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Chapitre 1 : Contexte et problématique de l’étude

1.5 Synthèse de la problématique et objectifs de recherche

Les cultures maraîchères subissent la pression d’un grand nombre de maladies et d’insectes ravageurs pouvant entraîner d’importantes pertes économiques. La lutte phytosanitaire fait appel à l’usage des pesticides afin de contrôler ces ennemis des cultures en limitant leur nombre à un seuil économiquement acceptable.

Cependant, l’usage abusif des pesticides ou sur une base régulière selon le calendrier est souvent constaté et entraîne des problèmes de résistance. Ce qui donne lieu à des applications plus fréquentes et des risques élevés pour l’environnement et la santé publique (Abhilash et Singh 2009; Bueno et al. 2011; Carisse et al. 2011). La gestion intégrée des ravageurs se base sur la combinaison d’un ensemble d’outils et d’approches de lutte pour réduire à la fois l’utilisation des pesticides, les risques de pollution et la perte économique que représente les ravageurs (Tang et al. 2010; Zalom 2010). Elle vise à appliquer localement les mesures de contrôle aux bons moments et aux bons endroits sur le territoire d’exploitation. Elle fait appel pour cela aux IAM qui influencent l’occurrence, le développement et le comportement des ravageurs afin d’alimenter des modèles de prévision, et supporter des activités comme le dépistage et la gestion spécifique des ravageurs par site. D’une part, les mesures des IAM comme l’humidité et la température de l’air sont habituellement des données ponctuelles acquises par les SM. Or, la faible densité et la représentativité spatiale de ces stations à travers le territoire ne rendent pas toujours compte de la variabilité locale des conditions agrométéorologiques qui affectent les ravageurs en dehors des sites de mesure (Benavides et al. 2007; Chokmani et al. 2005; Di Piazza et al. 2011). Ce qui peut induire des erreurs de diagnostic et affecter les mesures de contrôle utilisées pour répondre aux besoins locaux de gestion des ravageurs. D’autres parts, des IAM comme le taux de couverture végétal, l’humidité de surface et la température de surface permettent de caractériser des conditions microclimatiques qui affectent directement l’épidémiologie de plusieurs maladies des cultures. Ces indicateurs présentent souvent de très fortes variabilités spatiales et ne sont pas couramment mesurés par les SM (Broatch et al. 2006; Dalla Marta et Orlandini 2010; Rogers et Stevenson 2006). De ce fait ils sont très peu utilisés par la communauté scientifique et les praticiens pour évaluer l’influence des conditions agrométéorologiques sur les ravageurs et améliorer l’efficacité des modèles de prévision et des mesures de contrôle.

La géomatique agricole et l’agriculture de précision ont largement contribué à caractériser à diverses échelles la variabilité spatiale de différents facteurs abiotiques (topographie, stress hydrique et minéral) et biotiques (mauvaises herbes, maladies, insectes ravageurs) qui influencent le développement des cultures afin de limiter le risque environnemental de la production agricole et améliorer son rendement. Cependant, la caractérisation de la variabilité spatiale des conditions agrométéorologiques qui affectent localement les ravageurs est très peu abordée en géomatique agricole ou en agriculture de précision (Lee et al. 2010; Pattey

et al. 2001). Les capteurs de télédétection optique ou infrarouge thermique sont particulièrement utilisés au

champ pour détecter, à l’échelle de la feuille ou du couvert végétal, les stress ou dommages causés par les maladies et les insectes ravageurs afin de supporter localement la lutte phytosanitaire. Cependant, même si la détection des dommages donne de bons résultats, cette approche de gestion des ravageurs se bute à des limitations majeures d’ordre pratique. Les stress détectés ne sont pas spécifiques à des ravageurs et peuvent être attribués à d’autres sources de stress comme le déficit hydrique et minéral, ou encore des dommages

d’intempérie. En outre, le niveau de sévérité auquel certaines maladies sont détectées peut limiter l’efficacité des mesures de contrôle (Jones 1999; Oerke et Steiner 2010; Walker 1983). Plusieurs capteurs de télédétection à bord des satellites d’observation de la Terre permettent d’estimer sur une base régulière les IAM à des résolutions spatiales que ne peuvent atteindre les réseaux de stations météorologiques. Ces capteurs permettent en plus d’estimer des indicateurs qui ne peuvent être mesurés par les stations météorologiques (taux de couverture végétale) ou être observés couramment par celles-ci (humidité de surface, température de surface). Cependant, la résolution spatiale ou temporelle de ces capteurs, accentuée par les données manquantes due aux nuages, constituent d’importantes limitations à la caractérisation des variabilités locales et intraparcellaires requises dans la gestion spécifique des ravageurs par site (Ju et al. 2010; Lu et al. 2011; Mo et al. 2005; Park et al. 2007). Les algorithmes split-window ainsi que des indices comme le TVDI et le TVX ont été développés en télédétection pour respectivement estimer la température de surface, l’humidité de surface et la température de l’air. Ces indicateurs sont principalement estimés à partir des images satellite et présentent plusieurs restrictions d’ordre conceptuel qui peuvent générer d’importantes erreurs dans un contexte d’évaluation des conditions agrométéorologiques au champ. De plus, les incertitudes reliées à leur estimation ne sont pas bien connues. La thermographie infrarouge fait l’objet de nombreuses applications en agriculture, notamment pour la détection de divers stress affectant les couverts végétaux. La thermographie infrarouge aéroportée, combinée à l’imagerie multispectrale, présente un potentiel élevé pour caractériser les conditions agrométéorologiques locales et détecter des zones de gestion spécifique sur de vastes territoires agricoles. Ce potentiel n’a pas été évalué, du moins dans un contexte de lutte contre les ravageurs. La spatialisation des données à très haute fréquences mesurées par les stations météorologiques à l’aide des facteurs de variabilité spatiale issus des images satellite et des bases de données géographiques permet un suivi régulier des conditions agrométéorologiques et la prévision des ravageurs à l’échelle régionale. Cependant, la dynamique temporelle des facteurs de variabilité spatiale de ces données reste à évaluer.

L’objectif de cette étude est de modéliser, estimer et spatialiser des indicateurs agrométéorologiques et d’évaluer formellement leur incertitude à l’aide de la thermographie infrarouge aéroportée, de l’imagerie multispectrale aéroportée et des images satellite en vue de supporter la lutte contre les ravageurs des cultures maraîchères aux échelles intraparcellaires, locales et régionales. Cet objectif s’articule autour des objectifs spécifiques et sous-objectifs suivants :

Objectif 1 (O1) : Modéliser et estimer les indicateurs agrométéorologiques et leur incertitude à

l’échelle locale à l’aide de la thermographie infrarouge et de l’imagerie multispectrale aéroportée. Sous-objectif 1.1 (SO1.1) : Estimer et évaluer l’incertitude résultante de la proportion de

couverture végétale dérivée de l’imagerie multispectrale aéroportée.

Sous-objectif 1.2 (SO1.2) : Établir une méthodologie d’estimation de la température de

surface par thermographie infrarouge aéroportée.

Sous-objectif 1.3 (SO1.3) : Estimer l’humidité de surface et formuler son incertitude selon

l’indice TVDI.

Sous-objectif 1.4 (SO1.4) : Réviser et adapter l’indice TVX pour estimer la température de

l’air près de la surface et son incertitude.

Sous-objectif 1.5 (SO1.5) : Modéliser un indicateur des conditions de stress thermique et

hydrique affectant les cultures et les ravageurs.

Objectif 2 (O2) : Estimer les indicateurs agrométéorologiques à l’échelle régionale à l’aide des

images satellite NOAA-AVHRR.

Sous-objectif 2.1 (SO2.1) : Évaluer et comparer plusieurs indices de végétation, modèles

d’émissivité de surface et algorithmes split-window sur la base de leurs incertitude résultantes afin d’estimer la température de surface à partir d’un modèle qui s’applique le mieux à la région d’étude.

Sous-objectif 2.2 (SO2.2) : Estimer l’humidité de surface et son incertitude selon l’indice

TVDI.

Sous-objectif 2.3 (SO2.3) : Estimer et évaluer la température de l’air près de la surface selon

l’indice TVX modifié en SO1.3.

Objectif 3 (O3) : Spatialiser, à l’aide de la géostatistique multivariable, la température et l’humidité de

l’air près de la surface mesurées par les stations météorologiques en tenant compte de la dynamique spatiale et temporelle des facteurs dominants de leur variabilité spatiale (spatialisation dynamique). Sous-objectif 3.1 (SO3.1) : Caractériser la dynamique spatiale et temporelle des facteurs

dominants de la variabilité spatiale de la température et de l’humidité de l’air près de la surface observées à l’échelle locale et régionale.

Sous-objectif 3.2 (SO3.2) : Effectuer la spatialisation dynamique de la température de l’air et

de l’humidité de l’air observées à l’échelle locale et régionale.

Sous-objectif 3.3 (SO3.3) : Comparer les résultats de la spatialisation dynamique à ceux des

méthodes d’interpolation univariées dont le krigeage ordinaire et la distance inverse pondérée.

Objectif 4 (O4) : Évaluer les corrélations entre les occurrences spatiales des ravageurs affectant les

cultures maraîchères en Montérégie Ouest et les indicateurs agrométéorologiques dérivés de la télédétection aéroportée et satellitaire.