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Le stress oxydatif est le reflet d’un déséquilibre entre les manifestations systémiques d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) et les capacités du système biologique à rapidement détoxifier les

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intermédiaires réactifs ou à réparer les dommages causés par ces derniers. Ce déséquilibre dans le statut « rédox » normal des cellules peut être à l’origine d’effets toxiques à travers la production notamment de péroxydes et de radicaux libres qui vont attaquer tous les composants cellulaires incluant les protéines, les lipides et l’ADN. Il est à noter que les ROS tiennent également le rôle physiologique de messager cellulaire et que le stress oxydatif va altérer le bon fonctionnement de ce mécanisme de transduction du signal.

1. Le stress Oxydatif dans la BPCO

La fumée de cigarette expose le poumon à des niveaux extrêmes de stress oxydatif. Dans sa phase gazeuse, la fumée de cigarette contient plus de 1014 molécules réactives par bouffée, incluant des oxydants tels que O2-, oxydes nitriques et péroxynitrites. La phase particulaire contient des radicaux organiques tels que des radicaux semi-quinones, des radicaux hydroxyles et de l’H2O2 (Halliwell et al., 2006). La fumée de cigarette induit une augmentation de la charge oxydante et provoque des changements irréversibles dans les effets antioxydants protecteurs au niveau des voies respiratoires (van Der Toorn et al., 2007).

De plus, les oxydants dérivés de la fumée vont endommager les cellules épithéliales pulmonaires en induisant directement des altérations dans les lipides de membrane, les protéines, les sucres et l’ADN conduisant à une inflammation chronique (Foronjy et al., 2008). Cette inflammation chronique est une des caractéristiques de la BPCO montrée notamment par une augmentation des neutrophiles et des macrophages activés ainsi que de médiateurs inflammatoires dans les poumons. La combinaison du stress oxydatif et de l’inflammation chronique va encore amplifier le nombre de radicaux libres dans les voies respiratoires et, à long terme, favoriser l’expression de gènes pro-inflammatoires, la libération de protéines inflammatoires et l’inactivation des anti-protéases menant au cercle vicieux d’altérations des structures pulmonaires (Drost et al., 2005 ; Bhowmik et al., 2000 ; Paredi et al., 2000).

La génération de ROS au sein des poumons a été directement liée à l’oxydation des protéines, des lipides, des sucres et de l’ADN (Foronjy et al., 2008). La conséquence majeure de ce stress est certainement la formation de réactifs carbonyles et leur interaction avec des protéines conduisant à la carbonylation de ces dernières de manière non enzymatique (Dalle-Donne et

al., 2006). Le stress oxydatif pourrait être une des composantes du caractère auto-immun de la

BPCO. En effet, les protéines carbonylées sont hautement immunogènes et sont reconnues par le système immunitaire inné à travers les PRR. Les cellules de ce système vont alors présenter ces néoantigènes au système adaptatif, facilitant ainsi une réponse immunitaire acquise. Il a notamment été montré un taux élevé d’auto-anticorps contre les protéines du Soi modifiées par carbonylation dans le sérum de patients BPCO, ce taux augmentant avec la sévérité de la maladie (Kirkham et al., 2011). Cette modification va entraîner, en plus du processus auto- immun, une modulation dans la fonction des protéines, induisant des défauts de fonctionnement cellulaire.

Il a été montré notamment que le stress oxydatif pouvait accroître l’activité de l’Histone Acétyl Transférase (HAT) qui permet aux facteurs de transcription d’accéder à l’ADN codant et ainsi induire l’expression de gènes pro-inflammatoires dans les cellules épithéliales pulmonaires

Introduction : La BPCO

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(Tomita et al., 2003). Les macrophages, ainsi que les neutrophiles, activés après exposition à la fumée de cigarette vont libérer de manière importante des ROS sous la forme notamment de radicaux superoxyde et de péroxyde d’hydrogène (Schaberg et al., 1995).

De plus, le stress oxydatif peut entraîner le recrutement des cellules inflammatoires au niveau du poumon en augmentant la sécrétion de cytokines. Cela facilite la mise en place d'une boucle de rétrocontrôle positive qui perpétue l’inflammation et la destruction tissulaire par une infiltration excessive des cellules immunitaires (Bowler et al., 2004).

Dans le cas de la BPCO, un défaut dans la clairance muco-ciliaire et une augmentation de la viscosité du mucus ont été montrés (Siddiqi et al., 2009). En effet, des oxydants tels que les superoxydes ou l’ H2O2 sont capables de réduire la vitesse de battements des cils des cellules épithéliales très rapidement (15 minutes après l’exposition) (Feldman et al., 1994). De plus, les cytokines pro-inflammatoires et de nombreux ROS sont également capables d’induire l’expression des gènes codant les mucines conduisant à une hypersécrétion de mucus (Fujisawa

et al., 2009). Ces différents éléments vont contribuer à pérenniser l'inflammation.

2. Système antioxydant du poumon

Les antioxydants sont des agents qui neutralisent les ROS à un niveau basal et protègent les macromolécules cellulaires des modifications oxydatives. Un antioxydant classique va réagir rapidement avec des ROS afin de générer des espèces moins réactives. Il existe différents types d’antioxydants dans le poumon :

- les antioxydants enzymatiques (telles que la SuperOxyde Dismutase : SOD, la catalase, les Glutathione peroxydases, la glutation S-transférase, la peroxiredoxine, et l’Hème Oxygenase - 1 : HO-1) (MacNee W., 2005),

- les antioxydants non-enzymatiques comme le glutathion (GSH), l’ascorbate, l’urate, l’alpha-tocophérol, la bilirubine, le monoxyde de carbone, la ferritine et l’acide lipoïque (MacNee W., 2005),

Certains de ces mécanismes de défense contre le stress oxydatif du poumon sont altérés chez les fumeurs et chez les patients BPCO, notamment par une inhibition de la glutamyl-cystéine ligase (une enzyme clé dans la synthèse de la GSH, un anti-oxydant important). La GSH n’est alors plus en mesure de contrôler ce stress oxydatif (Harju et al., 2002).

Une diminution des gènes codant des antioxydants tels que l’Hème-Oxygénase-1 a aussi été observée chez des patients BPCO, défaut du à une instabilité de NRF2, le facteur de transcription associé à ce gène (Malhotra et al., 2008).Il a également été montré que le TGF-β, produit par les cellules épithéliales et les macrophages, inhibait la production d’autres enzymes anti-oxydantes telles que la catalase et de la SuperOxyde Dismutase 2 (SOD2), dans les cellules musculaires lisses de l’appareil respiratoire (Michaeloudes et al., 2011).

Ainsi, la fumée de cigarette provoque un stress oxydatif dans le poumon qui se pérennise chez les patients BPCO.

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3. Thérapies antioxydantes

Diverses approches ont été envisagées afin de rééquilibrer la balance oxydants/antioxydants dans le but d’améliorer la fonction pulmonaire et de mieux gérer la BPCO.

Dans cet objectif, la délivrance d’antioxydants par supplémentation diététique semble être un des moyens les plus faciles à mettre en œuvre. Les plus fréquents anti-oxydants sont les vitamines A, C et E (incluant le β-carotène) via l’utilisation de comprimés ou en augmentant la prise alimentaire en fruits et légumes (Hirayama et al., 2009).

L’administration orale de N-AcétylCystéine (NAC) permet d'obtenir une amélioration de la BPCO avec une augmentation de la tolérance et l’endurance à l'effort (Stav et al., 2009), ainsi qu’une diminution des épisodes d’exacerbation (Sutherland et al., 2006) et des marqueurs oxydatifs moins prononcés dans le sang et l’air expiré des patients (Zuin et al., 2005). Cependant, l’utilisation de la NAC n’est pas recommandée par la SPLF en tant que traitement de la BPCO (Recommandations pour la prise en charge de la BPCO : Autres traitements médicamenteux, 2003). La NAC est un antioxydant puissant capable d’éliminer de nombreux ROS tels que les péroxydes, les radicaux hydroxyles… De plus, la NAC va stimuler la synthèse de Glutathion, induire l’activité de la GSH S-Transférase et promouvoir la détoxification hépatique. Une autre approche possible est la délivrance d’antioxydants directement au niveau de la muqueuse pulmonaire, notamment la GSH (Bishop et al., 2005). Il a également été envisagé l’utilisation d’antioxydants indirects via des analogues qui peuvent être convertis in vivo en antioxydants efficaces. Par exemple, la N-acystélyne (NAL), qui est en fait de la NAC sous forme de sel, peut être nébulisée directement dans le poumon afin d’induire la GSH intracellulaire dans les macrophages alvéolaires (Gillissen et al., 1997).

Pour le moment, les thérapeutiques testées n'ont pas apporté de bénéfice très net, bien que de nouvelles molécules et des modes de traitement seront prochainement testés.

Introduction : La réponse immunitaire Th17

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III.

La réponse immunitaire Th17

Les lymphocytes T CD4+ auxiliaires sont des médiateurs importants dans le fonctionnement du système immunitaire complet. Ces lymphocytes vont coordonner l’expansion et la régulation des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques, faciliter les réponses des lymphocytes B mémoires, recruter et moduler de multiples composants du système immunitaire inné. L'activation et la polarisation des lymphocytes T CD4+ naïfs avec l’antigène varient en fonction du site anatomique, du type d’antigène, de l’environnement cytokinique et des molécules de co- stimulation. Ces variations entraînent la différenciation cellulaire des lymphocytes T auxiliaires en des effecteurs spécifiques de l’antigène avec des caractéristiques fonctionnelles distinctes appelées « état de polarisation ». En 1989, Mosmann et Coffman ont ainsi établi deux types de polarisation : les polarisations Th1 et Th2 (Mosmann et al., 1989) puis d'autres types TH9, Th17, Th22 ou Treg ont été identifiés. De nombreuses études ont été menées par la suite, permettant d’établir que les cellules T se différenciaient de manière indépendante en chaque lignée et que ces lymphocytes différents présentaient des signatures d’expression génique propres. C’est en 2006 qu’une troisième lignée de lymphocytes, produisant l’interleukine (IL-) 17 a été proposée (Dong et al., 2006).