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2. DES DONNEES DE SITE AU LABORATOIRE 41

2.3.2. Gel-dégel

2.3.2.2. Température de gel dans le massif

Phénomène de surfusion

Selon le diagramme de phase, le changement de phase de l'eau en glace se produit à 0°C sous pression atmosphérique (Figure 2-30) : il s'agit de la congélation.

Figure 2-30 Diagramme de phase eau liquide-glace et domaines des types de structure cristalline de la glace I, II, III et V.

Figure 2-31 Température de l'eau dans la roche lorsque la température extérieure est négative (modifié d'après Thomachot (2002))

En pratique, la congélation d’un volume d’eau libre à pression atmosphérique ne peut débuter que pour des températures inférieures à 0°C (Figure 2-31). Ce phénomène est souvent considéré comme du à la surfusion (Thomachot, 2002). Les récents travaux de Bost (2008) ont en fait montré que ce retard de la congélation de l'eau dans la roche s'explique par 3 hypothèses :

- l'eau encore liquide contenue dans la roche se retrouve sous pression lorsque l'eau avoisinante gèle et donc sa température de congélation diminue selon le diagramme de phase de la Figure 2-30 ;

- les migrations d'eau générées par la congélation apportent vers les sites gelés de l'eau non gelée. Les sites gelés sont donc alimentés en eau encore liquide et donc énergétiquement parlant la température de congélation ne peut être atteinte ;

- la dissolution de la calcite dans l'eau de la roche contribue à la présence d'une grande quantité d'impuretés dans l'eau ce qui contribue également à abaisser la température de congélation.

Prise en compte du retard de congélation de l'eau pour le calcaire de Chamesson et la Pierre de Lens

Tourenq (1970) obtient des températures de Tc1 - Tc2 (cf. Figure 2-31) comprises entre –2°C et –4°C pour des roches dont la majorité des pores a un diamètre supérieur à 0,03 µm et entre –10 à –20°C pour des roches dont la majorité des pores a des rayons inférieurs à 0,007 µm. En effet, la température de gel de l'eau dans les pores est liée au rayon du capillaire (Fagerlund, 1971). Le calcaire de Chamesson et la Pierre de Lens ont un diamètre de pore moyen bien supérieur à 0,03 µm. D'après les mesures de Tourenq, leurs températures de gel sont donc comprises entre -2°C et -4°C. Nous avons vérifié ce résultat par des mesures de température à l'aide de thermocouples introduits au cœur d'échantillons cylindriques 40*80 mm (Figure 2-32).

Les résultats des mesures sont reportés dans le Tableau 2-6. Pour la température Tc1 (cf. Figure 2-31), la valeur moyenne du calcaire de Chamesson est de -3,1 ± 0,4 °C et pour la Pierre de Lens -4,0 ± 0,7 °C. Pour la température Tc2 (cf. Figure 2-31), elle est légèrement en-dessous de 0°C. Dans ce cas, l'écart entre Tc1 et Tc2 est de 2,4 ± 0,4 °C pour le calcaire de Chamesson et de 2,6 ± 0,6 °C pour la Pierre de Lens ce qui est compris dans les valeurs mesurées par Tourenq (1970).

Figure 2-32 Mesure de la température de surfusion et de la température de gel à l'aide de thermocouples placés dans les échantillons du calcaire de Chamesson (à droite) et de la Pierre de Lens (à gauche).

Essai Chamesson Pierre de Lens

Tc1 (°C) Tc2 (°C) Tc1 – Tc2 (°C) Tc1 (°C) Tc2 (°C) Tc1 – Tc2 (°C) 1 -3,8 -0,7 3,1 -4,7 -1,6 3,1 2 -3 -0,7 2,3 -4,6 -1,4 3,2 3 -3,2 -0,6 2,6 -2,8 -1,2 1,6 4 -2,8 -0,6 2,2 -3,9 -1,2 2,7 5 -2,7 -0,8 1,9 -4,5 -1,8 2,7 6 -3,2 -0,7 2,5 -3,6 -1,4 2,2 moyenne -3,1 -0,7 2,4 -4,0 -1,4 2,6 écart type 0,4 0,1 0,4 0,7 0,2 0,6

Tableau 2-6 Températures de congélation Tc1 et Tc2 pour le calcaire de Chamesson et la Pierre de Lens au cours de passage de 20°C à -5°C en 2 heures environ. Valeurs mesurées à l'aide de thermocouples introduits au centre d'échantillons cylindriques 40*80 mm.

La température de surfusion est inférieure à -2°C, il est inutile de considérer les températures négatives comprises entre 0°C et -2°C.

Application en fonction des données climatiques des stations météorologiques

Les stations météorologiques de Troyes Barberey et de Nîmes Courbessac sont respectivement les plus proches de la carrière de Chamesson et de celle de Moulézan (Pierre de Lens). Elles sont donc utilisées pour avoir les données météorologiques de ces sites. Les données quotidiennes de températures minimales et maximales pour les années 2008 et 2009 ont été récupérées (Météo France, 2009a).

Chamesson Pierre de Lens

Nombre de cycles* Tmin Tmax Nombre de cycles* Tmin Tmax

Janvier 7 -4 6 3 -3 10 Février 11 -4 8 0 Mars 3 -4 9 1 -2 11 Avril 1 -2 11 0 Mai 0 0 Juin 0 0 Juillet 0 0 Août 0 0 Septembre 0 0 Octobre 2 -3 11 0 Novembre 2 -3 4 0 Décembre 6 -6 4 4 -4 6

Moyenne 32 (total) -4 8 8 (total) -3 9

Ecart type 1 3 1 3

* Nombre de jours par mois avec une température minimale inférieure à -2°C et une température maximale positive

Tableau 2-7 Données de température des stations météorologiques les plus proches des carrières de Chamesson et de Moulézan (Pierre de Lens) pour la détermination du nombre de cycles de gel-dégel et des températures de gel et de dégel. Valeurs moyennes de 2008 et 2009 (Météo France, 2009a).

On a ainsi déterminé le nombre de jours par mois où la température maximale est positive et la température minimale est inférieure à -2°C. Ce nombre de jours correspondra au nombre de cycles de gel-dégel que nous allons reproduire en laboratoire. On obtient les données du Tableau 2-7.

Par ailleurs, les valeurs de gel provenant de ces données météorologiques servent à déterminer à quelle température de gel les cycles de gel-dégel vont se dérouler. Nous avons regardé la valeur moyenne de l'ensemble des températures de gel relevées. Pour le calcaire de Chamesson, la température moyenne de gel est de -4° ± 1 °C et pour la Pierre de Lens, cette température vaut -3 ± 1 °C. Nous avons de même regardé les températures de dégel. Pour le calcaire de Chamesson, la température moyenne de dégel vaut 8 ± 3 °C et pour la Pierre de Lens, elle vaut 9 ± 3 °C.

Le Tableau 2-7 fournit enfin le nombre de cycles de gel-dégel moyen pour chacun des deux calcaires.

Ainsi, une année de cycles de gel-dégel correspond à :

- 32 cycles de gel-dégel à -4°C et +8°C pour le calcaire de Chamesson ; - 8 cycles de gel-dégel à -3°C et +9°C pour la Pierre de Lens.

2.3.3. Dissolution

2.3.3.1. Degré de saturation

L'évolution des degrés de saturation du calcaire de Chamesson et de la Pierre de Lens a été étudiée au paragraphe 2.3.1 et il a été choisi de les tester avec une saturation par immersion dans l'eau pendant 48 heures.

Par ailleurs, d'après des mesures faites sur le terrain (Tableau 2-8), l'eau acide, en contact avec la calcite présente dans les calcaires, est neutre aux résurgences (cf. réaction de dissolution du Chapitre 1, 1.1.2.1) et est même légèrement basique. L’eau contenue dans les calcaires est donc neutre.

Les échantillons seront donc saturés par imbibition à 48 heures avec de l'eau du robinet (i.e. pH neutre).

Référence Site (nombre de prélèvements) pH à l'exutoire

(Charmoille, 2002) Vallée du Doubs (9) De 7,17 à 7,5

(Talour, 1978) Massif de la Vanoise (3) De 8,6 à 8,4

(Miserez, 1973) Karst jurassien (6) De 7,0 à 8,0

(Djebbar, 2006) Sources et forages (9) De 7,5 à 8,0

Calcaire – Baulme la Roche (3) - Résurgence en bas de falaise, le

18/08/09 De 6,8 à 6,9

Dans le cadre de notre étude

Calcaire – D124 (1) - Résurgence à flanc de colline, le 18/04/11 6,9

Tableau 2-8 Mesures de pH réalisées aux exutoires de karsts