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Synthèse de l’analyse des controverses .1Cinq dimensions de questionnement.1Cinq dimensions de questionnement

Analyse des controverses

4.3 Synthèse de l’analyse des controverses .1Cinq dimensions de questionnement.1Cinq dimensions de questionnement

Pour rendre compte de la diversité des objets de préoccupation, nous avons distingué cinq catégories de questionnements. Ces cinq catégories sont des axes autour desquels nous paraissent s’articuler les discussions sur les nanosciences et les nanotechnologies. Nous ne prétendons pas que ces rubriques constituent la seule catégorisation permettant de démêler les débats sur les nanosciences et les nanotechnologies. Elles permettent cependant de couvrir de manière exhaustive les différents objets de débats que nous avons repérés dans notre travail d’analyse des controverses.

Ces cinq dimensions sont les suivantes :

– Les questions sanitaires et environnementales suscitées par l’utilisation des nanoparti-cules et nanomatériaux ;

– Les questions ouvertes par les nouvelles perspectives pour la médecine et les question-nements sur l’homme et le vivant ;

– La possible mise en danger des libertés individuelles par la prolifération de dispositifs communicants miniaturisés ;

– Les rapports entre développements technoscientifiques et démocratie ;

– Les interactions entre enjeux économiques, sociaux et géostratégiques, et développe-ments scientifiques et technologiques.

Ces dimensions de questionnements ne sont pas toutes de même nature. Les trois premières, (questions sanitaires et environnementales, nouvelles perspectives pour la médecine et ques-tionnements sur l’homme et le vivant, et mise en péril des libertés individuelles) regroupent des interrogations éveillées par des caractéristiques propres à des objets que certains acteurs considèrent comme relevant des nanosciences et des nanotechnologies.

Ces trois premières dimensions peuvent être considérées indépendamment les unes des autres, tout en étant mises en regard avec les deux dernières (rapport entre développements technoscientifiques et démocratie et interactions entre enjeux économiques, sociaux, géostra-tégiques et développements scientifiques et technologiques). Ces deux dernières dimensions se nourrissent en effet et alimentent les trois premières dimensions. Elles ne se conçoivent qu’en interaction avec elles et interrogent la manière dont le programme de recherche et d’innovation des nanotechnologies est développé en société.

Nous allons à présent détailler les interrogations dissimulées derrière chacun de ces cinq volets de préoccupation, en commençant par les questions sanitaires et environnementales suscitées par la production rationnalisée et à grande échelle de nanoparticules et de nanoma-tériaux.

4.3.2 Les questions sanitaires et environnementales suscitées par les nano-particules et nanomatériaux

Nanoparticules et nanomatériaux sont au centre d’une série de questionnements portant notamment sur la dangerosité potentielle de ces produits pour l’homme comme pour l’envi-ronnement.

Nombreux sont les acteurs qui s’en préoccupent (associations de protection de l’environ-nement : Amis de la Terre, APPA, FIDEA, FNE, ORDIMIP, SEPANSO ; industriels : ANIA, FEBEA, UIC, MEDEF, EpE ; organismes de recherche : CNRS-CEA, INSERM ; toutes les agences d’expertises ; tous les syndicats de salariés et les associations de consommateurs ; toutes les sociétés savantes ; Associations citoyennes : VivAgora, CENG, Fondation Sciences Citoyennes, Sciences et Démocratie ; Conseils économiques et sociaux : CESE, CES de Bretagne, mais aussi Les Verts, l’AFNOR...).

Parmi eux, plusieurs acteurs de l’expertise ont mené et continuent d’effectuer des études pour évaluer leur toxicité (IReSP, INERIS, INRS, AFSSET, AFSSA), leur écotoxicité (INERIS), mais aussi leurs risques d’explosion (INERIS).

Au travers de ce paragraphe, nous allons d’abord revenir sur les travaux visant à évaluer la dangerosité des nanoparticules et des nanomatériaux. Nous examinerons ensuite ce que disent les différents acteurs de l’évaluation des expositions des personnes aux nanoparticules et aux nanomatériaux. Enfin, nous nous intéresserons aux pistes de régulation proposées dans ces cahiers d’acteurs pour protéger les travailleurs et les consommateurs.

4.3.2.1 Des travaux pour évaluer la dangerosité des nanoparticules et

nanoma-tériaux

Des travaux sur l’écotoxicité des nanoparticules et des nanomatériaux

Des travaux sur l’impact des nanoparticules et des nanomatériaux sur

l’envi-ronnement L’INERIS rapporte que les questionnements relatifs à l’impact des

nanoparti-cules et des nanomatériaux sur l’environnement concernent la réactivité des nanopartinanoparti-cules et leur capacité à s’agréger suivant les caractéristiques physico-chimiques des milieux. Cet

institut explique que les connaissances en la matière demeurent actuellement limitées aussi bien pour ce qui concerne l’écotoxicité que le devenir de ces composés dans l’environnement. Pour sa part, l’Académie des Technologies expose quelles sont les difficultés auxquelles se heurtent justement les personnes effectuant des recherches pour évaluer le comportement des nanoparticules dans l’environnement :

Il reste extrêmement difficile d’évaluer ces risques pour l’environnement, car ils dépendent du genre de particule, du contexte dans lequel elle se trouve, de sa quantité, des évolutions physico-chimiques ou biologiques dans les différents éco-systèmes. Certaines nanoparticules peuvent réagir avec leur environnement et évo-luer suivant une histoire difficilement prévisible du fait des constantes de temps à prendre en considération pour leur environnement (effet sur plusieurs générations pour la faune et la flore). (Cahier d’acteurs de l’Académie des Technologies)

Certaines associations de protection de l’environnement font toutefois état d’études montrant que certaines nanoparticules et nanomatériaux pourraient avoir des effets délétères sur l’envi-ronnement. Ainsi la SEPANSO, se référant à un document produit par le Bureau Européen de l’Environnement, estime que la preuve est faite que les nanoparticules d’argent sont toxiques pour l’environnement. De leur côté, les Amis de la Terre mentionnent dans leur cahier d’ac-teurs des données mises en avant par l’observatoire des micro et des nanotechnologies sur les conséquences de l’exposition de certains poissons à des nanoparticules. Il semblerait que ces nanoparticules pourraient fixer et transporter des substances toxiques, altérer la capacité respiratoire de certaines espèces ou encore avoir des effets sur le développement embryonnaire. Les Amis de la Terre rapportent aussi les résultats des travaux d’une équipe de l’université américaine de Clemson montrant que des plants de riz exposés à des nanoparticules carbonées pouvaient subir des dommages importants.

Des inconnues sur le devenir des nanoparticules lors du retraitement des

dé-chets Deux associations de défense de l’environnement, la SEPANSO et l’ORDIMIP,

re-viennent aussi sur la question de la gestion des déchets contenant des nanoparticules. Pour la SEPANSO, les solutions proposant d’incinérer les déchets contenant des nanomatériaux n’ont pas prouvé leur innocuité. De plus, cette association souligne en s’appuyant sur un document produit par le Bureau Européen de l’Environnement, que les plans de retraitement des déchets dangereux ne tiennent pas compte du cas particulier des nanoparticules.

L’analyse de la situation proposée par l’ORDIMIP concorde avec ces éléments avancés par la SEPANSO.

En passant en revue des filières de retraitement actuelles des déchets, l’ORDIMIP distingue trois catégories de déchets :

- ceux des poubelles des laboratoires et des industriels ; - ceux qui se trouvent dans les poubelles des ménages ; - les déchets liquides.

Pour chacune de ces catégories, l’ORDIMIP pointe l’absence de prise en compte des nano-particules et l’absence de connaissances sur le devenir des nanonano-particules dans les différentes filières de retraitement des déchets (incinération des ordures, retraitement des eaux usées...). Par exemple, en ce qui concerne le traitement des nanoparticules contenues dans les ef-fluents liquides, l’ORDIMIP souligne les multiples zones d’ombre :

on peut penser que, déjà, des nanoparticules transitent par les réseaux de col-lecte et atteignent les stations d’épuration urbaines et de traitement des eaux in-dustrielles mais les traitements en place n’ont pas été étudiés pour retenir ces nano-objets. Sont-ils arrêtés ? Passent-ils à travers les mailles des filets étudiées pour des objets plus volumineux ? Finissent-ils dans les boues ? (Cahier d’acteurs de l’ORDIMIP)

De même en ce qui concerne l’incinération des ordures ménagères, l’ORDIMIP indique que le devenir des nanoparticules lors de la combustion est largement inconnu. Cette organisation s’interroge alors : les systèmes de filtration des fumées sont-ils efficaces ? Quel est le devenir des nanoparticules dans les résidus solides issus de l’incinération ? A ce propos, l’ORDIMIP souligne d’ailleurs :

Il n’y a, aujourd’hui, aucun protocole de prise en compte des nanoparticules dans les mâchefers qui sont utilisés en sous couche routière et donc en contact avec le milieu naturel. (Cahier d’acteurs de l’ORDIMIP)

L’Académie des Sciences revient également brièvement sur la question de la gestion des dé-chets. Comme l’ORDIMIP, cette société savante considère que la récupération de nanoparti-cules doit faire l’objet de recherches. En revanche, pour l’Académie des Sciences, leur élimina-tion par combusélimina-tion ou pour former des matériaux massifs (oxydes, métaux, semiconducteurs) peut se faire en utilisant des procédés classiques (chauffage, hydrolyse, ...).

Des travaux sur les risques d’explosion L’INERIS souligne aussi le caractère lacunaire

des connaissances sur les risques d’explosion des nanopoudres. Face à la diversité des nano-particules existantes, cet institut centre ses travaux sur celles qui sont produites dans des tonnages importants. Par ailleurs, l’INERIS met l’accent sur l’impossibilité d’extrapoler le comportement des nano-poudres à partir de celui des micro-poudres. Il souligne aussi la né-cessité de développer une instrumentation adaptée pour disperser les poudres, ainsi que des nouvelles techniques de caractérisation.

Cet accent sur l’importance de mettre au point des techniques de caractérisation des nano-objets et sur l’impossibilité d’extrapoler leur comportement à partir de celui des micro-nano-objets est aussi mis en avant à propos des effets de ces nanomatériaux et nanoparticules sur la santé et de l’évaluation de l’exposition des individus.

Des travaux sur la toxicité pour l’homme des nanoparticules et des nanomatériaux

Des effets possibles sur la santé mais peu de données disponibles Des résultats

d’études portant sur les effets des nanomatériaux sur la santé sont répertoriés par des acteurs de l’expertise comme l’INERIS, l’IReSP et l’INRS, mais aussi par Les Verts, les Amis de la Terre, la SEPANSO, ou encore par des industriels comme la FEBEA. Ces résultats pointent souvent la nocivité des nanoparticules étudiées19, mais ce qui ressort des contributions des différents acteurs de l’expertise, c’est aussi le caractère lacunaire des connaissances actuelles sur la dangerosité des nanoparticules.

L’AFSSA (dont les travaux sont également cités par le CES de Bretagne), qui s’est inté-ressée à la toxicité des nanoparticules ingérées par voie orale, rapporte que seules quelques études ont été menées sur ce sujet, essentiellement avec des métaux ou des oxydes de métal comme le sélénium, le cuivre ou le zinc. D’après l’AFSSA, les résultats inventoriés sont sou-vent discordants et ne permettent pas de conclure à un effet de dose, à un effet de taille ou à une relation entre les caractéristiques physico-chimiques de la particule et la toxicité.

L’INRS de son côté mentionne qu’il a été montré que dans certaines conditions expérimen-tales, certaines nanoparticules sont capables de franchir les barrières biologiques et de migrer vers d’autres sites de l’organisme. C’est aussi ce que rapporte l’association de protection de l’environnement, la SEPANSO qui s’appuie sur les propos d’un professeur d’épidémiologie à l’université de Bordeaux.

Pour sa part, l’IReSP explique que certaines nanoparticules, dans certaines conditions, semblent avoir des effets toxiques. Il cite

19. Sauf notamment pour la plupart des résultats d’études sur le dioxyde de titane mis en avant par la FEBEA et certains résultats obtenus par l’INERIS.

“la génération d’un stress oxydant, des effets inflammatoires et pro-thrombiques, la possibilité de survenue de fibrose ou d’emphysème pulmonaire, ou des dommages génétiques”(Cahier d’acteurs de l’IReSP).

L’IReSP indique aussi que les organes cibles mis en évidence sont principalement les appareils respiratoires et cardiovasculaires.

Les Amis de la Terre se réfèrent eux, dans leur cahier d’acteurs, à un numéro de 2008 d’une revue, Toxicological Sciences, faisant le point sur les études disponibles concernant la toxicité des nanoparticules. Ils soulignent que certains de ces composés pourraient être nocifs :

“Par inhalation : les nanoparticules de dioxyde de manganèse, inhalées par le rat, se retrouvent dans les zones profondes du cerveau, provoquant un stress oxydatif qui peut altérer gravement les neurones et favoriser les maladies neurodé-génératives.

Par contact : une peau irritée ou présentant une plaie semble ne pas être une barrière efficace. Alors que des nanoparticules sont utilisées depuis plusieurs années dans les cosmétiques, comme par exemple le dioxyde de titane dans les crèmes solaires, on a “oublié” par exemple - ce qui est le comble! - que le TiO est photo-dépendant toxique et qu’il peut provoquer des cancers de la peau et du colon !

Enfin, l’ingestion : chez le rat, on a constaté que, via l’intestin, les nanoparti-cules touchent le système immunitaire. Le tissu lymphoïde déclenche des réactions de défense exacerbées entrainant des réponses inflammatoires et un stress cellulaire avec son panel d’altérations susceptibles de provoquer des maladies graves -cancers, allergies, troubles neurodégénératifs.-” (Cahier d’acteurs des Amis de la Terre)

Les Amis de la Terre s’intéressent aussi au cas particulier des nanotubes de carbone. Ils citent les propos d’une directrice de recherche de l’INSERM sur leur toxicité où elle fait état de travaux ayant mis en évidence des effets analogues à ceux des fibres d’amiante. Cette comparaison entre fibres d’amiante et nanotubes de carbone est fréquente. Elle figure ainsi par exemple dans le cahier d’une autre association de protection de l’environnement la SEPANSO, dans celui de l’association de consommateurs Familles Rurales ou encore dans le document du syndicat UNSA.

De son côté, l’INERIS, dont certains membres ont travaillé sur la toxicité de certains types de nanotubes de carbone lors d’expositions par inhalation, rapporte que, dans les conditions expérimentales où ils s’étaient placés, ses chercheurs n’ont pas relevé d’effets inquiétants.

L’INERIS travaille sur les nanotubes de carbone, l’un des nanomatériaux les plus prometteurs en terme d’applications industrielles. Dans les conditions expé-rimentales utilisées à l’Institut (instillation intra-trachéale chez l’animal), les na-notubes de carbone ne franchissent pas de façon décelable la barrière pulmonaire au-delà des ganglions. Il n’a été mis en évidence ni inflammation, ni augmenta-tion des teneurs en collagène du poumon jusqu’à six mois après l’exposiaugmenta-tion, ce qui laisse supposer une absence de fibrose. (Cahier d’acteurs de l’INERIS).

Cet institut de recherche se montre cependant circonspect et pointe les limites des protocoles expérimentaux mis en œuvre.

Il convient néanmoins d’être prudent car ces résultats ne s’appliquent qu’aux nanotubes de carbone étudiés par l’INERIS dans la gamme de doses administrées. Or ces nanotubes sont extrêmement variés en taille, diamètre, impuretés métal-liques et post-traitement éventuels. Des analyses complémentaires seront donc né-cessaires pour définir précisément la pénétration dans l’organisme et la toxicité des nanotubes de carbone. (Cahier d’acteurs de l’INERIS)

Par ailleurs, la SEPANSO fait allusion à des travaux anglais publiés dans un numéro de Nature Nanotechnology datant de 2009, sur les effets des nanoparticules sur l’ADN. Les résultats de

cette recherche sont mis en avant par cette association pour justifier ses réserves vis-à-vis de la manière dont sont actuellement utilisés les nanomatériaux.

L’INRS, l’INERIS et l’IReSP mentionnent aussi que les particules nanométriques pour-raient être plus toxiques que des particules de taille supérieure et de même nature chimique. Ces trois organismes soulignent cependant le peu de données disponibles.

Des difficultés pour évaluer la toxicité des nanoparticules et des nanomatériaux

Les agences d’expertises travaillant sur la toxicité des nanoparticules et des nanomatériaux rencontrent en effet plusieurs difficultés pour évaluer la dangerosité pour la santé de ces composés.

D’abord, selon l’INRS, dans le cas des nanoparticules, l’approche classique en toxicologie ou en pharmacologie qui s’appuie sur l’existence de relations dose-effet avec une dose exprimée en masse est insuffisante. Il semblerait en effet que, pour ces objets, différents paramètres autres que la masse et la composition chimique, jouent sur la toxicité. L’INRS estime ainsi que la taille, le nombre et la forme des particules, leur surface, leurs propriétés chimiques de surface ou encore, leur état d’agrégation pourrait avoir une influence sur les effets des nanoparticules.

L’Académie des Technologies indique aussi :

On a montré également que les effets toxiques des nanoparticules dépendent de nombreux facteurs comme leur nature chimique, leur forme, la rigidité ou la flexibilité des particules, ainsi que des doses inhalées ou ingérées. (Cahier d’acteurs de l’Académie des Technologies)

Pour l’INRS comme pour l’IReSP, étant donné la multiplicité des nanoparticules, les difficultés pour évaluer la dangerosité des nanoparticules sont considérablement accrues. L’IReSP et l’AFSSA pointent ainsi notamment que les auteurs des études disponibles ne précisent pas toujours les caractéristiques des nanomatériaux ou des nanoparticules de manière exhaustive. Ceci rend, pour l’IReSP, ces différents travaux difficilement exploitables et comparables.

Ensuite, d’après l’INRS, les études réalisées sont peu nombreuses et elles sont menées exclusivement sur des cellules de culture ou in vivo sur des animaux. L’INRS explique que par conséquent, leurs résultats sont difficilement extrapolables à l’être humain. Il faudrait de plus pouvoir, selon l’INRS, examiner la toxicité des différents nano-objets en fonction des différentes voies d’exposition (respiratoire, cutanée, digestive).

Enfin, d’après l’AFSSA, les protocoles expérimentaux utilisés sur les animaux pour évaluer la toxicité des nanoparticules lors d’expositions par voie orale reproduisent mal les conditions réelles d’exposition des consommateurs.

Tous les acteurs de l’expertise ayant fourni un cahier d’acteurs et travaillant à évaluer la toxicité potentielle des nanomatériaux (IReSP, INERIS, INRS, AFSSA, AFSSET) se montrent donc extrêmement prudents. Ils pointent les limites de leurs connaissances en même temps que l’étendue des incertitudes sur la nocivité de ces produits. Face au peu de connaissances disponibles, l’AFSSA et l’AFSSET recommandent d’ailleurs la prudence et appellent à limiter les expositions aux nanoparticules et aux nanomatériaux.

Certaines nanoparticules et certains nanomatériaux sont toutefois utilisés industrielle-ment et dans des tonnages importants. Syndicats (CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO, UNSA) et associations de consommateurs (Afoc, CLCV, Familles Rurales, Indecosa-CGT) soulignent d’ailleurs dans leurs cahiers que les“nanotechnologies font d’ores et déjà partie de notre envi-ronnement” pour reprendre la formulation qu’emploient FO et l’Afoc.

Pour l’Union des Industries Chimiques, ces nanomatériaux utilisés à grande échelle depuis plusieurs dizaines d’années ont fait l’objet d’études et ces travaux n’ont, selon cette organisa-tion, pas mis en évidence que ces composés seraient dangereux. Le MEDEF et l’association

Entreprises pour l’Environnement indiquent aussi que les nanomatériaux utilisés largement depuis plusieurs années ont déjà fait l’objet d’évaluations et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter de leur toxicité.

C’est ce qu’affirme également la Fédération des Entreprises de la Beauté pour le cas du dioxyde de titane utilisé dans les crèmes solaires sous forme nanométrique depuis de nombreuses années. Concernant ce cas particulier, la Fédération des Entreprises de la Beauté met en avant les résultats des études qui ont porté sur la dangerosité du dioxyde de titane en contact avec la peau. Elle souligne que sous forme nanométrique, le dioxyde de titane ne passe pas sous la barrière cutanée. Cette Fédération cite toutefois aussi d’autres études sur les rats portant sur les risques par inhalation qui tendent à montrer que le dioxyde de titane pourrait être cancérigène. Elle temporise alors en mentionnant qu’une seule étude chez l’homme semble indiquer que l’exposition au dioxyde de titane pourrait être un facteur de surmortalité par cancer du rein ou du poumon. Finalement la FEBEA rappelle que le dioxyde de titane a été déclaré comme un ingrédient sûr pour les cosmétiques et rapporte que la commission européenne continue d’évaluer ce composé sous forme nano.

Si ces acteurs du monde de l’industrie ayant proposé un cahier d’acteurs estiment que les nanoparticules et nanomatériaux déjà produits à l’échelle industrielle ne posent pas de problème particulier, l’UIC, le MEDEF et la FEBEA n’écartent cependant pas le fait que certains nanomatériaux et nanoparticules pourraient se révéler toxiques pour l’homme et