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1.3 Nouvelles technologies d’imagerie microscopique et de traitement d’images 12

1.3.1.1 Les systèmes d’acquisition

Par dispositifs de « microscopie virtuelle », on entend tout d’abord l’acquisition et le stockage d’images numériques de structures microscopiques, puis ensuite leur visualisa-tion par l’intermédiaire d’un écran d’ordinateur (ou équivalent) sans utiliser de microscope [Rojo et al., 2006]. Lorsque la totalité de la lame est acquise, on parle de « Lame Virtuelle » (ou Virtual Slide en anglais).

Les lames virtuelles possèdent plusieurs avantages sur la microscopie classique :

– la possibilité de pouvoir se situer spatialement à tout moment par rapport à une miniature de la lame. Auparavant, les pathologistes étaient obligés de se constituer leur propre « image mentale ».

– le fait qu’il n’y ait pas de rupture dans la navigation en z sur une zone d’intérêt puisqu’elle est assistée de manière logicielle. Auparavant, l’observation était inter-rompue par le changement d’objectif du microscope et la mise au point qui s’en suivait.

– la simplification de la gestion et de la manipulation des lames (l’utilisation de la lame virtuelle évite d’envoyer, pour avis, la lame originale à distance, ce qui la préserve de toute perte ou détérioration).

– la conservation de l’information (l’intensité de coloration ne faiblit pas avec le temps sur l’image acquise, alors qu’elle s’altère pour la préparation microscopique). – la facilité de duplication et de partage de l’information (physiquement sur site ou à

distance par simple recopie du fichier image).

Les applications proposées sont multiples : examen collectif de lame [Ho et al., 2006], télépathologie [Tsuchihashi et al., 2008], enseignement [Helin et al., 2006, Dee et al., 2003], stockage dans le Dossier Médical Personnel (DMP) du patient, et bien sûr analyse d’images de tout ou partie de la lame.

Les différents systèmes de microscopie virtuelle :

Les premiers systèmes d’acquisition de lames virtuelles apparurent vers le milieu des années 1990 [Ferreira et al., 1997]. Ils étaient constitués d’un microscope à platine motori-sée sur lequel était fixée une caméra d’acquisition, le tout étant contrôlé par un ordinateur qui synchronisait la prise de vue.

Les concepteurs ont dû faire face à plusieurs difficultés. Les dispositifs de microscopie virtuelle ne permettaient d’acquérir qu’une portion de l’image, car les ordinateurs ne pos-sédaient pas suffisamment de mémoire vive pour contenir une image de la lame entière. En outre, les temps d’acquisition des premiers systèmes de numérisation étaient très longs (de deux jusqu’à une quinzaine d’heures pour obtenir une image d’une lame entière). Ces délais étaient parfois imposés par des platines motorisées peu rapides, mais étaient le plus souvent dus aux temps de calcul nécessaires pour créer une image de bonne qualité, sans artefacts de recouvrement entre les champs microscopiques.

D’autres défauts pouvaient également être rencontrés pour les systèmes qui n’utilisaient pas une illumination stabilisée ou qui ne corrigeaient pas le vignetage3des images. La res-titution couleur des images était alors instable et empêchait une analyse d’images fiable.

Les systèmes actuels ont pris en compte ces difficultés et ont, pour la plupart, corrigé ces défauts. On peut dénombrer trois classes de systèmes de microscopie virtuelle.

- Les microscopes à platine motorisée : Descendants des premiers systèmes de micro-scopie virtuelle, ils possèdent des platines motorisées à déplacement rapide et précis. Ils sont pilotés par un ordinateur, lui-même relié à un serveur pour stocker les images. Ils sont équipés d’un capteur CCD4matriciel qui permet d’acquérir des clichés successifs des champs microscopiques. On retrouve parmi ces systèmes le « BLISS » des laboratoires

3Le vignetage est le défaut d’un appareil de prise de vues ou de projection qui se traduit par un assom-brissement des angles ou du centre de l’image.

Bacus, le « .Slide » d’Olympus Soft Imaging System, « l’Eclipse » de Nikon ou « l’Alias » de LifeSpan Biosciences. On trouve également des systèmes totalement intégrés avec juste une ouverture pour introduire la lame. Ils contiennent les principaux éléments d’un micro-scope (platine motorisée, lentille, objectif(s), voire même chargeur de lames) mais pas d’oculaire. Ces appareils sont contrôlés par un ordinateur généralement inclus dans le sys-tème, parfois en compagnie d’un serveur. Parmi ces systèmes figurent le « Coolscope » de Nikon dans sa version automatisée et certains appareils de la gamme « Mirax » de Carl Zeiss, tels le « Mirax Scan » et le « Mirax Desk » (cf. figure 1.2).

a) b) c)

FIG. 1.2 – Microscopes à platine motorisée : a) Le BLISS des laboratoires Bacus b) Le Mirax Scan commercialisé par Carl Zeiss c) Le Coolscope de Nikon.

- Les scanners de lame : Ce sont des systèmes intégrés. Ils utilisent un capteur sous forme de barrette CCD. La lame est acquise entièrement par bande de la largeur du capteur. L’avantage est que le focus peut être différent à chaque ligne de capture, alors qu’avec un système basé sur une acquisition par imagette (caméra), le focus est identique pour toutes les lignes de l’imagette. On retrouve parmi ces systèmes des scanners photographiques à faible résolution comme ceux de la gamme « SuperCoolScan » 8000 ou 9000ED de Nikon (4000 dpi), mais également des scanners de résolution microscopique (54000 dpi pour le grossissement objectif X20) comme dans la gamme d’appareils « ScanScope » d’Aperio Technologies et la gamme « Nanozoomer » d’Hamamatsu (cf. figure 1.3).

a) b) c)

FIG. 1.3 – Scanners de lame histologiques : a) Le SuperCoolScan 9000 ED de Nikon, b) Le ScanScope CS d’Aperio Technologies, c) Le NanoZoomer d’Hamamatsu.

- Les champs de microscopes : Cette dernière catégorie comprend un seul système, le « DX-40 » commercialisé par la société Dmetrix et développé initialement par Weinstein [Weinstein et al., 2004] à l’université de Tucson. Il est appelé « champ de microscopes » car il inclut une grille de 80 lentilles, agissant comme des mini-microscopes, qui per-mettent de couvrir toute la lame en une seule prise de vue (cf. figure 1.4).

a) b)

FIG. 1.4 – a) Le DX-40 de Dmetrix b) La grille de 80 lentilles de 1,5mm de diamètre du DX-40.

Les caractéristiques des systèmes de microscopie virtuelle :

Les différents systèmes se différencient par plusieurs caractéristiques matérielles (qua-lité des objectifs, du capteur, de l’illumination) ou logicielles (focus, assemblage d’images élémentaires) qui au final font grandement varier la qualité de l’image obtenue, la vitesse d’acquisition et le prix de l’appareil.

- Objectif : La plupart des systèmes possèdent un objectif X20. Cet objectif peut souvent être remplacé, mécaniquement ou manuellement par un X40, un X60, voire un X100 à immersion. Certains systèmes proposent également des objectifs allant du X1.25 au X10. Sur les systèmes les plus courants, cependant, les grossissements inférieurs au X20 sont obtenus de manière logicielle. Selon la qualité de l’objectif, l’ouverture numérique est plus ou moins grande et la correction des aberrations chromatiques et/ou géométriques plus ou moins poussée. Des lentilles additionnelles qui agrandissent l’image obtenue à la sortie de l’objectif (sans toutefois améliorer le pouvoir séparateur du système) sont parfois intercalées sur le trajet optique (doubleurs de focale).

- Capteur : La plupart des caméras ou scanners utilisés exploitent des capteurs CCD ou plus rarement des CMOS5. Les microscopes motorisés utilisent une matrice de capteurs (de 3840x3072 pixels pour l’Eclipse), les scanners une barrette (de 2048 pixels pour le ScanScope). Le capteur peut être tri-CCD (Nanozoomer) ou mono-CCD couleur, utilisant un filtre de Bayer (Coolscope), dont la restitution couleur est médiocre pour l’analyse d’images.

- Résolution : La résolution finale de l’image varie en fonction de la résolution op-tique de l’objectif et de l’échantillonnage réalisé par le capteur utilisé. Elle est influencée également par l’interposition de différents adaptateurs (réducteurs de champ, etc.). Cou-ramment, ces dispositifs fournissent des tailles de pixel comprises entre 0,32µm et 0,5µm pour un objectif X20, et comprises entre 0,16µm et 0,25µm pour un objectif X40.

- Illumination : Le système peut utiliser une lampe halogène (.Slide), des LED6 mo-nospectrales (Coolscope) ou multispectrales (Alias, DX-40). Certains systèmes possèdent une source et des filtres spéciaux permettant de faire de la microscopie en fluorescence (Nanozoomer).

- Autres caractéristiques matérielles : Certaines options destinées à l’utilisation en clinique peuvent être ajoutées comme un passeur de lames pour automatiser l’acquisition d’un grand nombre de lames (jusqu’à 300 lames pour le Mirax scan) ou bien un joystick permettant de contrôler plus aisément la platine motorisée.

- Focus : La méthode utilisée pour régler la netteté des images influe de manière très importante sur le temps d’acquisition et sur la qualité finale des images. La mise au point peut être réalisée en choisissant pour chaque pixel, groupe de pixels ou pour l’image en-tière, le plan apportant le plus de netteté parmi ceux disponibles (Mirax). Elle est le plus souvent basée sur une recherche du maximum de contraste à partir d’acquisitions multiples de plans en z. Le calcul de cette mise au point peut être effectué à différentes fréquences : – Le focus peut être réalisé à chaque champ microscopique. Ce mode de focus est long, mais c’est celui qui donne les images les plus nettes, même en cas d’objets au relief inégal (cytologie).

– La mise au point peut être réalisée pour un champ et être appliquée telle quelle aux champs voisins. Cette méthode est plus rapide que la première, car il y a moins de champs à mettre au point, mais certaines zones peuvent être floues, particulièrement si l’échantillonnage des points de focus est insuffisamment réparti7.

– Le focus peut enfin être réalisé en établissant, préalablement à l’acquisition, une carte en z: la mise au point est effectuée en différents champs de la lame (choisis manuellement, de manière régulière ou automatiquement par échantillonnage régu-lier sur les zones de tissu préalablement détectées) et le déplacement en z pour tous les autres points de la lame est interpolé à partir du z optimal des régions mesurées. Cette méthode est souvent préférée pour son compromis entre la netteté et le temps d’acquisition.

Il est cependant à noter que le problème de focalisation est moins critique sur les sec-tions histologiques (où le tissu est épais) que sur les cytologies (où les cellules n’ont que quelques microns d’épaisseur).

- Juxtaposition : le « mosaïquage » des bandes ou des champs microscopiques acquis peut être réalisé soit par juxtaposition stricte (lorsque la platine motorisée est très précise), soit en réalisant une acquisition avec recouvrement entre les clichés des champs ou bandes qui sont ensuite recalés de manière logicielle. Les systèmes de scanners sont ici avantagés car ils ne nécessitent un recouvrement que sur les côtés de la bande, alors que les systèmes utilisant des clichés de champs microscopiques nécessitent un recouvrement sur les quatre bords de l’image.

6Light Emitting Diode

7Une périodicité de quelques champs permet souvent d’obtenir un bon compromis entre qualité du focus et temps de calcul.

- Temps d’acquisition : En fonction des caractéristiques précédentes et en fonction de la qualité du matériel utilisé, le temps d’acquisition varie beaucoup. Il varie également en fonction de l’aire scannée, de l’objectif utilisé, de l’utilisation éventuelle de cartes ou de composants dédiés à la compression des images et de la vitesse de transfert entre le dispositif d’acquisition et l’ordinateur (une connexion FireWire est généralement utilisée) et entre l’ordinateur et le dispositif de stockage. Certains systèmes réalisent au préalable une acquisition à faible résolution de la lame (soit en utilisant un appareil photo intégré –ScanScope, Mirax–, soit en utilisant un petit objectif –.Slide–) afin de détecter le tissu présent sur la lame pour éviter de scanner les zones de fond et limiter la zone de recherche de points de focus. Afin d’augmenter la vitesse de capture d’une lame, certains systèmes ont synchronisé la charge des capteurs CCD avec le mouvement de la platine (système Time-Delay-and-Integrationsur le Nanozoomer).

Au final, les temps d’acquisition pour la lame entière avec un objectif X20 sont de 1 minute pour le système à champ de microscopes, de 10 à 15 minutes pour les scanners microsco-piques et de 30 minutes à 12 heures pour les microscopes motorisés [Rojo et al., 2006].