hellawell [7] et peut expliquer l’efficacité partielle de l’inoculation des alliages d’aluminium (on estime qu’au mieux 1% des particules deviennent actives [5]).

d’obtenir un bon accord avec les observations expérimentales. Par exemple, la densité de grains est prise dans la gamme 1011-1013 m-3 par Vandyoussefi et Col. [4], 105-1011 m-3 par Martorano et col. [8] et constante à 1012 m-3 par Dong et Lee [9]. Dans nos expériences, il est possible d’estimer la densité de grains actifs par unité de volume N à partir de la taille des grains (Fig.IV-11). A partir de nos mesures expérimentales, nous trouvons une valeur asymptotique Nmax = 1,25.1011 m-3 qui est du même ordre de grandeur que les densités de grains évoquées plus haut.

108 109 1010 1011

0 10 20 30 40 50 60

Figure IV-11: Evolution de la densité volumique de grains équiaxes en fonction de la vitesse de solidification.

Nos expériences sont rapportées sur le diagramme de Hunt de la transition colonnaire-équiaxe [1], calculé pour une densité volumique d’affinant N = Nmax = 1,25.1011 m-3 et une surfusion de germination ∆TN = 0,1 K qui est une valeur standard utilisée pour les alliages d’aluminium affinés (Fig.IV-12). On peut voir que nos points expérimentaux correspondent à la région qui prédit une microstructure mixte colonnaire-équiaxe. Dans le modèle de Hunt [1]

les grains équiaxes qui ont germé en avant du front colonnaire ont une forme sphérique c’est-à-dire qu’ils se sont développés de manière isotrope. La microstructure mixte est composée à la fois de grains colonnaires et de grains équiaxes qui ont germé et se sont développés de manière isotrope. Dans ce cas, les grains équiaxes ne bloquent pas la croissance du front colonnaire et sont capturés par ce dernier.

Vitesse de solidification (µm/s) Densité

volumique (m-3)

1 10 100

1 10 100

Figure IV-12: Diagramme de Hunt pour l’alliage Al – 3,5 % pds Ni pour une surfusion de germination TN = 0,1 K et une densité volumique d’affinant N = Nmax = 1,25.1011 m-3.

Les symboles représentent les expériences pour lesquelles ont été observés :

(„) une microstructure purement colonnaire,

( ) une microstructure composée de grains d’origine équiaxe.

Dans nos expériences, le régime mixte n’a jamais été observé. Pour une vitesse de croissance Vg = 6 µm/s (Fig.IV-8a) les grains germent et sont suffisamment nombreux pour bloquer la structure colonnaire. Ensuite, les grains ont le temps de croître dans la direction du gradient thermique et de se développer en courtes structures colonnaires avant d’être bloquées à leur tour par de nouveaux grains. La propagation du front effectif est semblable à une succession de transitions colonnaire-équiaxe. Quand on augmente la vitesse de croissance (Fig.IV-8b-c-d) les grains deviennent de plus en plus globulaires car ils ont moins de temps pour développer leurs bras avant d’être bloqués par de nouveaux grains. Ce type de microstructure composée de grains allongés a également été mis en évidence par A. Badillo et C. Beckermann [6] dans des simulations numériques 2D en champ de phase prenant en compte les interactions solutales. Cependant, le fait que nous n’observions pas de croissance mixte peut être dû à la faible épaisseur de nos échantillons (≈ 200 µm). Les grains équiaxes peuvent bloquer plus facilement la structure colonnaire si elle est confinée dans une direction de l’espace. Dans le cas d’échantillons volumiques, les structures colonnaires peuvent se développer dans plusieurs directions de l’espace ce qui rend plus difficile leur blocage par les germinations.

De plus, même pour les plus grandes vitesses de solidification appliquées, les grains ne croissent pas de manière isotrope et sont toujours allongés dans le sens du gradient de

Colonnaire Mixte Equiaxe Gradient thermique (K/cm) Vitesse de croissance (µm/s)

IV-2-3. Caractérisation de la morphologie de la microstructure équiaxe en fonction