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I.5. Le système BER 1. Généralités

I.5.2. Les ADN glycosylases

I.5.2.5. Les stratégies permettant des études structurales sur les ADN glycosylases

Tout d’abord, on peut rappeler que les ADN glycosylases, hormis quelques enzymes procaryotes, font toutes plus de 200 résidus (Krwawicz et al., 2007), ce qui rend difficile voire impossible leur étude structurale par résonnance magnétique nucléaire (RMN), notamment si on veut étudier la structure de ces enzymes en interaction avec un ADN.

Sachant cela, les études structurales sur ces enzymes ont été réalisées, généralement par cristallographie de rayons X, ce qui donne l’avantage de pouvoir résoudre des structures de molécules de très grande taille pourvu que l’on trouve de bonnes conditions de cristallisation.

Par contre, l’inconvénient de la technique est qu’elle repose sur la stabilisation de molécules dans une conformation globale donnée, ne donnant pas ou peu d’informations sur la dynamique moléculaire couplée aux activités de ces enzymes. Afin de mieux comprendre ces phénomènes dynamiques, la solution qui a été mise en œuvre consiste en la stabilisation d’intermédiaires réactionnels qui puissent apporter des informations sur les étapes clés des activités des ADN glycosylases.

Cependant, si on reprend le modèle simplifié de Michaelis et Menten pour l’activité enzymatique :

E + S ES E + P

Alors on voit très rapidement que la stabilisation d’intermédiaires réactionnels sera impossible dans les conditions de mise en présence d’une enzyme active avec son substrat, car dans ces conditions le substrat est rapidement converti en produit (d’autant plus si on considère que l’on travaille à très haute concentration pour les études structurales). Les seules données structurales que l’on pourra obtenir dans ce cadre correspondent aux structures de l’enzyme libre, de son substrat, ou de son produit de réaction.

Afin de résoudre ce problème, des stratégies basées sur les connaissances mécanistiques issues de la biochimie des ADN glycosylases ont été utilisées.

La première étape de l’activité des ADN glycosylases correspond à un glissement le long de l’ADN non endommagé et/ou des sauts d’une position à une autre (Francis et al., 2003;

Zharkov et al., 2003), permettant à l’enzyme de trouver la lésion. Une stratégie pour mettre en évidence ce type de complexe primaire avec un ADN normal a été fondée sur une technique de pontage covalent entre la protéine et un ADN non lésé (Banerjee et al., 2006b).

La seconde étape correspond, dès que l’enzyme rencontre une lésion, à la reconnaissance primaire de celle-ci, ce qui permet à l’enzyme de sélectionner les lésions qu’elle va extruder de la double hélice d’ADN puis placer dans la poche de son site actif. Deux stratégies différentes de pontage covalent ont été utilisées pour investiguer structuralement les types de complexes présents entre l’inspection de l’ADN endommagé et la stabilisation de la lésion dans le site actif de l’enzyme (Banerjee et al., 2005; Banerjee et al., 2006a; Banerjee et al., 2006b; Lee et al., 2008).

A ce niveau, les lésions se retrouvent stabilisées dans la poche du site actif des ADN glycosylases (Complexes 1 et 4 de la Figure 17). Pour étudier ces complexes, les études structurales ont pris avantage de deux stratégies permettant d’éviter la catalyse enzymatique. La première repose sur la mutagénèse dirigée de résidus du site actif des enzymes pour abroger l’activité glycosylase en gardant la fixation spécifique à l’ADN endommagé (Slupphaug et al., 1996; Bruner et al., 2000 ; Fromme et al., 2003a). La seconde stratégie consiste en la définition et la synthèse d’analogues de lésions dont la liaison glycosidique est non métabolisable (Composés 17 à 19 de la Figure 17) (Schärer et al., 1995; Schärer et al., 1997; Chepanoske et al., 1999; Haraguchi et al., 2002; Wiederholt et al., 2002a; Ober et al., 2003; Coste et al., 2004;

Ober et al., 2005).

Ensuite, les étapes catalytiques correspondant à l’activité glycosylase de Fpg ont aussi été étudiées. Pour ce faire, des analogues d’états de transitions ont été utilisés, dont certains pour des études structurales (Composés 13 à 16 de la Figure 17) (Deng et al., 1997; Schärer et al., 1998; Haushalter et al., 1999; Hollis et al., 2000).

Arrivé à ce stade, on a deux cas de figures : (i) Pour les ADN glycosylases monofonctionnelle, les études structurales du produit de l’activité glycosylase ne posent pas de problème, car le site abasique créé est généralement un bon inhibiteur des ADN glycosylases, formant donc des complexes stables (Parikh et al., 2000). (ii) Pour les bi-fonctionnelles, il est nécessaire d’utiliser des analogues de sites abasiques ou sites abasiques stabilisés chimiquement pour pouvoir résoudre la structure de complexes avec les ADN glycosylases (Schärer et al., 1998; Castaing et al., 1992; Serre et al., 2002; Pereira de Jésus et al., 2005). De plus, pour les bi-fonctionnelles, il est possible de résoudre la structure du complexe covalent avec l’intermédiaire de type base de Schiff réduit au borohydrure de sodium (Complexe 5 de la Figure 15) (Fromme et al., 2002; Gilboa et al., 2002).

Par contre, à ma connaissance, aucune structure d’intermédiaires réactionnels de l’activité AP lyase n’a été résolue. Les dernières structures que l’on peut obtenir correspondent à celles des ADN glycosylases complexées à leur produit de réaction AP lyase, et ceci car ce produit de réaction est généralement un bon ligand pour les ADN glycosylases (Fromme et al., 2002).

Enfin, pour clore ce chapitre, on peut dire que toutes les techniques impliquant des mutants d’enzymes, des nucléotides modifiés, ou des stratégies de pontages covalents impliquent un biais qui ne peut être négligé, car ces modifications peuvent à elles-seules modifier légèrement les structures des complexes. En fait, pour valider ou invalider un modèle structural, une solution consiste à résoudre plusieurs structures pour un même complexe avec des stratégies différentes. Par exemple, on peut résoudre une structure avec une enzyme de type sauvage et un analogue de substrat non métabolisable d’une part, et avec une enzyme mutante et un substrat vrai d’autre part.