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II.2.2. Formation d’un complexe covalent abortif entre l’Hyd et LlFpg

II.2.2.1. Mise en évidence et caractérisation préliminaire du complexe covalent

Lors des études structurales sur le complexe formé entre LlFpg et le duplexe cHyd/C, nous avons obtenu des cristaux à 20 et à 37°C (voir Matériel et méthodes). La structure du complexe abortif présentée précédemment dans le chapitre II.2.1.3 a été réalisée à partir des cristaux obtenus à 20°C. Bien qu’observables à des concentrations supérieures en agent cristallisant que celles utilisée à 20°C (voir Matériel et méthodes), les cristaux obtenus à 37°C présentent un faciès similaire à ceux obtenus à 20°C, avec cependant une taille bien supérieure (600×200×200 µm et 200×100×50 µm, respectivement). Du point de vue de l’état de la protéine, les cristaux obtenus à 20 et 37°C varient significativement. En effet, l’analyse SDS-PAGE du contenu de chaque type de cristal indique sans ambiguïté que ceux obtenus à 37°C contiennent une espèce protéique de poids moléculaire supérieur à celui de la protéine libre, et cela à hauteur d’environ 50% (Piste 3, Figure 70A).

Figure 70 : Mise en évidence d’un complexe covalent entre LlFpg et le duplexe cHyd/C.

(A) : Analyse par SDS-PAGE des cristaux dissouts de LlFpg complexée au duplexe cHyd/C. (1) : Marqueurs de tailles. (2) : Cristal obtenu à 20°C dissout. (3) : Cristal obtenu à 37°C dissout. (B) : Analyse par SDS-PAGE-TRAP du complexe covalent formé entre LlFpg et le duplexe cHyd/C (voir Matériel et méthodes). Le tampon d’incubation utilisé est le n°5, et l’enzyme est diluée dans son tampon de stockage (voir Annexe). La concentration finale en Fpg pour les essais déposés sur les pistes 2 et 3 est de 12,5 µM.

Les complexes ont été incubés 18 heures à 37°C, puis l’essai déposé dans la piste 3 a subi une digestion de 30 min à 37°C en présence de protéinase K.

Fpg libre

Fpg - + +

Protéinase K - - +

ADN cHyd/C radiomarqué + + +

30 kDa 45 kDa

1 2 3

Complexe covalent

Complexe covalent dégradé

ADN libre

A B

D’après les marqueurs de poids moléculaires (Piste 1, Figure 70A), l’espèce protéique de plus grande taille (≈ 35 kDa) pourrait correspondre à un complexe entre LlFpg (≈ 31 kDa) et le brin d’ADN contenant la lésion (≈ 4,2 kDa). Ensuite, nous avons démontré que cette espèce de haut poids moléculaire correspondait bien à un complexe nucléoprotéique par incubation de protéine LlFpg en présence d’ADN radiomarqué (Figure 70B). Ainsi, l’analyse par SDS-PAGE-TRAP (autoradiographie de gels SDS-PAGE, voir le Matériel et méthodes) du mélange d’incubation indique clairement que c’est le brin lésé qui est associé covalemment à l’enzyme (seul ce brin est radiomarqué) (Piste 2, Figure 70B), et la sensibilité du complexe à la protéinase K confirme l’intervention d’un partenaire protéique dans ce complexe (Piste 3, Figure 70B).

Comme nous l’avons observé lors des essais de cristallogenèse (Figure 70A), ce complexe covalent est fortement favorisé lorsque les deux partenaires du complexe sont incubés à 37°C plutôt qu’à 25°C (Figure 71). On n’observe d’ailleurs plus du tout de complexe lors d’une incubation à 4°C (données non présentées). De plus, l’analyse par SDS-PAGE-TRAP indique que la réaction de pontage covalent est favorisée par la structure bicaténaire de l’ADN, et cela quelle que soit la température de formation du complexe (Figure 71).

Ainsi, on observe environ 4,8 fois plus de complexe covalent avec un ADN double-brin plutôt que simple-double-brin à 25°C, et 17 fois plus à 37°C (Figure 71). D’autre part, pour le duplexe cHyd/C, la réaction de pontage covalent est environ 8 fois plus efficace à 37°C qu’à 25°C (Figure 71).

Figure 71 : Effet de la température d’incubation et de la nature mono- ou bi-caténaire de l’ADN contenant le cHyd sur la formation du complexe covalent avec LlFpg.

Le tampon d’incubation utilisé est le n°5, et l’enzyme est diluée dans son tampon de stockage (voir Annexe). Le temps d’incubation est de quatre jours à 25 ou 37°C, et la concentration finale en Fpg est de 12,5 µM. L’analyse des résultats est faite par SDS-PAGE-TRAP (voir Matériel et méthodes).

Fpg - + + - + +

Duplexe cHyd/C + + + - -

-cHyd simple-brin - - - + + +

Température d’incubation (°C) 37 25 37 37 25 37

Pourcentage de complexe covalent 0 1,9 15,3 0 0,4 0,9 ADN libre

Complexe covalent

Même si la réaction de pontage n’est pas très véloce, la formation de complexe covalent est directement dépendante du temps d’incubation et de la concentration en enzyme, au moins sur les trois premières heures de réaction (Figure 72).

En effet, la vitesse initiale de formation de complexe covalent est multipliée par 2 lorsqu’on double la concentration en LlFpg dans les essais (traits pointillés, Figure 72). On est donc bien en présence d’une réaction catalysée par l’enzyme.

Ensuite, nous nous sommes intéressés à la caractérisation de la stabilité de nos complexes covalents. Ainsi, nous avons vu que ceux-ci sont clairement sensibles aux hautes températures (Figure 73).

En effet, si on supprime l’étape de dénaturation thermique de notre protocole de SDS-PAGE-TRAP (voir Matériel et méthodes), on détecte environ 1,8 fois plus de complexe que lorsque l’on réalise cette étape, et cela que ce soit la nature mono- ou bicaténaire de la sonde oligonucléotidique contenant le cHyd (Figure 73).

Figure 72 : Cinétiques de formation de complexe covalent entre LlFpg et le duplexe cHyd/C à 37°C.

Le tampon d’incubation utilisé est le n°5, et l’enzyme est diluée dans son tampon de stockage (voir Annexe). Deux cinétiques ont été réalisée à 37°C, avec des concentrations finales en Fpg de 12,5 et 25 µM.

L’analyse des résultats est faite par SDS-PAGE-TRAP (voir Matériel et méthodes). Des ajustements linéaires sur les données allant jusqu’à 183 minutes de réaction ont été ajoutés au graphique représentatif des résultats, et sont représentés par des pointillés. Les équations correspondant à ces ajustements sont indiquées.

y = 0,02x

y = 0,01x

0 2 4 6 8 10 12

0 200 400 600 800 1000 1200

Temps (min)

Pourcentage de complexe covalent

12,5 µM Fpg

25 µM Fpg

Afin de s’assurer que tous les complexes observés sont bien covalents, on a testé l’effet de l’absence de cette étape de dénaturation thermique sur le complexe non-covalent (incubé à 4°C pendant 15 minutes). Ainsi, la présence de SDS et la migration électrophorétique à température ambiante suffisent à dissocier les partenaires du complexe non-covalent (données non présentées). En conséquence, tous les complexes observés par SDS-PAGE-TRAP sont covalents, et ceci même sans réaliser l’étape de dénaturation thermique des échantillons. Cela nous permet donc de confirmer que notre complexe covalent est fortement instable à haute température, et il est probable qu’une incubation de plus de deux minutes à 90°C finirait par dissocier 100 % de nos complexes.

Outre la température, le pH influe aussi fortement sur la stabilité du complexe covalent, celui-ci étant clairement acido-labile (Figure 74). En effet, l’ajout de 100 mM final en HCl dans une solution (pourtant tamponnée avec environ 25 mM de tampons Tris et HEPES à pH 7,6 : voir Matériel et méthodes) de complexe covalent néoformé se traduit par une dissociation d’environ 63 % du complexe (Figure 74). Par contre, le complexe covalent est stable à pH physiologique et en présence de fortes concentrations de soude (Figure 74).

0 5 10 15 20 25 30

cHyd/C cHyd sb

Pourcentage de pontage covalent

sans chauffage à 90°C avec chauffage à 90°C

Figure 73 : Effet de la présence ou non de l’étape de dénaturation thermique du SDS-PAGE-TRAP sur la stabilité du complexe covalent formé entre LlFpg et le duplexe cHyd/C ou le cHyd simple-brin.

Le tampon d’incubation utilisé est le n°5, et l’enzyme est diluée dans son tampon de stockage (voir Annexe). Le temps d’incubation est de quatre jours à 37°C, et la concentration finale en Fpg est de 12,5 µM.

L’analyse des résultats est faite par SDS-PAGE-TRAP, mais en effectuant ou non l’étape de dénaturation thermique des échantillons pendant 2 min à 90°C (voir Matériel et méthodes).

Cette acido-labilité de notre complexe covalent est d’ailleurs fort intéressante, car elle explique pourquoi on n’a pas pu déterminer la masse de notre complexe par spectrométrie de masse (MALDI-TOF). En effet, la forte dilution et les conditions acides d’analyse par cette technique ont certainement eu pour conséquence de dissocier 100 % de notre complexe covalent. Par contre, cette analyse par spectrométrie de masse nous a permis d’observer qu’après dissociation du complexe covalent, l’oligonucléotide portant le cHyd était intact.

Cette observation indique immédiatement que la réaction de pontage covalent doit correspondre à une simple condensation de l’enzyme sur l’ADN lésé cHyd sans qu’il y ait une réelle métabolisation de la lésion.

II.2.2.2. Analyse comparative de la spécificité de la réaction de pontage et