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1. Introduction

1.1. Les nanoparticules manufacturées

1.1.3. Les risques liés à l’exposition aux nanoparticules

1.1.3.6. Impact des caractéristiques physico-chimiques des NP sur leurs effets biologiques

1.1.3.6.3. La structure cristalline

Les effets biologiques des NP dépendent fortement de leur structure cristalline. Un des meilleurs exemples pour illustrer cela est celui des NP de TiO2. Le TiO2 existe majoritairement sous deux formes : l’anatase et le rutile. La majorité des études menées jusqu’à ce jour a démontré un potentiel toxique plus élevé de la forme anatase comparé à la forme rutile. Sayes et al. ont étudié la toxicité in vitro de NP de TiO2 de taille comparable et de variété cristalline différente : anatase (10 nm), rutile (5 nm) et anatase/rutile (3 nm) dans des cellules épithéliales et des fibroblastes humains (Sayes et al. 2006). La concentration utilisée variait de 3 µg/ml à 300 µg/ml pour une exposition cellulaire durant jusqu’à 48h. Les résultats de cette étude ont montré que les NP anatase pouvaient être jusqu’à 100 fois plus toxiques que leur homologue de structure rutile. Les NP de forme anatase étaient également celles induisant une production de ROS, ex vivo et sous lumière UV, plus importante. Ces résultats suggèrent que la capacité des NP à générer des ROS, dictée par la structure cristalline de la NP, est responsable, du moins en partie, de son potentiel cytotoxique. De façon cohérente, Pan et ses collaborateurs ont trouvé que la forme anatase était plus toxique que la forme rutile (Pan et al. 2009). En effet, les NP anatase induisaient d’importantes lésions

37 cellulaires accompagnées des changements morphologiques comme une rupture des filaments d’actine et de la membrane plasmique. Les NP de forme rutile, bien qu’aussi internalisées dans les cellules, induisaient moins de dommages et présentaient surtout une capacité moins élevée à produire des ROS. Par ailleurs, il a également été montré que la structure cristalline des NP pouvait influer sur le type de mort cellulaire. En effet, les NP de structure anatase induiraient une mort cellulaire par nécrose tandis que celles de structure rutile conduiraient à une apoptose induite par la production de ROS (Hussain et al. 2009b). Cependant, d’après Liu

et al, seule une légère augmentation de la toxicité de l’exposition aux NP anatase était

observée par rapport aux NP rutile et P25 (80 % anatase, 20 % rutile) (Liu et al. 2009). De plus, une étude parue en 2012 a montré que les NP de forme anatase pure étaient moins génotoxiques que les NP de forme anatase/rutile (Gerloff et al. 2012). Enfin, une étude réalisée sur des rats instillés avec des NP de TiO2 de forme anatase et rutile, a montré que les NP rutile pouvaient induire des effets sur le poumon plus importants que les NP anatase (Numano et al. 2014). En effet, les NP de forme rutile induisaient un stress oxydant et une inflammation pulmonaires plus importants que celle de forme anatase, que ce soit in vivo ou bien in vitro. De plus, une prolifération des cellules épithéliales était observée, in vitro, en réponse aux NP de forme rutile (Numano et al. 2014).

1.1.3.6.4. Les propriétés de surface

Les NP peuvent être modifiées via l’attachement de groupes fonctionnels à leur surface ou via un recouvrement avec d’autres substances. Ces modifications peuvent avoir des effets sur la réponse biologique à ces NP. Warheit et al ont étudié l’impact d’un traitement de surface (alumine ou silice) sur la toxicité de NP de TiO2 dans les poumons. Il a été montré que les NP les plus toxiques étaient celles qui contenaient la quantité la plus élevée d’alumine ou de silice à la surface de la NP de TiO2 (Warheit et al. 2005). Au contraire, dans une étude ultérieure, la même équipe a également montré que le recouvrement de la surface de NP de TiO2 par de l’alumine et/ou de la silice réduisait la réponse inflammatoire pulmonaire observée chez des rats exposés (Warheit et al. 2007). D’autres études plus récentes confirment l’impact du revêtement de surface sur les réponses biologiques des NP de TiO2 (Mano et al. 2012; Saber et al. 2012). Cependant, certaines études ne montrent pas d’effets de la modification des propriétés de surface des NP. C’est le cas de l’étude de Singh et al. où la

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méthylation de NP de TiO2 n’a aucun impact sur la toxicité observée dans des fibroblastes humains, bien que la méthylation des particules permette une diminution de la taille des agrégats (Singh et al. 2007). Ainsi, la modification de la surface des NP semble être un facteur pouvant influencer leur toxicité, cependant, celle-ci dépend fortement du type de modification effectuée à la surface de la NP.

En conclusion, de nombreux facteurs intrinsèques aux NP peuvent influer sur leur toxicité (taille, structure cristalline, forme, modifications de surface…). Cependant il reste difficile de statuer sur l’influence exacte de chaque paramètre sur la toxicité de ces matériaux. En effet, l’inter-dépendance des paramètres physico-chimiques des NP fait qu’il est difficile de ne modifier qu’un seul paramètre à la fois, et donc d’isoler le paramètre responsable de la leur toxicité. De plus, il est très probable qu’une variété de facteurs agit de concert pour participer aux réponses biologiques des NP, que ce soit les facteurs intrinsèques aux NP (leurs caractéristiques physico-chimiques) mais aussi des facteurs extrinsèques (concentration de NP utilisée, modèle utilisé, durée de l’exposition…).

En résumé, après une exposition pulmonaire, les NP, en fonction de leurs caractéristiques physico-chimiques, peuvent induire des effets délétères pour l’organisme. Bien que plusieurs mécanismes biologiques aient été décrits dans la littérature comme potentiellement responsables de ces effets (notamment l’induction d’un stress oxydant et d’une réponse pro-inflammatoire), ceux-ci n’expliquent qu’en partie la toxicité des NP. Dans ce travail, nous nous sommes intéressés au processus autophagique en tant que nouveau mécanisme potentiellement responsable, du moins en partie, des effets toxiques des NP.

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