• Aucun résultat trouvé

Synthèse du motif 2-méthyl-1,3-aminoalcool par une réaction de type Reformatsky asymétrique en présence de

II.4 Méthodes de synthèse de sulfoxydes chiraux énantiopurs

II.4.1. Synthèse de sulfoxydes par voie diastéréosélective

Parmi les méthodes diastéréosélectives de synthèse de sulfoxydes chiraux, nous pouvons distinguer deux grandes familles : celles qui procèdent par double substitution de sulfites chiraux cycliques à l’aide d’un nucléophile carboné et celles qui se basent sur la substitution directe de sulfinates ou analogues.

II.4.1.a Synthèse de sulfoxydes par double substitution de sulfites cycliques chiraux

En 1991, le groupe de H. B. Kagan met au point une méthode d’accès efficace aux dialkyles sulfoxydes énantiomériquement purs par double substitution de sulfites cycliques chiraux en présence de réactifs organométalliques.104

Les sulfites cycliques chiraux 114a et 114b sont obtenus de manière hautement diastéréosélective à partir du diol 113, lui-même dérivé du (S)-lactate d’éthyle commercial et peu onéreux (Schéma II.26).

104 a) Rebiere, F.; Kagan, H. B. Tetrahedron Lett. 1989, 30, 3659. b) Kagan, H. B.; Rebiere, F. Synlett 1990, 643. c) Rebiere, F.; Samuel, O.; Ricard, L.; Kagan, H. B. J. Org. Chem. 1991, 56, 5991.

50

Schéma II.26 : Synthèse de sulfoxydes par double substitution du sulfites cycliques chiraux

Le sulfite majoritaire 114a est séparé par recristallisations successives dans un mélange cyclohexane/hexane 1:1. Il est ensuite ouvert régiosélectivement par addition d’un réactif organométallique pour conduire au mélange de sulfinates 115/116 dans des rapports variables en fonction de la taille du réactif organométallique utilisé. Le sulfinate majoritaire est à nouveau séparé par recristallisation, cette fois dans le cyclohexane. Enfin, le sulfinate majoritaire recristallisé est substitué par une deuxième espèce organométallique pour conduire au sulfoxyde souhaité et à la récupération du diol chiral 113. Cette méthode est une approche énantiodivergente qui permet l’accès aux deux énantiomères d’un sulfoxyde donné.

Nous avons utilisé cette méthode pour la préparation du (-)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde avec R1M = t-BuMgCl et R2M = MeMgBr. Il faut ainsi quatre étapes et environ trois semaines pour obtenir le (-)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde énantiomériquement pur en quantité raisonnable (4g) avec un rendement global de 26%.

II.4.1.b Synthèse de sulfoxydes par substitution directe de sulfinates ou analogues

Comme nous l’avons déjà mentionné auparavant, K. K. Andersen fut le premier à mettre au point une méthode d’accès efficace à des sulfoxydes énantiopurs par substitution directe de sulfinates chiraux à l’aide de réactifs organométalliques.95

Cette substitution nucléophile de type SN2 s’effectue avec une complète inversion de la configuration de l’atome de soufre stéréogène (inversion de Walden) comme l’ont démontré par la suite K. Mislow105, ainsi que C. Mioskowski et G. Solladié (Schéma II.27).106

105 a) Axelrod, M.; Bickart, P.; Jacobus, J.; Green, M. N.; Mislow, K. J. Am. Chem. Soc. 1968, 90, 4835. b) Mislow, K.; Ternay, A. L.; Melillo, J. T. J. Am. Chem. Soc. 1963, 85, 2329.

Chapitre II : Synthèse de motifs « 2-méthyl-1,3-aminoalcools » à l’aide d’une réaction de type Reformatsky asymétrique promue par l’iodure de samarium

51

Schéma II.27 : Inversion de Walden lors de l’addition d’un réactif organométallique sur un sulfinate chiral

G. Solladié a ensuite nettement amélioré la méthodologie de K. K. Andersen en optimisant l’étape d’obtention du (-)-(Ss,R,R,R)-sulfinate de menthyle énantiopur.102

Nous allons donc utiliser cette voie de synthèse pour accéder au (+)-(R)-méthyl-para-tolylsulfoxyde dont nous aurons besoin par la suite.

Cette méthode permet d’obtenir des sulfinates de menthyle énantiométiquement purs avec d’excellents rendements et excès énantiomériques.

Le sulfinate de menthyle est facilement préparé à partir du sel sodé de l’acide p-toluènesulfinique. Le sel de sodium de cet acide est tout d’abord activé par du chlorure de thionyle, puis, estérifié à l’aide de (-)-menthol naturel énantiomériquement pur pour aboutir à un mélange de diastéréomères en quantités égales. Par épimérisation dans l’acétone en présence d’une quantité catalytique d’acide chlorhydrique, il est possible de faire cristalliser l’un des deux sulfinates. On obtient ainsi le sulfinate énantiopur avec un excellent rendement de 90% (Schéma II.28).

Schéma II.28 : Synthèse du (-)-(S)-sulfinate de menthyle (S)-79 énantiomériquement pur

Cette méthode est très efficace car elle permet d’obtenir 30g de sulfinate de menthyle énantiopur en seulement 3 jours.

Le (+)-(R)-méthyl-p-tolylsulfoxyde 117 est ensuite obtenu par substitution du groupement menthol grâce à l’iodure de méthyle magnésium avec une inversion totale de la configuration de l’atome de soufre et un excellent rendement de 90% (Schéma II.29).

Schéma II.29 : Synthèse du (+)-(R)-méthyl-p-tolylsulfoxyde (R)-117 énantiopur

Dans ce contexte, D. A. Evans développe une voie d’accès à des sulfoxydes énantiomériquement purs par addition de réactifs organométalliques sur un analogue de

106

52 sulfinate chiral.107 En effet, il utilise l’oxazolidinone 118 comme auxiliaire de chiralité et non un alcool chiral (Schéma II.30). Il obtient une N-sulfinyloxazolidinone dans l’une ou l’autre des configurations possibles en fonction du réactif utilisé. Lorsqu’il procède par sulfinylation directe de l’oxazolidinone 118, il obtient la N-sulfinyloxazolidinone intermédiaire dans une configuration (voie a) et lorsqu’il procède par oxydation de la sulfenamide, il accède à l’autre configuration (voie b). Les N-sulfinyloxazolidinones intermédiaires sont obtenues sous la forme de deux diastéréomères dont l’un est majoritaire et une chromatographie sur gel de silice est nécessaire pour les séparer. Enfin, la N-sulfinyloxazolidinone majoritaire est substituée par un réactif organomagnésien pour conduire au sulfoxyde souhaité dans l’une ou l’autre des deux configurations. L’étape d’addition du réactif organomagnésien s’effectue avec une inversion complète de la configuration de l’atome de soufre. Nous n’avons pas testé cette méthode pour la synthèse du (-)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde en raison des faibles excès diastéréoisomèriques et rendements obtenus lors de l’étape de synthèse de la N-sulfinyloxazolidinone intermédiaire.

Schéma II.30 : Synthèse de sulxoxydes à partir d’une oxazolidinone chirale 117

Simultanément, le groupe de N. Khiar développe une méthode d’accès à des sulfoxydes énantiomériquement purs par addition de réactifs de Grignard sur des sulfinates obtenus à partir de le diacétone-D-glucose (DAG). L’étape d’addition du réactif organomagnésien sur le sulfinate s’effectue avec une complète inversion de la configuration de l’atome de soufre stéréogène (Schéma II.31).97f,108

Le sulfinate intermédiaire peut être obtenu dans l’une au l’autre des deux configurations en fonction de la base et du solvant utilisé.

107 Evans, D. A.; Faul, M. M.; Colombo, L.; Bisaha, J. J.; Clardy, J.; Cherry, D. J. Am. Chem. Soc. 1992, 114, 5977.

108

Chapitre II : Synthèse de motifs « 2-méthyl-1,3-aminoalcools » à l’aide d’une réaction de type Reformatsky asymétrique promue par l’iodure de samarium

53

Schéma II.31 : Synthèse de sulfoxydes énantiopurs à partir du diacétone-D-glucose

Nous avons testé cette méthodologie pour synthétiser le (˗)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde. Théoriquement, le sulfoxyde souhaité devrait pouvoir être obtenu par traitement du MeSOCl par la base de Hünig pour obtenir le sulfinate de configuration S qui après substitution nucléophile par le t-BuMgCl devrait fournir le sulfoxyde souhaité de configuration R. Cependant l’étape de formation du sulfinate conduit à une faible diastéréosélectivité. Une autre possibilité serait de traiter le t-BuSOCl toujours par la base de Hünig pour obtenir le sulfinate S qui après substitution nucléophile par le MeMgBr devrait fournir le sulfoxyde souhaité. Le problème est que l’espèce t-BuSOCl est instable et que l’étape de purification des sulfinates obtenus dans un mélange de diastéréomères conduit à des produits de dégradation et donc à un très mauvais rendement. C’est pourquoi nous n’avons pas poursuivi l’utilisation de cette méthode pour la synthèse du (-)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde.

Nous avons, dans cette première partie, passé en revue les méthodes diastéréosélectives de synthèse de sulfoxydes chiraux en portant plus particulièrement notre attention sur celles permettant un accès efficace au (-)-(R)-méthyl-tert-butylsulfoxyde énantiopur. Nous allons dans la partie qui va suivre nous intéresser aux méthodes d’accès à des sulfoxydes chiraux par voie énantiosélective.