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2.2.1.1 Test de fluorescence à la ThT

CHAPITRE 2 : Criblage d’une chimiothèque d’aurones sur des modèles des fibres de tau

I. 2.2.1.1 Test de fluorescence à la ThT

Les travaux de thèse du Dr Dufour ont permis d’observer des fibres en AFM structurellement similaires à celles de la protéine htau40 à partir du peptide R3.163 Ces fibres ont été obtenues après incubation de R3 à 100 µM pendant une semaine à 37 °C dans le tampon phosphate salin (PBS) à pH 7,4 en présence d’héparine (ratio héparine/protéine ou peptide 1:4) et en absence de DTT à 1 mM. La fibrillation de ce peptide peut également être réalisée dans le tampon phosphate 50 mM (pH 7,4), où elle est caractérisée par une phase d’élongation d’environ 15 h dans le test de fluorescence en plaque utilisant la ThT comme sonde et par un profil de feuillets β en CD. Dans ce projet, la fibrillation du

sels potentiellement présents dans le PBS, et d’autre part de pouvoir comparer avec la fibrillation du

peptide AcPHF6 réalisée dans le même tampon. De plus, les conditions de fibrillation ont été optimisées par la modification de différents paramètres, notamment les concentrations d’héparine et

de ThT utilisées, ainsi que la présence ou l’absence de DTT.

La concentration de ThT à utiliser a été déterminée par le suivi de la formation des fibres à partir de 100 µM de peptide R3 dans le tampon phosphate 50 mM pour différentes concentrations de ThT. La fluorescence observée au maximum du plateau dans le test en plaque a été reportée sous la

forme d’un histogramme pour des concentrations de ThT variant de 1 à 100 µM (Figure 2.I.11.A). Celle-ci est la plus élevée à 40 µM de ThT. A des concentrations inférieures de ThT, le maximum de fluorescence observé est moins important, ce qui vient probablement du fait que tous les sites de fixation de la ThT sur les fibres ne sont pas occupés. Pour une concentration supérieure à 40 µM, le maximum de fluorescence observé diminue également. Ce phénomène déjà reporté dans la littérature peut être attribué à une extinction de la fluorescence entre molécules de ThT liées et libres.188 La ThT libre en excès recouvrirait alors la ThT liée et empêcherait son excitation, résultant en une fluorescence moins importante. De plus, la ThT est capable de former des micelles à une

concentration supérieure à 4 µM, c’est-à-dire dans les conditions usuelles des tests d’agrégation de fibres amyloïdes.183 Les micelles peuvent alors incorporer des molécules hydrophobes et diminuer leur concentration effective dans le test de fluorescence. En outre, une étude récente suggère que

l’utilisation de la ThT en quantité sub-stoechiométrique par rapport au peptide amyloïde est idéale.39

Dans ces conditions, la ThT ne perturbe pas l’auto-assemblage des amyloïdes. En conséquence, la fibrillation du modèle R3 a été réalisée dans ce projet avec une concentration de 10 µM de ThT afin de permettre la comparaison avec la fibrillation du peptide AcPHF6. Il est à noter que la fluorescence observée est notablement inférieure dans le cas de la fibrillation du peptide R3 par rapport à celle du peptide AcPHF6. Ceci pourrait être dû au fait que la ThT se lie moins facilement au cœur hydrophobe

des fibres du peptide R3, celui-ci étant probablement plus enfoui que pour les fibres du peptide AcPHF6.

Figure 2.I.11. (A) Maximum de fluorescence observée au plateau en fonction de la concentration de ThT. (B) Variation de fluorescence après ajout de fibres préformées (100 µM) incubées pendant 24 h.

Afin de vérifier que dans la gamme de concentration utilisée, les sites de fixation de la ThT ne sont pas saturés, des fibres de R3 (100 µM) préformées au préalable pendant 24 h à 37 °C ont été ajoutées sur des fibres assemblées en parallèle dans les mêmes conditions dans le test en plaque (Figure 2.I.11.B). Aux diverses concentrations de ThT, cet ajout est accompagné d’une augmentation

spontanée de la fluorescence suivie d’un autre plateau. L’augmentation de fluorescence peut être expliquée par la liaison des molécules de ThT libres se fixant aux fibres ajoutées au milieu. La présence d’un excès de ThT libre est nécessaire pour permettre de détecter également des composés agissant en tant que promoteurs de la fibrillation, ce qui provoquerait une augmentation de la fluorescence. Cette gamme de concentrations de ThT devrait donc permettre l’étude de composés ayant soit un rôle d’inhibiteur, soit de promoteur de la fibrillation.

Par ailleurs, la contribution de l’héparine à la fibrillation de R3 a également été étudiée (Figure 2.I.12.A). Une cinétique de fibrillation similaire est observée pour des concentrations de 10 à 100 µM

d’héparine. Pour des concentrations inférieures, l’allure de la courbe de fibrillation est différente avec

des phases d’initiation et d’élongation (avant d’atteindre le plateau) plus longues et un maximum de fluorescence atteint au plateau supérieur. Ainsi, pour des concentrations de 10 à 100 µM d’héparine, les phases d’initiation et d’élongation sont d’environ 1 h chacune, alors que pour 1 µM d’héparine, la phase d’initiation est d’environ 2 h et la phase d’élongation de 4 h. En absence d’héparine, la phase d’initiation seule dure entre 6 et 8 h. Cette étude a également été réalisée dans un milieu réducteur en présence de DTT (Figure 2.I.12.B), où des profils similaires à l’étude précédente (Figure 2.I.12.A) sont obtenus. Dans cette étude également, des concentrations de 10 à 100 µM en héparine

présentent un profil proche, alors que les phases d’initiation et d’élongation sont considérablement

allongées pour des concentrations inférieures en héparine. En absence d’héparine notamment, la

phase d’initiation dure environ 16 h. Ainsi, la fibrillation du modèle R3 est plus lente dans un milieu réducteur en présence de DTT (1 mM), en particulier pour des faibles concentrations d’héparine. Ceci

intermoléculaires au niveau de la cystéine 322, ce qui confirmerait leur rôle dans le processus d’auto -assemblage des fibres (promoteurs de la fibrillation), comme cela a été illustré dans la littérature pour la protéine tau et son mutant K19.67

Figure 2.I.12. Fibrillation du modèle R3 (100 µM) dans le tampon phosphate (50 mM) avec 10 µM de ThT et 0 à 100 µM d’héparine en (A) absence ou en (B) présence de DTT (1 mM).

Les mêmes études ont été réalisées sur le peptide AcR3 (100 µM) dans le tampon phosphate (50 mM). Le peptide AcR3 a été incubé en absence (Figure 2.I.13.A) et en présence (Figure 2.I.13.B) de DTT avec des concentrations de 0 à 100 µM d’héparine menant à des constats similaires aux deux études précédentes. La phase d’élongation du peptide AcR3 semble cependant plus lente que celle

du peptide R3 avec des différences plus marquées au niveau de maximum de fluorescence au plateau, celles-ci s’échelonnant de manière décroissanteavec les concentrations d’héparine. A l’image de la fibrillation du peptide R3, la durée de la phase d’initiation est notablement augmentée à des concentrations faibles d’héparine ou sans héparine. De même, la présence de DTT augmente considérablement la phase de latence pour des faibles concentrations d’héparine.

Figure 2.I.13. Fibrillation du modèle AcR3 (100 µM) dans le tampon phosphate (50 mM) avec 10 µM de

ThT et 0 à 100 µM d’héparine en (A) absence ou en (B) présence de DTT (1 mM).

Ces données montrent que les peptides R3 et AcR3 ont des profils de fibrillation similaires à celle du peptide AcPHF6 et de la protéine tau. Suite à ces travaux, les études d’inhibiteurs des fibres du peptide R3 ou AcR3 ont été réalisés dans la suite de ce projet sans DTT et avec une concentration

d’héparine de 100 µM, concentration à laquelle a lieu une formation rapide et importante de fibres. Le modèle R3 a été utilisé comme outil de criblage secondaire pour les molécules actives sur le modèle AcPHF6. Les modèles R3 et AcR3 ont également été caractérisés plus amplement en CD et en AFM.