• Aucun résultat trouvé

Techniques d’investigation utilisées sur prélèvements

Chapitre IV Les recettes de peinture : Analyse des prélèvements par PIXE-BS

IV.1 Etat de l’art

IV.1.1 Techniques d’investigation utilisées sur prélèvements

On distingue, parmi les techniques d’investigation des peintures, celles qui peuvent être réalisées directement sur l’œuvre, sans dommages, de celles qui nécessitent de prélever un échantillon de l’œuvre (Figure 54). Le problème principal posé par les techniques non destructives in-situ est l’accès aux couches en profondeur, et donc la détermination de la stratigraphie de la peinture. Nous verrons au chapitre suivant comment la fluorescence X peut permettre d’accéder à cette stratigraphie dans certains cas, avec la meilleure connaissance possible des matériaux utilisés. On pourra se référer à [Mohen, 2006 ; Regert, 2006] pour la description des principales techniques utilisées pour l’examen et l’analyse non destructive des œuvres et objets d’art.

Figure 54 : Schéma des différentes techniques les plus utilisées pour l'analyse des peintures. Les sigles utilisés sont définis en annexe 3.

L’analyse des prélèvements permet un accès direct aux différentes couches de l’œuvre. Ceux-ci doivent être le plus petit possible afin de minimiser le dommage subi par l’œuvre. Ils sont en général prélevés à l’aide d’un scalpel sous loupe binoculaire puis enrobés dans une résine polyester ou poly-acrylate (pour faciliter leur déplacement et leur analyse). La résine est ensuite polie de façon à obtenir une surface plane, lisse, sur laquelle toute la stratigraphie des couches est visible. De cette façon, la stratigraphie et la distribution des pigments et liant sont préservées.

Avant toute analyse, les coupes obtenues sont observées sous microscope optique afin de préciser la couleur, l’épaisseur, la distribution et la taille des particules, autant d’indices de la nature des matériaux… Cette observation peut être complétée par des observations sous

IV.1.1.a Analyse des pigments (part minérale)

• La microscopie électronique à balayage (MEB), est couramment utilisée pour l’étude des coupes de peinture [Haswell, 2008 ; Mugnaini, 2006…].

L’image en électrons rétrodiffusés (BSE), est une image en contraste chimique sur laquelle il est généralement aisé de différencier les couches successives de peintures, mais aussi les grains de pigment à l’intérieur d’une couche. Le microscope électronique, associé à un analyseur X dispersif en énergie (MEB-EDX) permet une analyse élémentaire par la détection des rayons X émis par l’interaction du faisceau d’électrons avec la matière. L’analyse élementaire peut être utilisée comme indication pour l’identification des pigments. On obtient de plus une analyse semi-quantitative (voire quantitative) des éléments présents. Des cartographies donnent accès à la distribution des éléments dans la coupe. Cette technique est non destructive, il faut cependant noter que les coupes doivent être préalablement recouvertes d’une fine couche de carbone (métallisation) afin de rendre la surface conductrice. La principale limite de cette technique concerne la quantification des éléments légers.

Dans le cas de la microsonde électronique ou microsonde de Castaing, la détection des rayons X est réalisée avec un dispositif dispersif en longueur d’onde (WDX).

La limite de détection de cette technique est meilleure que celle du MEB-EDX et on peut détecter les éléments légers tels que le carbone ou l’azote. Cependant, l’analyse quantitative élémentaire se fait généralement par rapport à des témoins calibrés mesurés dans les mêmes conditions expérimentales. Dans les deux cas, la profondeur analysée est de l’ordre du µm.

• Les méthodes basées sur les rayons X, qui peuvent être réalisées sur prélèvement, laissent aussi l’échantillon inaltéré.

La fluorescence X, de même que la méthode d’émission de rayons X induits par des particules (PIXE : Particle Induced X-Rays Spectrometry), fournissent la composition élémentaire inorganique (détermination de certains pigments présents) [Mantler, 2000]. Une information plus complète sera obtenue par l’utilisation de la diffraction des rayons X qui permet l’identification des phases présentes [Salvado, 2009]. Il a ainsi été possible d’obtenir d’intéressants résultats sur les blancs de plomb utilisés par Grünewald, à partir de l’analyse par diffraction (en cartographie) de coupes de peinture provenant du retable d’Issenheim [Welcomme, 2007, Appl. Phys.].

IV.1.1.b Analyse du liant (part organique)

Pour l’analyse de la matière organique (principalement liants et vernis), d’autres techniques sont disponibles. Des méthodes destructives, après lesquelles l’échantillon n’est plus disponible pour d’autres analyses, permettent l’identification des matériaux constitutifs et de leurs produits de dégradation :

• Les tests microchimiques peuvent permettre la mise en évidence d’un liant oléagineux ou de la présence de protéines.

Le principal désavantage de ces tests est, en plus de leur aspect destructif, leur spécificité : la nature du test chimique réalisé dépend du composé recherché.

• La chromatographie en phase gazeuse (CPG) avec ou sans couplage à un spectromètre de masse (CPG-SM) permet l’identification des petites molécules organiques [Rioux, 1995 ; Berg, 2000].

La présence d’huiles, de cires, de résines terpéniques, de gommes polysaccharides et de colles animales a ainsi été mise en évidence dans des coupes de peinture [Mills, 1994 ; Schilling, 1996]. Cette technique cependant ne permet pas d’analyser les produits non volatils qui forment la plus grande partie des peintures vieillies. En l’absence de composés volatils, il est possible d’utiliser la chromatographie en phase gazeuse après pyrolyse des matériaux.

• La chromatographie en phase liquide à haute performance (HPLC : High Performance

Liquid Chromatography) est couramment utilisée pour l’identification des pigments

organiques, des résines [Doelen, 1998] et des acides aminés en vue de différencier les sources de protéines utilisées pour les peintures (principalement colles et œuf) [Nowik, 1995].

• Enfin, la calorimétrie différentielle (DSC : Differential Scanning Calorimetry) permet la caractérisation des liants [Odlyha, 1995] mais est assez peu répandue.

IV.1.1.c Analyse des pigments et du liant (parts organique et minérale)

Jusqu’à présent, seules les analyses TOF-SIMS (time-of-flight-secondary ion mass

spectrometry) et SIMS, ainsi que les spectroscopies Raman et infrarouge permettent l’analyse

publications mentionnent l’utilisation de l’infrarouge pour l’identification d’une technique a

tempera ou à l’huile, ou la mise en évidence de l’utilisation de résines. La spectrométrie

Raman [Bellot-Gurlet, 2006] est utilisée pour l’analyse des teintures et pigments. L’identification du liant est possible mais rendue difficile par les changements induits suite au vieillissement de la peinture.

• Le TOF-SIMS permet lui aussi d’étudier la distribution du pigment et du liant, avec une identification de la composition des matériaux [Keune, 2004 ; Mazel, 2007] Cette technique permet une analyse moléculaire à très haute sensibilité en extrême surface [Keune, 2005]. Elle permet entre autres la détection d’éléments traces, non visibles en MEB-EDX.

Cependant ces techniques ne permettent pas, jusqu’à présent, une analyse quantitative complète de l’échantillon.

IV.1.2 Etude des coupes de Léonard de Vinci et contemporains