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1.6. Hypothèses de recherche

1.6.1. Synthèse de travaux de recherche en SIC

Brigitte Simonnot a mené une enquête exploratoire en 2007 auprès de 73 étudiants inscrits en 1ère année de licence information communication à l’Université Paul Verlaine- Metz304. À travers cette enquête, Brigitte Simonnot constate l’hégémonie du moteur Google chez les étudiants (96 % des étudiants interrogés utilisent un moteur de recherche pour rechercher une information en ligne et ce moteur est Google). Elle identifie quatre catégories de motifs qui servent aux étudiants à expliquer cette utilisation massive de Google : les performances, la réputation du moteur, l’habitude, l’ergonomie et la présentation.

Les performances sont le plus souvent évoquées, à l’aide des expressions « rapide », « efficace », « performant », « meilleur résultat », « informations correctes », « pertinence », « quantité d’information fournie » et « choix des réponses ». Ensuite, la réputation du moteur est mise en avant avec l’emploi de termes comme : « réputation », « popularité », « le

plus connu » ou encore « le meilleur ». Un tiers des étudiants choisissent le moteur Google

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SIMONNOT, Brigitte. De l’usage des moteurs de recherche par les étudiants. In : SIMONNOT, Brigitte, GALLEZOT, Gabriel (coord.). L’entonnoir. Google sous la loupe des sciences de l’information et de la communication. Caen : C&F, 2009. pp. 39-57.

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par habitude ou par défaut car Google est la page d’accueil de leur navigateur. Brigitte Simonnot explique au passage la fidélité des internautes au moteur par le fait que la page d’accueil ait peu changé, ce qui ne bouleverse pas leurs habitudes. Enfin, l’ergonomie du moteur est invoquée, les étudiants le trouvant « facile » et « simple à utiliser », mais aussi la présentation du moteur, les étudiants se référant au « visuel clair », à « la clarté de la

page d’accueil », au « classement structuré des résultats », au fait qu’il soit « bien organisé »

et qu’il ait « une apparence qui plait ».

Concernant l’utilisation des moteurs et la recherche en ligne, 95 % des étudiants déclarent trouver cela facile. Ils ne consultent en général que les deux premières pages de résultats (ce qui est beaucoup) et en cas d’échec, ils adoptent tous la même et unique stratégie : la reformulation de mots-clés. Deux tiers d’entre eux n’ont jamais été formés à l’utilisation des moteurs et moins du quart estime en avoir besoin d’une, invoquant là aussi la simplicité et la facilité d’usage des moteurs. Les trois quarts des étudiants interrogés estiment que les résultats des moteurs sont complets et fiables (beaucoup ne sont pas gênés par la présence de publicité dans les pages de résultats). Enfin, Brigitte Simonnot note l’amalgame de beaucoup d’étudiants entre Web et moteur de recherche.

Suite à l’analyse de son enquête, l’auteure explique le succès des moteurs de recherche par l’impression de liberté qu’ils donnent aux étudiants. Leur gratuité et leur accessibilité en continue depuis chez soi jouent aussi en leur faveur. L’aspect démocratique des moteurs, qui sont accessibles au plus grand nombre, est également souvent mentionné. Leur interface simple et intuitive (tolérance aux fautes d’orthographe) et la recherche universelle qu’ils permettent concurrencent nettement les outils professionnels. Pour conclure, Brigitte Simonnot pointe la dépendance des étudiants vis-à-vis de Google et leur manque de recul critique quant aux enjeux politiques et économiques qui se cachent derrière le moteur.

Dans son ouvrage Dans le labyrinthe paru en 2012, Alexandre Serres s’intéresse à la problématique de l’évaluation de l’information sur Internet chez les étudiants305

. Il recense les pratiques et comportements des jeunes américains, anglais et bien sûr français à travers l’étude des résultats de différentes enquêtes. Il constate ainsi la domination des moteurs de recherche (et notamment Google) dans les outils de recherche dans une étude bourguignonne, la suprématie écrasante de Google dans le paysage des moteurs de recherche en France

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comme aux États-Unis ou encore la place centrale de Google utilisé pour localiser et accéder aux contenus des revues en ligne.

Alexandre Serres présente également un tableau comparatif des perceptions qu’ont les étudiants britanniques d’un portail de bibliothèque et d’Internet306

sur le plan de la recherche d’information. Les perceptions concernant Internet sont particulièrement intéressantes et certaines peuvent être mises en parallèle avec notre sujet : « interfaces intuitives », « classement par pertinence », « plus de contenu à jour », « confiance dans l’évaluation », « plus rapide », « liberté », « enthousiasme », « simple », « satisfaction immédiate », « peu

d’exigence de compréhension », « peu d’exigences en termes d’habiletés ».

Ces enquêtes sur les pratiques et comportements informationnels des étudiants ont apporté des résultats que l’on retrouve quelques années plus tard chez les élèves du secondaire. Les travaux de Karine Aillerie et d’Anne Cordier ont en effet nettement montré l’hégémonie de Google, justifiée par les mêmes critères d’habitude, de performance, de confiance, de rapidité, de simplicité, de pertinence ou encore d’exhaustivité. Des confusions conceptuelles, notamment entre Web, Internet et moteur de recherche, sont également observées chez les élèves, tout comme le signalait Brigitte Simonnot. La dépendance cognitive au moteur Google est constatée par ces différents chercheurs et l’illusion que la qualité des résultats serait uniquement liée au choix des « bons » mots-clés existe aussi bien chez les étudiants que chez les collégiens. L’importance de l’interface du moteur est évoquée sous l’angle de sa sobriété, vecteur de confiance par Anne Cordier, et sous l’angle de sa stabilité, vecteur de fidélité par Brigitte Simonnot. Enfin, l’aspect magique que revêt l’outil aux yeux des élèves est mis en avant par Anne Cordier. Fort de tous ces constats, il convient maintenant que nous formulions nos propres hypothèses de recherche.