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2. La glycoprotéine et l’entrée des Rhabdovirus

2.3. Attachement et récepteurs

2.3.2. b Les récepteurs de RABV

Quatre protéines ont été proposées pour jouer le rôle de récepteurs de RABV ( Figure 18) (Guo et al., 2019).

Figure 18. Les récepteurs proposés pour RABV.

Adapté de Belot et al, 2019.

(i) Le récepteur nicotinique de l’acétylcholine

Un segment de RABV G présente une similarité de séquence avec les neurotoxines curaremimétiques de venin de serpent, qui sont des ligands du récepteur nicotinique de l’acétylcholine (nAChR). Il a donc été proposé que le nAChR puisse agir comme un récepteur du RABV (Lentz et al., 1982, 1984). Cette hypothèse a été renforcée par la démonstration que RABV interagit avec le nAChR purifié (Lentz et al., 1986), plus précisément avec sa sous-unité

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α (Gastka et al., 1996). Enfin, une étude dans laquelle des cellules ganglionnaires de la racine dorsale (DRG) de souris (qui sont des structures contenant les neurones sensoriels du système nerveux périphérique) ont été traitées avec plusieurs antagonistes nicotiniques, a montré que la mécamylamine et la d-tubocurarine réduisent le pourcentage de neurones infectés (Castellanos et al., 1997). Cependant, il n'existe aucune preuve directe chez les modèles animaux que nAChR soit un récepteur de RABV. En outre, RABV peut infecter des neurones n’exprimant pas nAChR, et nAChR est situé principalement sur la partie musculaire des jonctions neuromusculaires (McGehee and Role, 1995).

Ainsi, bien que le NAChR puisse expliquer la capacité des souches de RABV à se multiplier localement dans des myotubes au niveau du site d’inoculation (Burrage et al., 1985), la propagation du virus dans le système nerveux central nécessite d'autres récepteurs dans les neurones.

(ii) La molécule d’adhésion des cellules neuronales

La deuxième protéine suggérée comme étant un récepteur de RABV est la molécule d’adhésion des cellules neuronales (NCAM) (Thoulouze et al., 1998). En effet, l'incubation de plusieurs lignées cellulaires avec RABV diminue l'expression de surface de NCAM, suggérant que NCAM est internalisé en présence du virus. De plus, le traitement de cellules sensibles au sulfate d’héparane, un ligand de NCAM, ou avec des anticorps anti-NCAM réduisent l'infection par RABV. De même, lorsque le virus est pré-incubé avec une forme soluble de NCAM, il n’est plus capable d’infecter les cellules. Par ailleurs, lorsque des cellules fibroblastiques L résistantes à l’infection sont transfectées avec un gène qui code pour NCAM, elles deviennent sensibles à l’infection. Enfin, l'infection des souris déficientes en NCAM par RABV a entraîné une mortalité légèrement retardée et une invasion cérébrale restreinte (Thoulouze et al., 1998). Ce dernier résultat amène à penser que même si NCAM semble jouer un rôle dans l’entrée du virus, in vivo il n’est pas le seul récepteur que RABV puisse emprunter.

(iii) Le récepteur murin du facteur de croissance nerveux de faible affinité

Le récepteur murin du facteur de croissance nerveuse de faible affinité (p75NTR) a été identifié comme ligand d’une forme soluble de RABV G (Tuffereau, 1998). La capacité de RABV G à lier p75NTR est dépendante d'une lysine et d'une arginine aux positions 330 et 333 respectivement, sur la G, qui sont connues pour contrôler la pénétration du virus dans les neurones moteurs et sensoriels de souris adultes (Coulon et al., 1998; Seif et al., 1985; Tuffereau et al., 1989). En outre, l'expression de p75NTR dans des cellules BSR, un clone de cellules de reins de bébé hamster (BHK21) rend la lignée cellulaire permissive pour une souche de RABV de renard non-adaptée aux cellules de laboratoire. Enfin, la G du génotype du lyssavirus de chauve-souris européenne de type 2 (mais pas celle du type 1 ni des virus de Mokola et de Duvenhage) lie également p75NTR (Tuffereau et al., 2001).

Néanmoins, les souris dépourvues de p75NTR sont toujours susceptibles à l’infection, indiquant que l'interaction entre RABV G et p75NTR n'est pas nécessaire pour l'infection de neurones primaires par RABV (Tuffereau et al., 2007). Cependant, des données suggèrent que RABV peut utiliser un transport dépendant de p75NTR pour faciliter son trajet vers le système nerveux central (Gluska et al., 2014).

39 (iv) Le récepteur métabotropique du glutamate 2

Plus récemment, une stratégie globale, exploitant l’ARN interférent (ARNi) a été utilisée pour cribler les potentiels facteurs de l'hôte utiles à l'infection par RABV dans des cellules rénales embryonnaires humaines (HEK293). Ainsi, le récepteur métabotropique du glutamate 2 (mGluR2) a été identifié comme étant essentiel à l’infection par RABV (Wang et al., 2018). mGluR2 est un récepteur à sept passages transmembranaires et est conservé chez les mammifères. Il est abondant dans le système nerveux central et très rarement exprimé dans d’autres tissus (Ohishi et al., 1993). Des expériences de co-immunoprécipitation ont montré que RABV G interagit avec mGluR2. De plus, des anticorps dirigés contre mGluR2 bloquent l'infection des cellules par RABV et une version soluble du récepteur neutralise également l'infection par RABV. Une diminution de l'expression de mGluR2 à la surface des cellules infectées a été observée et l’internalisation conjointe de mGluR2 et du virus dans les cellules ainsi que leur transport aux endosomes précoces et tardifs montrent également que mGluR2 a les caractéristiques pour être un récepteur de RABV. Cependant, chez les souris, certaines cellules neuronales infectées par RABV semblent en être dépourvues (Wang et al., 2018).

Si on considère l’ensemble des études qui ont été menées pour identifier les récepteurs de RABV, aucun des candidats proposés n’est strictement indispensable pour l’infection, suggérant que le virus peut probablement utiliser plusieurs récepteurs. Ceci est en accord avec des expériences effectuées sur un mutant avirulent, incapable de tuer l’animal adulte, qui ont montré que certaines cellules neuronales permissibles à l’infection d’une souche virulente, ne sont pas infectées par le mutant. Cela suggère que la souche virulente est capable de lier plusieurs récepteurs distincts pour pénétrer dans différents neurones, tandis que le mutant avirulent n'en reconnaît que quelques-uns (Lafay et al., 1991). Enfin, les cellules rénales de singe vert d’Afrique (BS-C-1) qui n’expriment ni p75NTR, ni NCAM, ni nAChR, ni probablement mGluR2 (puisque la lignée BS-C-1 a des caractéristiques de cellules épithéliales) sont sensibles à l’infection par RABV (Piccinotti et al., 2013). Par conséquent, d’autres facteurs d’entrée non identifiés restent à déterminer. Il n’est pas exclu que ces facteurs soient spécifiquement présents dans les cellules épithéliales, et soient nécessaires pour les derniers stades de la maladie, lorsque le virus se propage du système nerveux central aux tissus périphériques.