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a) Historique et évolution des traitements anti VIH

L’émergence des premiers cas de SIDA avérés correspond à l’apparition de la biologie moléculaire moderne qui permit, par le biais de nouvelles approches mécanistiques, d’accélérer le développement de composés antirétroviraux. Ainsi quatre ans après la découverte du VIH comme agent pathogène du SIDA, la première molécule ayant une activité antirétrovirale est approuvée par la FDA (food and drugs administration). L’AZT (Zidovudine) est un inhibiteur de l’étape de reverse transcription médiée par l’enzyme virale RT [99,100]. A partir de 1987, les patients infectés par le VIH-1 sont donc traités par monothérapie d’AZT. Durant le début des années 90 d’autres antirétroviraux sont également approuvés par la FDA comme la didanosine (Videx) ou la stavudine (Zerit). L’ensemble de ces molécules font partie de la classe des NRTIs (nucleoside analogue reverse transcriptase inhibitors). Cependant l’utilisation à long terme de monothérapies se révèle inefficace et démontre la nécessité de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques [101].

Les traitements combinant deux antirétroviraux sont utilisés à partir de 1992 et remplace la monothérapie deux ans plus tard. A partir de 1995 de nouvelles classes d’antirétroviraux font leur apparition sur le marché biopharmaceutique. Tel que l’inhibiteur de protéase saquinavir (Fortovase/Invirase), synthétisé suite à la caractérisation structurelle de l’enzyme virale PR par cristallographie, et la nevirapine (Viramune) première molécule de la classe des NNRTIs (non-nucleoside reverse transcriptase inhibitors). Les thérapies utilisant ces nouvelles classes de composés permettent une diminution exponentielle de la virémie chez les patients infectés [102,103].

L’ère moderne de la trithérapie antirétrovirale débute en 1997 via l’utilisation d’un traitement combinant deux NRTIs avec un inhibiteur de protéase ou un NNRTI. Ce traitement permet la diminution de la mortalité associée à l’infection ainsi que de la charge virale en dessous du

41 seuil cliniquement détectable [104]. La thérapie basée sur la triple combinaison d’antirétroviraux est depuis nommée HAART (Highly active antiretroviral therapy).

La gamme d’antirétroviraux a continué à se développer en ciblant d’autres étapes de la réplication du VIH-1. Ainsi deux nouvelles classes ciblant l’entrée du virus furent accepté par la FDA, avec en 2003 l’enfuvirtide /T-20 un inhibiteur de fusion [105], puis en 2007 le Maraviroc un antagoniste du corécepteur CCR5.

Enfin des molécules ciblant la dernière enzyme virale IN furent développées. Le Raltégravir fut le premier de la classe des INSTIs (integrase strand transfert inhibitors) à être accepté par la FDA en 2007 [106]. Suivirent à partir de 2013, le Dolutegravir et l’Elvitegravir faisant partie de la même classe d’inhibiteur d’IN [107].

Malgré le fait qu’il existe aujourd’hui des traitements antiretroviraux (ART) très efficaces, des résistances contre l’ensemble des classes d‘antirétroviraux actuellement sur le marché ont été mises en évidence chez les patients traités. La recherche de nouveaux agents thérapeutiques est toujours prioritaire.

Depuis 2010 de nouveaux inhibiteurs de l’IN avec un mécanisme d’action innovant sont en développement dans différentes entreprises biopharmaceutiques. Ces molécules font partie d’une nouvelle classe d’antirétroviraux comme inhibiteurs de l’interaction entre l’intégrase virale et son principal cofacteur cellulaire la protéine LEDGF/p75.

b) Déclin de la virémie sous thérapie ART

Depuis 2010 aux Etats-Unis et en Europe, la thérapie ART est initiée chez les patients ayant un nombre de LT CD4 inférieur à 350 cellules/mm3 et une virémie entre 105-104 copies d’ARN viral/ml de sang. La physiopathologie de l’infection VIH-1 est alors caractérisée par un déclin multiphasique de la charge virale plasmatique (figure 10).

La première phase du déclin de la virémie apparait rapidement suite à la prise du traitement. Elle est associée à l’élimination des LT CD4 infectées. En effet les LT CD4 actives sont les cibles préférentielles du VIH-1. Ces cellules sont très sensibles aux effets cytopathiques liés à l’infection et ont un temps de demi-vie court (1 jour). Ainsi la thérapie ART permettant l’inhibition drastique de la réplication virale, les LT CD4 préalablement infectées meurent et le renouvellement naturel induit par le système immunitaire permet de restaurer un « pool » de cellules LT CD4 actives non infectées.

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Figure 10 : Déclin de la virémie sous traitement ART [108].

La seconde phase est plus lente mais permet d’atteindre un seuil de charge virale dans le sang cliniquement non détectable (< 20-50 copies d’ARN viral/ml de sang). La diminution de la virémie dans cette seconde phase correspond à l’élimination de cellules de la lignée myéloïde macrophages et cellules dendritiques. Cette phase est plus progressive que la précédente car ces cellules sont moins sensibles à la cytotoxicité induite par le VIH-1 et ont une demi-vie plus longue (plusieurs semaines).

Au regard de l’efficacité des traitements ART résultant en une reconstitution significative du système immunitaire, des études portant sur la demi-vie des cellules infectées avaient prédit l’éradication du VIH-1 après plusieurs années de trithérapies [109]. Malheureusement même après de nombreuses années sous thérapie, dès deux semaines après l’arrêt du traitement l’ARN viral redevient détectable dans le sang des patients [110].

En effet même si la charge virale n’est plus détectable, la réplication du VIH-1 n’est pas complétement supprimée par le traitement. Une des évidences de cette persistance est l’observation de rebonds de virémie chez les patients sous ART [111]. La durée, l’amplitude et l’origine de ces épisodes transitoires de pics de la charge virale ne sont pas encore bien

43 caractérisés [112,113,114]. Cependant les rebonds de virémie sous traitement ART démontrent l’existence de réservoirs viraux empêchant l’éradication du VIH-1.

Le VIH-1 cause une infection chronique pour laquelle aucun traitement curatif n’est disponible pour le moment. Les patients infectés suivent un traitement ART à vie et la tolérance aux antirétroviraux, les interactions médicamenteuses et l’accessibilité aux traitements peuvent compromettre l’efficacité de la thérapie.

c) La thérapie préventive

La transmission dite verticale correspond à la transmission du virus de la mère à l’enfant au cours de la grossesse, de l’accouchement ou de l’allaitement. Depuis le début de la pandémie ce phénomène est au cœur de la recherche de thérapies antirétrovirale préventives. En 1994, il a été démontré que le traitement des femmes enceintes infectées avec de l’AZT permettait de prévenir la transmission verticale du VIH-1 [115].

La transmission verticale étant liée à la charge virale plasmatique, lorsque les femmes enceintes sont traitées par des thérapies ART le risque de transmission périnatale est inférieur à 2 % [116]. Selon le rapport annuel de l’UNAIDS l’utilisation de thérapies ART adaptées pour la mère et le fœtus, a permis de diminuer de près de 70% les cas de transmission mère enfant l’an dernier.

En 2011, l’utilisation des thérapies ART chez des couples dits serodiscordants, c’est-à-dire avec seulement l’un des deux partenaires infecté, a montré une efficacité de prévention de l’infection chez les personnes saines [117].

Jusqu’à très récemment aucun antirétroviral n’avait encore été caractérisé comme préventif, c’est désormais chose faite. En effet le tenofovir disoproxil fumarate (Truvada) produit par Gilead, faisant partie de la classe des NRTIs, vient d’être accepté par la commission européenne comme premier traitement antirétroviral préventif ciblant exclusivement des personnes à haut risque de contamination. Cela fait suite aux études ayant démontré l’efficacité du Truvada dans des tests de prophylaxies en préexposition au VIH-1 [118].

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B -

Les différentes classes actuelles d’antirétroviraux

Les traitements actuels ART sont constitués de la combinaison de plusieurs antirétroviraux ciblant différentes étapes clés du cycle de la réplication du VIH-1. A ce jour, six classes d’antirétroviraux ont été approuvées par la FDA (figure 11) et d’autres sont en cours d’essais cliniques. Depuis quelques mois des médicaments combinant directement plusieurs classes d’inhibiteurs ont également été mises sur le marché biopharmaceutique.

Figure 11 : Les étapes du cycle de réplication du VIH-1 ciblées par les différentes classes d'antirétroviraux.

Les classes d’antirétroviraux actuellement acceptées par la FDA sont référencées en vert, les facteurs de restriction cellulaires en rose et les protéines virales contrecarrant leur activité en bleu [119].