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La discussion sur un élargissement du Conseil implique une réflexion majeure sur le binôme de l’efficacité et la représentativité. La notion de représentativité fond l’argu-mentation des protagonistes d’un élargissement, alors que les opposants à un changement profond de la taille du Conseil avancent la nécessité d’un Conseil efficace.

L’ajout de nouveaux sièges au Conseil permettrait d’impliquer davantage de pays avec des arrières-plans culturels, de niveau de développement et de structures sociologiques différents à son travail. La considération de spécificités régionales découlant d’un nombre plus élevé de membres pourrait dans le cas optimal améliorer la vision des problèmes et situations auxquels le monde est confronté aujourd’hui et au mieux en comprendre les vrais enjeux. Les résolutions et décisions du Conseil gagneraient vraisemblablement en qualité, en devenant plus adéquates et mieux adaptées aux situations particulières.

En même temps, on départirait éventuellement d’une vision monolitique des réponses

40. Wouterset al.(2009) p.147

à ces mêmes situations, et réduire ainsi l’emprise de quelques États (en particulier des États-Unis) sur le travail du Conseil de sécurité. Cependant,Thomas Weiss est d’avis qu’un quelconque élargissement ne permettra pas de constituer un organe véritablement représentatif et que sonactivisme pourrait être mis en danger.41

Le déploiement de plus de ressources humaines42 consacrées au travail du Conseil per-mettrait de répondre à une charge de travail croissante avec la diversité des probléma-tiques et sujets abordés. Dans le même sens, la possibilité de tenir davantage de consul-tations permettrait d’avoir une meilleure compréhension et acceptation des décisions du Conseil, et en affermir la légitimité et l’efficacité vers l’extérieur.43 L’exemple des régime de sanctions ou encore celui des missions de maintien de la paix montre que la mise en œuvre efficace des décisions dépend largement de leur acceptation par la communauté internationale toute entière.

L’argument primaire dans le sens dustatu quo ou dans le sens d’un élargissement limité tient au fait que la responsabilité qui est conférée au Conseil par la Charte des Nations Unies, lemaintien de la paix et de la sécurité internationales, nécessite un organe qui est capable de prendre desaction[s] rapide[s] et efficace[s].44 La réactivité face à une crise, c’est-à-dire la capacité de prendre des décisions promptes serait mise en danger par la considération de positions multiples afin de parvenir à un consensus ou un vote affirmatif sur une résolution. Ainsi, le Conseil perdrait un atout majeur par rapport à la majorité des organes de l’Organisation, il ne serait plus en mesure de prendre des décisions fortes et efficientes en réponse aux situations d’urgences45 tel qu’il a été conçu en 1945 par les grandes puissances.46

À la lumière de l’activité d’autres entités politiques internationales ou supra-nationales, le processus de décision dépend largement de la volonté politique et la capacité de trouver un consensus sur une question donnée.47En considérant en particulier le fonctionnement du Conseil de l’Union européenne48il apparait qu’il y a effectivement des difficultés qui peuvent surgir dans le cours de négociations, parce qu’il y a plus d’intérêts à concilier.

Cependant deux différences majeures sont à relever dans la comparaison de ces deux

41. Weiss (2009) p.55-56

42. Le nombre de personnel attaché au Conseil varie par délégation entre 180 (États-Unis) et 5 ; pour une analyse de la charge de travail : Dedring (2008) p.4 s.

43. Voir dans ce sens les arguments présentés dans Bosco (2009) p.203 s.

44. CONU article 24

45. Müller (2001) p.64, Weiss (2009) p.56 46. Daillieret al.(2009) p.938

47. Baboet al.(2008) p.89

48. Une des institutions de l’Union européenne (TUE article 13 §1), organe décisionnel de l’UE com-posée de ministres des vingt-sept pays membres, voir notamment Cartouet al.(2002) p.99

Conseils. Premièrement, la gravité des situations soumises au Conseil de sécurité ne laisse souvent ni beaucoup de choix dans les options, ni beaucoup de marges d’appréciation objective de la nécessité d’action et facilite la prise de décisions.

Deuxièmement, alors que les décisions du Conseil de l’Union ont un impact direct dans les États le composant, il est moins récurrent que les intérêts des États associés à la prise de décision dans l’organe restreint onusien soient directement et immédiatement en jeu. Malgré une responsabilité accrue reposant sur les membres permanents concernant les implications financières des missions de maintien de la paix, le financement de ces-dernières est, en règle générale, reparti selon une clé de distribution établi par l’Assemblée générale sur la base du produit intérieur brut de chaque État membre de l’ONU.49 L’analyse de la contribution aux contingents de troupes dégage un résultat similaire, et révèle même une certaine réticence des membres permanents à détacher du personnel pour ces missions.50

Sur la base de ces éléments, et malgré les similitudes apparentes, il ne serait donc pas opportun de prendre l’exemple du fonctionnement du Conseil de l’UE comme référence et comme un argument fort contre un élargissement du Conseil de sécurité.

La majorité des pays s’accorde sur le fait qu’un Conseil d’au-delà de vingt-cinq membres ne pourra plus fonctionner de façon adéquate. Néanmoins, les propositions présentées en 2005 convergent autour d’un Conseil de vingt-cinq.51 Pourtant, les États-Unis avant tout sont réticents à un élargissement trop massif, et proposent comme solution de com-promis un élargissement à un maximum de vingt ou vingt-et-un membres52 face aux demandes continues d’une vaste part des États. À côté des arguments relatifs à l’ef-ficacité du Conseil, le rôle prépondérant des P-5 est mis à risque avec plus d’acteurs d’importance géopolitique régionale ou mondiale.53 Non seulement est-il important de s’entendre sur la taille finale du Conseil, mais il faut également s’interroger sur le statut des nouveaux acteurs.

49. D’autres formes de financement ont été expérimentées, et la délégation à des organisations régio-nales se profile davantage. Voir notamment Weiss et Daws (2007) p.683 s. ainsi que Siekman (1991) p.155 s. pour l’état de la discussion sur le financement des missions de maintien de la paix à la fin de la guerre froide

50. Pour des résumés mensuels des contributions de troupes, voir site des Nations Unies sur les missions de maintien de la paix (http://www.un.org/en/peacekeeping/contributors/) (vérifié le 15 mai 2010)

51. Proposition du groupe de haut niveau : 24 membres Propositions « G-4 » et UfC : 25 membres

Proposition de l’Union africaine : 26 membres

52. Volger (2007) p.541, ainsi que Weiss (2009) p.58in fine 53. Pour les implications en terme de vote, voir Section 3 p.16

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