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5. PROCESSUS D’ALTERATION DES CALCAIRES DE REFERENCE 123

5.1. Technique d'obtention des résultats

5.2.2. Degrés d’altération des échantillons provenant de blocs prélevés sur site

5.2.2.1. Obtention des échantillons à partir des blocs prélevés sur

site

Les échantillons provenant de blocs prélevés sur site ont été carottés aux mêmes dimensions que les échantillons altérés en laboratoire.

Or, contrairement aux échantillons altérés en laboratoire qui n’ont subi aucune manipulation mécanique, les échantillons altérés du terrain ont été carottés dans leur état d’altération final. Et une carotte trop fissurée ne permettait pas d’obtenir les dimensions désirées. Donc, les échantillons obtenus proviennent des zones les moins sensibles mécaniquement des blocs prélevés sur site.

Ainsi, pour le faciès très altéré, nous n’avons pu obtenir que deux échantillons correspondant aux dimensions. Pour le faciès peu altéré, 11 échantillons ont été obtenus et enfin pour le faciès altéré, 12 échantillons ont été obtenus. Nous devons donc garder en tête que le carottage des échantillons entraîne une sous-estimation du degré d’altération de ces faciès plus ou moins altérés.

5.2.2.2. Observations de l’altération

L’étude des échantillons aux faciès altérés prélevés sur le terrain ne donne pas des évolutions mais uniquement des valeurs à l’instant où nous les avons prélevés. La comparaison avec les échantillons altérés en laboratoire peut donc se faire uniquement par le biais des observations de l’altération. L’observation de l’altération se fait aux échelles macroscopique et microscopique.

A l’échelle de l’éprouvette

Regardons tout d’abord les fissures observables par les images des parois latérales au scanner. Pour les faciès peu altéré et altéré, aucune fissure n’est visible sur les échantillons. Trois hypothèses peuvent expliquer cette situation :

1) les échantillons sont exposés aux conditions climatiques depuis peu de temps et ne sont donc pas encore fissurés, comme les échantillons altérés au laboratoire après le 1er cycle annuel d’altération accéléré ;

2) les échantillons n’ont pas réagi en fissurant face aux conditions climatiques ;

3) les échantillons carottés sont les moins endommagés et donc ceux qui ne présentent pas de fissures en surface.

Concernant le faciès peu altéré, les échantillons présentent une porosité liée aux fissures très faible (entre 0,4 et 0,7 %), l’hypothèse 1 paraît donc la plus adaptée.

Pour le faciès altéré, la porosité liée aux fissures des échantillons est non négligeable (entre 0,4 et 1,2 %). Pourtant aucune fissure n’est visible sur la surface des échantillons, ceci s’explique par l’hypothèse 3.

Regardons maintenant la longueur et l’orientation des fissures présentes sur les 2 échantillons du faciès très altéré. Les valeurs moyennes des longueurs des fissures en fonction de leur orientation sont données dans la Figure 5-15.

Les longueurs et orientations des fissures du calcaire au faciès très altéré montrent, comme les échantillons soumis aux cycles annuels d’altération accélérés, une orientation préférentielle des fissures dans la direction horizontale.

0 -80 -70 -60 -50 -40 -30 -20 -10 10 20 30 40 50 60 70 80 0 40 80 120 160 200

Longueur des fissures (mm)

O ri e n ta ti o n d e s f is s u re s ( °) Figure 5-15 Représentation polaire de l’orientation et de la

longueur des fissures obtenues par analyse d’images à partir des surfaces des échantillons « déroulées » au scanner pour le calcaire prélevé sur site au faciès très altéré. 0° correspond à l’orientation horizontale, 90° à l’orientation verticale vers le haut et -90° à l’orientation verticale vers le bas. Les valeurs correspondent à la moyenne faite à partir des résultats de deux échantillons.

Figure 5-16 Fissures présentes en surface des échantillons du calcaire au faciès très altéré, elles sont remplis de calcite.

Par contre, si l’on compare la longueur maximale des fissures horizontales du faciès très altéré avec les valeurs de la Figure 5-9, elle se situe entre le 6ème et le 7ème cycles annuels d’altération accélérés. Or, le carottage sous-estime le degré d’altération du calcaire (5.2.2.1). Il semble donc que ce faciès ait un âge d’exposition aux cycles climatiques très avancé. Au niveau du processus d’altération, ce faciès a donc dépassé la phase 1 de fissuration. Pourtant, la porosité totale de ce calcaire est très faible (0,8%), il est donc difficilement concevable qu’il se situe dans la phase 2 d’élargissement des vides.

Si l’on regarde la surface des échantillons, les fissures présentes ne sont pas vides contrairement aux échantillons soumis aux cycles annuels d’altération accélérés, mais sont remplies de calcite (Figure 5-16). Cet aspect met en évidence un phase de l’altération due à la dissolution que nous n’avons pas observé sur les échantillons altérés en laboratoire : la calcite dissoute vient précipiter dans les fissures déjà créées.

- une forte fissuration, il a donc dépassé la phase 1 de fissuration ;

- une porosité totale très faible, il n’est donc pas dans la phase 2 d’élargissement des vides ; - des fissures remplies de calcite, aspect non observé en laboratoire.

Il semble donc que ce faciès très altéré se situe dans une phase du processus d’altération située après les phases 1 et 2 observées en laboratoire. Cette phase correspond au remplissage des fissures par de la calcite dissoute et re-précipitée.

Les observations des fissures au scanner confirment les degrés d’altération estimés suite aux observations sur site.

Elles donnent par ailleurs des informations précises sur le processus d’altération :

- le faciès peu altéré ne présente pas de fissures dans la mesure où il n’a pas été exposé aux intempéries un temps suffisant ;

- le faciès altéré est fissuré mais le carottage des échantillons empêche d’observer ces fissures sur leurs surfaces ;

- le faciès très altéré fait apparaître une autre phase d’altération, plus avancée que celles observées en laboratoire, où les fissures sont remplies de calcite.

A l’échelle de la microstructure 0 0,005 0,01 0,015 0,02 0,025 0,001 0,01 0,1 1 10 100 1000

Rayon d'accès au pore (µm)

V o lu m e i n c m e n ta l (m L /g )

Chamesson/état initial Faciès peu altéré Faciès altéré Faciès très altéré

Figure 5-17 Courbes porosimétriques du volume incrémental en fonction du rayon d’accès au pore obtenues pour chaque faciès observé sur site. La courbe porosimétrique du calcaire de Chamesson à l’état initial a été rajoutée pour comparaison avec les autres états.

Regardons maintenant les courbes obtenues par l’essai de porosimétrie au mercure et comparons-les à celle du calcaire de Chamesson à l’état initial. Elles sont reportées dans la Figure 5-17.

La courbe du calcaire au faciès peu altéré présente une seule différence avec la courbe du calcaire de Chamesson à l’état initial : la hauteur du pic de la gamme principale est plus petite pour le faciès peu altéré. Or, cette même différence a été observée dès le premier cycle d’altération accéléré et jusqu’au cycle 3, c’est-à-dire au début de la phase 1 de fissuration des échantillons du calcaire de Chamesson en laboratoire (Figure 5-10). Ce faciès correspondrait donc au début de la phase 1 du processus d’altération.

L’allure de la courbe du faciès altéré présente deux différences avec la courbe du calcaire de Chamesson à l’état initial :

- la hauteur du pic de la gamme de pores principale est plus élevée pour le faciès altéré ; - le rayon de la gamme de pores principale est plus élevé pour le faciès altéré.

La hauteur du pic de la gamme de pores principale plus élevée correspond à une augmentation de la quantité de pores. Or, cette augmentation est observée sur les échantillons altérés en laboratoire au cycle 7. Donc ce faciès correspondrait au début de la phase 2 du processus d’altération d’élargissement des vides. Par contre, aucun décalage important du pic vers les rayons d’accès aux pores plus larges n’est observé sur les échantillons altérés en laboratoire (Figure 5-13). Ce décalage peut s’expliquer par deux hypothèses :

1) initialement, ce calcaire présente des rayons de pores supérieurs à ceux du calcaire de Chamesson que nous avons étudié en laboratoire ;

2) au cours de l’altération du calcaire au faciès altéré, la gamme de pores principale s’est élargie uniformément.

Compte-tenu du fait que les courbes porosimétriques des échantillons altérés en laboratoire (Figure 5-13) montrent de faibles variations au fur et à mesure des cycles, il est difficile d’envisager un élargissement aussi important de la gamme de pores principale. Par ailleurs, l’épaisseur de la zone d’exploitation du calcaire de Chamesson est de 40 m, d’après la carte géologique, des variations de porosité à l’état initial sont donc tout à fait envisageables. Il est donc beaucoup plus probable que ce faciès altéré ait, à l’état initial, une gamme de pores principale de rayon plus élevé.

Concernant la courbe correspondant au faciès très altéré, sa très faible porosité (0,8%) limite l’interprétation de sa courbe porosimétrique. En comparant cette courbe avec la courbe du calcaire de Chamesson à l’état initial, trois différences apparaissent néanmoins :

- un pic correspondant à un rayon d’accès au pore proche de 10 µm ; - la disparition du pic de la gamme de pores principale ;

- l’apparition de pores de rayons d’accès inférieurs à 0,02 µm et atteignant jusqu’à 0,005 µm. Le pic situé à un rayon de 10 µm coïncide avec les pics des courbes porosimétriques à partir du cycle 2 et particulièrement visible au cycle 7 (Figure 5-13). Or, ce pic a été attribué, pour les échantillons altérés en laboratoire à la porosité liée aux fissures. Or la valeur de la porosité liée aux fissures est proche de 0,8%, soit la totalité de la porosité de l’échantillon, il est donc très probable que ce pic corresponde également à la porosité liée aux fissures.

La disparition du pic de la gamme de pores principale signifie que ces vides ont été remplis. Or, nous avons vu sur la Figure 5-16 que les vides sont remplis de calcite re-précipitée à l’échelle de l’échantillon. Nous pouvons donc extrapoler cette observation à l’échelle des pores du calcaire au faciès très altéré. En outre, l’apparition de pores de rayon inférieurs à 0,02 µm rejoint cette idée de comblement des vides par de la calcite dissoute et re-precipitée. En effet, il reste quelques pores non entièrement comblés dont le rayon d’accès a donc fortement diminué.

Ainsi, les courbes porosimétriques des échantillons altérés sur site rejoignent les observations faites sur les échantillons altérés en laboratoire et apportent des compléments d’information : - le faciès peu altéré présente les mêmes courbes que les échantillons altérés en laboratoire pour le début de la phase 1 de fissuration ;

- le faciès altéré présente des variations semblables à celles des échantillons altérés en laboratoire au début de la phase 2 d’élargissement des pores ;

- le faciès très altéré présente les mêmes pics associés à la porosité liée aux fissures que les échantillons altérés en laboratoire auxquels s’ajoutent des indices confirmant l’idée d’un comblement des vides par de la calcite dissoute et re-précipitée.

Enfin, les observations faites sur les courbes issues de l’essai de porosimétrie au mercure vont être complétées par les observations faites au microscope électronique à balayage. Les vues d’ensemble de la microstructure de ces différents faciès sont données dans la Figure 5-18.

Faciès peu altéré Faciès altéré Faciès très altéré

Figure 5-18 Vue d’ensemble de la microstructure des différents faciès altérés naturellement pour le calcaire de Chamesson

Pour le faciès peu altéré, nous notons la présence de vides localisés dans la matrice, attribuables à la dissolution d’après le Chapitre 4 (4.1.2), mais aucune fissure n’est visible. Pour le faciès altéré, une forte porosité autour des oolithes est observable, là aussi une modification plutôt attribuable à la dissolution d’après le Chapitre 4 (4.1.2).

Enfin, pour le faciès très altéré, aucune porosité n’est observable, par contre, quelques fissures sont visibles dans la microstructure.

Les observations au microscope électronique montre que :

- les faciès peu altéré et altéré ne présentent que des effets de la dissolution ; - le faciès très altéré présente quelques fissures et une porosité quasi inexistante.

5.2.2.3. Synthèse des degrés d’altération

Le Tableau 5-5 reprend l’ensemble des observations de l’altération faites pour les échantillons provenant des blocs prélevés sur site présentant des faciès plus ou moins altérés.

Images des surfaces « déroulées » au scanner

Courbes porosimétriques Images MEB

Observations Phase d’altération Observations Phase d’altération Observations Phase d’altération Faciès peu altéré Pas de fissures Début du processus d’altération Diminution de la quantité de pores Début de la phase 1 Vides localisés dans la matrice de dissolution Début du processus d’altération

Faciès altéré Fissures (pas en surface) Phase 1 au moins Augmentation de la quantité de pores Début de la phase 2 Vides autour des oolithes Phase 2 Faciès très altéré Fissures remplies de calcite Après la phase 2 Augmentation de la quantité de fissures Comblement des pores Après la phase 2 Présence de fissures Phase 1 au moins

Tableau 5-5 Récapitulatif des résultats obtenus à partir des observations de l’altération sur les blocs des faciès plus ou moins altérés prélevés sur site pour le calcaire de Chamesson. La phase d’altération correspond aux phases décrites dans le paragraphe 5.2.1.4.

Le faciès peu altéré rejoint les observations de l’altération faites sur les échantillons altérés en laboratoire au début de la phase 1 du processus d’altération.

Le faciès altéré rejoint les observations faites sur les échantillons altérés en laboratoire au début de la phase 2.

Le faciès très altéré présente une phase du processus d’altération postérieure à celles observées sur les échantillons altérés en laboratoire. On peut la considérer comme une phase 3

où les vides (fissures et pores) sont comblés par de la calcite re-précipitée, suite à la phase 2 d’élargissement des pores.

Les estimations des degrés d’altération des échantillons prélevés sur site sont donc confirmées par les observations de l’altération en laboratoire. Le faciès peu altéré correspond au calcaire présentant le plus faible degré d’endommagement, le faciès très altéré correspond au calcaire présentant le plus haut degré d’endommagement et le faciès altéré correspond au calcaire avec un degré d’endommagement intermédiaire.

5.2.3. Conclusion

Suite aux mesures et observations réalisées sur les échantillons ayant subi les cycles annuels d’altération accélérés et sur les échantillons altérés provenant du terrain, il est possible de mieux connaître le processus d’altération du calcaire de Chamesson.

Ce processus s’effectue en phases successives :

- phase 1 : propagation des fissures (jusqu’au cycle 3 d’un point de vue mécanique) ; - phase 2 : élargissement des vides (fissures et pores) ;

- phase 3 : comblement des vides (fissures et pores) par la calcite dissoute.

Les phases 1 et 2 ont été observées sur les échantillons altérés en laboratoire et confirmées par les observations réalisées sur les échantillons prélevés sur site correspondant aux faciès peu altéré et altéré. Par contre, deux différences ont été observées entre les observations en laboratoire et les observations in situ :

- la phase 1 de fissuration pour les faciès peu altéré et altéré semble moins prononcée que sur les échantillons altérés en laboratoire ;

- la phase 3 n’a pas été observée sur les échantillons altérés en laboratoire mais sur les échantillons prélevés sur site correspondant au faciès très altéré.

5.3. Processus d’altération de la Pierre de Lens dans le