• Aucun résultat trouvé

Synthèse des caractéristiques morphologiques des discontinuités naturelles

3 Comportement des discontinuités

5.5 Synthèse des caractéristiques morphologiques des discontinuités naturelles

Afin d'évaluer l'influence de la rugosité des surfaces des discontinuités naturelles sur le comportement en cisaillement, nous avons procédé à une caractérisation de la morphologie des surfaces avant la réalisation des essais mécaniques. Douze échantillons de discontinuités naturelles ont été utilisés pour cette étude. La mesure de la topographie de surfaces sous un profilomètre laser 3D permet la détermination des paramètres statistiques morphologiques des surfaces.

Les paramètres globaux tels que l'étendue, la moyenne arithmétique des hauteurs CLA ou la dispersion des hauteurs RMS (calculé par rapport au plan moyen), permettent de donner les premières évaluations de la rugosité des surfaces. La comparaison des paramètres des surfaces inférieure et supérieure d'un même échantillon confirme le degré d'emboîtement et les dégradations éventuelles antérieures des surfaces.

Les paramètres directionnels ont été déterminés selon huit directions différentes pour chaque surface. Nous avons observé que la valeur de chaque paramètre varie selon la direction de calcul signifiant une anisotropie directionnelle des paramètres de rugosité. Le paramètre Z4 qui est la proportion non compensée des longueurs projetées

des pentes positives par celles des pentes négatives, est le paramètre le plus sensible au changement de direction. Le paramètre RL, qui est le rapport entre la longueur réelle et

la longueur projetée des profils, est le moins sensible. Les directions d'anisotropie correspondant aux valeurs maximale et minimale de chaque paramètre ont été déterminées. Nous avons observé que les directions d'anisotropie des paramètres RL, Z2,

Z4 et les moyennes de colatitudes positives et négatives sont généralement proches. Cela

signifie l'existence d'une direction pour laquelle la rugosité est la plus marquée : c’est la direction dans laquelle les aspérités se propagent préférentiellement, avec le plus de facettes mobilisées et avec l'angularité la plus grande. Le paramètre Z3 semble

indépendant de la direction de calcul et peut montrer des directions d'anisotropie différentes. La comparaison des paramètres calculés pour les surfaces inférieure et supérieure permet de conclure sur la similarité de la rugosité des surfaces.

Les douze discontinuités ont été regroupées en trois groupes d'échantillons de rugosité similaire selon une direction de cisaillement choisie en se basant sur les paramètres directionnels. Ceci a pour but d'avoir des discontinuités naturelles de morphologie proche afin de réaliser des essais de cisaillement. Il est intéressant d’observer que ce regroupement à partir des paramètres directionnels est conforme au classement préliminaire fait à partir des paramètres globaux. Nous avons observé que les directions de cisaillement choisies pour le groupe le plus lisse sont généralement perpendiculaires aux directions d'anisotropie, tandis qu'elles sont parallèles pour le groupe le plus rugueux. Le JRC (Joint Roughness Coefficient) calculé à partir de Z2

traduit bien le degré de rugosité, qui est définie aussi par les paramètres statistiques. Il est également très proche pour les échantillons dans un même groupe.

L'aire de contact entre les surfaces inférieure et supérieure a été déterminée grâce aux données de topographie des surfaces en fonction de la contrainte normale appliquée lors du cisaillement. Comme attendu, nous avons observé une influence de la contrainte normale sur l'aire de contact avant essai. Plus la contrainte normale est élevée, plus le taux de contact entre les surfaces est grand.

Après la réalisation des essais de cisaillement, les surfaces de discontinuités ont été rescannées afin de déterminer les endommagements dus au cisaillement. Les paramètres globaux diminuent après essai. Cependant, nous n'observons pas de liaison entre ces diminutions et la contrainte normale appliquée ou la rugosité initiale. Les paramètres directionnels RL, Z2 et les moyennes des colatitudes diminuent également après essai.

Nous n’avons pas réussir à proposer une loi mathématique de ces diminutions en fonction de la contrainte normale ou de leur valeur initiale. Cependant, nous avons observé une différence de la variation de ces paramètres en fonction du groupe. Le groupe le plus lisse montre les variations les plus faibles et le groupe le plus rugueux montre les variations les plus importantes. Ainsi, le changement de l'angularité des surfaces après essai semble dépendre de la rugosité initiale et il n'est pas influencé par la contrainte normale. Les variations des paramètres Z3 et Z4 ne montrent pas de

tendance significative.

Les zones dégradées ont été déterminées à partir des différences d'altitude entre les surfaces avant et après essai. Nous avons observé une influence de la contrainte normale sur l'endommagement des surfaces. Sous une même contrainte normale, les surfaces de rugosité similaire peuvent avoir des endommagements quantitativement identiques, bien que la distribution des zones endommagées puisse être différente. Plus

normale élevée, on peut observer des différences de l'endommagement des surfaces de rugosité pourtant similaire. Nous avons observé également que les zones les plus endommagées correspondent généralement au sommet des aspérités d'angularité la plus grande.

Chapitre 6

Essai de cisaillement sur discontinuités

naturelles

Plusieurs études sur le comportement en cisaillement des discontinuités ont été effectuées ces derniers temps (chapitre 3). Mais, afin d'assurer une bonne répétition des essais en utilisant différents paramètres d'essai, la plupart des chercheurs ont souvent recouru à des répliques de joints rocheux modèles ou des joints rocheux sciés artificiellement. Dans cette étude, nous n'utilisons que des discontinuités rocheuses naturelles. Grâce aux mesures de morphologie des surfaces de discontinuités présentées dans le chapitre précédent, nous avons pu classer les échantillons en groupes de rugosité similaire. Nous présentons dans ce chapitre les résultats des essais de cisaillement réalisés selon différents chemins de chargement. Le comportement en cisaillement des discontinuités rocheuses naturelles soumises à contrainte normale constante ou à rigidité normale constante est mis en évidence. L'influence des différentes conditions de cisaillement est également abordée. Enfin, des modèles de comportement en cisaillement pertinents sont proposés pour les discontinuités naturelles étudiées.

6.1

Description des échantillons et du programme expérimental

6.1.1Échantillons

En plus des douze échantillons que nous avons scannés sous profilomètre laser et qui sont présentés dans le chapitre précédent, une autre dizaine d'échantillons a été utilisée pour réaliser des essais de cisaillement. Ces discontinuités ont été également choisies parmi des carottes de forage de diamètre de 85 mm effectué dans les marbres de St Béat. Les surfaces de fractures sont saines et ne présentent pas de signe visible de

cisaillement antérieur. Les dimensions des douze premiers échantillons ont été présentées dans le tableau 5.1 et le tableau 6.1 présente les dimensions des autres échantillons avec 2×a et 2×b respectivement la longueur du grand et petit axe de la surface ellipsoïdale.

Pour ce dernier groupe d'échantillons, nous n'avons pas mesuré la morphologie des surfaces avant et après la réalisation des essais. Par contre, nous avons essayé de choisir visuellement des échantillons de surface la plus similaire possible (taille des grains et des grandes ondulations, direction de cisaillement) afin de pouvoir tester différents paramètres d'essais sur des surfaces de morphologie proche.

Tableau 6.1 - Dimensions des échantillons de discontinuité naturelle du marbre de St Béat. Échantillon Côte (m) 2×a (mm) 2×b (mm) Surface (cm²)

13 51,20 89,7 84,8 59,7 14 18,64 88,1 84,7 58,6 15 75,68 93,5 84,9 62,3 16 19,03 86,8 84,8 57,8 17 21,77 88,4 84,7 58,8 CNS.1 34,07 86,5 84,7 57,5 CNS.2 40,95 102,9 84,8 68,5 CNS.3 94,95 96,5 84,7 64,2 CNS.4 47,37 86,8 84,7 57,7 CNS.5 51,50 87,4 84,8 58,2 CNS.6 34,10 88,1 84,8 58,7 CNS.7 34,35 86,7 84,8 57,7 6.1.2Programme expérimental

Nous avons réalisé des essais de cisaillement selon différents chemins de chargement : CNC (essai de cisaillement direct à contrainte normale constante), CN variable (contrainte normale variable) et CNS (essai de cisaillement direct à rigidité normale externe imposée) pour des contraintes normales variant de 1,5 à 7 MPa et des vitesses de cisaillement allant de 5 à 100 µm/s (tableau 6.2 et tableau 6.3). Ici nous utilisons classiquement la notion de contraintes (normale et tangentielle) bien que la surface de contact d'une éponte sur l'autre ne soit pas connue exactement. Les contraintes ont été calculées conventionnellement par rapport à la surface externe des épontes. Cette surface maximale est définie par les dimensions de l'échantillon bien que le joint ne soit pas forcément parfaitement imbriqué initialement et qu'il ne soit évidemment plus parfaitement imbriqué dès l'apparition d'un déplacement relatif tangentiel. Afin d'avoir une surface de contact (macroscopique) constante tout le long d'essai, on peut utiliser des joints dont les épontes ont des surfaces légèrement différentes (Jing et al. 1992, Huang et al. 1993, Lee et al. 2001). Dans notre cas, nous

l'hypothèse d'un changement de surface de contact minime au cours du cisaillement pour calculer les contraintes normale et tangentielle. De ce fait, les essais de cisaillement peuvent être pilotés à force normale constante. Les forces normales correspondantes sont respectivement d'environ 10 à 40 kN. Au total, treize essais CNC, quatre essais CN variable et sept essais CNS ont été effectués.

Les douze premiers échantillons des essais CNC, qui ont été scannés au profilomètre laser et divisés en trois groupes d'échantillons de rugosité similaire, ont été cisaillés à 3 niveaux de contrainte normale (1,5, 3 et 5 MPa) qui correspondent à une couverture relativement faible, ce qui est le cas in situ. En parallèle, pour étudier l’influence de la vitesse de cisaillement sur le comportement mécanique de l'éponte, les essais ont été réalisés pour chaque niveau de contrainte normale, à trois vitesses relatives de cisaillement (5, 10 et 20 µm/s). Ces vitesses sont classiquement utilisées au laboratoire et permettent de rester dans des durées d'essais raisonnables (moins de 1h) pour un déplacement maximal de 7 mm. Outre ces essais à vitesse de cisaillement constante, pour chaque niveau de contrainte normale, on a réalisé un essai à vitesse variable afin d'étudier l'influence du changement de vitesse de cisaillement au cours d'essai. Le changement de vitesse est effectué à chaque demi-phase de déplacement de ±3,5 mm. Le treizième essai CNC a été réalisé à contrainte normale de 7 MPa et vitesse de cisaillement de 5 µm/s pour pouvoir comparer avec les essais CNS réalisés à la même contrainte normale initiale. Les essais CNC ont été effectués pour un cycle de cisaillement complet avec le déplacement maximal de ±7 mm.

Tableau 6.2 - Programme d'essais de cisaillement réalisés à contrainte normale constante et à contrainte normale variable.

Chemin de cisaillement Échantillon Contrainte normale (MPa) Vitesse de cisaillement (µm/s) Nombre de cycle Analyse morphologique (avant et après) G1-01 5 5 1 cycle oui G1-02 5 10 1 cycle oui G1-04 5 20 1 cycle oui G1-05 5 10 puis 20 1 cycle oui

G2-07 3 5 1 cycle oui

G2-08 3 10 1 cycle oui G2-09 3 20 1 cycle oui G2-11 3 5 puis 20 1 cycle oui G3-03 1,5 5 1 cycle oui G3-06 1,5 10 1 cycle oui G3-10 1,5 20 1 cycle oui G3-12 1,5 20 puis 100 1 cycle oui Contrainte normale constante (CNC) 13 7 5 1 cycle non 14 1,5 à 5 5 3 demi-cycles non 15 1,5 à 5 5 3 demi-cycles non 16 1,5 à 5 5 1 demi-cycle non Contrainte normale variable 17 1,5 à 5 5 1 demi-cycle non

Les essais CN variable consistent à cisailler sous une contrainte normale constante puis changer la valeur de la contrainte normale constante. Les chemins de cisaillement utilisés seront présentés en détail dans la section 6.2.4.2. Trois contraintes normales différentes (1,5, 3 et 5 MPa) ont été utilisées. Le tableau 6.2 récapitule les paramètres d'essais utilisés pour les essais CNC et CN variable.

Afin d'étudier le comportement en cisaillement des joints rocheux quand la dilatance est bloquée ou partiellement bloquée, nous avons réalisé des essais de cisaillement à rigidité normale constante imposée (CNS) qui varie de 5 à 10 MPa/mm. Les contraintes normales initiales sont comparables à celles des essais CNC, de 3 à 7 MPa. La vitesse de cisaillement est uniforme pour tous les essais CNS (5 µm/s). Les échantillons ont été cisaillés pour un quart cycle de déplacement maximal jusqu'à 20 mm ou pour un cycle complet de déplacement maximal de ±7 mm.

Tableau 6.3 - Programme d'essais à rigidité normale imposée sur des discontinuités naturelles. Échantillon Rigidité normale imposée (MPa/mm) Contrainte normale initiale (MPa) Vitesse de cisaillement (µm/s) Cycle CNS.1 5 3 5 1 quart CNS.2 6 3 5 1 quart CNS.3 10 3 5 1 quart CNS.4 5 5 5 1 quart CNS.5 10 5 5 1 quart CNS.6 5 7 5 1 cycle complet CNS.7 10 7 5 1 cycle complet