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II Passage à la taille nanométrique

II.3 Synthèse de nanoparticules bimétalliques de métaux nobles

Les NPs bimétalliques peuvent être divisées en 2 grandes catégories, les alliages ainsi que les cœur-coquille. Ces NPs bimétalliques possèdent des propriétés chimiques, physiques et électriques qui n'apparaissent pas forcément dans le matériau massique (Mulvaney, 1996). De plus, celles-ci, comme pour les NPs monométalliques, présentent des propriétés liées à leur taille, telles que les propriétés optiques et spectroscopiques (SERS) que nous détaillerons au chapitre IV, et peuvent s'autoassembler en structure 3D. Ces NPs bimétalliques ont fait l'objet d'un intérêt grandissant, en particulier, dans la catalyse mais aussi dans le développement de substrats SERS. L'intérêt de ces systèmes bimétalliques est donc de tirer avantages des diverses propriétés de catalyse et plasmonique de différents matériaux. L’étude des propriétés des nanoparticules cœur-coquilles Au@Ag, Ag@Au et d’alliages Cu-Au fait l’objet du chapitre IV de mon manuscrit.

II.3.1 Alliages

De nombreux travaux ont été réalisés sur les alliages. Dans cette partie, nous nous intéresserons en particulier aux alliages de cuivre, d'argent ou d'or. Par exemple, des alliages tels qu’Au-Pd ou Au-Pt ont été étudiés dans la littérature (Schmid et al., 1991) En effet, ces alliages tirent de l'avantage de la faible réactivité de l'or avec la grande sélectivité des métaux de catalyse, ici, Pd ou Pt. Ces alliages ont été utilisés pour l'hydrogénation d'alcènes (Toshima et al., 1993) ou bien pour la cyclisation d'acétylène (Schmid et al., 1991). Des alliages Au-Pd ont aussi été utilisé pour l'électro-oxydation du glucose pour des applications dans l'énergie (Habrioux et al., 2007). Pour des alliages cuivre-or, ceux-ci ont été utilisés en tant que catalyseurs pour, par exemple, l'oxydation du monoxyde de carbone (Zhu et al., 2006). Zhu et al. ont utilisés des nanotubes de Au/TiO2, avec l'or ajouté par dépôt-précipitation, modifiés par du cuivre via calcination de nitrate de cuivre. Le catalyseur, ainsi obtenu, AuCu/TiO2 a montré une conversion totale du CO à une température (70°C) plus faible que sa contrepartie Au/TiO2 (170°C). Les alliages Cu-Au ont aussi été utilisés dans l'époxidation du propène

(Chimentão et al., 2007) où le catalyseur AuxCuy/TiO2 a montré une sélectivité plus

importante que les catalyseurs monométalliques tels que Au/TiO2 ou Cu/TiO2. D'autres

alliages ont été étudiés tels que l'alliage Au-Ag notamment dans le domaine de la plasmonique. Ces 2 métaux se sont imposés en tant que référence dans le domaine du SERS. Il est connu que les NPs d'argent fournissent une plus grande exaltation que les NPs d'or mais celles-ci ne sont pas aussi stables dans un environnement biologique notamment de par l'oxydation de surface. L'utilisation d'un alliage suscite donc un intérêt à tirer parti des différentes propriétés de l'or et de l'argent dans la fabrication de substrats SERS (Khaywah et al., 2015). L'efficacité SERS de nanoparticules bimétallique Au-Ag, dont la taille varie de 8 nm à 17 nm, a été calculée sur du 2,4,6-trinitrotoluène (Yang et al., 2009). En se basant sur la

bande de vibration symétrique de la fonction NO2, le facteur d'exaltation calculé est de l'ordre

Chapitre I. Introduction bibliographique

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II.3.2 Cœur-coquille

Les NPs cœur-coquille sont, comme leur nom l'indique, composé de 2 ou plusieurs matériaux. Les matériaux utilisables pour le cœur, ainsi que pour la coquille, peuvent être

organiques ou inorganiques (inorganique/inorganique, inorganique/organique,

organique/inorganique et organique/organique). Le choix des matériaux et particulièrement celui de la coquille dépendront notamment de l'application finale des NPs. Il existe plusieurs types de NPs cœur-coquille (Figure I-6) et les plus communes sont les cœur-coquille sphériques avec un cœur recouvert d'une coquille d'un différent matériau (Figure I-6(a)).

Figure I-6 : Schéma de différents types de nanoparticules "cœur-coquille" : (a) sphérique; (b) hexagonal; (c) multiple cœurs recouverts d'une couche unique; (d) "nanomatryushka" et (d) cœur mobile dans une coquille creuse. Figure reproduite de Chaudhuri et al. (Ghosh Chaudhuri and Paria, 2012)

Ainsi, en fonction des matériaux choisis, le champ d'application des NPs bimétalliques est très large. Une des applications possible est dans le domaine biomédical. Les NPs cœur-coquille peuvent être utilisées en tant que vecteur pour l'administration de médicament ainsi

que pour du ciblage spécifique. Par exemple, des NPs d'oxyde de fer (Fe3O4@couche

organique) habillées de dendrimères (acide folique) ont été utilisées pour cibler et détecter des cellules cancéreuses (Landmark et al., 2008). Les NPs cœur-coquille sont aussi très utilisées, comme dans le cas des alliages, pour la catalyse notamment de part les propriétés catalytiques du Pd utilisé alors comme coquille. L'or et l'argent sont les métaux de référence dans le domaine de la plasmonique. L'équipe de Yang ont aussi synthétisé des cœur-coquilles Ag@Au avec différentes tailles de cœur et d’épaisseur de couche en modifiant le ratio AuIII/AgI dans leur synthèse (Yang et al., 2009) et ont déterminé un facteur d'exaltation de l'ordre de 1012 sur le trinitrotoluène.

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31 Dans la littérature, plusieurs méthodes pour synthétiser des NPs bimétalliques existent. De manière générale, les synthèses sont soit par voie chimique, telle que la co-réduction d'ions métalliques, qui est une réaction en 1 étape, soit par voie physique, telle que la radiolyse où une solution d'ion métallique est illuminée par un faisceau de rayon à haute énergie. Comme pour les nanoparticules monométalliques, nous nous intéresserons dans ce travail uniquement aux méthodes par voie chimique.

II.3.2.1 Synthèse par co-réduction

La synthèse par co-réduction est la réduction simultanée de plusieurs ions métalliques en solution en 1 seule étape. De cette manière, des NPs d'alliages ont été synthétisées (Cable and Schaak, 2005) avec des couples de métaux divers tels que M-Sn (avec M= Ag, Au, Cu, Co, etc.) ou Pt-M' (M'=Bi, Pb, Sb, Sn). Les nanoparticules M-Sn obtenues ont un diamètre moyen allant de 5 à 50 nm tandis que les NPs Pt-M' ont un diamètre de 10 à 100 nm.

Il a cependant été remarqué que dans certaines conditions de températures et ratio, des phases métalliques pures apparaissaient dans les NPs bimétalliques. De la même manière, des NPs d’alliage Ag-Au avec un ratio de 67%/33% respectivement, ont été synthétisé (Li et al., 2013) avec un diamètre moyen allant de 120 à 160 nm en faisant varier le ratio Ag(I)/Au(III). Cependant, il est aussi possible d'obtenir des cœur-coquilles Ag@Au en théorie. En effet, si les 2 métaux ont un potentiel redox différent, celui de potentiel le plus haut aura tendance à se réduire en premier lors de la co-réduction (Samal et al., 2013). Dans le cas de NPs bimétalliques Au-Ag, l'or se réduira avant l'argent formant des cœur-coquilles ou des mélanges hétérogènes. Mais il est possible, d'empêcher cette réduction en 2 temps en modifiant la vitesse de nucléation, via la température et le ratio d'ions (C. Wang et al., 2009).

II.3.2.2 Synthèse par germination

La synthèse par germination est bien adaptée pour la fabrication de NPs bimétalliques cœur-coquille ou hétérostructurées. Tout d'abord, le germe est synthétisé via les nombreuses méthodes existantes (voir II-2). Par la suite, un second métal sera déposé de manière uniforme sur le germe préformé, formant une structure cœur-coquille. La structure, la forme et la taille des germes ont un impact important sur la nucléation et la germination du second métal. Dans cette méthode, il est donc nécessaire de contrôler les paramètres cinétiques afin d'obtenir les NPs de structure voulue. En effet, dans le cas de NPs Pd-Au (Lim et al., 2010), le choix du réducteur influencera la structure finale de la NPs : des cœur-coquilles seront obtenus avec de l'acide L-ascorbique en tant que réducteur tandis que l'utilisation d'acide citrique formera des dimères Pd-Au.

La morphologie des NPs peut aussi être contrôlée via l'épaisseur de la coquille. Des nanoparticules cœur-coquilles Ag@Au (Srnová-Šloufová et al., 2000) ont été étudiées et caractérisées. Lorsque l'épaisseur de la coquille d'or augmente (allant de 0,2 à 6 nm pour un cœur d'argent de 10 nm), les NPs vont devenir de plus en plus facettées (triangle, hexagone). Cependant la synthèse par germination n'est pas uniquement limité à la fabrication de NPs

cœur-coquilles ou hétérostructurées. Des NPs d’alliage Cu-Au et Cu3Au ont été synthétisées

(Chen et al., 2010) par procédé galvanique en faisant réagir des NPs d’or avec un sel de

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32 Il est à noter que la méthode de germination peut être utilisée également afin d'augmenter le diamètre de nanoparticules monométalliques (Goubet et al., 2015).

Pour augmenter la taille de nanoparticules d’or, un complexe [Au(OLA)n] est formé à partir de la dissolution d’un sel d’or (HAuCl4) dans de l'oleylamine pure. En ajoutant un certain volume de ce complexe à une solution de germe de nanoparticules d’or de 5 nm de diamètre chauffée à une température de 90°C, une augmentation du diamètre moyen des nanoparticules est observée avec une conservation de la polydispersité initiale. Il est possible de contrôler la taille finale des nanoparticules en variant le volume de complexe ajouté. Des nanoparticules d’or jusqu’à 13 nm de diamètre peuvent ainsi être obtenues. Cette méthode de germination a été utilisée dans ce travail de thèse pour la synthèse des nanoparticules d’or de 11,5 nm de diamètre (Tableau I-2)