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6.4 Travail réel de l’infirmière

6.4.4.3 Suivi de réévaluation

Un suivi de réévaluation est effectué dans la grande majorité des parcours de la clientèle MA-TNCM analysés et observés lors de cette étude. Le plus souvent, c’est l’infirmière qui procède à la première rencontre de réévaluation qui se tient normalement six mois après l’annonce du diagnostic. Par après, les rencontres de réévaluation suivantes sont espacées de six à douze mois, selon la situation. Ce suivi est parfois effectué en alternance entre le médecin et l’infirmière, d’autres fois, c’est cette dernière qui se charge de chaque réévaluation et le médecin rencontre le patient dans les jours suivants, lorsque nécessaire. Il arrive que ce soit le médecin qui établit le calendrier de suivi. Dans d’autres cas, le médecin et l’infirmière en discutent ensemble. Il arrive aussi que ce soit l’infirmière qui propose un délai de suivi au médecin ou encore qu’elle échange avec le patient de sa propre initiative entre les suivis initialement prévus. Ces variations peuvent être expliquées par plusieurs facteurs

comme le niveau de collaboration entre le médecin et l’infirmière, l’expérience de l’infirmière, son niveau d’initiative et la complexité de la situation clinique. Lorsque la situation est instable, la réévaluation peut se faire dans un délai plus court. Par exemple, lors des entretiens, une infirmière racontait suivre un patient en suivi conjoint avec le médecin tous les trois mois à cause d’une perte de poids et d’une situation précaire avec le proche aidant.

Comme dans le cas de l’évaluation initiale, la structure des suivis de réévaluation réalisés par les participantes de l’étude est similaire d’une infirmière à l’autre en ce qui a trait à la portion évaluative. Chaque suivi consiste en une rencontre en GMF d’une durée approximative de 60 minutes avec la personne atteinte et son proche. Encore une fois, lorsque la personne atteinte se présente seule au rendez-vous, l’infirmière demande toujours s’il est possible de joindre un proche pour compléter la réévaluation. Pour les assister dans leur collecte d’informations, toutes les infirmières participantes utilisent un des deux formulaires de réévaluation24 proposés dans la boîte à outils du CIUSSS de l’Estrie.

Les données recueillies auprès de la clientèle lors de cette rencontre sont semblables à celles obtenues lors de l’évaluation initiale. L’infirmière fait d’abord passer le MMSE, le test de l’horloge et parfois le MoCA à la personne atteinte. Si la situation le justifie, elle demande ensuite à l’aidant de remplir une seconde fois le même formulaire, celui déjà utilisé lors de l’évaluation initiale, ce qui lui permettra d’être informée des changements survenus depuis la dernière rencontre. Puis, elle recueille la perception du patient sur sa gestion des AVQ et AVD, sur ses fonctions cognitives ainsi que sur son état mental. Elle s’assure aussi que le milieu de vie de la personne atteinte est adéquat. Toutes les questions formulées par l’infirmière découlent des données recueillies dans les rencontres précédentes :

J’y vais de façon plus générale que l’évaluation initiale. Je pose les questions que je n’avais pas posées. Parce que ça dure moins longtemps, alors j’essaie de ne pas répéter les mêmes choses. Avant de rencontrer le patient, je révise toujours mon dossier. Je pars vraiment de ma dernière rencontre pour continuer. (Participante D) Si un patient prend une médication pour des troubles de la mémoire, l’infirmière en discute avec lui et communique avec le médecin ou la pharmacienne du GMF pour en organiser le renouvellement si cela est nécessaire :

Quand on veut renouveler la médication, nous on fait affaire avec les pharmaciennes. Comme ça, les médecins n’ont pas besoin de remplir les formulaires. Soit qu’on les appelle, soit qu’on va les voir ou soit qu’on leur envoie une tâche et elles font le renouvellement directement via la RAMQ sur internet. (Participante D)

Les infirmières participantes procèdent également à diverses interventions durant les rencontres de réévaluation, comme traiter des différentes thématiques associées au MA- TNCM (le diagnostic, les SCPD, la conduite automobile et les aspects médicaux-légaux et financiers). Cependant, les participantes n’abordent pas chacune de ces notions de manière systématique et détaillée. De plus, lorsqu’un problème est décelé, les infirmières participantes y réagissent de façons différentes. Par exemple, une des infirmières a rapidement décelé un comportement perturbateur d’un patient avec son proche, information qu’elle a tout simplement transmise au médecin traitant en lui demandant d’intervenir. Une autre, face à la même situation, a plutôt élaboré une description détaillée du comportement problématique et a proposé plusieurs pistes de solution pour améliorer la qualité de vie de la personne atteinte et du proche devant ce comportement. Elle a aussi demandé au proche aidant de communiquer avec elle si la situation persistait, et elle a finalement informé le médecin traitant de ses observations et de ses interventions. Dans ce cas, le médecin n’a pas eu à intervenir davantage. Cette variation dans les interventions de l’infirmière pourrait encore une fois être expliquée par une multitude de facteurs. Ces facteurs seront abordés à la section 6.5.4 portant sur les conditions associées aux écarts.

Dans un autre ordre d’idée, les infirmières participantes accordent une attention particulière aux besoins du proche durant ces rencontres. Elles s’assurent qu’il ne montre pas de signe d’épuisement, le font verbaliser, proposent des ressources et réaffirment leur disponibilité :

Souvent la principale chose à faire avec les aidants c’est de les écouter. C’est vrai, ils sentent qu’il a quelqu’un qui est là pour eux. (Participante G)

Finalement, les différents paramètres vitaux comme la tension artérielle, le pouls et le poids sont contrôlés par l’infirmière. Le poids est toujours comparé avec le dernier obtenu. Lorsqu’une perte de poids est observée, l’infirmière pose diverses questions pour documenter ce problème. Elle fait également de l’enseignement sur l’alimentation, comme

le fait de prendre le plat principal en premier, de prendre un supplément liquide protéiné et de prendre plusieurs petites collations :

Comme tous les patients en résidence, j’insiste auprès des patients et des proches aidant qu’il faut manger le plan principal en premier. On met de côté la soupe pour commencer. Parce que des fois, après ça, ils n’ont plus faim. (Participante C)

Plusieurs autres interventions infirmières ont été observées dans les différentes rencontres de suivi de réévaluation documentées dans cette étude. Elles sont présentées à l’annexe L.