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Chapitre 2 : Cadre théorique

2.2 Télédétection et estimation des indicateurs agrométéorologiques

2.2.2 Mesure des températures de surface par thermographie infrarouge

La température de surface (TS) peut être définie comme un état d'équilibre thermodynamique résultant du bilan énergétique entre l'atmosphère, la surface et les couches inférieures de la surface (Schmugge et al. 2002a). La TS peut être estimée à partir des observations de télédétection dans la bande thermique s’étendant de 8 à 14 micromètres. Les mesures effectuées par les capteurs de télédétection dans cette bande spectrale fournissent des indications sur l’humidité et la température de la surface terrestre (Hufty 2001). Elles constituent une importante source de données pour la caractérisation du microclimat et l’estimation des IAM.

2.2.2.1 Principes physiques

Les objets dont la température est supérieure au zéro absolu (0 K ou -273,15 °C) émettent une radiation Infrarouge Thermique (IRT) qui est fonction de leur température et de la longueur d'onde d'émission (Jones 2004). Ce qui concerne la quasi-totalité des objets à la surface de la terre. Le rayonnement IRT émis par toute

surface étant fonction de sa température, la mesure à distance de ce rayonnement à l'aide d'un radiomètre permet d'estimer la température de cette surface. C'est la base de la thermographie infrarouge (Bonn et al. 1992; Guyot 1999; Saha 2004). Plusieurs lois physiques permettent d’établir le lien entre le rayonnement IRT émis par des objets et la température de ces objets. La loi de Planck permet de caractériser la luminance spectrale du rayonnement d’un corps noir1 en fonction de sa température. La luminance spectrale est la puissance rayonnée par angle solide par unité de surface de corps noir et par longueur d’onde. Elle établit la relation entre le rayonnement IRT émis par le corps noir, la longueur d’onde d’émission et la température du corps noir (Équation 2.13).

𝐿𝜆= 2ℎ𝑐2 𝜆5(𝑒𝜆𝑘𝑇ℎ𝑐𝑏− 1)

Équation 2.13

𝐿𝜆 = Luminance spectrale (Wm-2sr-1μm-1) ℎ = Constante de Planck (6,6256×10-34 Js) 𝑘 = Constante de Boltzmann (1,38054×10-23 JK-1) 𝑐 = Vitesse de la lumière (2,998×108 ms-1) 𝜆 = Longueur d’onde (μm)

𝑇𝑏 = Température du corps noir (K)

La loi de Wien explique le déplacement vers les courtes longueurs d’onde des corps de plus en plus chaud (Équation 2.14). Elle est obtenue par dérivation de la loi de Planck et permet d’identifier la longueur d’onde ou le corps noir émet son maximum de radiation. La longueur d’onde du maximum de radiation thermique de la surface terrestre se situe autour de 10,3 μm (Rees 2001).

𝜆𝑚𝑎𝑥=2898

𝑇𝑏

Équation 2.14

𝜆𝑚𝑎𝑥 = longueur d’onde du maximum d’émission (m).

La loi de Stephan-Boltzmann exprime l’exitance totale du corps noir (Équation 2.15). C’est la densité de flux de radiation totale émise à partir d'une unité de surface dans un hémisphère. En d’autres termes, c’est la puissance totale du rayonnement émis par le corps noir (Bonn et al. 1992). Elle est obtenue par intégration de la loi de Planck sur l’ensemble du spectre électromagnétique.

1 Matériau idéal absorbant toutes les radiations, quelle que soit leur longueur d'onde, et qui, du fait de sa

𝑀 = ∫ 𝐿∞ 𝜆𝑑𝜆 0

= 2𝜋4𝑘4

15𝑐23𝑇𝑏4= 𝜎𝑇𝑏4

Équation 2.15

𝑀𝑏 = Exitance totale du corps noir (Wm-2) 𝜎 = Constance de Stefan-Boltzmann = 2𝜋5𝑘4

15𝑐23 = 5,67×10-8 Wm-2K-4

𝑇𝑏 = Température du corps noir (K)

L’estimation de l’exitance totale du corps par la fonction de Stefan-Boltzmann porte sur l’ensemble du spectre électromagnétique, or la plupart des radiomètres infrarouges opèrent dans une bande spectrale. Il est donc préférable d’utiliser la fonction de Planck pour déterminer l’exitance du corps noir (𝑀𝜆𝜆12), mesuré par le

capteur dans une bande spectrale, [𝜆1− 𝜆2] donnée (Qin et al. 2005; Rees 2001) (Équation 2.16).

𝑀𝜆 1 𝜆2 = 1 𝜆2− 𝜆1∫ ℎ𝑐2 𝜆5(𝑒𝜆𝑘𝑇ℎ𝑐 − 1) 𝑓(𝜆)𝑑𝜆 𝜆2 𝜆1

Équation 2.16

𝑓(𝜆) = Fonction de réponse spectrale du capteur dans la bande spectrale [𝜆1− 𝜆2]

La quantité 𝑀𝜆𝜆12 peut être également formulée comme suit :

𝑀𝜆𝜆12= ∫ 𝐿 𝜆𝑑𝜆 𝜆2 𝜆1 = 𝜎𝑇4(𝑓(𝑥 1) − 𝑓(𝑥2))

Équation 2.17

Avec : 𝑥1= ℎ𝑐 𝜆1𝑘𝑇

Équation 2.18

𝑥2= ℎ𝑐 𝜆2𝑘𝑇

Équation 2.19

𝑓(𝑥) =15 𝜋4∫ 𝑥3 𝑒𝑥− 1𝑑𝑥 𝑥 0

Équation 2.20

La fonction 𝑓(𝑥) (Équation 2.20) ne peut être évaluée que par intégrale numérique. La table de la fonction de distribution de Planck permet également d’estimer les valeurs de la fonction 𝑓(𝑥) (Gaussorgues 1999; Rees 2001). Selon Guyot (1999), la luminance mesurée par les radiomètres à bandes larges ne correspond qu’à un 1/3 du flux émis par la surface.

La plupart des objets de la surface n'agissent pas comme des corps noirs dans l'émission de la radiation infrarouge thermique. Le concept de corps gris est rattaché à ces objets car la valeur de la radiation infrarouge thermique émise par les objets de la surface réelle est inférieure à la valeur théorique émise par un corps noir. La relation entre le corps gris et le corps noir est déterminée par l'émissivité. Elle varie entre 0 et 1 et détermine le pouvoir d'émission du corps gris par rapport à un corps noir à la même température. Pour une température donnée, l'émissivité varie selon la longueur d'onde. Cependant, l'émissivité est généralement considérée comme une constante dans la région infrarouge thermique du spectre électromagnétique (Jones et Callow 2004). En considérant l’émissivité, la loi de Stefan-Boltzmann associée à un corps gris est décrite par l’Équation 2.5.

Le principe des caméras de thermographie infrarouge est que la TS est déterminée connaissant sa luminance dans l’IRT et son émissivité (Guyot 1999). La plupart de ces caméras permettent d’analyser la distribution spatiale des températures apparentes de la surface, c’est-à-dire, la température qu’aurait eue un corps noir (Bonn et al. 1992; Gaussorgues 1999). La conversion de la mesure énergétique effectuée par les caméras de thermographie infrarouge en TS est généralement effectuée à l'aide d'une fonction interne qui effectue l'intégration de la loi de Planck sur la bande spectrale d'opération de la caméra (Jones et Callow 2004). La relation entre la TS du corps gris et la température absolue du corps noir (𝑇𝑏) peut être établie par une inversion de la loi de Planck (Saha 2004) (Équation 2.21) :

𝑇𝑆 = ℎ𝑐

𝜆𝑘𝑙𝑛 (1 + 1𝜀 𝑠(𝑒

ℎ𝑐

𝜆𝑘𝑇𝑏− 1))

Équation 2.21

La relation entre la température apparente (température du corps noir) mesurée par le capteur et la température "vraie" de la surface peut être simplifiée à l’aide du modèle suivant (Bonn et Escadafal 1996; Bonn et al. 1992) :

𝑇𝑆 = 𝑇𝑏

𝜀𝑠14

Équation 2.22

Les algorithmes utilisés par les caméras de thermographie infrarouge pour estimer la TS corrigent dans la plupart des cas les effets de la sensibilité spectrale du détecteur et de l'émissivité de la surface. Ils doivent également déterminer dans la radiation thermique totale reçue par la caméra, la fraction de radiation émise effectivement par la surface. Car la radiation émise par la surface est atténuée lors de son passage dans l'atmosphère.

2.2.2.2 Du rayonnement infrarouge thermique émis par la surface à l’estimation de la température de surface

L’énergie apparente mesurée par le radiomètre infrarouge thermique provient de trois sources (Équation

2.23) : la radiation émise directement par la surface, la radiation atmosphérique descendante réfléchie par la

surface, et la radiation atmosphérique ascendante (Bonn et al. 1992; Burnay et al. 1988; Jacob 1999; Qin et

al. 2005).

𝑅𝐶 = 𝑅𝐿↑+ (1 − 𝜌

𝑠)𝑅𝐿↓+ 𝑅𝐴↑

Équation 2.23

𝑅𝐶 = Rayonnement infrarouge thermique mesuré par le capteur (Wm-2)

𝑅𝐿↑ = Rayonnement infrarouge thermique ascendant émis par la surface (Wm-2) 𝑅𝐿↓ = Rayonnement infrarouge thermique descendant émis par l’atmosphère (Wm-2) 𝑅𝐴↑ = Rayonnement infrarouge thermique ascendant émis par l’atmosphère (Wm-2) 𝜌𝑠 = Coefficient de réflectivité thermique de la surface

Le paramètre 𝑅𝐿↑ dépend de TS et de ε

s (Équation 2.5). 𝑅𝐿↓ et 𝑅𝐴↑ sont fonction de TA et du profil de distribution de la vapeur d’eau atmosphérique (Équation 2.4, Équation 2.11). La radiation infrarouge thermique mesurée par la caméra thermique est ainsi une somme de radiation thermique émise et de radiation thermique réfléchie (Jones et Callow 2004). Cette mesure est influencée par l’émissivité de la surface, qui est fonction de la structure et des propriétés optiques des éléments qui composent la surface, et par les constituants atmosphériques (Li et Becker 1993; Luquet 2002; Schmugge et al. 2002b; Sugiura et al. 2007). La différence entre la température apparente mesurée par le capteur et la TS réelle varie entre 1 et 5 K dans la bande spectrale allant de 10 à 12 micromètres (Srivastava et al. 2009). Ce qui représente l'influence des conditions atmosphériques et des effets de l'émissivité. Selon plusieurs auteurs (Jang et al. 2004; Sugiura et

al. 2007), la principale difficulté liée à la mesure de la TS est l’imprécision induite par la transmissivité

atmosphérique. Les principaux phénomènes atmosphériques qui atténuent la transmission du rayonnement IRT sont l’absorption et la diffusion du rayonnement par les gaz et les particules atmosphériques. La vapeur d’eau atmosphérique est le plus important facteur d’atténuation du rayonnement IRT (Gaussorgues 1999). Les principales bandes d’absorption du rayonnement IRT par la vapeur d’eau atmosphérique sont situées vers les longueurs d’onde 2,6 μm, entre 5,5 et 7,5 μm et au-delà de 20 μm (Gaussorgues 1999). Il existe plusieurs bandes spectrales appelées "fenêtres atmosphériques" à travers lesquelles l’absorption du rayonnement IRT est très faible. Parmi ces bandes, la bande allant de 3 à 5 μm et celle allant de 8 à 14 μm, sont les bandes où opèrent les caméras de thermographie infrarouge. La bande spectrale allant de 8 à 14 μm est la bande thermique la plus utilisée, car c’est la bande du maximum d’émission des objets à la température ambiante et le rayonnement solaire y est totalement absorbé. Il ne perturbe donc pas les mesures de température dans les conditions naturelles du jour (Guyot 1999). Certains systèmes d’imagerie thermique utilisent la fenêtre 3 à 5 μm pour observer des objets ou des phénomènes à température très élevée. Le rayonnement solaire n’est pas

totalement absorbé dans cette bande et affecte donc les mesures de température effectuées durant le jour (Guyot 1999). Il existe également d’autres gaz atmosphériques comme le gaz carbonique (CO2) qui atténuent la transmission du rayonnement IRT. Cependant, leur influence est très faible, comparativement à celle de la vapeur d’eau. Les particules en suspension dans l’air ou aérosols sont à l’origine de la diffusion du rayonnement émis par la surface. Le rayonnement IRT est atténué proportionnellement au coefficient de diffusion de l’atmosphère. Les courtes longueurs d’onde sont plus diffusées que les grandes longueurs d’onde, de sorte que le rayonnement visible est plus atténué que le rayonnement infrarouge (Caloz et Collet 2001). Les aérosols entraînent également une baisse de contraste dans les images thermiques (Gaussorgues 1999). En dehors des effets de l’émissivité de la surface (EMS) et de la transmissivité de l’atmosphère, la température apparente mesurée par le capteur est également influencée par la géométrie d'acquisition traduite par la direction d'observation et les caractéristiques du radiomètre. Différentes approches de correction d’émissivité et de correction atmosphériques sont proposées pour estimer la TS à partir de l’énergie apparente mesurée par le capteur thermique.

Les corrections d’EMS peuvent être effectuées à partir de mesures directes ou à l’aide de modèles d’EMS. L’estimation directe de l’EMS peut être réalisée avec une "boîte d’émissivité" (Cihlar et al. 1997) ou à partir d’un radiomètre. Plusieurs méthodes telles l'EMS normalisée, les indices thermiques spectraux, le ratio spectral, la méthode du résiduel alpha, et la méthode de séparation de l'EMS et de la température ont été établies pour estimer l’EMS à partir de l’imagerie multispectrale (Srivastava et al. 2009). Ces méthodes sont applicables aux capteurs qui possèdent plusieurs bandes thermiques tels que les capteurs AVHRR, MODIS et ASTER. Elles ne peuvent être appliquées avec des capteurs ne possédant qu'une seule bande thermique comme les capteurs TM et ETM+ de Landsat ou encore les capteurs de thermographie infrarouge dont la grande majorité ne possèdent qu’une bande thermique. Ces capteurs nécessitent une estimation indépendante de l’EMS afin de déterminer la valeur de TS à travers des algorithmes de type single-channel (Sobrino et al. 2004). La plupart des algorithmes single-channel exploitent la relation entre le NDVI et l’émissivité de surface pour estimer ce dernier (Srivastava et al. 2009; Van De Griend et Owe 1993). En effet, il a été démonté qu’après une transformation logarithmique, le NDVI est fortement corrélé à l’EMS. Plusieurs approches ont donc été proposées pour estimer l'EMS à partir du NDVI (Becker et Li 1990a; Sobrino et al. 2001; Valor et Caselles 1996; Van De Griend et Owe 1993; Zhang et al. 2006 2009). Nous présentons ici Le modèle d’émissivité de Van De Griend et Owe (1993) (EVGO) et le modèle d’émissivité de Sobrino et Raissouni (2000) (ESR). Le modèle EVGO permet d’estimer l’EMS (𝜀𝑠) comme une fonction logarithmique du NDVI (Équation 2.24). Le modèle s’applique mieux pour des valeurs de NDVI comprises entre 0,157 et 0,727.

Le modèle ESR est connu sous le nom de Méthode des seuils de NDVI ou NDVITHM (NDVI Thresholds

Method). Selon Sobrino et al. (2004), cette méthode offre de meilleurs résultats, comparativement à d’autres

méthodes comme le modèle EVGO ou encore celle de Becker et Li (1990a). L'algorithme d'estimation de l'EMS selon le modèle ESR opère comme suit :

 Si 𝑁𝐷𝑉𝐼 < 0,2 alors, le pixel est considéré comme un sol nu et son émissivité est considérée égale à sa valeur de réflectance dans la bande rouge.

 Si 𝑁𝐷𝑉𝐼 > 0,5 alors, le pixel est considéré comme une couverture végétale totale, et on considère son émissivité comme ayant une valeur constante de 0,99.

 Si 0,2 ≤ 𝑁𝐷𝑉𝐼 ≤ 0,5 alors, le pixel a une composition mixte de sol nu et de couverture végétale, et sont émissivité est calculée selon l’équation suivante :

𝜀𝑠= 𝜀𝑣𝑃𝑣+ 𝜀𝑠𝑜𝑙(1 − 𝑃𝑣) + 𝑑𝜀

Équation 2.25

𝜀𝑣 = Valeur d’émissivité de la végétation 𝜀𝑠𝑜𝑙 = Valeur d’émissivité du sol nu 𝑃𝑣 = Proportion de la couverture végétale

𝑑𝜀 = Paramètre tenant compte des effets de réflections internes et de distribution géométrique des surfaces naturelles.

La proportion de couverture végétale (𝑃𝑣) est obtenue comme suit :

𝑃𝑣 = [ 𝑁𝐷𝑉𝐼 − 𝑁𝐷𝑉𝐼𝑚𝑖𝑛 𝑁𝐷𝑉𝐼𝑚𝑎𝑥− 𝑁𝐷𝑉𝐼𝑚𝑖𝑛] 2

Équation 2.26

Avec : 𝑁𝐷𝑉𝐼𝑚𝑖𝑛 = 0,2 et 𝑁𝐷𝑉𝐼𝑚𝑎𝑥 = 0,5

Le paramètre 𝑑𝜀 (Équation 2.27) est négligé sur des surfaces homogènes. Cependant, elle est prise en compte sur des surfaces hétérogènes et rugueuses, comme le couvert forestier.

𝑑𝜀 = (1 − 𝜀𝑠𝑜𝑙)(1 − 𝑃𝑣)𝐹𝜀𝑣

Équation 2.27

Où, le paramètre 𝐹 est un facteur de forme de distribution géométrique dont la valeur moyenne est de 0,55.

Le modèle ESR nécessite la connaissance des valeurs d’émissivité du sol nu et du couvert végétal. Sobrino et

al. (2001) recommandent une valeur d’émissivité de 0,99 pour le couvert végétal. Cependant, l’émissivité du

sol est plus délicate à déterminer. Car, comparativement à la végétation, les sols présentent une grande variation d’émissivité. L’émissivité du couvert végétal est très forte (supérieur à 0,98). Cela est dû à la teneur en eau du végétal sain. Même si ce n’est pas le cas (exemple de végétal sec), l’émissivité demeure forte en raison de l’effet de cavité induite par la hauteur du couvert (Stoll 1988). Des émissivités moyennes de 0,960 et

0,985 sont respectivement proposées pour le sol nu et la végétation dans la bande thermique allant de 10,5 à 12,5 µm. Snyder et al. (1998) proposent une émissivité moyenne de 0,989 pour les surfaces d'eau.

Les phénomènes d’absorption et d’émission atmosphérique réduisent la corrélation entre le rayonnement IRT mesuré par le radiomètre et celui émis par la surface. La conversion de la température apparente mesurée par le capteur en TS nécessite donc la connaissance de la transmissivité de l’atmosphère. Les corrections atmosphériques ont pour but de corriger les effets de diffusion et d’absorption atmosphérique du rayonnement émis par la surface (Sharma et al. 2009). Elles sont effectuées selon différentes approches comme la modélisation des conditions atmosphériques à l’aide des modèles de transfert radiatifs (MTR), la modélisation simple de la transmissivité de l’atmosphère, et la correction atmosphérique par mesures simultanées au sol. Les MTR sont des méthodes de correction robustes basées sur la relation entre la température apparente mesurée par le capteur et la TS. Les variables d’entrée de la plupart de ces modèles incluent l’épaisseur optique des aérosols et des particules moléculaires. La composition et la distribution spatiale des aérosols sont très variables. Il est donc nécessaire d’effectuer des mesures locales de ces paramètres pour calibrer les MTR et corriger les effets atmosphériques (Sharma et al. 2009). Les mesures d’optique atmosphérique nécessaires aux corrections atmosphériques sont souvent manquantes pour l’application des MTR. Des climatologies sont alors utilisées pour ces corrections (Moulin 1995). La modélisation simple de la transmissivité de l’atmosphère consiste à estimer cette dernière à partir des données comme la température ambiante, l’humidité et la distance de visée (Sugiura et al. 2007). Cette méthode est souvent utilisée pour corriger les mesures de thermographie infrarouge. Généralement, cette fonction de correction est une fonction interne aux caméras de thermographie infrarouge. La caméra possède une table de laquelle est déterminée la transmissivité de l’atmosphère selon la distance, la température de l’air et l’humidité de l’air. Ces tables sont elles-mêmes souvent générées à l’aide d’un MTR. Des mesures de TS effectuées au sol pendant l’acquisition des images permettent également d’établir la relation entre la température apparente et la TS. Les mesures au sol peuvent être effectuées à l’aide d’un radiothermomètre. Les surfaces utilisées pour ces mesures doivent être assez grandes et homogènes pour avoir un nombre suffisant de pixels et des valeurs moyennes significatives.

2.2.2.3 Algorithmes split-window et estimation des températures de surface par imagerie satellitaire

L’approche split-window est la méthode la plus connue et la plus utilisée pour estimer TS à partir des capteurs munis de plusieurs bandes thermiques comme AVHRR, MODIS et ASTER (Becker et Li 1990b; Coll et al. 2005; Katsiabani et al. 2009; Kealy et Hook 1993; Kishtawal 2004; Majumdar et Mohanty 1998; Vidal 1991). Elle a été initialement développée pour estimer la TS des océans à partir des bandes thermiques 4 (10,5-11,5 μm) et 5 (11,5-12,5 μm) du capteur AVHRR. Elle est basée sur le fait que l’atténuation atmosphérique de la

radiance émise par la surface est proportionnelle à la différence des radiances mesurées simultanément par le capteur dans les deux bandes thermiques (de Wit et al. 2004). En effet, les valeurs de température mesurées dans les canaux 4 et 5 du capteur AVHRR sont légèrement différentes à cause des différences dans l’absorption de la vapeur d’eau atmosphérique (Chokmani 2002; Saha 2004). Il existe plusieurs algorithmes

split-window. Quelques-uns des plus connus sont résumés au Tableau 2.2. Le modèle de base des

algorithmes split-window est présenté par Coll et al. (1994) comme suit :

𝑇𝑆 = 𝑇4+ 𝐴(𝑇4− 𝑇5) + 𝐵(𝜀)

Équation 2.28

𝑇𝑆 est la température de surface. 𝑇4 et 𝑇5 sont les températures de brillance des canaux 4 et 5 du capteur AVHRR. 𝐴 est un coefficient associé à la transmissivité de l’atmosphère dans ces canaux. Le paramètre 𝐵(𝜀) est associé aux effets d’émissivités. Les paramètres 𝐴 et 𝐵(𝜀) dépendent de l’humidité atmosphérique. Le coefficient 𝐴 est estimé à partir d'un MTR ou à partir d'un modèle de régression avec des mesures in-situ.

Tableau 2.2: Algorithmes split-window

Référence Algorithme split-windows

Price (1984) 𝑇𝑆 (𝐾) = [𝑇4+ 3,33(𝑇4− 𝑇5)] (3,5+𝜀4 4,5 ) + 0,75𝑇5∆𝜀 Becker et Li (1990b) 𝑇𝑆 (𝐾) = 1,274 +𝑇4+𝑇5 2 (1 + 0,15616 1−𝜀 𝜀 − 0,482 ∆𝜀 𝜀2) + 𝑇4−𝑇5 2 (6,26 + 3,981−𝜀𝜀 + 38,33∆𝜀𝜀2) Coll et al. (1994) 𝑇𝑆 (𝐾) = 𝑇4+ 2,13(𝑇4− 𝑇5) + 0,18 + 50(1 − 𝜀4) − 200∆𝜀 Ulivieri et al. (1994) 𝑇𝑆 (𝐾) = 𝑇4+ 1,8(𝑇4− 𝑇5) + 48(1 − 𝜀) − 75(𝜀4− 𝜀5) McClain et al. (1985) 𝑇𝑆 (𝐾) = 1,035𝑇4+ 3,046(𝑇4− 𝑇5) − 283,93 + 273

𝑇𝑆 est la température de surface; 𝑇4 et 𝑇5 sont respectivement les températures de brillance des canaux 4 et 5 du capteur AVHRR; 𝜀4 est l’émissivité de surface associée au canal 4; ∆𝜀 est la différence d’émissivité des canaux 4 et 5 avec ∆𝜀 = 𝜀4− 𝜀5; 𝜀 est l’émissivité moyenne des canaux 4 et 5 avec 𝜀 =𝜀4+𝜀2 5.

2.2.3 Indicateurs thermiques et estimation des conditions de température et