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HCcorr 100/0 C -

HC90/C10stack 93/7 C Broyage dans l’eau

HCchem(AcOH) 86/14 P

Lavage dans acide acétique pendant t = 5

min

Cchem(AcOH) 0/100 P

Lavage dans acide acétique pendant t = 5

min

HCchem(H2O) 100/0 P Chauffage dans H2O à T

= 80 °C pendant t = 3 h

Cchem(H2O) 25/75 P Chauffage dans H2O à T

= 80°C pendant t = 3 h

HC30/C70hist 30/70 ? ?

HC65/C35hist 65/35 C ? ?

Tableau III. 1 : Échantillons décrits au cours de ce chapitre et utilisés dans la suite de notre étude.

III.D Stabilité des phases en mélange avec le liant organique

Une des préoccupations qui a motivé l’étude par DRX des échantillons historiques contenant du blanc de plomb était la stabilité des phases d’intérêt, une fois mélangées avec le liant organique. L’objectif était de vérifier qu’aucune transformation des carbonates n’ait eu lieu après un vieillissement de la peinture : on peut par exemple imaginer qu’une conservation sous certaines conditions puisse entrainer une variation de pH au sein même de la couche picturale, déplaçant ainsi le rapport HC:C.

En effet, des études ont mis en évidence après un long vieillissement l’apparition de carbonates de plomb lors de l’évolution d’un système [pigment + liant organique contenant de la litharge PbO] (Mazzeo, 2008). De même, une étude récente menée par IRTF Synchrotron a révélé que la litharge PbO, fréquemment utilisée comme siccatif dans les huiles de peinture pouvait subir des transformations menant à la formation de carbonates de plomb : des

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particules de litharge ont été déposées sur des gouttelettes d’huile de noix, et l’évolution du système suivie par l’étude de cartographies IRTF. Après un mois, un pic correspondant aux carbonates est apparu (Cotte, 2016). La quantité de carbonates formée n’a pas été mesurée.

Dans le cadre de notre étude, nous avons également mis en œuvre un vieillissement de systèmes [pigment + liant organique]. Des mélanges phase cristalline / liant organique ont été réalisés, dans des proportions correspondantes à celles d’une peinture classique (20:1 w%). Ces mélanges étaient préparés dans les conditions traditionnelles de travail utilisées par les peintres avant l’avènement des peintures à l’huile vendues déjà préparées : ajouts successifs du liant organique accompagnés de broyages répétés à l’aide d’un mortier. Trois types de liants ont été considérés :

 Huile de lin cuite pure, sans ajout de siccatif

 Huile de lin cuite avec ajout de siccatif PbO

 Colle animale

Nous avons considéré trois pigments en mélange avec chacun de ces liants : les phases pures cérusite et hydrocérusite, et un mélange 50:50 (w%) des deux phases. Les mélanges obtenus ont été étalés sur des lames de verre, en contrôlant l’épaisseur de la couche à l’aide d’un étaleur. Les épaisseurs 15, 30, 45 et 60 µm ont été testées.

Les échantillons ont été placés dans une enceinte de vieillissement (Memmert, HCP 108), en utilisant le cycle suivant, pendant 4 semaines, avec retrait d’un échantillon pour chaque phase chaque semaine :

T = 25 °C, RH = 30 % pendant t = 12 h, suivi de :

T = 35 °C, RH = 80 % pendant t = 12 h

Après retrait, chaque échantillon était analysé par DRX Bragg-Brentano, à l’aide d’un porte-échantillon spécialement adapté.

Les résultats obtenus n’ont indiqué aucune évolution des phases cristallines, quel que soit le temps de vieillissement considéré. Il semble donc que dans les conditions de simulation choisies pour cette expérience, aucune variation de pH de la couche de peinture (du moins

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suffisamment importante pour entrainer l’apparition de C dans HC ou vice-versa) n’ait eu lieu. Il est évident que les paramètres de vieillissement testés ne constituent qu’un seul type de conditions climatiques, et que la nature même du vieillissement simulé en enceinte est sujette à caution. Cependant, nous avons volontairement choisi des conditions « extrêmes » de température et d’humidité : nous partons donc du postulat qu’une transformation C ↔ HC n’a pas lieu au sein d’une couche de peinture conservée dans des conditions climatiques « normales ».

On peut noter que nous nous sommes fondés sur un liant de type huile de lin et non huile de noix, ce qui était le cas dans les travaux cités plus haut. De plus, il est possible que si une apparition de l’un ou de l’autre carbonate ait eu lieu dans le cadre de notre expérience, la teneur formée ait été inférieure aux limites de détection de la DRX de laboratoire utilisée, soit moins de 0,5 %. Dans tout les cas, ces tests appellent à de nouvelles expériences : il serait intéressant de faire varier d’une part les réactifs (particulièrement le liant), d’autre part les conditions du vieillissement.

Notons que cette étude ne porte pas sur les phénomènes de dégradation des couches picturales à base de blanc de plomb. Ces dégradations, menant à la formation des savons de plomb « nocifs », constituent un sujet d’étude important de la science des matériaux appliquée au patrimoine. De nombreuses études portant sur ces altérations ont été réalisées lors des dernières années (Kotulanova, 2009 ; Cotte, 2007 ; Hermans, 2016 ; Keune, 2016). Si l’on considère l’apparition de carbonates de plomb au sein des couches, en raison de la présence de litharge décrite par M. Cotte, une question intéressante est l’évolution à long terme de ces phases carbonates nouvellement formées : est-il possible qu’une couche entière de peinture garde un aspect intact, alors qu’une cristallisation est en cours, ou ces savons de plombs évoluent-ils systématiquement en protusions ? Quoi qu’il en soit, dans le cadre de notre travail, nous avons systématiquement travaillé sur des couches de peintures « saines », c’est-à-dire ne présentant pas de dégradation visible (par exemple protrusions), par examen macroscopique ou microscopique (imagerie MEB).

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CONCLUSION

Nous avons décrit au cours de ce chapitre les matériaux de synthèse utilisés au cours de notre étude. En effet, il est essentiel de travailler sur les phases cérusite et hydrocérusite pures, afin de définir précisément leurs propriétés. Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, les morphologies de ces phases peuvent varier : nous avons donc effectué des mûrissements afin d’obtenir différentes morphologies de cristallites.

Avant de nous pencher sur l’étude de ces phases au sein même des œuvres d’art, nous avons reconstitué les procédés post-synthèse anciens, et observé leur effet : on a ainsi pu constater qu’un traitement acide entraine la formation de cérusite, tandis qu’un traitement aqueux menait à une augmentation de la teneur en hydrocérusite, via la formation de cristallites de tailles importantes.

Au cours de ce chapitre, nous avons également précisé la formation des produits de corrosion lors de l’attaque du plomb métallique par la combinaison de vapeurs d’acide acétique et de CO2. La filière de synthèse par corrosion du pigment blanc de plomb, en équilibre avec le mélange gazeux H2O, CO2, O2, AcOH a été établie pour la première fois. Ce résultat permet ainsi par exemple de préciser la place de la phase plumbonacrite dans le mécanisme de synthèse du pigment.

L’ensemble de ces résultats permet de proposer une première grille de lecture à utiliser lors de l’analyse d’un pigment blanc de plomb historique (Tableau III.2).

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Composition du blanc

de plomb Conditions de corrosion Traitement Effet sur les cristallites

100 % HC Synthèse très brève - ?

100 % HC Synthèse « classique » Traitement aqueux + chauffe

Cristallites de taille importante

HC:C > 60:40 Synthèse « classique » Traitement aqueux

Morphologie particulière (arrêtes émoussées en cas de broyage par ex ?) HC:C > 60:40 Synthèse « classique » - - C > HC

(jusqu’à 100% C ?) Synthèse « classique » Traitement acide

Recristallisation : fautes d’empilement de C? Érosion des cristallites

d’HC C > HC

(jusqu’à 100% C ?) Excès de CO2

C > HC (jusqu’à 100% C ?)

Pigment détaché des lames de Pb au sein de

l’empilement C > HC

(jusqu’à 100% C ?) Épuisement de la source de CO2 Traitement aqueux

Présence d’acétate Épuisement de la source de CO2

Présence de P Synthèse « inachevée »

(ou savons de plomb) - -

Tableau III. 2 : Résultat de différentes conditions de corrosion et traitements post-synthèse sur la composition d’un pigment blanc de plomb.

Enfin, la stabilité de mélange [pigment + liants organiques] dans le temps a été testée. Si dans le cadre de notre étude, ce mélange s’est avéré stable (pas de formation de carbonates détectée), ce point particulier reste à approfondir, en testant diverses conditions de vieillissement.

Ces résultats nous permettent d’aborder l’étude du blanc de plomb des œuvres peintes munis d’un référentiel de réflexion plus précis. Dans le but de retrouver des indices quant aux diverses qualités de pigment employées par les peintres, nous allons maintenant employer la méthode de DRX pour avoir accès à la microstructure et à la composition du blanc de plomb utilisé dans les œuvres peintes.

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Chapitre IV ÉTUDE CHIMIQUE

MICROSTRUCTURALE DU BLANC DE PLOMB