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CHAPITRE II. ETAT DE L’ART SUR LES METHODES INDUSTRIELLES, LE

II.2 Usage des méthodes d'amélioration dans le secteur public

II.2.1 Les spécificités du secteur public

Un service public peut être défini comme une action effectuée par une autorité publique afin de répondre aux besoins d'intérêt général (Bodiguel et al. 2000). La notion d'intérêt général, basée sur des valeurs partagées par les membres d'une société, est une première différence avec le secteur industriel. Alors que le secteur industriel se concentre sur l'aspect financier et les segments de marché, le service public se préoccupe de la qualité du résultat et de l'équité (van Thiel et Leeuw 2002). Ainsi, dans le privé, la valeur commune qui rassemble les acteurs est la nécessité de profit et de rentabilité, permettant seuls de garantir la pérennité de l'entreprise. Dans le public, la valeur commune partagée par tous les collaborateurs réside dans l’importance du service rendu, la nécessité d'une utilisation optimale des ressources n'étant qu'une contrainte. Les trois critères du service public sont (Piastra 2013):

• critère organique : le service public n’est pas qu’une activité, c’est aussi un organe,

• critère du régime juridique : il cadre le contrôle de l’administration sur le privé et définit un régime juridique spécifique, celui du droit public, pour les activités d’un service public. La loi de Rolland identifie droit principes directeurs du service public qui sont (Rolland 1938) :

• continuité : en raison de la permanence du besoin auquel ils répondent, les services publics ne peuvent fonctionner par intermittence,

• mutabilité : le service public doit s’adapter aux changements de la société et à l’évolution de l’intérêt général,

• égalité : principe des valeurs constitutionnelles (droit accès égal, neutralité du service, participation égale aux charges du service, etc.).

Le personnel de la fonction publique dispose d’un statut différent des employés du secteur privé, notamment en termes de protection sur l’emploi. Si les fonctionnaires ont des droits comme les employés du secteur privé, ils ont aussi des devoirs qui sont (LOI n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale 2007) :

• obligation du secret professionnel, • obligation de discrétion professionnelle, • obligation de réserve, • obligation de désintéressement, • obéissance hiérarchique, • obligation de service, • obligation de neutralité, • obligation d’impartialité.

L’une des particularités entre les fonctionnaires et les employés du secteur privé réside dans la motivation et l’implication dans leurs tâches quotidiennes. En effet, une étude a démontré la motivation des fonctionnaires qui favorisent les actions pour l’intérêt général (Lyons et al. 2006). Pour intégrer la fonction publique, les candidats doivent obtenir un concours pour répondre aux exigences d’impartialités du secteur. De plus, la fonction publique dispose de ses propres institutions de formation. Cette dissociation de la formation entre le secteur privé et public peut être une raison des difficultés pour les deux secteurs à travailler ensemble, n’ayant pas développé le même langage (Farmer 1995).

Si on considère le périmètre d’une métropole, il existe un large éventail de services publics à fournir tels que le transport, l'énergie, l'éducation, les soins de santé, les bâtiments, les infrastructures physiques, les aliments, l'eau, la sécurité publique, etc. (Rouban 2010). L'ISO37120 qui traite de l'évaluation durable d'une ville identifie 16 domaines d'activités publiques : soutien pour l'économie, l'éducation, l'environnement, les finances, le feu et les interventions d'urgence, la gouvernance, la santé, les loisirs, la sécurité, l'hébergement, la gestion des déchets d'eau et de solides, les télécommunications, le transport, urbanisme, assainissement. Cette diversité d'intervention publique crée une complexité de gestion (Fox 2014). Elle augmente aussi la complexité de son organisation. Contrairement à une entreprise du secteur privé, le secteur public n’a pas d’activité centrale.

La présence de la partie politique dans l’organisation du secteur public est également une particularité à noter. L’action du secteur public retranscrit la stratégie politique du territoire où l’administration à la compétence d’agir. Il est difficile d’obtenir une cohérence entre la demande politique, soit la stratégie de l’organisation, et les moyens de mise en œuvre à la disposition de l’organisation (Rouban 2010).

Le secteur public a des impératifs moraux mais aussi juridiques pour satisfaire ses utilisateurs avec justice et équité, donnant droit de recours aux utilisateurs contre les institutions (Warin 1999). Le service public est régit dans le cadre du droit public (Rolland 1938). Dans ce contexte, l'identification des attentes des utilisateurs et la définition des services à fournir constituent des défis majeurs.

La dernière particularité du secteur public que nous souhaitons mettre en avant dans l’état de l’art est l’hétérogénéité des utilisateurs finaux. Le secteur privé, dans une approche marketing, segmente son activité en fonction des attentes d’une clientèle cible clairement identifiée. Or, le service public doit répondre aux exigences d’une clientèle ayant des univers socioculturels très diversifiés. D’ailleurs, le secteur de la santé se refuse d’utiliser le terme client mais préfère celui de « patient » pour démontrer le caractère unique de l’individu (Alford 2002). Le secteur public doit répondre aux exigences de deux types de « clients » sans user de méthodes préférentielles qui sont :

• le citoyen : individu qui jouit de l’usufruit du service public et qui de surcroit prend part à la vie démocratique du territoire (financièrement et démocratiquement parlant),

• l’usager : individu qui jouit de l’usufruit du service public sans participer à la vie de la cité (parfois ni financièrement et surtout ni démocratiquement parlant).

L’ensemble de ces spécificités constitue pour notre démarche des données d’entrées pour caractériser la performance et identifier les axes d’améliorations à mettre en place dans le secteur public.