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E. Physiopathologie de la BPCO

3. Étape 3 : Réponse Immune Adaptative

Au cours de la BPCO, les lymphocytes T CD8+ cytotoxiques sont les principaux lymphocytes retrouvés dans les différentes voies aériennes et dans le parenchyme pulmonaire. Ces lymphocytes vont contribuer à la dégradation du parenchyme pulmonaire via notamment la sécrétion d’enzymes protéolytiques telles que le granzyme B ou la perforine (Lieberman J., 2003). L’action de ces enzymes va entraîner une augmentation du nombre de cellules épithéliales et endothéliales apoptotiques ou nécrotiques, et cette destruction ne pourra pas être compensée par la prolifération cellulaire (Calabrese et al., 2005). Le nombre de lymphocytes T CD8+ est en corrélation avec le degré d’obstruction et d’emphysème trouvé chez le patient (Saetta et al, 1998). De plus, des modèles animaux ont montré que, dans le cas d’une BPCO induite expérimentalement, les lymphocytes T CD8+ étaient également capables de produire de l’IL-17 (Duan et al., 2011).

Au moins deux types de lymphocytes T CD4+ effecteurs sont retrouvés dans les poumons de patients BPCO : les lymphocytes polarisés Th1 et Th17.

Les lymphocytes polarisés Th1 produisent essentiellement de l’interféron (IFN)-γ, stimulant la production de cytokines et chimiokines pro-inflammatoires et promouvant ainsi l’accumulation

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de cellules inflammatoires au sein du poumon. Une augmentation de l’expression de l’IL-12 et de l’IL-18 par les macrophages et les cellules dendritiques est probablement à l'origine du développement des cellules polarisées Th1 (Imaoka et al., 2008). De plus, l’interaction entre certaines chimiokines (CXCL-10 et CXCL-9) sécrétées par les cellules T et leur récepteur (CXCR- 3), retrouvé dans les macrophages, induit l’expression de la MMP-12 par ces derniers, nourrissant ainsi le cercle vicieux de l’inflammation et de la destruction du parenchyme pulmonaire (Grumelli et al., 2004).

Les lymphocytes polarisés Th17 sont connus pour leur rôle dans l’inflammation et les maladies auto-immunes. Les cytokines nécessaires pour leur différenciation, leur prolifération et leur maintenance (IL-6, IL-1β, TGF-β et IL-23) sont des cytokines produites par les cellules épithéliales et les macrophages au cours de l’exposition à la fumée de cigarette, comme nous l’avons précisé précédemment. La réponse Th17 est caractérisée par la production, entre autres, d’lL-17A et d’IL-17F. Ces cytokines sont notamment connues pour être liées à l’inflammation médiée par les neutrophiles en induisant la libération, par les cellules épithéliales pulmonaires et les cellules musculaires lisses, de chimio-attractants (CXCL1 et CXCL8) pour les neutrophiles (Laan et al., 1999). L’IL-17 va aussi induire l’expression de gènes codant les mucines MUC5A et MUC5B, responsables en partie de l’hypersécrétion de mucus retrouvée chez les patients BPCO (Fujisawa et al., 2009). De manière intéressante, l’IL-17 est également capable d’induire, en plus du recrutement des neutrophiles, la production de MMP- 12 par les macrophages (Shan et al., 2009). De plus, il a été montré récemment que l’IL-17 pouvait aussi induire la contraction des cellules musculaires lisses en se fixant directement sur son complexe de récepteurs exprimé par ces cellules (Kudo et al., 2012). L’IL-17 pourrait donc participer à l’hyperréactivité bronchique observée lors de tests à la métacholine (un broncho- constricteur).

Les lymphocytes Th17 ont un rôle important et parfois déterminant dans la mise en place d’une réponse immune protectrice lors d’infections bactériennes et fongiques. Cependant, ils sont également responsables des troubles immunitaires rencontrés dans certaines maladies auto- immunes qui étaient auparavant associées à une réponse de type Th1 excessive (Onishi et al., 2010).

De plus, la présence de follicules lymphoïdes matures avec un centre germinatif et des zones bien individualisées de lymphocytes T et B dans le tissu péribronchiolaire des patients présentant une BPCO est aussi le témoin d’une réponse immune adaptative. Le nombre de follicules augmente fortement avec la sévérité de la maladie chez les patients ayant une BPCO sévère à très sévère (25 à 30 % chez les patients au stade GOLD III et IV) (Brusselle et al., 2009). Les lymphocytes B isolés des follicules des patients ayant une BPCO sont de nature oligoclonale, ce qui suggère une induction antigène-spécifique de ces cellules B folliculaires (van der Strate et

al., 2006). La structure des follicules, avec un centre germinatif riche en cellules B et des zones

périphériques riches en lymphocytes T CD4+ (80–90 %) et CD8+, favorise la présentation des antigènes par les cellules dendritiques lors de leur passage via le canal lymphatique efférent. Les cellules B et T, à qui le même antigène a été présenté, interagissent ensuite entre elles via leurs récepteurs et les signaux de costimulation pour initier l’expansion clonale des lymphocytes B avec production d’anticorps (Abbas et al., 2000).

Introduction : La BPCO

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Ces données sont quelque-peu contradictoires et ne permettent pas de définir précisément la place des cellules T conventionnelles dans la physiopathologie de la BPCO. Leur rôle est vraisemblablement d'amplifier le processus et de participer dans les atteintes systémiques qui apparaissent secondairement dans la BPCO.

Figure 8 : Physiopathologie de la BPCO.

La fumée de cigarette inhalée active les cellules épithéliales et les macrophages qui libèrent de nombreux facteurs chimiotactiques recrutant ainsi les cellules inflammatoires au sein du poumon. Ces facteurs incluent le CCL2 qui agit sur le CCR2 pour le recrutement des monocytes, le CXCL1 et le CXCL8 qui agissent sur le récepteur CXCR2 afin de recruter les neutrophiles et les monocytes (qui se différencieront en macrophages une fois dans le poumon) et le CXCL9, -10 et -11 qui, via le récepteur CXCR3, recrutent les lymphocytes T auxiliaires et cytotoxiques qui relargueront de l’IFN-γ et de l’IL-17 continuant d’amplifier la réponse inflammatoire en stimulant les cellules épithéliales. Les cellules inflammatoires, avec les macrophages et les cellules épithéliales, libèrent des protéases telles que la MMP-9 ou MMP-12, qui causent la dégradation de l’élastine et l’emphysème. L’élastase produite par les neutrophiles induit également une hypersécrétion de mucus. Les cellules épithéliales et les macrophages sécrètent également du TGF-β qui stimule la prolifération des fibroblastes et donc la fibrose des petites voies aériennes. La production de CCL20 par les cellules épithéliales et les macrophages induit également le recrutement de cellules dendritiques spécialisées dans la présentation d’antigène et l’activation des lymphocytes T. Adapté de Barnes PJ., 2009.