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Depuis 2009, les AOD, auparavant nommés NACO, sont commercialisés aux côtés des AVK jusque-là seuls anticoagulants oraux. Trois après, l’Assurance Maladie a réalisé une étude à partir des données du SNIIRAM et du Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information (PMSI) [17] afin de faire un état des lieux des prescriptions d’anticoagulants en France suite à l’arrivée de ces nouveaux anticoagulants. Elle met ainsi en lumière une perturbation dans l’évolution de la prescription des AVK dans la période observée.

Les analyses suivantes concernent la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013 (Figure 7).

Figure 7 Evolution des effectifs de patients débutant un traitement par AOD ou AVK (Source: SNIIRAM, France entière, données Tous régimes)

A partir du premier trimestre 2012, on constate :

 une baisse de la prescription des AVK concomitante avec l’augmentation de la prescription des AOD.

 une hausse du switch AVKAOD (près de 100 000 patients sont concernés sur la période observée).

 une importante baisse des prescriptions en première intention des AVK A partir de la fin d’année 2012, on constate :

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nombre de patients switchés en 10 mois : on passe de 40 000 à environ 15 000 patients)

 une légère augmentation du switch AODAVK (ce switch reste pour autant faible, à peine 5 000 patients sous AOD sont concernés).

A partir du premier trimestre 2013, on constate :

 une diminution de la prescription en première intention des AOD. Au troisième trimestre 2013, on constate :

 un nombre quasiment aussi important de prescription en première intention d’AOD que d’AVK (55 000 patients environ pour les AOD contre 60 000 pour les AVK). Pendant la période observée, l’Assurance Maladie recense 235 000 patients sous AOD versus près de 252 000 patients sous AVK.

Au début de la période observée, l’augmentation du nombre de patients concernés par les AOD en première et seconde intention pourrait s’expliquer dans un premier temps par la facilité apparente de leur usage : pas de contrôle de routine, pas de changement de posologie.

La baisse par la suite des prescriptions d’AOD en première et seconde intention témoigne, d’après l’Assurance Maladie, de l’effet conjugué des actions de sensibilisations de l’ANSM, la HAS et l’Assurance Maladie auprès des médecins concernant les AOD.

S’agissant des changements de traitement, la HAS et l’ANSM ont indiqué qu’il n’existe pas d’argument pour modifier le traitement d’un patient stabilisé sous AVK. Un exemple pour illustrer ce propos est l’étude française réalisée du 1er janvier 2011 au 30 novembre 2012 qui ne relève aucune différence concernant le risque hémorragique chez un patient en FA non valvulaire sous AVK et chez un patient « switcher » AVKAOD.

A cette même période de référence, l’Assurance Maladie recense un nombre de patients ayant bénéficié du remboursement d’un AVK bien supérieur à celui d’un AOD : plus d’1 million de patients suivaient un traitement par AVK en France contre 265 000 sous AOD. Les AOD devraient donc être réservés aux patients pour lesquels :

 INR difficile à maintenir dans la zone thérapeutique malgré une observance correcte,

 En cas de contre-indication,

 En cas de mauvaise tolérance,

 En cas de refus des contraintes, ou d’impossibilité à les assumer, liées à la surveillance de l’INR.

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I.5

Effets indésirables

I.5.A Origines et panorama actuel

Les héparines et les AVK sont des médicaments emblématiques de l’iatrogénèse. En effet, il faut remonter à l’Antiquité pour les AVK et aux années 1950 pour les héparines pour commencer à écrire l’histoire de leurs effets indésirables : hémorragie, thrombose et thrombopénie induite par héparine.

 Début 1900 : L’histoire de la découverte des AVK montre qu’ils étaient un poison à

l’origine de troupeaux de bovins décimés par des complications hémorragiques, puis un raticide, avant d’être des médicaments.

L’histoire de la médecine et de la pharmacopée depuis l’antiquité connait l’ambivalence de toute substance possédant une puissante action pharmacologique : la dose fait le poison.

 1948 : Observation de plaquettes sous héparine non fractionnée.

 1958 : Embolies artérielles, « caillots blancs » pendant un traitement IV d’héparine.

 1994 : Découverte des anticorps dirigés contre le complexe facteur plaquettaire 4- héparine.

 1996 : Gangrène veineuse et rôle [18].

 2007 : Les AVK sont à l’origine de la plus forte incidence d’hospitalisation pour effets indésirables en France. Ils représentaient 12,3% des hospitalisations pour effet indésirable médicamenteux soit 17 701 hospitalisations par an en 2007 [19].

Il existe également un risque potentiel de mésusage et donc d’accidents iatrogéniques avec l’utilisation des AOD, en raison :

- De leur nouveauté,

- Des dosages différents en fonction des indications en traitement prophylactique ou curatif, - De l’absence de surveillance biologique (pouvant impliquer une moins bonne observance et une moins bonne surveillance),

- Des risques hémorragiques associés à l’insuffisance rénale, à l’âge et un faible poids corporel,

- De l’élargissement possible des indications compte-tenu de la facilité d’emploi des médicaments.

En 2011, l’Enquête Nationale sur les Effets Indésirables (ENEIS) 1 et 2 a mis en évidence que les anticoagulants, dont les AVK sont la première classe pharmacologique, arrivent en France

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au premier rang des médicaments responsables d’accidents iatrogènes graves : hémorragie et thrombose (37% en 2004 et 31% en 2009 des évènements indésirables graves rapportés liés au médicament) [11].

Parmi les facteurs associés à ce risque élevé on peut citer le fait qu’en moyenne, le temps passé dans la zone thérapeutique n’excède jamais plus de 65%, même dans les études randomisées les plus récentes. Autrement dit, pendant près de 40% du temps passé sous traitement, le patient est soit à risque de thromboses car pas suffisamment anticoagulé, soit à risque hémorragique car trop anticoagulé.

Pour ces raisons, une surveillance thérapeutique de l’INR est nécessaire et l’ANSM est ainsi particulièrement vigilante à la surveillance des nouvelles molécules (AOD) car l’absence de surveillance biologique de routine augmente le risque iatrogène. De même une surveillance étroite des plaquettes lors d’un traitement sous héparine est nécessaire pour prévenir ou enrayer au plus vite le risque de TIH.

Il y a donc trois principaux risques auxquels est exposé un patient traité par anticoagulant : l’hémorragie dans un cas de surdosage, la thrombose dans un cas de sous-dosage et la TIH en cas de chute importante des plaquettes lors d’un traitement sous héparine.

I.5.B Accidents hémorragiques

Le risque majeur et le plus fréquent des anticoagulants est le risque hémorragique.

Le risque d’accident hémorragique est maximal durant les premiers mois du traitement. La surveillance doit donc être particulièrement rigoureuse durant cette période, en particulier lors du retour à domicile d’un patient hospitalisé.

La survenue d’une hémorragie peut être spontanée ou traumatique, associée ou non à un surdosage. Selon l’ANSM, elle peut être qualifiée de grave ou potentiellement grave si l’un des critères suivant est relevé [20]:

- Hémorragie extériorisée non contrôlable par les moyens usuels,

- Instabilité hémodynamique : Pression Artérielle Systolique (PAS) < 90mmHg ou diminution de 40mmHg par rapport à la PAS habituelle, ou Pression Artérielle Moyenne (PAM) < 65mmHg, ou tout signe de choc,

- Nécessité d’un geste hémostatique urgent : chirurgie, radiologie interventionnelle, endoscopie,

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- Localisation menaçant le pronostic vital ou fonctionnel (hémorragie intracrânienne, intraoculaire, hémothorax, hématome musculaire profond, hémorragie digestive aigue…). Si aucun de ces critères n’est présent, l’hémorragie est qualifiée de non grave.

On peut distinguer deux catégories d’hémorragie : - Hémorragie externe

- Hémorragie interne, plus difficile à mettre en évidence car le saignement n’est pas extériorisé.

Nous allons donc citer les différents signes annonciateurs qui doivent rendre le patient vigilant et faire suspecter une hémorragie [21].

Le premier signe, et commun aux deux types d’hémorragies dans le cadre d’un traitement par AVK, est bien entendu un INR supérieur à la normale haute fixée par le médecin.

Il est important de dire au patient que dans une situation comme dans l’autre, il doit rapidement contacter un médecin (le cas échéant aller aux urgences les plus proches) qui prendra les mesures nécessaires, dont une prise de sang pour déterminer la valeur de l’INR.