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I.5. Le système BER 1. Généralités

I.5.2. Les ADN glycosylases

I.5.2.6. Les ADN glycosylases et la variabilité des immunoglobulines

Comme évoqué précédemment, le rôle principal des ADN glycosylases est le maintien de l’information génétique via leur participation à la réparation par excision de base.

Cependant, la participation de UNG, une uracile-ADN glycosylase eucaryote, à

Figure 17 : Mécanismes de réaction et inhibiteurs des ADN glycosylases.

(A) Mécanisme réactionnel des ADN glycosylases monofonctionnelles : Une molécule d’eau est déprotonée dans le site actif par une chaine latérale carboxylique de l’enzyme et positionnée pour attaque nucléophile sur le carbone anomérique. Dans l’état de transition (2), une charge positive apparait sur le ribose. Le produit de réaction est un site abasique (3). (B) Mécanisme réactionnel des ADN glycosylases bi-fonctionnelles : Mécanisme similaire à celui des bi-fonctionnelles, hormis le fait que le nucléophile est un résidu aminé de l’enzyme (souvent une lysine). Le produit de clivage de la liaison glycosidique (6) subit un réarrangement, et une β-élimination permet la coupure entre le phosphate et le côté 3’ du site abasique (8). (C) Inhibiteurs synthétiques des ADN glycosylases : (9) Site abasique, et ses formes réduites ou stabilisées chimiquement (10-12). (13-16) Analogues d’états de transition chargés positivement. (17-19) Analogues de nucléotides avec une liaison glycosidique non clivable par les ADN glycosylases.

l’hypermutation somatique (SHM) assurant diversité et spécificité aux anticorps a récemment été évoquée (Neuberger et al., 2003; Martomo et al., 2006), indiquant donc qu’une enzyme sensée lutter contre la mutagénèse peut aussi participer à des effets promutagènes.

En effet, l’apparition d’uraciles dans l’ADN par désamination spontanée des cytosines en uraciles était connue (Duncan et al., 1982), amenant potentiellement des transitions G/C vers A/T dans tout le génome lors de la réplication. Cependant, il a récemment été montré que des désaminations enzymatiques étaient induites spécifiquement dans les séquences codant pour les régions variables des immunoglobulines dans les lymphocytes B. Ces désaminations sont dues à la désaminase AID (Activation-Induced cytosine Deaminase), et entrainent l’apparition de paires G/U dans l’ADN (Neuberger et al., 2003; Martomo et al., 2006).

Ces paires G/U sont alors directement une source de transitions G/C vers A/T dans l’ADN si on a réplication des paires G/U. De plus, l’activité de UNG sur les paires G/U crée des sites AP en face de guanines, qui donnent des transitions et transversions si ces sites AP sont utilisés comme modèle lors de la réplication (Martomo et al., 2006). Ces mutations correspondent surtout à des transitions G/C vers A/T, une adénine étant majoritairement insérée en face des sites AP par les ADN polymérases (Boiteux et al., 1982; Simonelli et al., 2005).

Néanmoins, on peut avoir d’autres types de mutations avec la machinerie de réplication normale, et encore plus si des ADN polymérases de basse fidélité sont recrutées. Ce n’est normalement pas le cas car l’activité de UNG est théoriquement suivie des actions de APE1 puis de la Pol β, qui est une ADN polymérase fidèle (Bebenek et al., 2004).

On peut aussi noter que UNG n’est pas la seule protéine de réparation qui soit impliquée dans la SHM, étant donné que les enzymes Msh2 et Msh6 (MutS-Homolog) du système de réparation des mésappariements sont aussi impliquées. Cependant, ces protéines sont sensées être couplées à des ADN polymérases réplicatives pour la resynthèse de l’ADN (Pol δ et ε), qui sont connues pour être relativement fidèles (chapitre I.5.4 sur les ADN polymérases et leur implication dans la mutagénèse induite par les lésions) (Bebenek et al., 2004).

La voie d’apparition des mutations via UNG dans le SHM est donc décrite comme venant majoritairement de la réplication de sites AP, ce qui ne devrait pas arriver si on avait un BER normal. En effet, dans ce cas UNG resterait fixée sur son produit de réaction jusqu’à intervention de l’APE1, justement pour éviter la réplication des sites AP (Parikh et al., 1998).

Le BER induit par UNG n’est donc pas conventionnel dans le cas de la SHM, ce qui peut être lié à la saturation du système BER par la création de trop d’uraciles dans l’ADN via l’action de

glycosylase ne serait pas plus saturée que la partie correspondant à l’action de UNG, ce qui augmenterait la quantité de sites AP non-réparés pouvant être substrats pour les ADN polymérases. Dans ce cadre, des études pourraient être menées afin de déterminer si il n’y aurait pas surproduction de UNG (ou intervention d’autres uracile ADN glycosylases potentielles) par rapport aux autres acteurs du BER, ou s’il n’y aurait pas sous-production d’AP endonucléase dans les lymphocytes B.

D’autre part, les publications évoquées précédemment indiquent que la mutagénèse du SHM viendrait aussi du recrutement d’ADN polymérases de basse fidélité (Pol θ, η, ζ, κ et REV1). Dans ce cas, et même si on ne trouve cette information que sous forme d’hypothèse (Diaz et al., 2005), l’intervention d’ADN polymérases non-fidèles pourrait participer directement aux mutations observées pour la SHM via la réplication de l’ADN, et cela sans avoir à passer par les sites AP, donc indépendamment de UNG. La façon dont ces polymérases seraient recrutées dans le cas de la SHM reste cependant à résoudre, étant donné que ce ne sont pas celles qui sont sensées participer aux voies de réparation induites par les protéines de réparation UNG, Msh2 et Msh6.

Une autre voie qui pourrait participer à la mutagénèse induite par UNG a été décrite par Neuberger et collaborateurs en 2005. Le dUTP, un intermédiaire lors de la synthèse de novo de dTTP, est incorporé lors de la réplication en donnant des paires U/A (Duncan et al., 1982).

L’hypothèse émise est qu’une uracile-ADN glycosylase inconnue (autre que UNG) enlèverait les U des paires U/A, induisant des mutations via la réplication par une ADN polymérase de faible fidélité des sites abasiques ainsi créés. Cependant, aucune donnée n’a été publiée pour étayer cette hypothèse. De plus, cette voie serait indépendante de l’AID, et serait donc possible dans tout le génome et dans tous les types de cellules en réplication.

D’autre part, il y a de multiples désaminases des acides nucléiques chez l’homme, dont beaucoup sont de fonction inconnue, si ce n’est que certaines sont capables de désaminer les cytosines dans l’ADN. Certaines pourraient donc être impliquées dans une mutagénèse UNG-dépendante dans d’autres régions du génome que celle codant pour les immunoglobulines, et dans d’autres types de tissus, pouvant ainsi participer à l’évolution des génomes, mais aussi à l’apparition de cancers.