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Systèmes étudiés et Protocoles expérimentaux…

6 Suspension modèle : étude du rhéoépaississement

6.2 Mesures locales : Rhéométrie par IRM

6.2.1 Systèmes étudiés et Protocoles expérimentaux…

Les mesures de profils de vitesse sont réalisées avec la même géométrie de Couette-IRM décrite plus haut. Le cylindre intérieur est entraîné à une vitesse de rotation constante Ω comprise entre 0.01 et 100 tours/min correspondant à des taux de cisaillement moyens de 0.002 à 23.5 s-1. Nous mesurons les profils de vitesse stationnaires dans l’entrefer pour diverses vitesses Ω. Deux suspensions de billes de polystyrène de 40 μm à 0.6 de fraction

volumique sont étudiées. Il s’agit d’une suspension isodense et d’une suspension présentant une différence de densité de Δρ=0.15gcm-3entre les billes et la solution de NaI.

6.2.2 Profils de vitesse

La Fig. 6 (a) montre ainsi les profils de vitesse adimensionnés pour la suspension adaptée en densité. On observe, contrairement à la suspension de fécule de maïs, que l’écoulement n’est pas localisé. Pour des vitesses de rotation très faibles et jusqu’à 2 tours/mn, tout l’entrefer est cisaillé. Ce comportement indique l’absence de tout seuil d’écoulement. En plus, l’évolution dans l’entrefer de la vitesse normalisée par rapport à la vitesse du cylindre intérieur montre une courbe maîtresse très peu différente du cas Newtonien. Ce comportement non localisé a été obtenu sur une suspension isodense de billes de 20 μm (Fig. 2 du Chap. 5).

Par contre, pour des vitesses de rotation supérieures à 2 tours/mn, nous obtenons des profils de vitesse qui deviennent rapidement décroissantes dans l’entrefer. Il semble que ces mesures de profils de vitesse montrent l’existence de deux régimes d’écoulement : un régime non localisé aux faibles vitesses de rotation caractérisant une absence de seuil d’écoulement et un régime localisé aux vitesses de rotation élevées.

• Pour de très basses vitesses de rotation (0.06 et 0.08 tour/mn), un écoulement localisé s’installe avec une rupture de pente très marquée des profils de vitesse à l’interface entre la zone en écoulement et celle à l’arrêt : le rayon critique délimitant ces deux zones permet de définir une contrainte critique qui caractérise le seuil d’écoulement (voir le paragraphe 5.3.2.2.1).

• Pour des vitesses de rotations comprises entre 0.1 et 1.0 tour/mn, un écoulement Newtonien est obtenu : tout le matériau est cisaillé. Ceci est illustré sur la Fig. 6 (c).

• Lorsque la vitesse de rotation imposée au cylindre intérieur augmente, nous observons, comme dans le cas de la suspension adaptée en densité, des profils de vitesse d’allure exponentielle qui redeviennent localisés (Fig. 6 d). Nous pouvons remarquer que ces profils de vitesse sont très similaires et restent sur une courbe maîtresse et que la fraction de matériau cisaillée dans l’entrefer reste la même quelque soit la vitesse de rotation imposée. En gros, le taux de cisaillement pour la transition entre les régimes localisés et non localisés reste difficile à évaluer mais peut être estimé entre 0.53 et 0.72 s-1. Ces valeurs restent dans le même ordre de grandeur du taux de cisaillement critique de rhéoépaississement obtenu en rhéométrie classique.

Fig. 6 : Profils de vitesses adimensionnés de suspensions de billes de polystyrène de 40 μm

L’absence de rupture de pente dans le deuxième régime de localisation peut être expliquée en considérant que la contrainte varie en 1/r2. Dans le cas où les contraintes imposées sont faibles, un cisaillement partiel est obtenu dans l’entrefer. Mais comme la contrainte devient très faible dans ce dernier, ceci est suivi par un arrêt brutal de l’écoulement se traduisant par une localisation avec rupture de pente des profils de vitesse qui est synonyme de seuil d’écoulement. La Fig. 6(c) montre très bien ce régime qu’on peut qualifier de FRICTIONNEL [Huang et al (2005)]. Ce régime est suivi d’un régime non localisé ou VISQUEUX dans lequel tout le matériau est cisaillé. En revanche, dans le deuxième régime localisé, l’écoulement semble vraisemblablement localisé mais cette fois sans rupture de pente nette entre la zone cisaillée et la zone non cisaillée. Dans ce cas, comme la contrainte imposée ne peut être faible partout dans l’entrefer, l’arrêt ou le ralentissement de l’écoulement observé ne peut être dû qu’à un changement de comportement (rhéoépaississement) et ou à une migration des particules du cylindre intérieur vers le cylindre extérieur. Ce phénomène de migration peut il être à l’origine de ce régime localisé observé dans cette géométrie de Couette ?

La migration, étant un comportement irréversible, a été observée, en rhéométrie classique sur une géométrie plus conventionnelle de type Vane, sur la suspension isodense. En effet, en appliquant une lente montée suivie d’une descente en taux de cisaillement, la viscosité de la suspension évolue de la même façon avec cependant des valeurs différentes lors de la montée et de la descente en cisaillement : à la descente, nous retrouvons un rhéoépaississement « continu » alors que la migration a déjà eu lieu (Fig. 7a) En plus, nous pouvons remarquer au passage le phénomène classique : à la descente, la viscosité apparente est plus basse ; la migration tend à diminuer la viscosité apparente plutôt qu’à l’augmenter pour des raisons bien compréhensibles (appauvrissement en particules prés du cylindre interne). Ceci permet de d’affirmer que la migration ne peut être à l’origine du rhéoépaississement puisqu’on retrouve le rhéoépaississement à la descente

Fig. 7 : Mise en évidence de la migration : Evolution de la viscosité en fonction du taux de cisaillement lors d’une montée puis d’une descente en cisaillement (a) dans une cellule de Vane (b) dans une géométrie plan – plan. L’insert montre un zoom pour les faibles taux de cisaillement dans le cas du cisaillement plan.

De plus, dans le cas d’un cisaillement plan –plan (Fig. 7b), un comportement assez différent est observé : la viscosité apparente devient plus importante lors de la descente

centrale de rayon inférieur à celui des disques de la géométrie plan – plan (Fig. 8), suite à une migration vers le centre, explique ce phénomène classique de la migration comme dans le cas du Couette : la viscosité apparente reste moins importante à la descente par rapport à la montée en taux de cisaillement.

Fig. 8 : Schématisation de la migration en cisaillement plan – plan

Cependant aux faibles taux de cisaillement, l’accumulation des particules prés du centre des disques favorise un blocage irréversible de la suspension (par le phénomène de migration) d’où le seuil observé (la pente de la viscosité en fonction du taux de cisaillement est égale à l’unité). Dans ce cas, la viscosité apparente devient plus importante lors de la descente contrairement à l’observation dans le cas d’une géométrie de Couette. Ce raisonnement reste compatible au principe de « réservoir » évoqué dans le cas de la suspension de fécule de maïs. En effet, nous avons remarqué que l’ajout d’un surplus de pâtes autours des disques retarde et surtout atténue le rhéoépaississement (Fig. 2)

En plus, ces mesures sur ces deux géométries nous montrent les deux différents aspects du rhéoépaississement. Avec le plan – plan, où le confinement reste très important, une augmentation brutale de la viscosité est observée : il s’agit d’un rhéoépaississement discontinu et le blocage de l’écoulement se fait d’un plan à l’autre comme cela est montré sur la Fig. 8. Nous pouvons remarquer au passage une différence considérable sur les contraintes normales développées par cette suspension modèle par comparaison avec celles des suspensions de fécule de maïs. La suspension de billes modèles développe des contraintes normales très faibles (250Pa pour la suspension de billes contre 9000Pa pour la suspension de fécule de maïs). Cette différence de comportement peut s’expliquer par l’aspect lisse des particules modèles, contrairement aux particules de fécule de maïs qui présentent une rugosité très importante.

Dans la géométrie de Couette, la viscosité apparente de la suspension augmente continûment avec le taux de cisaillement : il s’agit d’un rhéoépaississement continu.

En somme, ces mesures de migration en géométrie classique montrent que la migration des particules n’est en aucun cas responsable du rhéoépaississement et donc du régime localisé observé sur ces suspensions dans le cas des fortes vitesses de rotation. En plus, il est important de noter que le passage des régimes localisé et non localisé reste parfaitement réversible. La Fig. 6 (b) montre les profils de vitesse adimensionnés sur la suspension adaptée en densité (absence de crémage et de sédimentation). Dans ce cas, sans

plus clair, des mesures de concentration sont effectuées. En effet, il s’agit de quantifier les profils de concentration locaux par le biais de l’IRM.