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Spectres physionomiques et fonctionnels

Dans le document Spectres chorologiques et écologiques IV D (Page 27-55)

Les données considérées ici et leur exploitation suivent le même schéma que celui du chapitre précédent. Le but de ce chapitre est d’examiner la possibilité de mettre en évidence des critères physionomiques permettant de diagnostiquer certains aspects de la nature d’un type forestier donné. Dans plusieurs cas, très peu de travaux ont été menés et les discussions présentées ont alors davantage une valeur descriptive destinée à susciter l’intérêt d’études futures.

IV.2.1 SPECTRE DES TYPES BIOLOGIQUES

Ces aspects ont déjà été effleurés au chapitre III.3.3 mais en se limitant à la notion d’ensembles structuraux. Nous proposons d’aller un peu plus loin et de comparer l’importance des différents types biologiques décrits au chapitre II.4.1.1. Quelle est la contribution des arbustes, herbacées terrestres, épiphytes du sous-bois, arbres émergents, ..., à la diversité globale d’une communauté végétale ? Cette question a préoccupé et préoccupe encore bien des chercheurs à propos des forêts tropicales. Elle est particulièrement problématique car pour y répondre, il faudrait idéalement connaître toutes les espèces présentes dans un type forestier donné quel que soit leur type biologique. Or, au chapitre I.4, nous avions déjà attiré l’attention du lecteur sur la difficulté pratique d’envisager de tels relevés aussi complets. Nous avions par ailleurs mentionné le fait que les premiers à avoir réalisé les prémices d’un tel relevé en forêt tropicale, à savoir GENTRY & DODSON (1987), avaient procédé en inventoriant toutes les plantes présentes dans une surface bien déterminée (1000m²). D’autres ont par la suite renouvelé l’expérience en d’autres contrées en se basant sur des relevés de dimensions généralement plus petites: REITSMA (1988, 200m²), TCHOUTO & al. (1999, 100m²). Mais la prise en compte de surfaces plus petites n’est pas sans conséquences ! Il est clair qu’un relevé de 100m² ou même 200m² sera largement sous-échantillonné quant aux strates supérieures (arbres dominants, etc.) par rapport à des relevés de 1000m² comme ceux de GENTRY & DODSON. Par conséquent la proportion d’espèces d’arbres dominants par rapport au nombre total d’espèces du relevé (décrivant la communauté végétale) sera sous-évaluée pour les relevés plus petits, alors que pour ces mêmes relevés le nombre d’espèces des strates inférieures sera quant lui aussi représentatif, ou presque, que pour les grands relevés et donc les comparaisons qu’on peut faire entre ces deux types de relevés seront forcément biaisées. Citons un exemple concret en reprenant les réflexions de l’un des chercheurs qui se sont récemment penchés attentivement sur le sujet. REITSMA (1988, p.88) a largement discuté ces aspects au travers d’une synthèse de ses données personnelles et des principaux travaux de référence en la matière. Ce dernier a très justement effectué les comparaisons de diversité globale en ramenant les données de GENTRY &DODSON (1987) à la même surface que celle de ses relevés complets, et a ainsi montré que certaines forêts très diversifiées du Gabon n’avaient rien à envier (que du contraire) aux forêts néotropicales les plus riches, du moins à l’échelle d’une station et probablement d’une communauté végétale (ce qui soit dit en passant met en évidence les raisons essentiellement historiques des fortes différences en termes de richesse de flore entre les trois continents). Mais il a aussi comparé les spectres bruts de types biologiques et n’a dans ce cas pas pu ramener les données de GENTRY &DODSON à un niveau d’échantillonnage comparable. Il arrive alors à la conclusion que la riche forêt qu’il a étudiée au Gabon se caractérise par une plus forte proportion d’espèces herbacées et suffrutescentes par rapport à la forêt dense humide étudiée par GENTRY & DODSON en Equateur (23-30% contre 13%) et par une plus faible proportion d’espèces arborées (19-24% contre 32%). Or, au chapitre III.3.4, nous avons montré que des relevés de 200m² n’étaient représentatifs que pour à peine 20% des espèces d’arbres dominants et un peu plus de 40% des espèces d’arbres dominés observables sur une surface un peu plus grande (plus ou moins comparable à celle

des relevés de GENTRY & DODSON). Il n’y avait donc rien d’étonnant à ce que REITSMA

obtienne une proportion inférieure d’espèces arborées, puisque cette strate est en fait largement sous-estimée par rapport aux données de GENTRY & DODSON, et par conséquent une proportion supérieure d’espèces du sous-bois.

L’originalité de notre approche, complète, quantitative et représentative (cf. I.4), permet d’apporter une nouvelle contribution à cette problématique. En effet, dans notre cas, nous avons pris le temps de considérer les différents ensembles structuraux, et donc en partie les différents types biologiques, d’une manière équivalente en termes d’effort d’échantillonnage et donc de représentativité. Dans nos relevés, et contrairement à tous ceux de nos prédécesseurs, les principaux ensembles structuraux sont inventoriés à effort d’échantillonnage constant, ou du moins à représentativité très comparable. A ce stade, nous ne pouvons que renvoyer le lecteur au chapitre II.2, où nous avons longuement débattu de ces considérations, et rappeler brièvement que bien qu’il soit impossible de fixer un effort d’échantillonnage parfaitement équivalent entre strate herbacée et strates ligneuses, il est toutefois raisonnable de prétendre fixer des efforts d’échantillonnage comparables en termes de représentativité.

Les résultats que nous avons obtenus sont présentés au Tab.51. Les proportions sont présentées par communauté végétale plutôt que par relevé, afin de réduire au maximum les biais par manque de représentativité, qui sont par ailleurs négligeables même à l’échelle d’un de nos relevés puisque pour chacun de ceux-ci le manque de représentativité est supposé très comparable quel que soit le type biologique envisagé.

Tab.51 Spectre brut des types biologiques en % et en nombres d’espèces (RSp) pour chacun des types forestiers

étudiés et de manière globale pour l’ensemble des relevés. Seuls les relevés continentaux du Dja ne sont pas totalement comparables et manquent de représentativité (surtout les Ad). Les sous-totaux sont présentés pour les principaux ensembles structuraux: sup.= strate supérieure (A=E+Ass+Aco), moy.= strate moyenne (Ad), s-bois-L (plantes ligneuses du bois = arbustes et arbustes), s-bois-H (plantes herbacées et épiphytes du sous-bois). Les données présentées sont issues de l'ensemble des sous-relevés, constituant les différents relevés complets, quantitatifs et représentatifs, inventoriés pour chaque type forestier.

RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % RSp % E 46 15 22 8 29 14 39 10 25 13 35 18 63 13 48 14 39 13 56 18 117 11 Ass 38 12 22 8 18 8 38 10 27 14 27 14 53 11 36 11 39 13 36 11 102 10 Aco 34 11 32 12 22 10 42 11 27 14 24 12 57 12 40 12 40 13 37 12 100 10 moy. Ad 45 14 63 23 44 21 85 22 44 23 54 28 91 18 60 18 65 22 56 18 181 17 Lli 41 13 14 5 14 7 13 3 4 2 3 2 26 5 19 6 4 1 11 3 80 8 ar 49 16 43 16 29 14 62 16 23 12 19 10 79 16 66 20 36 12 44 14 208 20 Hs-ar 8 3 16 6 8 4 14 4 7 4 3 2 20 4 9 3 10 3 12 4 44 4 Ht 36 11 39 14 33 15 59 15 23 12 14 7 62 13 36 11 46 15 44 14 135 13 Hép 1 0 7 3 7 3 16 4 1 1 0 0 11 2 5 1 7 2 3 1 33 3 Hsa 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 1 0 Hépt 0 0 0 0 1 0 1 0 0 0 0 0 3 1 1 0 0 0 0 0 6 1 Hgr 12 4 8 3 8 4 11 3 12 6 10 5 16 3 12 4 11 4 10 3 20 2 HL 3 1 3 1 1 0 3 1 2 1 3 2 8 2 3 1 3 1 5 2 13 1 p 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 Indet 2 1 0 0 0 0 2 1 0 0 0 0 3 1 1 0 0 0 1 0 9 1 118 37 76 28 69 32 119 31 79 41 86 45 173 35 124 37 118 39 129 41 319 30 45 14 63 23 44 21 85 22 44 23 54 28 91 18 60 18 65 22 56 18 181 17 57 18 59 22 37 17 76 20 30 15 22 11 99 20 75 22 46 15 56 18 252 24 52 17 58 21 50 23 90 23 38 19 28 15 101 20 57 17 67 22 62 20 209 20 109 35 117 43 87 41 166 43 68 35 50 26 200 41 132 39 113 38 118 37 461 44 385 214 OrInfl Or Global 1050 315 300 LitInflBas LitInflCol 270 315 195 193 493 336 sup. s-bois

Cont MontSup MontTyp MontInf LitCotBas LitCotCol

s-bois-H s-bois moy. s-bois-L Total sup.

Nos résultats mettent en évidence plusieurs choses.

De manière générale, la proportion des espèces des strates supérieures représente aux environs de 40% (35-45%) de l’ensemble des espèces d’une communauté végétale de basse et moyenne altitudes alors que cette proportion n’est que de 30% (28-32%) en forêt submontagnarde. Voici l’explication que nous proposons.

Premièrement, il est bien connu que les forêts submontagnardes sont caractérisées par une canopée assez basse (souvent une vingtaine de mètres), mais aussi basse soit-elle, les arbres qui la constituent restent par définition des arbres dominants, certes plus petits mais au même titre que les grands sujets des forêts de plaine. Ce n’est donc pas la hauteur de ce type forestier qui est à mettre en cause. On sait aussi que les forêts submontagnardes fraîches, comme la plupart des autres types forestiers plus ou moins stressés, se caractérisent souvent par l’apparition d’espèces monodominantes. Ce fait est couramment rapporté pour la strate supérieure mais pas spécialement pour les strates inférieures, où ce phénomène semble occasionnel en forêt submontagnarde et bien souvent alors causé par la régénération abondante des espèces monodominantes de la strate supérieure. Il est donc vraisemblable que la plus faible proportion d’espèces des strates supérieures en forêts submontagnardes soit à imputer à ces phénomènes de monodominance. D’ailleurs, si on considère le spectre des types biologiques pondéré par les nombres d’individus, les différences évoquées n’apparaissent plus clairement (données non illustrées).

D’autre part, parmi les strates arborées supérieures, c’est de loin la strate des émergents qui présente l’écart le plus grand entre les forêts submontagnardes et les autres. On sait en effet, d’après nos observations personnelles sur le terrain, que les forêts submontagnardes, en plus d’être assez basses, présentent généralement une canopée sensiblement moins " cloquée " (pour reprendre le terme de BLANC 2002) qu’une forêt mature de plaine, c’est-à-dire plus plate en raison de la relative rareté des émergents. Cette raréfaction des émergents en forêt submontagnarde a déjà été citée comme une des principales caractéristiques physionomiques de ce type forestier, notamment par ASHTON (2003), POULSEN &PENDRY (1995), etc., mais n’avait pas encore à notre connaissance été démontrée de manière quantitative.

Etant donné que, selon notre méthodologie, les strates supérieures ne sont pas échantillonnées de manière moins représentative, on s’attend à ce que la proportion d’espèces de ces strates soit plus importante que les résultats obtenus par nos prédécesseurs. C’est effectivement le cas puisque nos 35-40% dépassent les 32% de GENTRY &DODSON (1987) et plus encore les 19-24% des relevés de 200m² de REITSMA (1988). On peut noter que ce dernier a aussi réalisé des relevés emboîtés (nested plots) dont le niveau supérieur est représenté par des parcelles de 1ha pour les DBH ≥ 5 ou 10cm, mais il est difficile sur base des données publiées de mettre en évidence des valeurs qui puissent être comparées aux nôtres.

Il faut aussi rappeler que les lianes ligneuses ont été un peu moins bien inventoriées dans notre étude que dans certaines autres. Toutefois, nous estimons que ce léger biais qui persiste dans nos données reste insignifiant.

Premièrement, tous nos relevés sont placés en vieille forêt avec tout au plus une légère influence hydromorphe ce qui n’est comme on le sait pas un habitat propice au développement d’un grand nombre d’espèces lianescentes, comme on peut le voir dans certaines forêts alluviales ou dans des types plus secs ou plus secondarisés, ou encore dans certaines forêts de pente forte.

Deuxièmement, s’il est vrai que nous n’avons pas inventorié de manière complète les lianes de nos relevés, nous ne les avons pas pour autant laissées de côté puisque celles présentes

dans les strates arbustives sont prises en compte ainsi que toutes celles présentes dans nos relevés complets de la strate herbacée, c’est-à-dire essentiellement les petites lianes, soit l’essentiel des individus observables (PARREN 2003). D’après la récente étude de PARREN

(2003), la contribution des lianes à la diversité d’une communauté de forêt tropicale peut varier de 12% (Smith 1970 in PARREN, Puerto Rico) à 31% (Hall & Swaine 1981 in PARREN) au Ghana, où l’abondance des lianes est réputée la plus élevée qui soit en forêts tropicales. Dans son étude en forêt gabonaise, REITSMA (1988) a observé de 14 à 35 espèces de lianes ligneuses par relevés de 200m². Quant à nous, nous avons observé de 3 à 26 espèces de lianes par communauté, exceptionnellement plus. Nous n’avons trouvé dans les travaux précités aucune information suffisante pour nous permettre de proposer une quelconque correction de nos observations. D’ailleurs, il est certain que l’abondance des lianes est extrêmement variable d’une station à l’autre, à l’instar de l’abondance des plantes de sous-bois. En outre, ceux qui se sont attardés sur les lianes n’ont pas forcément toujours recherché les plus vieilles forêts mais plus souvent des types un peu secondarisés ou très humides, favorables à la prolifération des lianes et donc à leur étude. Les rotangs par exemple (qui ne sont d’ailleurs pas toujours considérés comme des lianes) sont tous relativement confinés aux forêts secondaires ou ayant subi de fortes perturbations ; nous n’avons observé aucune tache ni même aucun individu adulte au sein de nos relevés de forêts matures.

Enfin, nous voudrions insister sur le fait que malgré les améliorations de notre approche méthodologique, nous restons loin d’un échantillonnage parfait, c’est-à-dire où tous les types biologiques sont inventoriés avec un effort identique. En effet, notre méthode permet d’inventorier de manière représentative les strates arborées supérieures, mais il est clair qu’entre les émergents (E), les arbres dominants (Ass) et les arbres co-dominants (Aco), les E sont moins bien représentés que les Ass et Aco.

Tab.52 Comparaison des spectres de types biologiques obtenus sur base d’un relevé complet et représentatif

(nested plot) (1) et sur base d’un relevé complet de 200m² (2) pour une station de forêt dense mature de terre ferme en fonds de vallée (vallicole, relevé Litb1 appartenant à la communauté LitInflBas). Les nombres d’individus (Ab) sont indiqués ainsi que les nombres d’espèces (RSp), le pourcentage rapporté au nombre total d’espèces (spectre brut). Enfin les sous-totaux pour certains ensembles de types biologiques sont mentionnés. Aucune plante saprophyte ou parasite n’a été observée dans ce relevé. Les valeurs obtenues par Reitsma (1988), pour des types forestiers comparables au Gabon, sont indiquées en face des ensembles de types biologiques dont il est question et qui ne correspondent pas forcément aux sous-totaux que nous avons préférés mettre en évidence. (*1720 individus sur 200m² soit 8,6 individus/m², dont 1,9 arbustes et 4,4 herbacées et suffrutex)

(1) Ab RSp % sp s-tot. (2) Ab RSp % sp s-tot. (3) RSp (3) % sp E 65 15 6,5 29 6 3,6 Ass 55 19 8,2 12 6 3,6 Aco 145 30 13,0 27,7 57 14 8,4 15,6 Ad 167 45 19,5 95 23 13,8 30-43 19-24 Lli 64 20 8,7 64 20 12,0 14-35 11-18 ar 426 43 18,6 387 39 23,4 22-41 18-25 Hs-ar 19 8 3,5 22,1 19 8 4,8 28,1 Ht 362 27 11,7 362 27 16,2 33-48 23-30 Hép 98 6 2,6 98 6 3,6 0-3 0-1 Hépt 1 1 0,4 1 1 0,6 Hgr 320 10 4,3 320 10 6,0 HL 79 6 2,6 21,6 79 6 3,6 29,9 14-34 11-17 Indet 222 1 0,4 197 1 0,6 Total 2023 231 1720* 167 125-201

Il est possible de renforcer nos remarques en utilisant nos données de relevés complets de strate herbacée, qui suivent donc la même méthodologie que les relevés des auteurs évoqués ci-dessus et, de manière générale, que ce que nous avons appelé des relevés " complets " au chapitre I.4 (cf. Tab.9). On peut alors comparer les résultats obtenus de cette manière avec les résultats obtenus sur le même relevé suivant la méthodologie du relevé " complet, quantitatif et représentatif " (Tab.52). On observe les mêmes écarts que ceux décrits au paragraphe précédent: les données obtenues par le relevé complet (Tab.52-2) sous estiment, par rapport aux résultats obtenus avec le relevé complet et représentatif (Tab.52-1), la proportion des espèces des strates supérieures et surestiment donc cette proportion pour les strates inférieures. Les valeurs du spectre brut qui traduisent plus fidèlement la réalité biologique sont donc celles en gras dans le Tab.52 et celles présentées au Tab.51 ci-dessus.

En conclusion, nous avons vu que les strates supérieures comptent 35-45% des espèces en forêt de plaine et 28-32% en forêt submontagnarde. Les trois sous-ensembles constituant la strate supérieure (E, Ass et Aco) sont généralement équitablement représentés avec un léger avantage aux émergents sauf en forêt submontagnarde où ces émergents représentent un pourcentage comparable voire inférieur aux deux autres constituants. Les arbres dominés (Ad) constituent un ensemble très important (près d’une espèce sur 5). Les lianes sont assez rares dans nos relevés et représentent de 1 à 7% des espèces (exceptionnellement 13%). Vient alors le sous-bois qui malgré sa faible biomasse contribue pour au moins 26% à plus souvent un peu moins de 2 espèces sur 5 (40%) et jusqu’à 43% de la flore d’une communauté végétale donnée. Au sein de ce sous-bois, les arbustes contribuent de manière variable entre 10 et 20%. Les sous-arbustes et plantes suffrutescentes représentent de 2 à 4% en forêt de plaine et de 4 à 6% en forêt submontagnarde. Quant aux plantes herbacées du sous-bois, elles représentent de 15 à 23% des espèces, soit à elles seules plus de la moitié des espèces du sous-bois et presque autant que les arbres dominés. La majorité des espèces herbacées du sous-bois est terrestre (7-15% du nombre total des espèces de la communauté), puis grimpante (3-6%, surtout Aracées). Les herbacées volubiles ou lianescentes ne représentent que 1 à 2% et les épiphytes du sous-bois (des troncs, etc.) sont généralement représentées par très peu d’espèces, atteignant 2% en forêts vallicoles et surtout 3 à 4% en forêts submontagnardes.

Outre les problèmes de sous-échantillonnage de certains ensembles biologiques comme les strates supérieures, d’autres difficultés gênent les comparaisons entre sources différentes. Pour les quelques études ayant considéré des relevés complets, les définitions de certains groupes biologiques peuvent varier ou manquer de précision. Par exemple, GENTRY & DODSON (1987) n’ont pas clairement défini dans laquelle de leurs catégories ils incluent les sous-arbustes et les herbacées grimpantes ou volubiles. REITSMA (1988), qui a vraisemblablement suivi la même méthodologie, ne distingue pas ces sous-arbustes, qu’il inclut dans les herbacées terrestres.

Ce dernier conclut que les herbacées et sous-arbustes contribuent à une plus grande part de la diversité en Afrique qu’en Amazonie (23-30% contre 13% pour GENTRY &DODSON, et 22% pour nous). Il fait également remarquer que la plus grosse différence entre ces deux continents se marque surtout pour les épiphytes qui représentent pas moins de 35% des espèces en forêt dense hyperhumide néotropicale contre moins de 1% pour les forêts qu’il a étudiées au Gabon. Nous obtenons quant à nous jusqu’à 4% en forêt submontagnarde.

Sur base des principaux ensembles biologiques évoqués dans de telles études, nous avons ici défini un système plus synthétique et plus détaillé dont nous voudrions recommander l’usage. Les publications de données de ce genre ne devraient alors pas se limiter à des sous-totaux afin de laisser la possibilité à d’autres de discuter correctement ces résultats.

IV.2.2 SPECTRE DES MODÈLES ARCHITECTURAUX, TYPES DE BASE DE TRONC ET

TYPES D’EXSUDATS

Nous traiterons ces aspects en deux chapitres: l’un essentiellement consacré aux strates ligneuses, l’autre au sous-bois. L’architecture des ligneux a été largement étudiée par Francis Hallé qui a récemment publié un document synthétique enrichi de nombreux exemples et avec une volonté d’étendre ses considérations aux plantes sous-arbustives et même herbacées, notamment au travers de la définition du modèle de BELL (HALLÉ 2004). Pour ces deux derniers ensembles biologiques (sous-arbustes et plantes herbacées) nous préférerons toutefois les travaux plus spécialisés de BLANC (2002).

IV.2.2.1 Modèles architecturaux pour les strates ligneuses

Jusqu’à ce jour, les modèles architecturaux n’ont été qu’effleurés d’un point de vue écologique. Or on peut se demander quels sont les modèles architecturaux les plus répandus en forêts denses humides et s’il existe des différences entre types forestiers. ROLLET (1979) avait déjà évoqué l’intérêt d’envisager une étude des spectres de modèles architecturaux et, par la suite, un seul auteur semble s’être penché sur le sujet : (DE FORESTA 1983). Comme toujours, le problème majeur est qu’on se heurte rapidement, en milieux forestiers tropicaux, à l’insuffisance des connaissances et pour bon nombre d’espèces on ne connaît que bien peu de choses. Nous avons néanmoins tenu à apporter notre pierre à l’édifice.

Etant donnés les nombreux objectifs que nous nous étions fixés pour ce travail, il est clair que l’identification des modèles architecturaux sur le terrain ne pouvait pas constituer une priorité. Certains modèles sont très faciles à identifier d’un coup d’œil rapide, certains s’identifient au bout d’un bref examen, d’autres en revanche peuvent nécessiter une attention plus soutenue. Notre philosophie fut la suivante: nous avons cherché à identifier un maximum de modèles architecturaux à condition de ne pas ralentir la collecte des autres données. Nous ne nous sommes donc attardés que sur les sujets pour lesquels il semblait relativement facile d’identifier le modèle architectural. Nous avons ensuite enrichi nos données en nous basant sur le peu de littérature qui cite des exemples de modèles architecturaux pour la flore africaine (HALLÉ 2004, HALLÉ &OLDEMAN 1970). Bien que notre étude soit largement insuffisante, étant donné le nombre d’espèces dont l’architecture est restée indéterminée, elle a toutefois le mérite de donner de nouveaux exemples pour la flore africaine et de présenter une liste synthétique de ces observations et de celles des auteurs précités.

Malgré le peu de données (seulement 30% des espèces dont le modèle architectural a été identifié, soit 319 espèces), il est assez évident que le modèle qui domine est celui de TROLL

(Fig.71). Ce modèle est en effet répandu au sein de la famille des Césalpiniacées, elle-même parmi les plus importantes dans nos inventaires (6,2% de nos espèces sont des Césalpiniacées). Parmi nos familles importantes en termes d’espèces, on peut encore citer les Annonacées (4,4% de nos espèces), chez lesquelles le modèle de TROLL est aussi très répandu, et les Euphorbiacées (5,1% de nos espèces), au sein desquelles il existe une plus grande diversité de modèles architecturaux. Le nombre relativement élevé d’espèces suivant le modèle de MASSART est essentiellement dû aux nombreuses espèces de Diospyros

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