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I . Les années de seigneuriage

E. Les premiers résultats du nouveau régime

5. Le taux de change

Source : Banque Centrale de Turquie

5. Le taux de change

L’une des variables importantes dans le mécanisme de transmission de la politique de ciblage d’inflation est le taux de change. Dans le cadre de cette politique, le taux de change n’est plus

une ancre nominale : il s’agit d’un régime de taux de change flottant et la Banque Centrale Turque essaye d’empêcher et de protéger la Livre turque de s’apprécier ou de se déprécier en intervenant sur le marché de change quand c’est nécessaire. Depuis le début du régime de ciblage d’inflation, la Banque Centrale Turque a intervenu 21 fois sur le marché an achetant ou en vendant des devises à part les achats et ventes réguliers. Ainsi, la Banque Centrale Turque a réussi à rendre moins volatile les taux de change nominaux comme on peut le remarquer dans le graphique ci-dessous.

Graphique11: L’évolution des taux de change (cotation à l’incertain)

Taux de change

1 1,2 1,4 1,6 1,8 2

2001 2002 2003 2004 2005 2006

Années

YTL

$ Euro

Source : Banque Centrale de Turquie

Graphique 12: L’évolution du taux de change réel effectif Taux de change réel effectif

100,0 110,0 120,0 130,0 140,0 150,0 160,0 170,0 180,0

1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

Années

%

px-consommateur px-producteur Source: Banque Centrale de Turquie

Dans le graphique ci-dessus, on a l’évolution du taux de change effectif réel dont la cotation est à l’incertain, qu’on peut considérer en tant que signe de la situation du marché de devise et de la force de concurrence commerciale au niveau internationale, calculé à partir des prix de consommateur et des prix de producteurs à la fin des années. On constate que juste après la crise de 2000, il y a une chute importante du taux de change effectif réel nous montrant une dépréciation de la Livre Turque mais pendant la période 2002-2005, c’est-à-dire pendant la période de ciblage d’inflation implicite, le taux de change effectif réel calculé soit à partir des prix-consommateur, soit des prix-producteur, augmente: donc, dans cette période, la Livre Turque s’apprécie et la Turquie a une certaine force de compétitivité au niveau international.

Mais en 2006, on voit que cette compétitivité se détériore: la Livre Turque se déprécie et le taux de change effectif réel chute suite aux chocs d’offre et à l’évolution du prix de pétrole pendant cette période.

Tableau 8: L’évolution du déficit commercial et de l’entrée de capitaux Années Déficit commercial

(en millions de dollars)

Entrée de capitaux (en millions de dollars)

1999 -9.771 131

2000 -22.057 85

2001 -3.363 117

2002 -6.390 21

2003 -13.489 133

2004 -22.736 140

2005 -32.988 2076

2006 -40.941 1547

Source: Trésor de Turquie et Banque Centrale de Turquie

On peut constater l’impact de cette appréciation de la Livre Turque sur le déficit commercial et l’entrée de capitaux, à partir des chiffres donnés dans le tableau 8 : D’une part, suite à la dépréciation de la livre turque après la crise de 2000, le déficit commercial chute mais par contre, dès que la Livre Turque s’apprécie de nouveau, le déficit commence à augmenter, les importations étant toujours supérieures aux exportations pendant la période de ciblage d’inflation implicite. La dépréciation de la Livre Turque en 2006 n’affecte pas à l’inverse l’évolution du déficit commercial : de 2005 à 2006, le déficit continue à augmenter suite à la conjoncture économique internationale. D’autre part, l’entrée de capitaux augmente à partir de

2002 jusqu’à 2005 avec l’appréciation de la Livre Turque dans cette période. Mais comme le taux de change effectif réel baisse en 2006, il y a une baisse de l’entrée de capitaux cette année-là.

Conclusion

La Turquie est un pays en voie de développement qui a fait face à un problème d’inflation chronique pendant de longues années et qui a adopté différentes politiques monétaires dans le but de réduire cette inflation et d’assurer la stabilité de prix. Cette inflation résidait dans l’accumulation du déficit public et dans le financement de celui-ci par le seigneuriage et l’endettement qui causait à son tour, un problème de crédibilité puis que ces modes de financement de déficit public pouvaient causer très facilement l’incohérence temporelle.

La Turquie est l’un de ces pays qui a commencé à adopter le régime de ciblage d’inflation d’abord implicitement en 2002 après explicitement depuis début de 2006 à la suite des crises de 2000 et de 2001 et à réaliser des réformes économiques dans le but de satisfaire les conditions nécessaires pour ce régime. D’abord, la Banque Centrale turque est devenue indépendante en avril 2001. Grâce à un couple de discipline financière et des réformes économiques, il s’agit d’une politique monétaire efficace et crédible au moins dans la période de ciblage implicite : la transparence de la Banque Centrale est assurée par des publications régulières des rapports d’inflation et des rapports monétaires et financiers, des extraits des réunions du Conseil Monétaire, le déficit public qui était à l’origine de l’hyper-inflation est réduit et le seigneuriage qui était l’un des moyens les plus important de ce déficit, a perdu de son importance et enfin, le ciblage a fait ses premières preuves dans un premier bilan macroéconomique.

Dans ce bilan, on a examiné tout d’abord si la cible d’inflation était atteinte ou pas et on a remarqué que le taux d’inflation était resté inférieur à la cible dans les premières années et qu’il avait convergé vers la cible à la fin de la période de ciblage d’inflation implicite. Cela a renforcé la confiance dans la réussite et la continuité de la politique, ainsi que le degré de crédibilité du ciblage d’inflation. Par contre, dans la première année de ciblage d’inflation explicite, la cible n’est pas atteinte et est restée supérieure à la cible à la fin de 2006, ce fait étant dû aux chocs d’offre et à l’environnement économique international. On a constaté aussi que les dynamiques de l’inflation avaient changées significativement dans la période de ciblage d’inflation implicite.

On sait que dans le cadre du régime de ciblage d’inflation, le taux de change reste flexible, la Banque Centrale se réservant le droit d’intervenir pour éviter toute fluctuation trop forte. Dans ce cadre, on a constaté que le taux de change était moins volatile et la Banque Centrale était intervenue quand cela avait été nécessaire. Quant au taux de change réel effectif, il s’est amélioré et la Livre Turque s’est appréciée sous la politique de ciblage d’inflation.

Quant à l’instrument de la politique de ciblage d’inflation, c’est-à-dire le taux d’intérêt de la Banque Centrale le jour au jour, on peut dire que la Banque Centrale a réussi à les baisser graduellement aussi bien dans la période du ciblage d’inflation explicite qu’implicite.

On sait que dans le cadre d’un régime de ciblage d’inflation, la discipline financière est très importante. C’était l’un des points les plus faibles de l’économie turque après les crises de 2000 et de 2001. Mais dès la mise en adoption de la nouvelle politique de ciblage d’inflation, la part de la dette publique est réduite et qu’on a pu assurer une certaine discipline financière puisque la dominance fiscale a été réduite et la profondeur financière a baissé..

Enfin, on peut ajouter que l’économie turque a continué à croître sous cette nouvelle politique monétaire : le taux de croissance a passé d’un taux négatif à des taux positifs, dépassant même l’objectif de taux de croissance.

La Turquie a adopté la politique de ciblage d’inflation après les échecs de différentes politiques de désinflation. Ces politiques ont souvent échoué à cause du problème de l’incohérence temporelle parce que les politiques prévues ne restaient pas toujours optimales d’une conjoncture économique à l’autre et elles étaient abandonnées à la suite des crises économiques étant elles-même des sources de problèmes de crédibilité et détériorant la crédibilité. A la différence des politiques mises en œuvre avant la politique de ciblage d’inflation, cette dernière a continué et réussie. Le niveau de la crédibilité de la Banque Centrale s’est amélioré grâce à cette politique qui est souvent proposée en tant qu’une politique améliorant le degré de la crédibilité et évitant le biais inflationniste. On peut se demander maintenant en quoi c’est une politique qui améliore le degré de la crédibilité. Dans le chapitre suivant, on va se focaliser sur cette question et essayer de comprendre en quoi il s’agit d’une politique monétaire qui peut améliorer le degré de la crédibilité.

CHAPITRE II

CREDIBILITE EN MATIERE DE CIBLAGE