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1. Introduction

1.2. L’autophagie

1.2.3. Rôle de l’autophagie et implication dans des pathologies

1.2.3.3. Autophagie, inflammation et stress oxydant

Le rôle de l’autophagie dans les différentes pathologies présentées précédemment pourrait être lié à sa capacité à moduler les réponses inflammatoires et oxydantes associées à ces pathologies.

La machinerie autophagique joue un rôle majeur dans le contrôle de l’inflammation. En effet, il a été mis en évidence que l’autophagie pouvait réguler de façon négative l’inflammation, via notamment l’inhibition de l’activation des inflammasomes, complexes multiprotéiques impliqués dans la maturation et la sécrétion des cytokines pro-inflammatoires

53 IL-1β et IL-8 (Schroder and Tschopp 2010). En effet, l’autophagie basale, en dégradant les mitochondries endommagées, à l’origine de la production de ROS, va empêcher l’activation des inflammasomes par les ROS, et ainsi réduire la réponse inflammatoire (Nakahira et al. 2011; Zhou et al. 2011). Un blocage de l’autophagie conduit alors à une activation de l’inflammasome et donc à la production de cytokines inflammatoires. Par ailleurs, en plus de contrôler la production de cytokines via la régulation de l’activation des inflammasomes, l’autophagie peut également cibler directement la forme précurseur de l’IL-1β pour une dégradation lysosomale (Harris et al. 2011). Shi et al ont montré que l’activation des inflammasomes dans des macrophages conduisait à la formation d’autophagosomes et que le blocage de l’autophagie exacerbait l’activation des inflammasomes (Shi et al. 2012). Leurs résultats suggèrent l’existence d’une voie de rétrocontrôle négatif où l’activation de l’inflammasome conduirait à l’activation de l’autophagie qui, en retour, contrôlerait négativement l’inflammation en dégradant les inflammasomes actifs. De plus, l’autophagie permet de limiter la réponse inflammatoire en dégradant également les corps apoptotiques, susceptibles de relarguer des motifs moléculaires associés aux dégâts cellulaires (DAMPs,

damage-associated molecular pattern), pouvant induire la libération de cytokines

pro-inflammatoires (Levine et al. 2011). Par ailleurs, la production d’IL-1β et d’IL-18 induite par des endotoxines est augmentée chez des souris déficientes pour le gène Atg16L1, indispensable au processus autophagique (Saitoh et al. 2008).

L’autophagie est impliquée dans la régulation transcriptionnelle de gènes intervenant dans la réponse pro-inflammatoire. En effet, lorsque l’autophagie est défectueuse, la protéine p62, substrat de l’autophagie, s’accumule et conduit à l’oligomérisation de TRAF6 (tumor

necrosis factor receptor-associated factor 6) et ainsi à l’activation de NF-κB, facteur de

transcription impliqué dans la réponse inflammatoire (Ling et al. 2012; Mathew et al. 2009; Moscat and Diaz-Meco 2012). Une des preuves du rôle de l’autophagie dans la réponse inflammatoire vient du fait que de nombreux gènes intervenant dans le processus autophagique sont associés avec des pathologies à composante inflammatoire. En effet, plusieurs travaux ont montré que chez des patients atteints de la maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique du système digestif, des polymorphismes étaient retrouvés dans la séquence de gènes impliqués dans l’autophagie, comme par exemple dans celle du gène Atg16L1, Irgm1 (immune related GTPase M-1), ou encore ULK1 (Consortium 2007; Henckaerts et al. 2011).

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Comme tous les stress, le stress oxydant peut induire l’autophagie, et cette dernière peut également moduler la réponse à ce stress oxydant. En effet, il a été montré que l’induction de l’autophagie par le jeûne était en fait régulée via la production de ROS, notamment celle d’O2- et d’H2O2 (Chen et al. 2009a; Scherz-Shouval et al. 2007). Dans une de ces études, il a en fait été montré que l’H2O2 pouvait inhiber la protéine Atg4 au niveau du site de formation de l’autophagosome, promouvant ainsi la lipidation de LC3-I en LC3-II, et ainsi permettant l’activation de l’autophagie (Scherz-Shouval et al. 2007). De plus, il a été montré que l’autophagie pouvait être induite dans des cellules provenant de tumeurs gliales et traitées au peroxyde d’hydrogène, via la voie Akt/mTOR et le complexe PI3K/beclin 1 (Zhang et al. 2009a). L’idée que les ROS jouent un rôle dans l’induction du processus autophagique vient aussi d’études ayant montré que l’induction de l’autophagie par le jeûne était dépendante de la production de l’anion superoxyde O2-, et que la surexpression d’enzymes anti-oxydantes, comme la superoxyde dismutase et/ou la catalase, protégeait les cellules HeLa contre l’autophagie induite par ce jeûne (Chen et al. 2009a).

L’autophagie peut également moduler la réponse oxydante en inhibant notamment la production de ROS. En effet, il a été montré qu’un blocage de l’autophagie conduisait à une augmentation du stress oxydant (Farombi 2006; Hara et al. 2006; Park et al. 2008; Park et al. 2004; Yamasaki et al. 2007). L’autophagie joue un rôle majeur dans la régulation de la réponse oxydante en dégradant les mitochondries endommagées, qui sont la principale source de production de ROS. En effet, une autophagie sélective ciblant les mitochondries et appelée la mitophagie, permet à la cellule de se protéger contre le stress oxydatif en éliminant les mitochondries défectueuses (Lemasters 2005). Par exemple, une augmentation de la production de ROS a été observée dans des cellules déficientes pour la mitophagie (Kurihara et al. 2012). De plus, plusieurs études suggèrent un rôle essentiel de l’autophagie dans la dégradation des protéines oxydées, notamment via l’autophagie médiée par les protéines chaperonnes (Kaushik and Cuervo 2006; Kiffin et al. 2004). De façon cohérente avec ces résultats, la protéine p62, de par son rôle de dégradation des aggrégats protéiques par l’autophagie, pourrait être également impliquée dans la dégradation de ces protéines oxydées et ainsi participer à la régulation de la réponse au stress oxydant par l’autophagie. Par ailleurs, en réponse à un stress oxydant, le facteur de transcription nucléaire Nrf2 (nuclear factor

erythroid-derived 2 like 2), impliqué dans la transcription de gènes antioxydants, comme

l’hème oxygenase, peut induire l’expression de p62, qui à son tour, peut activer Nrf2, formant ainsi une boucle de rétrocontrôle positive permettant de réduire la réponse oxydative (Jain et al. 2010; Komatsu et al. 2010).

55 En conclusion, l’autophagie est un processus physiologique permettant de maintenir l’homéostasie cellulaire. Des altérations du processus autophagique, comme une activation anormale ou bien une activité défectueuse, sont associées avec de nombreuses pathologies, et sont probablement liées à l’interdépendance entre l’autophagie, l’inflammation et/ou le stress oxydant. Etant donné que ces deux derniers mécanismes sont les deux mécanismes principalement décrits comme sous-jacents aux effets des nanomatériaux, et que les principales voies d’entrée des NP dans la cellule convergent vers le lysosome, acteur majeur du processus autophagique, une meilleure compréhension du rôle potentiel de l’autophagie dans la toxicité des nanoparticules (Figure 14) semble nécessaire.

Figure 14 : Relation hypothétique entre l’autophagie et les réponses biologiques aux nanomatériaux

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