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Les outils de l’abrasion : de la matière première au contexte d’utilisation

Chapitre 1 : Les roches exploitées et les caractéristiques recherchées

B. Les sources historiques et archives mentionnant la pierre crétoise

Comme nous l’avons mentionné préalablement, les sources historiques mentionnent depuis l’Antiquité l’existence de la pierre crétoise. Plus proche de nous, les textes provenant de la période d’occupation ottomane, puis les transcriptions de voyageurs nous le confirment. Dans

ces documents, les pierres à aiguiser sont présentées, en fonction de la période chronologique, comme pierre Naxia (pierre de l’Île de Naxos, pour cet aspect cf. BOLETI 2009 ; 2017), ou encore comme « pierre turque » ou même « pierre du Levant ».

Emmanuel Giannoulakis précise que la pierre à aiguiser crétoise est attestée à Marseille au XIXe siècle. Provenant de Candie (Heraklion), elle aurait été mise dans un bain d’huile d’olive pendant près de cinq mois dans le but de la durcir. Il est rapporté qu’à cette époque,

Elounda produisait 150 tonnes de pierres à aiguiser dont 50 étaient destinées à l’exportation

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Source internet :http://www.sharpening-stones.com/consultée le : 15 novembre 2012.

Fig. 19: Images de gisements exploités dans le cadre des carrières d’Elounda52.

La composition exacte de cette pierre crétoise reste à préciser. Plusieurs analyses et références consultées lui attribuent des classifications différentes et des variations de composants. Par exemple, on la retrouve classée tantôt dans la catégorie de la pyrollithe ou tantôt dans celle de la novaculite, à rapprocher dans cette hypothèse de la pierre à aiguiser

naturelle réputée de l’Arkansas, provenant des États-Unis. On la présente également, parfois,

comme une sorte « d’émeri » composée de couches et de substances sédimentaires à tendance

siliceuse. Seuls l’aspect de surface, l’efficacité et la qualité des gisements renvoient à des

informations cohérentes, singulières. On loue ses qualités abrasives et son grain précis et fin,

qui peut s’appliquer à un bord de coupe.

B. Les sources historiques et archives mentionnant la pierre crétoise

Comme nous l’avons mentionné préalablement, les sources historiques mentionnent depuis l’Antiquité l’existence de la pierre crétoise. Plus proche de nous, les textes provenant de la période d’occupation ottomane, puis les transcriptions de voyageurs nous le confirment. Dans

ces documents, les pierres à aiguiser sont présentées, en fonction de la période chronologique, comme pierre Naxia (pierre de l’Île de Naxos, pour cet aspect cf. BOLETI 2009 ; 2017), ou encore comme « pierre turque » ou même « pierre du Levant ».

Emmanuel Giannoulakis précise que la pierre à aiguiser crétoise est attestée à Marseille au XIXe siècle. Provenant de Candie (Heraklion), elle aurait été mise dans un bain d’huile d’olive pendant près de cinq mois dans le but de la durcir. Il est rapporté qu’à cette époque,

Elounda produisait 150 tonnes de pierres à aiguiser dont 50 étaient destinées à l’exportation

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Source internet :http://www.sharpening-stones.com/consultée le : 15 novembre 2012.

Fig. 19: Images de gisements exploités dans le cadre des carrières d’Elounda52.

La composition exacte de cette pierre crétoise reste à préciser. Plusieurs analyses et références consultées lui attribuent des classifications différentes et des variations de composants. Par exemple, on la retrouve classée tantôt dans la catégorie de la pyrollithe ou tantôt dans celle de la novaculite, à rapprocher dans cette hypothèse de la pierre à aiguiser

naturelle réputée de l’Arkansas, provenant des États-Unis. On la présente également, parfois,

comme une sorte « d’émeri » composée de couches et de substances sédimentaires à tendance

siliceuse. Seuls l’aspect de surface, l’efficacité et la qualité des gisements renvoient à des

informations cohérentes, singulières. On loue ses qualités abrasives et son grain précis et fin,

qui peut s’appliquer à un bord de coupe.

B. Les sources historiques et archives mentionnant la pierre crétoise

Comme nous l’avons mentionné préalablement, les sources historiques mentionnent depuis l’Antiquité l’existence de la pierre crétoise. Plus proche de nous, les textes provenant de la période d’occupation ottomane, puis les transcriptions de voyageurs nous le confirment. Dans

ces documents, les pierres à aiguiser sont présentées, en fonction de la période chronologique, comme pierre Naxia (pierre de l’Île de Naxos, pour cet aspect cf. BOLETI 2009 ; 2017), ou encore comme « pierre turque » ou même « pierre du Levant ».

Emmanuel Giannoulakis précise que la pierre à aiguiser crétoise est attestée à Marseille au XIXe siècle. Provenant de Candie (Heraklion), elle aurait été mise dans un bain d’huile d’olive pendant près de cinq mois dans le but de la durcir. Il est rapporté qu’à cette époque,

Elounda produisait 150 tonnes de pierres à aiguiser dont 50 étaient destinées à l’exportation

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vers divers pays. Le prix des pierres à aiguiser équivalait à cette époque à environ un euro par kilogramme53.

L’extraction en carrière de la pierre à aiguiser se déroulait du printemps à l’automne, de

Mars à Novembre. L’hiver, à cause de la boue et de la pluie, les gens travaillaient à la collecte des olives.

Afin de détacher les roches inutiles de la pierre à aiguiser, les hommes employaient la technique de la dynamite ou s’aidaient d’une mèche et de poudre à canon54. Les pierres à aiguiser étaient classées en trois couleurs - blanc, gris clair et noir - et en fonction de leur dureté, les pierres étaient qualifiées de pierres à aiguiser molles ou dures. Après l’extraction, le commerçant choisissait les pierres à aiguiser « vendables » en fonction des qualités énumérées ci-dessus. Les pierres à aiguiser étaient ensuite exportées vers la France, l’Italie, la

Suisse, la Turquie, la Syrie, le Liban, l’Égypte ou même le marché intérieur grec.

En parallèle (selon les témoignages de couteliers crétois à Héraklion), ces derniers, jusque dans les années 1960, s’approvisionnaient directement sur le terrain des sources rocheuses. Une expédition annuelle de quelques jours, à dos d’âne, leur permettait de ramasser sur les sites, des pierres naturelles, qui seraient ensuite utilisées pour l’aiguisage de leurs outils (enquête réalisée sur place par H. Procopiou au cours de l’été 2011).

Se pourrait-il que cette perception des supports lithiques et l’anticipation des choix aient été

pensées dès l’Âge du Bronze ?

Il s’avère que nos observations sur le matériel archéologique vont également dans ce sens, c’est-à-dire que l’efficacité de l’utilisation des outils repose d’une part sur la granulométrie, et d’autre part sur la ténacité de la matière lithique. Les grains en présence sont « apprivoisés » pour la reconnaissance et l’utilisation de supports abrasifs de qualité, efficaces lors de l’exécution des actions d’abrasion, d’aiguisage, d’affûtage et de polissage.

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Source :http://gocrete.blogspot.fr/2012/05/sharpening-stones-elouda.html, consultée le : 15 novembre 2012. Pour comparaison, la pierre à aiguiser d’Elounda est vendue 20 euros le kilogramme de nos jours en Grèce (à Athènes et Chania par exemple).

54Ce type d’action m’a été confirmé lors d’une conversation avec l’épouse d’un exploitant de carrière de pierre à

II- Perception des supports lithiques et anticipation des choix d’utilisation des outils

À l’Âge du Bronze, dans le monde égéen, les hommes ne procédaient pas à une

classification géologique stricte. Leur perception de la matière première leur permettait de

connaître les roches, possédant des degrés d’abrasivité plus ou moins fort. L’outillage de différents sites archéologiques qui ont fait l’objet d’une publication témoignent d’une telle

sélection (cf. par exemple BLITZER 1995 ; MCDONALD, RAPP 1972 ; BOLETI 2017 ; PROCOPIOU 2013). Ce phénomène a été observé en contexte artisanal contemporain,

comme nous le prouve l’étude ethnographique menée par Hara Procopiou sur le polissage de

la pierre en Inde (PROCOPIOU 2013). Pour ce faire, la perception cognitive implique un apprentissage et un savoir empirique du comportement des roches pendant la fabrication et

l’utilisation. Sont également mobilisés plusieurs sens, à travers un ressenti de la pierre par

palpation (sens tactile), une reconnaissance progressive des pierres au moyen du sens visuel

ou l’écoute du bruit de la pierre, au moyen de l’ouïe. De fait, les sens sont mis à profit pour

reconnaître les matières premières qui seront ensuite perçues comme plus performantes pour un degré d’abrasion spécifique, par exemple une abrasion intense ou plus modérée, fine selon les besoins (SCHOUMACKER 1993 ; DELGADO, RISH dans LONGO 2008).

III- La granulométrie

Les roches choisies comme support d’une activité abrasive contiennent des grains plus ou

moins fins, voire grossiers. Ces grains « sont des témoins de tout un ensemble d’actions chimiques et mécaniques » (GUYON, DELENNE, RADJAL 2017, p. 62). D’après nos observations macroscopiques, on reconnaît une corrélation entre le caractère compact et la

résistance du matériau. Lors de l’action abrasive, l’eau ou l’adjuvant (lubrifiant) employé pour l’occasion entraîne la cohésion des matériaux granulaires. Il en résulte que le degré d’abrasion plus ou moins fort des roches dépend des propriétés inhérentes des grains. Il nous apparaît important d’évaluer la taille des grains et des fibres qui définissent la grossièreté ou

la finesse de la pierre, et jouent un rôle clé dans le potentiel abrasif. La qualité des grains a une incidence sur le degré des actions abrasives. On observe qu’en phase finale d’abrasion,

lors de la phase de finition, l’utilisation d’un support lithique à grain fin est privilégiée ; les

supports à gros grains et grains « moyens » étant préférés lors d’actions abrasives de plus

grande intensité, notamment lors des premières étapes d’abrasions. Selon la finesse du grain,

un nombre est rapporté. Plus celui-ci est élevé, plus le grain est fin. On relève que les outils en

pierre à gros grains (estimés entre 80 et 100 sur l’échelle des valeurs des grains) impliquent

davantage de marques sur le métal. Au contraire, l’emploi d’un outil à grains fins implique

moins de marques sur la lame en métal. Les stigmates présents à proximité du fil du tranchant apparaîtront davantage comme des surfaces lisses. Les pierres de qualité, avec des grains très

fins, sont utilisées lors des actions finales d’abrasion, pour des actions de polissage ou

d’affûtage particulièrement modérées (légères). On peut noter en supplément que d’autres matériaux sont aussi employés en complément. On peut effectivement envisager de polir et de

lustrer les lames lors de l’ultime étape de finition avec du cuir, de la paille, une éponge

comme en témoignent les données ethnographiques. Matériaux périssables, ces derniers n’ont malheureusement pas été conservés au sein des zones d’habitats et des ateliers archéologiques sondés.

IV- La ténacité des roches, les échelles de détermination et les valeurs

La ténacité s’exprime comme la qualité de la solidité d’un matériau, incluant sa résistance

(définition du CNRTL disponible en ligne55). Elle est en quelque sorte la résistance à la rupture, conditionnée par la texture de la roche, intégrant ainsi la dureté de la matière première lithique. Des échelles présentant des valeurs de dureté peuvent être consultées dans le but de catégoriser les roches.