• Aucun résultat trouvé

État des lieux technique et réglementaire En Europe, les exigences à assurer en condition d’éclairage extérieur (en

particulier en éclairage public) sont définies par la norme NF EN 13 201. Celle-ci s’appuie sur des résultats et synthèses présentés dans les rapports techniques publiés par la Commission Internationale de l’Eclairage (CIE). Il s’agit d’une société savante qui traite des différentes thématiques asso-ciées au domaine de la lumière et en particulier de l’éclairage. Néanmoins, la norme NF EN 13 201 ne donne aucune indication pour limiter l’éblouisse-ment d’inconfort en éclairage extérieur. En effet, en matière d’éblouissel’éblouisse-ment, elle indique seulement des exigences à maintenir pour limiter l’éblouissement d’incapacité (notamment par l’intermédiaire du TI, cf. Section 1.2.1).

En 1976, le rapport technique n˚31 de la CIE proposait d’utiliser le mo-dèle du Glare Control Mark9 (noté GCM) pour quantifier l’éblouissement d’inconfort généré par une installation d’éclairage public (CIE, 1976). Mal-heureusement, avec l’évolution des technologies des luminaires (en particu-lier avec les luminaires à LEDs), ce modèle est devenu obsolète et est diffici-lement utilisable. En effet, il faisait intervenir l’intensité des luminaires à des

angles spécifiques (à 80˚et 88˚par rapport à la verticale). Le solide photo-métrique était bien représenté pour les installations d’éclairage de l’époque avec ces deux angles, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui.

A l’heure actuelle, aucun autre modèle n’a été adopté pour quantifier l’éblouissement d’inconfort en éclairage public. C’est la raison pour laquelle dans son rapport n˚136 (CIE, 2000), la CIE fournit uniquement des recom-mandations pour limiter l’éblouissement d’inconfort en éclairage urbain (e.g. pour une zone résidentielle ou piétonne) en fonction de trois facteurs :

• la hauteur du mât h du luminaire (en m) ;

• la luminance maximale LS,85/90du luminaire, entre 85˚et 90˚par rap-port à l’axe verticale dirigé vers le bas (en cd/m2) ;

• la surface lumineuse AS,90 du luminaire émettant dans une direction de 90˚par rapport à l’axe vertical dirigé vers le bas (en m2).

Par exemple, une des recommandations est que pour une hauteur h com-prise entre 4,5 et 6 m, le produit LS,85/90× A0,5S,90ne doit pas dépasser 5500. Dans le rapport n˚115 (CIE, 2010a), la CIE explique qu’aucune méthode satisfaisante n’a été retenue pour quantifier correctement l’éblouissement d’inconfort. De ce fait, le rapport conseille de se fonder uniquement sur le calcul d’éblouissement d’incapacité (avec le modèle du TI définit par l’Eq. 1.1).

Enfin, en comparant la photométrie de 16 systèmes de phares, le rapport technique n˚188 de la CIE (CIE, 2010b), se fonde sur des valeurs d’éclai-rement mesurées sur un plan horizontal à 940 mm au dessus de la surface de la route. En se référant à une distance statique de 50 m en amont des phares, le rapport précise que tous les phares testés produisent des niveaux d’éblouissement acceptables. Malheureusement, le rapport ne précise pas la procédure employée pour mesurer l’éblouissement (nous pouvons supposer que seul l’éblouissement d’incapacité a été considéré). De plus, le rapport précise qu’en situation dynamique (i.e. quand la position du faisceau lu-mineux issu des phares change en permanence), il est difficile d’assurer un éclairage performant assurant une bonne visibilité, tout en évitant l’éblouis-sement.

Il existe une deuxième société savante importante qui traite les problé-matiques liées à l’éclairage. Il s’agit d’une société américaine, appelée Illu-minating Engineering Society of North America (IESNA). Dans son rap-port technique de 2000 (IESNA, 2000b), l’IESNA fait part de deux modèles

qui permettent d’évaluer l’éblouissement d’inconfort en éclairage public. En plus du GCM évoqué précédemment (CIE, 1976), elle mentionne le modèle du Cumulative Brightness Evaluation10, issu de travaux américains. Néan-moins, l’IESNA ne préconise aucun des deux modèles et fournit seulement deux recommandations pour atténuer au maximum l’éblouissement d’incon-fort en éclairage extérieur :

• augmenter le déplacement angulaire des sources par rapport aux lignes de vision normales de l’observateur ;

• augmenter la taille du milieu diffusant entourant la source lumineuse. Face à cette absence de modèle d’éblouissement d’inconfort adéquat en condition d’éclairage extérieur, un comité technique de la CIE s’est récem-ment construit autour de la problématique de l’éblouisserécem-ment d’inconfort en éclairage public et automobile (le TC 4-33 : "Discomfort glare in Roadway and vehicle lighting"). Dans la version finale du rapport (non publiée à ce jour), un état de l’art général de l’éblouissement d’inconfort est présenté, dans lequel on constate l’absence de consensus sur un modèle à adopter parmi ceux de la littérature.

1.4 Problématique

D’après l’état des lieux spécifique à un contexte opérationnel en éclairage extérieur (cf. Section 1.3), une attente apparaît sur un modèle d’éblouis-sement d’inconfort fiable. En éclairage extérieur, la plupart des modèles d’éblouissement d’inconfort de la littérature (Hopkinson, 1940; de Boer & Schreuder, 1967; Schmidt-Clausen & Bindels, 1974; Bennett, 1977; Bul-lough & Sweater-Hickcox, 2012; Lin et al., 2014) prédisent un niveau moyen d’éblouissement d’inconfort à partir de caractéristiques photométriques et géométriques d’une scène visuelle. La grande majorité de ces modèles ont été conçus à partir de résultats expérimentaux obtenus en laboratoire, lors-qu’une seule source lumineuse est observée en situation statique (i.e. quand la source est immobile par rapport à l’observateur). Or, en éclairage exté-rieur, l’usager est souvent en mouvement relatif par rapport aux nombreuses sources qui l’entourent.

Les travaux de cette thèse consisteront à trouver une base scientifique permettant de faire évoluer cette doctrine et d’aider au dimensionnement de l’éclairage public et automobile du point de vue de l’éblouissement d’in-confort. Pour y parvenir, la problématique générale de cette thèse est d’éta-blir un modèle de prédiction de l’éblouissement d’inconfort engendré par

plusieurs sources lumineuses en mouvement relatif par rapport à un obser-vateur en condition d’éclairage extérieur.

La démarche générale établie pour répondre à cette problématique est présentée dans la Section suivante.

1.5 Démarche générale

Tout d’abord, il est important de préciser que ce travail n’a pas pour ob-jectif de simuler un cas d’usage d’une situation d’éclairage extérieur (e.g. une situation de conduite nocturne). Au contraire, les travaux réalisés consistent à analyser et comprendre l’impact d’une scène visuelle dynamique multi-sources, avec des gammes de valeurs représentatives d’une situation d’éclai-rage extérieur, sur l’éblouissement d’inconfort.

Différentes expérimentations psycho-visuelles ont été menées en labora-toire à partir de stimuli visuels inspirés des conditions réelles (i.e. qui pré-sentent des caractéristiques fidèles à celles des scènes visuelles réelles), mais en aucun cas ces stimuli ne décrivent un cas réel. Dans ces expérimentations, chaque facteur a été manipulé indépendamment des autres, alors qu’en si-tuation réelle, ils co-varient.

Cette thèse vise à quantifier l’éblouissement d’inconfort d’une scène vi-suelle complexe, i.e. comprenant plusieurs sources statiques en situation dy-namique, dans lesquelles les caractéristiques des sources varient au cours du temps. Néanmoins, il est difficile de traiter directement cette situation car elle fait intervenir simultanément plusieurs facteurs (le nombre de sources, leur position les unes par rapport aux autres, leur vitesse de déplacement, etc). Nous avons donc choisi de suivre une démarche analytique permettant d’isoler les différents facteurs caractéristiques d’une scène visuelle complexe. La démarche de thèse se décompose en quatre étapes, présentées sur la Fi-gure 1.1.

Une première étape consiste à réaliser des simulations informatiques qui serviront à déterminer les gammes de valeurs représentatives d’une situation d’éclairage extérieur (i.e. éclairage public et automobile) et permettront ainsi de dimensionner nos différentes expérimentations.

Les deux étapes suivantes sont consacrées à la simplification d’une scène visuelle complexe par une unique source lumineuse qui génère le même ni-veau d’éblouissement d’inconfort. En se plaçant sous une luminosité am-biante fixe et à un niveau de gêne constant, deux aspects différents sont étudiés (cf. Figure 1.1) :

Figure 1.1 – Schéma présentant les principales étapes mises en œuvre pour répondre à la problématique.

• l’Aspect "dynamique" i.e. quand l’observateur est en mouvement relatif par rapport à une source lumineuse dans son champ visuel. • l’Aspect "sources multiples" i.e. quand l’observateur est entouré

de plusieurs sources lumineuses immobiles.

Une dernière étape consiste à généraliser les résultats obtenus lors des deux étapes précédentes à différents niveaux de gêne et différentes ambiances lumineuses. L’ensemble des expérimentations serviront à établir le modèle de prédiction de d’éblouissement d’inconfort souhaité, en situation d’éclairage extérieur (cf. Figure 1.1).

Les simulations informatiques, servant au dimensionnement des expéri-mentations, seront présentées dans le Chapitre 3. Les expérimentations re-latives aux aspects dynamique et sources multiples seront respectivement explicitées dans les Chapitres 4 et 5. Pour généraliser à différents niveaux de gêne, une dernière expérimentation sera détaillée dans le Chapitre 6. Ce chapitre présentera également la construction du modèle final à partir de l’ensemble des résultats obtenus.

Avant de présenter ce travail expérimental, ainsi que les résultats qui en découlent, il convient de mener un état de l’art relatif à l’éblouissement d’inconfort en éclairage extérieur.