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Chapitre 6 : Résultats des analyses transversales

6.5 Tâches administratives et évaluatives

Plusieurs répondants ont abordé la place des tâches administratives et évaluatives dans le cadre de leur pratique à l’IUSMQ. Certains parlent du fait que les statistiques demandées sont inadaptées au défi de temps associé à leur contexte de travail. Plusieurs abordent les rapports d’évaluation du fonctionnement social, les évaluations psychosociales dans le cadre de régimes de protection, les formulaires d’exonération ou les outils d’évaluation multi-clientèles pour les demandes d’hébergement, ainsi que la rédaction des notes évolutives, comme étant des tâches administratives très prenantes dans leur pratique.

C’est beaucoup de temps. C’est beaucoup de temps pis... faut que j’apprenne à être plus efficace. Fait que ça peut représenter, facilement je trouve que, c’est, c’est quasiment 50-60 % des fois, ça dépend, mais... T’sé c’est parce que note d’ouverture, les notes en suivi, l’évaluation, la note de fermeture... J’trouve qu’on est redondant à pu finir pis des fois je suis capable de faire tout ça, mais des fois, je ne suis pas capable de faire tout ça.

Plusieurs démarches à réaliser font aussi partie de ces tâches administratives, puisqu’elles comportent la rédaction de documents de référence. Prenons par exemple les demandes concernant les revenus (Régie des rentes, aide financière de dernier recours), l’obtention de la carte d’assurance-maladie et l’hébergement.

Comme le décrit l’OTSTCFQ, les travailleurs sociaux ont des tâches évaluatives à réaliser dans le cadre de leur pratique. Parmi les répondants à notre

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étude, les principales évaluations nommées sont les suivantes : l’évaluation du fonctionnement social, les démarches liées à l’hébergement et à la relocalisation des usagers, les évaluations psychosociales en cas d’inaptitude, les références aux autres organismes, l’évaluation familiale, l’évaluation de l’atteinte des objectifs du plan d’intervention, l’évaluation de la situation préhospitalisation, auxquelles s’ajoute les évaluations réalisées dans le cadre de supervision de stagiaires.

Le transfert de connaissances cliniques aux stagiaires est d’ailleurs, pour nos répondants, un point important de la pratique du travail social de 3e ligne

psychiatrique. « Ouais, je suis vraiment dans une zone de confort d’une bonne période-là. Pis c’est sûr que le transfert des connaissances, quand on prend des stagiaires, mais ça aussi c’est une façon de […] bien utiliser nos compétences aussi. Bien tout ça, ça me permet de diversifier mon travail aussi, pour que ce soit moins un peu routinier. »

Comme nous le verrons dans la section suivante, la collaboration professionnelle façonne elle aussi la pratique du travail social de 3e ligne.

6.6 Collaboration interprofessionnelle

Travailler dans un hôpital offrant des services de troisième ligne en psychiatrie signifie interagir avec d’autres professionnels au quotidien. Il est certain que ces collaborations influencent la pratique des travailleurs sociaux que nous avons interviewés. La présente section est divisée en fonction de la provenance des intervenants avec lesquels les travailleurs sociaux transigent. Nous aborderons ainsi la collaboration interprofessionnelle avec l’équipe de travail, la collaboration avec les organismes communautaires et le réseau public (CSSS, centre jeunesse, etc.). Une autre section portera sur la collaboration avec les autres travailleurs sociaux de l’IUSMQ.

6.6.1 Équipe de travail

Le travail d’équipe étant au centre de la pratique des travailleurs sociaux, il est pertinent de faire ressortir ici les principaux constats à ce sujet. Pour débuter, abordons la collaboration avec les psychiatres. Si certains répondants soulignent la notion d’ajustement nécessaire pour travailler avec plusieurs psychiatres (voir extrait 1 ci-après), d’autres mentionnent à quel point le psychiatre avec lequel ils

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collaborent comprend la philosophie et le rôle du travailleur social (extrait 2). Notons aussi que six participants ouvrent sur le fait que la collaboration avec les psychiatres dans leur contexte de travail est bonne, car ceux-ci sont disponibles, accessibles, faciles d’approche et ouverts à la discussion (extrait 3).

Extrait 1 :

Bien, qu’est-ce qui n’est pas évident c’est parce que c’est d’avoir [nombre]3 médecins différents. Avec [nombre] médecins […] qui n’ont pas

nécessairement la même perception. T’sé, général, la perception du T.S. […], t’sé, c’est la même, mais […] chacun a quand même des façons de voir notre implication là. T’sé par exemple, avec un, l’intervention familiale ça peut être : Oui, tu peux évaluer, tu peux faire un suivi, moyen terme, si tu veux, tu peux travailler la dynamique de la famille […]. Bon faut que […] tu argumentes cliniquement pour ça. Tu fais faire valoir c’est quoi la plus-value là-dedans dans le traitement, mais…. À partir […] de là, oui, quand c’est, t’sé, légitimé cliniquement, mais oui tu peux y aller. D’autres n’y vont jamais vraiment te le demander ou ouvrir là-dessus.

Extrait 2 :

Pis je pense que j’ai la chance de travailler avec le psychiatre avec lequel je travaille là. […] Le psychiatre avec lequel j’travaille […] il est social, il a une tête de systémique là t’sé. Fait que j’ai comme tombé sur le bon, en lien avec moi, mon approche là. Fait que ça... Il est accessible […]. Bien je n’ai pas travaillé avec d’autres là, mais il est très facile d’approche, je te dirais là. Et, pis c’est ça, il y a beaucoup, il n’y a pas de gêne t’sé, il y a de la collaboration, il y a une belle collaboration.

Extrait 3 :

T’sé les psychiatres sont quand même assez présents, sont très disponibles. Ça je trouve ça un facilitateur. On peut se joindre à eux pour des rencontres au besoin, au début pis en cours de suivi. Donc, leur disponibilité, c’est un très grand facilitateur aussi à mon avis.

La collaboration à l’intérieur de l’équipe de travail, c’est-à-dire avec les autres professionnels de l’équipe (infirmier, ergothérapeute, psychologue, éducateur spécialisé, pharmacien4), dépend quant à elle du lieu de travail et du

répondant. Pour plus de quatre répondants, le travail d’équipe se fait positivement et dans la complémentarité.

Il y a une belle complémentarité avec l’ergothérapeute là, où là... quand a fait des évaluations, on a fait ça quelques fois, ça été super le fun là, je vais appeler la famille pis elle va être là, pis avant qu’elle fasse son

3 Nous avons retiré l’information sur le nombre de médecins ici, afin d’éviter que la ressource particulière dont il est question puisse être identifiée par les lecteurs connaissant l’organisation interne de l’IUSMQ

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évaluation fonctionnelle. Fait que souvent on va appeler la famille, on va faire une première collecte de données vraiment en lien avec le fonctionnement day to day qui va l’aider elle. Pis après ça, moi je les rappelle, pis quand j’ai des compléments d’information. Fait que ça, je trouve ça l’fun, ça amène une belle collégialité entre nous. Pis après quand elle fait, après l’évaluation, quand elle remet les résultats souvent je vais être là, pour recevoir les résultats avec le client, pis compléter un peu avec ce que la famille a vu de la personne. T’sé a nous autorise toujours avant, […] fait que là j’amène toujours un peu plus le côté familial, qu’est-ce qui avait été observé, s’il était d’accord avec ça, la conclusion en lien avec l’évaluation. Fait que ça, c’est vraiment une belle complémentarité, là on mélange les deux évaluations ensemble. Ça, c’est l’fun.

Pour certains participants, la collaboration avec les professionnels laisse quelque peu à désirer, soit parce qu’il y a un manque de clarté du rôle de chacun (extrait 4) ou bien à cause de changements fréquents de personnel (extrait 5).

Extrait 4 :

Avec les autres professionnels ça par exemple sur mon unité là, avec l’éducatrice actuellement, ce n’est pas facile. La différenciation des rôles, ce n’est pas clair. Y’a Il n’y a rien de clair beaucoup sur l’unité actuellement là. Fait que ça n’aide pas pour nous, professionnellement […] entre intervenants.

Extrait 5 :

Avec les autres professions […], c’est sûr qu’il y a l’avant pis l’aujourd’hui là. Avant […] on travaillait toujours ensemble, donc beaucoup d’échange d’informations, lien d’appartenance qui était plus fort... Là, j’te dirais que le lien d’appartenance beaucoup […] moins fort.

Pour plusieurs des répondants, les interactions dans l’équipe sont faciles, constructives et les échanges permettent un suivi en cohérence face à l’usager et sa famille.

OK, ben dans mon équipe, je trouve que la collaboration, elle va super bien. Il y a beaucoup, beaucoup d’échanges de bureau. T’sé, l’information, je trouve qu’à circule sur les patients. Fait que quand y se passe quelque chose concernant les pilules, l’infirmière, la pharmacienne vont me le dire parce qui savent très bien que si j’parle à la famille, c’est important que j’le sache et vice-versa.

Moi c’est la dynamique d’équipe. Je travaille dans une équipe où... il y a une super belle collaboration là. Je ne te dis pas que ce n’est parfait là t’sé. Mais on travaille bien en équipe. Pis, je pense qu’il y a un respect... Il y a beaucoup de respect du travail que chacun fait. Pis il y a beaucoup de respect aussi en lien avec la clientèle qui est difficile, que t’sé nous

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comme équipe faut qu’on se tienne la t’sé. […] On accorde une grande importance. Fait qu’il y a une […] belle, belle cohésion dans l’équipe. […] Bien je te dirais, ben c’est vraiment beaucoup ça : le respect, pis la reconnaissance des compétences de chacun.

Nous remarquons donc que la plupart des relations de travail entre les professionnels des équipes interdisciplinaires semblent positives. Voyons maintenant ce qui en est pour la collaboration avec les organismes communautaires et le réseau public.

6.6.2 Organismes communautaires et réseau public

La collaboration interprofessionnelle avec les organismes communautaires et le réseau de services publics est centrale dans la pratique des travailleurs sociaux de l’IUSMQ, comme nous l’avons vu dans la portion portant sur la liaison avec les partenaires (section 6.4.5).

Quelques répondants expliquent avoir des liens positifs avec les intervenants du CLSC : « […] je trouve qu’on a une belle collaboration entre TS de CLSC ou éducateurs », « Moi, je trouve qu’avec les autres travailleurs sociaux du réseau, ça va plutôt bien. »

On remarque par contre certaines embuches liées à la collaboration avec quelques organismes du milieu communautaire et public. D’abord, plusieurs répondants mentionnent que le délai d’attente pour que les usagers de la 3e ligne

reçoivent des services en 1re ligne (CSSS) les amène à devoir considérer d’autres

avenues pour que les usagers aient les services dont ils ont besoin.

C’est sûr que les CLSC, bien… Le fait qui a tellement d’attente que… Moi, si je deal avec un patient là, je lui explique là : Regardez là, je vous réfère, sauf qu’il va y avoir six mois, un an peut-être là…. Donc, c’est trouver des alternatives. C’est sûr que c’est des ressources communautaires, en attendant. Ce n’est pas super pour les agents de liaison, ce n’est pas une mauvaise collaboration, mais…. C’est une contrainte.

D’autres répondants expliquent que les liaisons avec certains partenaires se compliquent pendant le temps où les usagers sont hospitalisés, comme les attentes de ceux-ci sont parfois élevées.

Pis des fois aussi, c’est à travers les liaisons qu’on fait dans la communauté. Des fois, les gens sont épuisés, dans la communauté, pis là ils se servent un peu de l’hospitalisation. Les intervenants, je parle.

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Ils se servent un peu de l’hospitalisation. Des attentes que l’hospitalisation va tout régler. Ce n’est pas nécessairement ça qui arrive fait que des fois, ça c’est difficile. L’hospitalisation peut être très courte pis soit la famille ou soit les intervenants dans la communauté s’attendaient à ce que ça se passe différemment pis que la personne ressorte dans un autre état complet et ce n’est pas le cas. Fait que ça, je trouve que c’est… Des fois, l’arrimage n’est pas toujours facile à faire à ce niveau-là.

Chaque travailleur social a des liens avec certains organismes communautaires particuliers, en fonction de la problématique de l’usager qu’il dessert. La collaboration avec le réseau communautaire inclut donc plusieurs organismes différents. Globalement, notons que les contacts avec ces organismes sont qualifiés positivement par la plupart des répondants.

[Organisme 1], ça va super bien. [Organisme 2], ça va super bien. T’sé, ça fait vraiment partie de la catégorie des organismes avec lesquels on travaille beaucoup…. [Organisme 3] aussi, belle découverte… Depuis un an, je te dirais... [Organisme 4], vraiment belle découverte. Ça va bien, c’est sûr que [organisme 4], t’sé, je comprends qu’ils ont des enjeux eux différents pis sont beaucoup dans l’alliance justement fait que là…. Mais quand même, t’sé, quand un moment donné, on sait que notre client va aller à [organisme 4], pis qui nous signe une autorisation… Il y a un travailleur de rue là, génial de... de là, c’est vraiment… C’est ça, fait que c’est des belles découvertes.

La collaboration avec le réseau communautaire et le réseau public comporte des points négatifs et d’autres positifs. Nous nous attarderons maintenant à la collaboration entre les travailleurs sociaux de l’IUSMQ.