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Dans la première partie du cadre conceptuel, l’examen détaillé du code orthographique du français a permis de mieux comprendre les difficultés vécues par certains apprenants. Les résultats d’études descriptives de la compétence orthographique d’élèves francophones du primaire ont permis d’illustrer le fait que les propriétés visuelles des mots constituent les propriétés orthographiques qui engendrent le plus grand nombre d’erreurs d’orthographe lexicale chez les élèves avec et sans difficulté d’apprentissage de la langue écrite (Daigle et al., 2016; Plisson et al., 2013). Plus précisément, les phonèmes multigraphémiques et les

lettres muettes non porteuses de sens ont été identifiés comme étant les deux phénomènes visuels les plus difficiles à maîtriser par les élèves du primaire (Daigle et

al., 2016; Plisson et al., 2013). D’ailleurs, les enfants seraient sensibles à ces phénomènes visuels dès la première année du primaire et cette sensibilité continuerait à se développer au moins jusqu’en quatrième année (Plisson, 2017). Ces résultats suggèrent que ces phénomènes visuels doivent être enseignés en classe assez tôt, en concomitance avec les propriétés phonologiques et morphologiques des mots, pour favoriser le développement de la compétence orthographique des élèves.

La deuxième partie de ce chapitre était consacrée à la description des travaux portant sur l’enseignement efficace. De ces travaux, quatre principes à la base d’un enseignement

efficace ont été relevés : 1) la couverture efficace de la matière, 2) le soutien apporté aux

élèves, 3) la différenciation de l’enseignement et 4) l’évaluation de la compréhension et la rétroaction. La prise en compte de ces principes par l’enseignant parait essentielle s’il

souhaite favoriser la réussite scolaire de ses élèves.

La troisième partie de ce chapitre visait à dresser le bilan des différentes pratiques existantes pour enseigner l’orthographe. L’état de la recherche sur les pratiques déclarées indique que les pratiques d’enseignement sont nombreuses, peu différenciées et que le recours aux listes de mots s’avère la pratique la plus répandue dans les classes au primaire. Après s’être attardée aux pratiques déclarées par les enseignants, la présentation des dispositifs d’enseignement développés par les chercheurs pour enseigner l’orthographe en français a été effectuée. Ces dispositifs promeuvent une démarche favorisant la verbalisation, les interactions entre pairs et un traitement de l’écrit en matière de résolution de problèmes. D’ailleurs, le bilan des études empiriques ayant porté sur l’évaluation de l’efficacité des différents dispositifs d’enseignement montre que la pratique régulière des orthographes

approchées aurait un impact significatif sur l’appropriation de certaines propriétés caractérisant le code à différents moments dans la scolarité de l’élève. Toutefois, aucune de ces études n’a ciblé spécifiquement l’appropriation des propriétés visuelles au premier cycle du primaire. Considérant que les propriétés visuelles des mots rendent compte du plus grand nombre d’erreurs d’orthographe lexicale chez des élèves francophones du primaire avec et sans difficulté (Daigle et al., 2016; Plisson et al., 2013), il était important de s’intéresser aux autres variables ayant été testées à travers des études d’entrainement portant sur l’enseignement de l’orthographe. Ces variables donnent des indications à l’enseignant sur les éléments à intégrer dans sa pratique pour voir au bon développement de la compétence orthographique. Il appert que l’exposition à l’écrit, tout comme la sensibilisation des

élèves aux spécificités orthographiques des mots, mènerait à des gains significatifs en matière de compétence orthographique. De plus, il a été vu que la mémorisation de l’orthographe des pseudo-mots était favorisée lorsque leur enseignement était associé à leurs propriétés sémantiques. Par ailleurs, il ressort aussi des études portant sur les

pseudo-mots que l’écriture et la lecture favoriseraient davantage l’acquisition de

nouvelles connaissances orthographiques que la lecture seulement.

Les travaux menés à ce jour contribuent grandement à l’état actuel des connaissances au sujet de l’enseignement de l’orthographe. Une seule étude connue a comparé des contextes d’enseignement différents visant les propriétés visuelles des mots (Daigle et al., 2019). Cependant, cette étude n’avait pas pour objectif d’évaluer l’éventuel apport de l’enseignement des propriétés sémantiques qui, comme on l’a vu, contribue à la mémorisation de l’orthographe. Par ailleurs, une seule étude ne peut à elle seule constituer une base suffisante pour justifier des pratiques de classes. D’autres études portant sur le même thème soient menées de manière à tester l’éventuel bénéfice de l’enseignement des propriétés sémantiques.

Par ailleurs, les auteurs qui ont comparé les effets de différentes modalités d’entrainement (lecture comparativement à la lecture et l’écriture) ont tous utilisé des pseudo-mots pour évaluer l’acquisition de connaissances orthographiques (Bosse et al., 2014; Ouellette, 2010; Shahar-Yames et Share, 2008). Il semble important de tester les différences rapportées par ces auteurs dans le contexte où c’est l’enseignement et l’apprentissage de vrais mots qui nous intéresse.

De manière à répondre aux besoins de recherche mis en évidence par la synthèse du deuxième chapitre de cette thèse, une recherche quasi expérimentale doit être menée pour répondre aux trois objectifs spécifiques de recherche suivants :

Objectif spécifique 1 :

Comparer les effets des conditions expérimentales (enseignement des propriétés formelles de nature visuelle et des propriétés sémantiques [PVS], enseignement des propriétés formelles de nature visuelle [PV], aucun enseignement [C]), de la modalité d’entrainement des mots (lecture, écriture et lecture) et du temps de collecte des données (prétest, post-test immédiat, post-test différé) sur la réussite des élèves en orthographe au

niveau lexical. Objectif

spécifique 2 :

Comparer les effets des conditions expérimentales (enseignement des propriétés formelles de nature visuelle et des propriétés sémantiques [PVS], enseignement des propriétés formelles de nature visuelle [PV], aucun enseignement [C]), de la modalité d’entrainement des mots (lecture, écriture et lecture) et du temps de collecte des données (prétest, post-test immédiat, post-test différé) sur la réussite des élèves en orthographe au niveau sublexical.

Objectif spécifique 3 :

Comparer les effets des conditions expérimentales (enseignement des propriétés formelles de nature visuelle et des propriétés sémantiques [PVS], enseignement des propriétés formelles de nature visuelle [PV], aucun enseignement [C]) et du temps de collecte de données (prétest, post- test immédiat, post-test différé) sur la réussite des élèves selon les

phénomènes visuo-orthographiques ciblés.

En lien avec les deux premiers objectifs spécifiques, deux hypothèses de recherche sont formulées. Elles sont présentées à la page suivante. Comme le troisième objectif spécifique de recherche a une visée plus exploratoire, aucune hypothèse de recherche n’a été formulée.

Hypothèse de recherche 1 :

L’enseignement des propriétés formelles de nature visuelle et des propriétés sémantiques (PVS) favorise davantage le développement des connaissances orthographiques que l’enseignement des propriétés formelles de nature visuelle (PV).

Hypothèse de recherche 2 :

L’entrainement des mots à l’aide d’activité impliquant de la lecture et de l’écriture favorise davantage le développement des connaissances

orthographiques qu’un entrainement à l’aide d’activité impliquant de la lecture seulement.

Afin d’atteindre ces trois objectifs spécifiques, un protocole méthodologique de nature quasi expérimentale a été développé. Ce protocole est décrit au chapitre suivant.

3 Méthodologie

Les concepts définis dans le cadre conceptuel et la critique des études empiriques ont permis de faire les choix méthodologiques qui semblaient les plus pertinents pour mesurer l’efficacité des pratiques d’enseignement favorisant le développement de la compétence en orthographe.

Pour atteindre nos objectifs spécifiques de recherche, un plan de recherche quasi expérimentale a été privilégié pour évaluer l’efficacité des pratiques d’enseignement de l’orthographe. La recherche quasi expérimentale se caractérise notamment par la présence d’un prétest et d’un ou plusieurs post-tests. L’évaluation réalisée avant et après l’intervention a permis d’évaluer les gains effectués en matière d’apprentissage associés à chaque condition expérimentale d’enseignement et à chaque condition d’entrainement.

Même si l’affectation des participants n’est pas effectuée aléatoirement entre les différentes conditions, le plan de recherche quasi expérimentale permet tout de même d’inférer un certain nombre de liens entre la variable indépendante (les pratiques d’enseignement) et la variable dépendante (les apprentissages effectués selon la nature de l’analyse menée). Ce type de plan présente donc l’avantage d’avoir une très forte validité écologique. Considérant que la composition des classes reste intacte, une certaine contamination est évitée par le biais des contacts quotidiens entre les élèves d’un même groupe qui auraient été assignés à deux conditions différentes.

Pour la réalisation de l’ensemble de cette recherche doctorale, un certificat d’éthique a été délivré par le Comité plurifacultaire d’éthique de la recherche (CPÉR) de l’Université de Montréal (annexe 1).

La première partie de ce chapitre est consacrée à la présentation des participants à cette étude. Le déroulement de la collecte de données et les épreuves permettant de mesurer les différentes variables en jeu dans cette recherche sont décrits dans la deuxième partie. La troisième partie de ce chapitre est dédiée à la description du traitement des données en fonction des objectifs de recherche.