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Structure de la glycoprotéine des vésiculovirus

2. La glycoprotéine et l’entrée des Rhabdovirus

2.2. Structure de la glycoprotéine des vésiculovirus

La G de VSV (VSV G) est la glycoprotéine la plus caractérisée des Rhabdovirus (Abou-Hamdan et al., 2018; Roche et al., 2008). Il est possible de cliver la majeure partie de l’ectodomaine de VSV G, directement à la surface des particules virales par protéolyse ménagée à la thermolysine. Ce fragment est appellé Gth et contient les résidus 1 à 422 de la protéine

(l’ectodomaine complet étant constitué de 446 résidus).

Les structures cristallographiques des formes pré- et post-fusion de Gth ont été déterminées

(Roche, 2006; Roche et al., 2007). Sous ces deux conformations, G est trimérique.

Les structures des conformations pré- et post-fusion permettent de distinguer trois domaines structuraux (Figure 15 B,C) : un domaine de fusion (FD), contenant les boucles de fusion, inséré dans une boucle d’un domaine d’homologie à la pleckstrine (PHD), lui-même inséré dans une boucle du domaine de trimérisation (TrD) qui est impliqué dans l’oligomérisation de la glycoprotéine sous ses deux conformations.

Ces domaines sont connectés entre eux par des régions charnières (R1 à R4). Les segments R1 et R4 connectent le TrD au PHD, tandis que R2 et R3 connectent le PHD au FD. Le TrD est connecté au segment C-terminal (R5) de l'ectodomaine. Ce segment lui-même est connecté à l’hélice transmembranaire permettant l’ancrage de la glycoprotéine à la membrane (Baquero et al., 2015a).

Le domaine de fusion comprend une structure étendue en feuillets β dont un très allongé constitué de trois brins à l’extrémité desquels sont situés deux boucles comprenant des résidus hydrophobes. Ces boucles sont les boucles de fusion qui interagissent avec la membrane cible au cours du processus de fusion (Figure 15 D)(Baquero et al., 2015a; Roche, 2006; Roche et al., 2007).

Les structures de VSV G sous les conformations pré- et post-fusion ont été observées à la surface virale par tomographie après coloration négative et en cryo-EM (Libersou et al., 2010; Si et al., 2018). Les structures observées sur les particules virales sont en accord avec les structures trimériques de Gth obtenues par cristallographie dans les deux conformations.

Durant la transition structurale médiée par le pH permettant de passer de la forme pré-fusion à la forme post-fusion, la protéine subit un très large réarrangement conformationnel. Les domaines structuraux sont relocalisés les uns par rapport aux autres sans changer de structure tertiaire. Cette relocalisation des domaines est dûe aux changements de la structure des régions charnières (R1-5) (Figure 15 C). Globalement, on peut interpréter le changement de conformation par un retournement du FD et du segment C-terminal autour du TrD (Baquero et al., 2015a; Roche, 2006; Roche et al., 2007).

(Suite légende Figure 15) A. Organisation en domaines de VSV G. La position des sites de glycosylation sont indiqués. Le domaine de fusion (FD) est en jaune, le domaine d’homologie à la pleckstrine (PHD) en orange, le domaine de trimérisation (TrD) en rouge, les régions charnières R1 et R4 en cyan, R2 et R3 en vert, R5 en violet, le domaine transmembranaire (TM), et Cytosolique (C) dans des nuances de gris.

B. Diagrammes en rubans des trimères pré-fusion et post-fusion de VSV Gth et du trimère post-fusion de

CHAV Gth (PDB: 5I2S, 5I2M et 4D6W). Les lignes en pointillés représentent le segment C-terminal

manquant de l'ectodomaine menant au segment transmembranaire (TM). C. Diagrammes en ruban des protomères de VSV Gth pré-fusion et post-fusion et du protomère CHAV Gth post-fusion. Les différences

structurales majeures entre VSV G et CHAV G sont indiquées par des flèches noires. D. Vue rapprochée des boucles de fusion VSV G situées aux extrémités du FD. Les résidus hydrophobes des boucles de fusion de VSV G, impliqués dans l'interaction membranaire sont représentés en rose. Les résidus chargés qui limitent la pénétration du peptide de fusion dans la membrane sont également représentés en jaune.

33 Figure 15. Structures de la glycoprotéine de VSV et de CHAV.

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À la fin de la transition structurale, à l’état post-fusion, le cœur de la structure est organisé en un faisceau de six hélices, dont le centre trimérique est composé par les trois hélices centrales du TrD (allongées lors de la transition structurale du segment R4), dont les sillons accueillent trois hélices latérales résultant de la nouvelle structure adoptée par R5 (Figure 15 E) (Baquero et al., 2015a; Roche, 2006; Roche et al., 2007).

Une particularité de la glycoprotéine des Rhabdovirus, est que le changement de conformation induit par l’abaissement du pH est réversible (Gaudin, 2000a; Gaudin et al., 1991b, 1993). C’est une différence majeure avec les protéines fusogènes d’autres familles virales pour qui le changement de conformation est irréversible (la conformation pré-fusion étant alors métastable).

La réversibilité du changement de conformation de la glycoprotéine des Rhabdovirus a été initialement démontré pour VSV G solubilisée avec des détergents (Doms et al., 1987) puis, pour RABV G à la surface de la particule virale, par microscopie électronique (Gaudin et al., 1993).

En fait, il existe un équilibre dépendant du pH entre la conformation pré-fusion et post-fusion ainsi que les conformations monomériques intermédiaires qui permettent de passer de l’une des conformations à l’autre (Albertini et al., 2012; Baquero et al., 2017). Ces intermédiaires conformationnels seront décrits dans la partie 2.5.4.b.

Cet équilibre a été démontré pour les formes solubles (Gth) de VSV G (Albertini et al., 2012;

Lyles et al., 1990), à la surface du virion pour RABV G et VSV G (Albertini et al., 2012; Libersou et al., 2010; Roche and Gaudin, 2002) et in vivo dans le réticulum endoplasmique pour VSV G (Zagouras et al., 1991). Finalement, même l'insertion du domaine de fusion de VSV G et de Chandipura Virus (CHAV) G dans une membrane cible, induite par un faible pH a été démontré comme étant réversible (Albertini et al., 2012; Baquero et al., 2015b; Kim et al., 2017; Pak et al., 1997) ; cet équilibre thermodynamique est très déplacé vers le trimère post-fusion en dessous de pH 6 (Roche and Gaudin, 2002). Au dessus de pH 7, à la surface du virus, on observe la présence du trimère pré-fusion en équilibre avec des monomères flexibles. La réversibilité de la transition structurale a un intérêt lors de la biosynthèse de G. En effet, G traverse des compartiments acides lors de sa maturation dans les compartiments acides du Golgi, ce qui la fait transiter vers sa forme post-fusion. La réversibilité lui permet, lorsqu’elle arrive dans le milieu extracellulaire à pH 7,4, de changer de conformation pour acquérir la forme pré-fusion et recouvrir ainsi ses propriétés de fusion nécessaires pour les étapes précoces du cycle infectieux du virion néosynthétisé (Gaudin et al., 1995b).