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4. Le corégulateur transcriptionnel RIP140

4.2. Structure et fonctions in vitro

La protéine RIP140 (Receptor Interacting Protein of 140 kDa), également nommée NRIP1 (Nuclear Receptor Interacting Protein 1), est constituée de 1158 acides aminés. Il s’agit de l’un des premiers cofacteurs transcriptionnels à avoir été décrit. Le corégulateur transcriptionnel RIP140 a été mis en évidence dans des cellules de cancer du sein au travers de son interaction avec le domaine d’activation transcriptionnelle du récepteur des œstrogènes ERα (Cavaillès et al., 1995). Cette protéine possède la particularité d’être un coactivateur ou un corépresseur en fonction de son recrutement sur ses gènes cible (Castet et al., 2006). RIP140 interagit avec la plupart des récepteurs nucléaires, mais aussi avec de nombreux facteurs de transcription et des enzymes de modification des histones (L’Horset et al., 1996) (Nautiyal et al., 2013a). Le gène codant la protéine RIP140 est localisé en position q11.2 du chromosome 21 chez l’Homme. L’ensemble de la séquence codante de RIP140 est comprise dans un seul large exon et plusieurs exons non codants ont été identifiés dans la région 5’ du gène, jusqu’à 100 kb en amont du promoteur (Augereau et al., 2006a). La séquence de la protéine est relativement conservée entre les espèces (83% d’homologie entre les séquences humaine et murine). La protéine RIP140, exprimée de manière ubiquitaire, est localisée

majoritairement dans le noyau des cellules. Elle présente deux signaux de localisation nucléaire (NLS, Nuclear Localization Signal) en position 97 et 856, et neuf motifs riches en Leucine, de type LxxLL (Figure 27). Ces motifs correspondent à des séquences dont la structure en hélice α permet leur interaction avec les récepteurs nucléaires (L’Horset et al., 1996) (Augereau et al., 2006b). L’analyse de l’activité répressive de RIP140 a permis d’identifier quatre domaines répresseurs autonomes dont certains fonctionnent par liaison de protéines répressives additionnelles et/ou des enzymes de modification des histones. Le premier domaine répresseur est localisé entre les acides aminés 27 et 199 et agit par recrutement des histones désacétylases de classe I et II (HDAC), responsables de la compaction de la chromatine qui entraîne une répression de la transcription (Castet et al., 2004; Wei et al., 2000). Le deuxième domaine répresseur est compris entre les résidus 429 et 739 et interagit avec les protéines CtBP1 et 2 (C-terminal Binding Protein 1 et 2), qui à leur tour, peuvent recruter des HDACs (Castet et al., 2004; Christian et al., 2004; Vo et al., 2001a) (Figure 26).

Figure 26 Domaines répresseurs de RIP140

(Castet et al. 2004)

L’interaction entre RIP140 et les HDACs est modulée par des modifications post-traductionnelles. La phosphorylation de deux thréonines en position 202 et 207 augmente l’activité transrépressive de RIP140, en favorisant son interaction avec HDAC3 (Gupta et al., 2005; Huq et al., 2005). Des sites d’acétylation (4 dans le RD1 et 3 dans le RD2) ont été identifiés et l’hyperacétylation de RIP140 augmente son activité répressive (Huq and Wei, 2005). Cependant, l’acétylation de la lysine 446, au niveau du site de fixation des CtBPs inhibe cette interaction et diminue l’activité transrépressive de RIP140 (Vo et al., 2001b). De même, la méthylation des arginines en position 240, 650 et 948 semble diminuer l’activité corépressive de RIP140 par une diminution du recrutement des HDACs (Mostaqul Huq et al., 2006) (Figure 27).

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Figure 27 Modifications post-traductionnelles de RIP140

(Augereau et al. 2006)

Les domaines répresseurs 3 et 4, situés dans la région C-terminale de RIP140, respectivement entre les résidus 753 à 804 et 1118 à 1158, ne possèdent pas d’effecteurs clairement identifiés. Cependant, deux lysines, en position 756 et 1154, situées dans les domaines RD3 et RD4 respectivement, peuvent être SUMOylées de manière réversible par la protéine SUMO-1. Il semblerait que la SUMOylation de RIP140 affecte sa localisation nucléaire et l’activité répressive des domaines RD3 et 4, sans pour autant perturber sa stabilité (Rytinki and Palvimo, 2008).

Il a été démontré que RIP140 est capable de réguler l’activité transcriptionnelle des ERRs (ERR, Estrogen Receptor-Related Receptors), différemment en fonction des séquences cible des promoteurs (Castet et al., 2006). En effet, RIP140 est capable d’inhiber la transactivation par ERRα, β et γ de gènes rapporteurs naturels ou artificiels contenant différents types d’éléments de réponse. Cette inhibition est corrélée à la liaison, observée in vitro, entre RIP140 et les trois isoformes ERR. Alors que RIP140 inhibe la transactivation du récepteur α des hormones thyroïdiennes (TRα) par ERRβ, il l’augmente au travers d’ERRα et ERRγ. Le promoteur du TRα contient des sites Sp1 et il a été démontré que RIP140 régule positivement la transactivation, par les ERR, d’autres cibles connues des facteurs Sp1, comme le gène p21, où les histones désacétylases interviennent. Il semblerait que le fort recrutement des HDACs

par RIP140 lui permette de déréprimer ce promoteur par une titration de ces enzymes. De manière équivalente, il a été démontré que l’activation du promoteur p21 par p53, implique la dissociation d’HDAC1 de l’extrémité C-terminale de Sp1, pour permettre la formation du complexe activateur Sp1-p53.

RIP140 est capable d’inhiber l’activité transcriptionnelle dépendante du facteur AP-1, induite par les œstrogènes, indépendamment du recrutement des HDACs. En présence d’œstradiol (E2), le récepteur ERα favorise la transcription déclenchée par la protéine activatrice AP-1 (Activator Protein 1). Cette induction est permise par l’interaction directe entre le facteur de transcription c-Jun et ERα qui stabilise un complexe multiprotéique contenant le coactivateur GRIP1 (Glucocorticoid Receptor Interacting Protein 1). RIP140 se lie à c-Jun et forme un complexe multiprotéique avec ERα. L’effet négatif de RIP140 est inhibé par la surexpression du coactivateur GRIP1. Les deux cofacteurs entrent en compétition pour se lier à c-Jun et ERα et leurs niveaux d’expression respectifs peuvent permettre de déterminer l’efficacité de l’E2 dans la stimulation des gènes, sous contrôle du facteur AP-1 (Teyssier et al., 2003).

La tumorigenèse du sein et de l’ovaire est liée à une altération de l’équilibre entre les récepteurs ERα et ERβ. Une expression ectopique d’ERβ inhibe les effets mitogènes et les réponses transcriptionnelles induites par l’E2 et augmente la formation d’hétérodimères ERα/ERβ. RIP140 est un répresseur transcriptionnel majeur d’ERα, mais son interaction avec ERβ est également importante. Le recrutement de RIP140 sur un rapporteur ERE (Estrogen

Response Element) est augmenté lors de la surexpression d’ERβ et l’activité d’ERβ est plus

sensible à la répression par RIP140. Une diminution de l’expression de RIP140 inhibe les effets répressifs du récepteur ERβ activé. Ces résultats illustrent le rôle clé de RIP140 dans les effets inhibiteurs d’ERβ sur la signalisation œstrogénique dans le cancer de l’ovaire (Docquier et al., 2013).

Les facteurs de transcription E2Fs sont connus pour leurs rôles majeurs dans le contrôle du cycle cellulaire, la réplication, l’apoptose, la différenciation cellulaire (Iaquinta and Lees, 2007) et par voie de conséquence, la tumorigenèse (Chen et al., 2009). Le facteur E2F1 est capable d’induire l’apoptose de manière dépendante ou non de p53 (Wu et al., 2009). Il a été démontré que RIP140 réprime la transactivation du facteur E2F1 et inhibe l’expression de plusieurs gènes cible d’E2F1 (Docquier et al., 2010). L’analyse de tumeurs de cancers du sein, a mis en évidence que de faibles niveaux d’expression de RIP140 étaient corrélés à de hauts niveaux d’expression des gènes cible du facteur E2F1. Cette régulation est complexe car RIP140 est également un gène cible d’E2F1. L’expression de RIP140 est finement régulée au

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cours du cycle cellulaire, augmentant jusqu’à 5 fois lors des transitions G1/S et G2/M. Le promoteur de RIP140 contient des éléments de réponse E2Fs et son activité est augmentée par la surexpression des facteurs E2F1/DP1. Cette régulation positive implique les facteurs de transcription Sp1 et s’accompagne du rétrocontrôle négatif exercé par RIP140. E2F1 participe à l’induction de RIP140 au cours de la différenciation des adipocytes, permettant d’expliquer certains des effets des facteurs E2F1 dans les cancers et les maladies métaboliques (Docquier et al., 2012).