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Spectroscopie de résonance magnétique électronique (RME)

Chapitre 2. Méthodologie, échantillons et techniques analytiques

2.4. Techniques analytiques

2.4.4. Spectroscopie de résonance magnétique électronique (RME)

La spectroscopie de résonance magnétique électronique (RME) permet de détecter et caractériser les systèmes qui présentent des électrons célibataires, à savoir les composés paramagnétiques, les composés ferro- ou ferri-magnétiques, les radicaux, certains défauts dans des cristaux etc.

a. Principe

Lorsque des matériaux présentant des électrons célibataires sont soumis à un champ magnétique 𝐵0, on observe la levée de dégénérescence des niveaux d’énergie de spin 𝑆 en 2𝑆 + 1 états par effet Zeeman. La RME est fondée sur l’interaction résonante entre un rayonnement micro-onde et ces états magnétiques d’électrons célibataires. Les résonances sont induites par l’interaction entre les électrons célibataires du matériau et la composante magnétique de l’onde électromagnétique micro-onde (𝐸1,𝐵1), orthogonale au champ 𝐵0 et de plus faible amplitude.

En spectroscopie RME et contrairement à la plupart des techniques spectroscopiques, la fréquence 𝜈 de l’onde électromagnétique est fixe et le spectre est enregistré en fonction du champ magnétique 𝐵0. La transition RME a lieu pour des écarts d’énergie tels que :

𝛥𝐸 = ℎ𝜈 = 𝑔𝜇𝑏𝐵0 (21)

avec 𝑔 le facteur de Landé (𝑔𝑒= 2,0023 dans le cas d’un électron isolé) et 𝜇𝑏 le magnéton de Bohr. Dans une molécule ou un solide, la valeur du facteur 𝑔 dépend de la structure électronique et du couplage spin-orbite qui dépend de la charge du noyau. Pour les radicaux libres organiques, qui ne contiennent que des atomes de H, O, C ou N, le facteur est très proche de 𝑔𝑒 (|𝑔 − 𝑔𝑒| < 0,001), tandis que pour des éléments comme les ions de transition, il peut s’en éloigner significativement (|𝑔 − 𝑔𝑒| < 0,1).

b. RME des composés ferro/ferrimagnétiques

i. Les différents types de magnétisme

Les matériaux contenant des électrons non appariés possèdent un moment magnétique permanent18 (Binet, 2012). Si les moments magnétiques permanents des différents atomes sont indépendants, le matériau est dit paramagnétique. Dans ce cas, en l’absence de champ magnétique, les moments magnétiques sont orientés aléatoirement et l’aimantation totale est nulle. Si un champ magnétique apparaît, les moments s’alignent de manière réversible selon la direction du champ et l’aimantation prend une valeur non nulle.

Certains systèmes sont magnétiquement ordonnés, c’est-à-dire que des interactions existent entre les différents moments magnétiques permanents des atomes : même en l’absence de champ magnétique, les moments adoptent des orientations préférentielles les uns par rapport aux autres. Si les moments magnétiques sont colinéaires, le matériau est dit

ferromagnétique. Si les moments magnétiques forment deux sous-réseaux à aimantation

antiparallèle qui se compensent exactement, le matériau est dit antiferromagnétique et

18 Les couches électroniques pleines conduisent quant à elle à l’apparition d’un moment magnétique induit en présence d’un champ magnétique (diamagnétisme), de sens opposé au champ et d’intensité négligeable devant celle du moment magnétique permanent. Les composés aux couches électroniques totalement remplies (sans électrons célibataires) sont qualifiés de diamagnétiques (exemple : la calcite).

possède une aimantation globale nulle. Enfin si les deux sous-réseaux ne se compensent pas exactement, le matériau est dit ferrimagnétique et possède une aimantation résiduelle non nulle. Les différents types de comportement magnétique sont illustrés sur la Figure 33.

Figure 33 : Principaux types de comportement magnétique (traduit de Mathew & Juang, 2007).

ii. Le superparamagnétisme

Pour les matériaux ferro- ou ferri-magnétiques, l’aimantation s’oriente souvent préférentiellement selon certains axes cristallographiques : il s’agit de l’anisotropie magnéto-cristalline. La barrière d’énergie 𝛥𝐸 à franchir pour passer d’une orientation préférentielle à une autre est telle que 𝛥𝐸 = 𝐾 × 𝑉 avec 𝐾 la constante d’anisotropie magnétocristalline qui dépend de la structure du matériau et 𝑉 le volume.

Pour 𝛥𝐸 > 𝑘𝑇, l’aimantation reste figée dans une certaine orientation préférentielle. Pour des volumes très petits correspondant généralement à des diamètres de particule inférieurs à 40 nm (Mathew & Juang, 2007), l’énergie 𝛥𝐸 devient inférieure à l’agitation thermique 𝑘𝑇. On observe dans ce cas une distribution aléatoire de l’orientation de l’aimantation des nanoparticules magnétiques qui conduit à une aimantation totale nulle. Si un champ magnétique apparaît, les nanoparticules s’orientent de manière réversible selon la direction du champ et l’aimantation totale n’est plus nulle. Les nanoparticules ferro- ou ferri-magnétiques présentent de ce fait un comportement similaire aux moments permanents des

atomes dans un matériau paramagnétique. Ce phénomène est appelé

superparamagnétisme.

La spectroscopie RME permet de mettre en évidence le superparamagnétisme à l’aide d’études expérimentales à différentes températures (Berger et al., 2001). En effet, une corrélation a été observée entre la température et la forme et la position du signal de résonance RME dans le cas de matériaux superparamagnétiques: plus la température diminue, plus la résonance s’élargit et se décale vers les bas-champs (Figure 34). Dans certains cas, la spectroscopie RME permet donc de mettre en évidence simplement la présence de nanoparticules de taille inférieure à 40 nm environ.

iii. RME du fer dans les matériaux

Dans notre étude, la spectroscopie RME sera principalement utilisée pour étudier l’environnement chimique et structural du fer. En effet, la spectroscopie RME permet de mettre en évidence les atomes de fer sous diverses formes:

- L’ion paramagnétique Fe3+ isolé en basse symétrie est détectable en RME avec en particulier une résonance avec un facteur 𝑔 apparent 𝑔𝑎𝑝𝑝 ~ 4,3 souvent observée et décrite dans les verres (Griscom, 1980)

- Les ions Fe2+ et Fe3+ en symétrie octaédrique et tétraédrique dans les ferrites (c’est-à-dire des composés ferrimagnétiques présentant une structure spinelle de type MeFe2O4 avec Me un métal quelconque) sont couramment étudiés par RME. Par exemple la magnétite Fe3O4 (ou la maghémite γ-Fe2O3, de structure identique) produit une résonance ferrimagnétique très intense pour 𝑔 ~ 2,16 (Griscom, 1984).

Figure 34 : Comportement superparamagnétique de nanoparticules de maghémite (source : Berger et al., 2001).

c. Appareillage

Le spectromètre utilisé est un BRUKER Elexsys E500 et un résonateur BRUKER SHQE de l’Institut de Recherche de Chimie de Paris (IRCP) à Chimie ParisTech19. La source du rayonnement est une diode GUNN qui génère des micro-ondes (bande X : environ 9,5 GHz). La fréquence du rayonnement est fixe et le balayage s’effectue en champ. Pour réduire le rapport signal sur bruit, on ne détecte pas l’absorption mais sa dérivée, en modulant le signal par un champ magnétique oscillant de fréquence 100 kHZ et d’amplitude environ 4 G. L’étude sera menée à température ambiante (RT) et à froid (10 K) pour examiner la présence éventuelle de composés superparamagnétiques contenant du fer.

Les paramètres d’acquisition sont les suivants : - 𝐵0. : centré entre 1000 et 5100 G

- Puissance du rayonnement (atténuation): 18-40 mW - Température : ambiante ou 10 K

- Temps de conversion du convertisseur analogique/numérique : 40,96 ms - Constante de temps du filtre : 10,24ms

d. Préparation des échantillons

Les échantillons sont découpés en petits morceaux millimétriques et introduits dans un tube en quartz pur de diamètre 3 mm, à une hauteur inférieure à 1 cm. Les poudres sont

introduites directement dans le tube. Comme la RPE est une technique très sensible (centaine de ppb) les tubes vides sont analysés avant de les remplir pour pouvoir éliminer les signaux parasites.

e. Traitement des données

Après acquisition, les spectres des tubes vides sont soustraits aux spectres des échantillons pour s’affranchir d’éventuels signaux parasites. Les spectres d’absorption des échantillons sont ensuite normalisés par la masse d’échantillon introduite, ce qui permet de comparer les intensités par unité de masse, qui sont directement reliées à la concentration de l‘espèce absorbante.