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Structure des champs récepteurs des cellules ganglionnaires

Chapitre 5 Démosaïçage généralisé et implications pour le système visuel humain 105

4.1 Structure des champs récepteurs des cellules ganglionnaires

4.1.1 Cellules ganglionnairesmidget

Une inhibition latérale pour des supports fréquentiels disjoints

D’après notre modèle par estimation de la chrominance, les basses fréquences d’intensité

doivent être retranchées de l’image afin de laisser de la place en bande de base pour la

chromi-nance avant que l’image ne soit transmise au cortex (Figure5.22). Si l’on appelleIm l’image

à la sortie des photorécepteurs,I

LGN

l’image arrivant au corps genouillé latéral et f un filtre

passe-bas, cette opération cela s’écrit :

I

LGN

=I

m

−I

m

∗f

De manière équivalente, en factorisant :

I

LGN

=Im∗(δ−f) (5.26)

Ainsi, à la sortie de la rétine, le champ récepteur des cellules ganglionnairesmidgetdoit être de

la formeδ−f. Or, comme f est un filtre passe-bas à gain unitaire, sa réponse impulsionnelle

aura une amplitude faible. Ainsi le photorécepteur central présentera une contribution positive

prépondérante, tandis que les photorécepteurs voisins présenteront une inhibition moins forte

(Figure5.23). On a donc bien une structure de la forme centre/pourtour, cohérente avec les

ob-servations électrophysiologiques. De plus, il est intéressant de remarquer que dans notre modèle

le champ récepteur périphérique ne présente pas de sélectivité vis-à-vis des classes de cônes.

Cette sélectivité des connexions n’est pas nécessaire au niveau de la rétine, mais elle doit

appa-raître au niveau du cortex.

FIG. 5.23: Champ récepteur des cellules ganglionnaires de type P. Le champ associe une pondération

élevée positive sur le photorécepteur central, tandis que les photorécepteurs voisins présentent une

inhi-bition diffuse, à caractère passe-bas.

142 Chapitre 5. Démosaïçage généralisé et implications pour le système visuel humain

Gain du filtrage associé au centre du champ récepteur

(a) (b)

FIG.5.24: Effet de filtrage passe-bas dû à la taille du centre du champ récepteur des cellules

ganglion-naires midget. (a) Cas où le centre est issu de connexions non spécifiques. L’ensemble du spectre est

filtré passe-bas, donc les porteuses de chrominance sont atténuées. (b) Cas où le centre n’est connecté

qu’à un type de cône. Seules les hautes fréquences d’intensité sont atténuées.

Pour l’opposition B/Y, il y a des connexions non sélectives à L et M pour former la

compo-sante inhibitrice. Les voies parvo et koniocellulaires pourraient donc toutes les deux avoir une

contribution négative provenant des signaux L et M de manière non sélective.

Oppositions de couleur en périphérie de la rétine

En périphérie de la rétine, les cellules ganglionnaires sont connectées à un grand nombre de

cônes, aussi bien dans le centre de leur champ récepteur que dans le pourtour de leur champ. On

peut montrer que si l’on souhaite préserver l’information chromatique, le centre doit

nécessaire-ment être spécifique. Le pourtour peut, quant à lui, être non spécifique (à l’image de ce que nous

proposons en fovea). En fovea, où les cellules ganglionnairesmidgetont une ligne directe vers

l’information des cônes, on pouvait modéliser (Equation (5.26)) le centre du champ récepteur

par une impulsion de Dirac (neutre en terme de convolution). En périphérie, le centre intègre

l’information issue de plusieurs cônes. On peut donc le modéliser par un filtrage passe-bas.

Examinons quelles sont les conséquences de ce filtrage sur le spectre du signal véhiculé

par les cellules ganglionnairesmidgetselon que les connexions sont spécifiques ou non. Si les

connexions sont non spécifiques, alors on effectue un filtrage passe-bas sur le signal en

mo-saïque. Or, nous avons vu que les hautes fréquences du signal en mosaïque sont composées des

porteuses de chrominance et des détails d’intensité. Ce sont donc ces deux informations qui sont

atténuées par le filtrage passe-bas associé au centre du champ récepteurmidget(Figure5.24(a)).

Par conséquent, comme le nombre de cônes présents dans le centre du champ récepteur

mid-get augmente avec l’eccentricité, la perception des couleurs devrait diminuer elle aussi avec

l’eccentricité. C’est ce qui est mesuré par expériences psychophysiques [Mullen 96].

Supposons maintenant que le centre du champ récepteur midget reçoive une information

provenant exclusivement d’un type de cône. Alors le filtrage passe-bas s’applique sur les

com-posantes spatialement démultiplexées du signal en mosaïque. Comme nous l’avons vu, le

dé-multiplexage a pour conséquence de démoduler l’information de chrominance en bande de base.

Ainsi, le filtrage passe-bas n’atténuera pas l’information d’oppositions de couleur, mais

unique-ment l’information de détail d’intensité (Figure5.24(b)). Les oppositions de couleurs sont donc

préservées, elles peuvent avoir la même intensité qu’en fovea. Cela correspond à ce qui aurait

été mesuré au niveau physiologique [Martin 01].

4. Conséquences du modèle pour le système visuel humain 143

(a) (b)

(c) (d)

FIG. 5.25: (a) l’intensité basse fréquence est estimée par convolution normalisée, (b) par filtrage

uni-forme. L’absence de normalisation locale du filtre se traduit par l’apparition de bruit. Cela se ressent au

niveau du PSNR des images reconstruites par la méthode linéaire (a-b) : 31.77dB et 30.71dB

respecti-vement. Constante d’espace du filtre :k

0

= 1pixel.

D’après ce que nous avons vu sur l’interpolation par convolution normalisée, il semble

né-cessaire que les poids provenant des cônes L et des cônes M soient bien adaptés (leur somme

doit être égale àp

L

etp

M

respectivement). Cela impliquerait un apprentissage de la rétine afin

d’ajuster correctement ces poids, ce qui est parfaitement envisageable. Cependant il est

intéres-sant de remarquer que le niveau de bruit qui apparaît si on ne normalise pas ces poids dépend

de la fréquence de coupure du filtre que l’on choisit. Si le filtre utilisé est très passe-pas, alors

la normalisation ou non des poids a une très faible influence sur le résultat (Figure5.26). Au

contraire, si on souhaite extraire des fréquences d’intensité plus élevée, la normalisation aura

une plus grande importance (Figure5.25). Cela se comprend facilement en considérant la taille

144 Chapitre 5. Démosaïçage généralisé et implications pour le système visuel humain

(a) (b)

(c) (d)

FIG. 5.26: (a) Intensité basse fréquence estimée par convolution normalisée, (b) par filtre uniforme.

Lorsque le filtre est très passe-bas, la normalisation locale du filtre n’as plus grande importance.

(a-b) Les images reconstruites par la méthode linéaire ont des PSNR identiques : 35.09dB et 35.05dB

respectivement. La constante d’espace du filtre passe-bas vautk

0

= 3pixels.

de la réponse impulsionnelle d’un filtre passe-bas. Si la fréquence de coupure est très basse,

alors sa réponse impulsionnelle est grande, effectuant une moyenne sur un plus grand nombre

d’échantillons. La densité d’échantillons est alors à une échelle plus globale. Dans le cas limite,

si notre filtre passe-bas calcule l’intensité moyenne de toute l’image, alors les densités

d’échan-tillons sont strictement égales à p

L

etp

M

, et il n’est pas besoin de normaliser. Si la fréquence

de coupure est plus élevée, alors le voisinage considéré est plus restreint, et les variations de

densités locales seront plus élevées d’un pixel à l’autre, nécessitant une normalisation afin de

réguler ces variations. Ainsi, il est tout à fait envisageable, selon les fréquences de coupures des

filtres rétiniens, que les connexions n’aient pas à être ajuster en fonction du voisinage proche.

4. Conséquences du modèle pour le système visuel humain 145

FIG.5.27: Schéma du champ récepteur des cellules ganglionnaires parasol (coupe et vue de dessus). Le

centre reçoit une information des trois types de cônes. Le pourtour retranche une information

chroma-tique, c’est-à-dire qu’il connecte spécifiquement une classe de cône avec une pondération positive et en

connecte une autre avec une pondération négative.

Ainsi il est possible que la rétine n’ait pas à ajuster le poids de ses connexions en fonction des

densités locales si le filtrage est suffisamment passe-bas. En contrepartie, cela génère beaucoup

de bruit chromatique sur l’intensité (ou effet de grille), et la chrominance est très passe-bas. Il

faudrait alors que ce système soit allié à un mécanisme post-rétinien adaptatif.

Il est à noter que l’utilisation d’un filtre très passe-bas permet à la fois de réduire les fausses

couleurs (transformées en un bruit achromatique), de récupérer de plus hautes fréquences

d’in-tensité, et de s’affranchir de la nécessité de pondérer les connexions rétiniennes en fonction des

densités de photorécepteurs. Par ailleurs, cela rendrait possible l’utilisation d’un filtrage récursif

au niveau de la rétine, car le filtrage récursif est incompatible avec une normalisation spécifique

à chaque canal, comme nous l’avons vu au chapitre précédent.

4.1.2 Cellules ganglionnaires parasol : une intensité à laquelle on retranche un résidu de

chrominance

Nous avons vu dans le paragraphe précédent que dans le cas d’un arrangement irrégulier des

photorécepteurs, un filtrage suffisamment passe-bas permet de récupérer un signal d’intensité

dépourvu de bruit de chrominance, sans avoir recourir à la convolution normalisée. Nous avons

supposé que c’était en accord avec la faible largeur de bande de la chrominance.

Il est rapporté cependant, dans la littérature, que le signal achromatique véhiculé par la voie

magnocellulaire a une meilleure résolution spatiale que les signaux d’oppositions de couleurs

[Livingstone 02]. Cela signifie que le signal magnocellulaire doit faire face au problème de

bruit de chrominance. Nous voyons deux solutions à ce problème. L’une serait d’effectuer une

convolution normalisée. L’autre solution serait d’utiliser le filtre décrit dans le paragraphe3.1

par l’Equation (5.16), en filtrant l’expression obtenu par un passe-bas et que nous appelons ici

g. Cette méthode permet de monter plus haut en fréquence que la méthode par convolution

normalisée, sans toutefois créer d’effet de grille, grâce au filtre passe-basg. Le champ récepteur

centré sur un cône L - mais dont le centre embrasse plusieurs cônes - serait donc défini de la

manière suivante :

f

lum,L

= g

|{z}

centre

−g∗((1−p

L

)f

L

−p

M

f

M

−p

S

f

S

)

| {z }

pourtour inhibiteur

(5.27)

146 Chapitre 5. Démosaïçage généralisé et implications pour le système visuel humain

x+1

x

<A

x+1

x

>A

FIG.5.28: (a) Lorsque deux cônes voisins de même classe échantillonnent un stimulus, qu’il soit

chro-matique ou achrochro-matique, la différence d’amplitude de leur réponse est contrôlée par la fréquence de

coupure de l’optique. (b) Lorsque deux cônes voisins sont de classes différentes, un stimulus chromatique

induit systématiquement une différence de gradient entre leurs réponses.

au filtre passe-bas g) et d’un pourtour inhibiteur impliquant à la fois des oppositions de

cou-leurs et un filtrage passe-bas achromatique (Figure5.27). Cette inhibition permet de

compen-ser le bruit chromatique qu’il y aurait si le champ récepteur avait été composé uniquement de

son centre. Un tel champ récepteur pourrait correspondre aux mesures électrophysiologiques

relevées par Smith et al. pour lesquelles ni l’hypothèse de sélectivité ni l’hypothèse de non

discrimination ne sont entièrement statisfaisantes [Smith 92].