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Le matériel archéologique

Chapitre 1 Les outils archéologiques égéens

Le matériel archéologique, constituant notre corpus, provient de différentes régions égéennes. Il a été choisi suite aux découvertes réalisées sur les sites archéologiques égéens, dont les résultats ont ensuite été publiés dans les monographies et les ouvrages de références.

Ayant présenté brièvement le matériel et abordé les limites du sujet de façon succincte dans la première partie, plusieurs remarques peuvent être faites sur le traitement des données accordé aux outils étudiés. En effet, on relève que certaines publications peuvent ne contenir aucune note ou précision sur ce type de matériel. Souvent relégué et intégré à la catégorie généraliste et vague des outils abrasifs en pierre polie, il s’avère que les études portant sur les

traces de fabrication et d’utilisation de ces outils sont peu nombreuses et que la terminologie

employée pour les décrire est peu normalisée. En plus, un nombre restreint de pierres à aiguiser et pierres à affûter, polissoirs et autres outils de l’abrasion est mis au jour sur les sites

archéologiques. Ce manque d’informations est à rapprocher d’une mauvaise connaissance et

identification de ces outils, souvent méconnus des archéologues, provoquant des lacunes dans les sources bibliographiques.

I- Le corpus

En ce qui concerne le monde égéen, au cours de nos recherches de terrain, plus d’une

centaine d’outils provenant de dix sites de référence ont fait l’objet d’une étude directe, d’une analyse et d’un examen macroscopique approfondis. Quatre régions égéennes ont ainsi été

prises en compte : le Péloponnèse, l’Eubée, la Crète et le Nord-est égéen. La datation des outils couvre un intervalle large et prend en considération l’ensemble des périodes (et sous

périodes) de l’Âge du Bronze (Tableau 14).

Au vu des délais d’autorisations et des facilités d’accès aux exemplaires archéologiques, le matériel intégré dans le corpus s’avère donc relativement restreint d’un point de vue

Datation

Sites archéologiques égéens du corpus et datation des outils étudiés Âge du Bronze égéen Chronologie traditionnelle Crète Civilisation Minoenne A. Evans Crète Civilisation Minoenne N. Platon Grèce continentale (Helladique) Nord-Est égéen (Âge du Bronze) 3100–2700 MA I Prépalatial Helladique Ancien

Bronze Ancien Zygouries

Thermi I (3000) Troie I (3000-2600) à Troie IV

2700–2200 MA II Thermi III A et B

2200–2000 MA III Thermi IV A et B

2000–1900 MM I A

Helladique Moyen Nichoria,

Malthi Kommos 1900–1800 MM I B Protopalatial 1800–1700 MM II 1700–1600 MM III A Néopalatial 1650 – 1600 Helladique Récent I Mycènes Nichoria, Malthi 1600–1550 MM III B 1600 – 1470 Helladique Récent

II A Mycènes Nichoria,Malthi

1550–1520 MR I A Kommos 1520–1430 MR I B 1470 – 1410 Helladique Récent II B 1430–1400 MR II Postpalatial 1410 – 1370 Helladique Récent III A1 Mycènes Nichoria, Malthi, Korakou Midea 1400–1330 MR III A 1370 – 1315 Helladique Récent III A2 1330–1200 MR III B 1315 – 1225 Helladique Récent III B1 Destructions des habitations Panagia Houses Mycènes Nichoria, Malthi, Korakou Midea, Tirynthe 1200–1100 MR III C 1225 – 1190 Helladique Récent III B2 Subminoen 1190 – 1130 Helladique Récent III C1 Nichoria, Malthi,

Korakou Tirynthe Lefkandi

1130 – 1070 H. R. III C2

D’autres outils provenant de différentes régions, intégrant par exemple les Cyclades, sont

également mentionnés dans les conclusions. Lorsque les outils n’ont fait l’objet de notre part,

d’aucun examen et/ou d’aucune analyse, leur description avec le matériel examiné, se fonde

sur les recherches et les précisions apportées et livrées par les chercheurs dans les monographies de sites ou éventuellement les carnets de fouilles.

II- Les critères de description des outils

Tel que le mentionnait François Sigaut dans l’ouvrage Outils aratoires en Afrique,

Innovations, normes et traces, l’outil amène « au faire » (SEIGNOBOS, MARZOUK,

SIGAUT 2000 p. 10). Afin de décrire un outil de façon pertinente, plusieurs critères sont pris

en compte. D’une part, sa structure ; c’est-à-dire les matériaux, forme, dimensions absolues (en cm) et relatives (diverses parties de l’outil les unes par rapport aux autres mais aussi par rapport au corps de l’utilisateur), poids, angles (manche/lame par exemple), symétries,

asymétries, équilibres, réglages, dispositif d’emmanchement. Les propriétés qui résultent de

sa fabrication, pour la plupart sont des propriétés d’ordre intentionnel. D’autre part, son

fonctionnement ; c’est-à-dire la façon dont l’outil est mis en mouvement. Il s’agit d’identifier

le mouvement lui-même et les résultats sur la matière travaillée. La description des postures et des gestes de la personne est ainsi prise en compte. On relève également sa ou ses fonctions,

ce qui concerne l’ensemble des finalités de l’opération qu’une personne a effectuées

(SEIGNOBOS, MARZOUK, SIGAUT 2000).

Nous avons choisi de classer le matériel en plusieurs catégories : en nous appuyant sur la taille, la morphologie de l’outil, la présence de traces de mise en forme et/ou d’utilisation (stries, polis, résidus), la présence de grains plus ou moins fins, en nous intéressant également au fonctionnement des outils, nous concentrant également sur les postures et les gestes

possibles, c’est-à-dire aux actions d’abrasion exécutées.

De fait, plusieurs types peuvent se dégager. À partir des types définis, la chaîne opératoire pourra ensuite être remontée et esquissée progressivement.

III- Premier stade de classification des outils

Différentes sous catégories peuvent être précisées, considérant les morphologies primaires et résiduelles, les matières premières, les grains en présence (granulométrie) et les traces

On relève une surface de l’outillage lisse (EVELY 2000), induite par l’usure et/ou la

fabrication de celui-ci. Plusieurs spécificités peuvent être mises en évidence. Celles-ci se regroupent autour de différents types (Tableau 15).

A. Type 1 : Les pierres à aiguiser, à affûter et/ou polissoirs (possible polyvalence) de petit format ou format moyen

L’ensemble des outils de type 1 présente une forme oblongue, rarement trapézoïdale ou

triangulaire, très fréquemment carrée ou rectangulaire. Trois sous-types : 1A), 1B) et 1C)

caractérisent ce premier type d’outils (Fig. 112). Les stigmates observés sont des stries, des

polis et parfois des résidus, piégés dans les interstices de surface de la pierre.

Sous-type A) – Les outils possèdent une cannelure ou une perforation (marques

intentionnelles d’une mise en forme préalable de l’outil, avec des traces d’usage (stries/polis)

résultant de leur utilisation). La granulométrie des outils de type 1A) se compose de grains moyens à fins, émoussés.

Sous-type B) – Les outils de cette sous-catégorie sont de petits formats (< 10 cm de long) et

allongés. Nous avons choisi de les distinguer en les nommant « barres gommes ». Les outils contiennent des traces d’usage, des stries et des polis significatifs. Leur granulométrie est fine ou moyenne avec des grains émoussés.

Sous-type C) – Pour cet ensemble, les outils ont été catalogués - type plaque, blocs et

fragments de format moyen (et d’épaisseur plutôt moyenne). Ils retiennent des marques et des

traces d’usage (stries et/ou polis) liées à leur mise en forme préalable ainsi qu’à leur

utilisation. La granulométrie varie de moyenne à fine. Les grains ont tendance à être émoussés.

Fig. 112: Exemples de « pierres à aiguiser, à affûter et/ou polissoirs (possible polyvalence) » de TYPE 1 (avec les sous-types 1A), 1B) et 1C) représentés) (© N. Thomas).

B. Type 2 : Les outils fins abrasifs

Ces outils sont allongés. Ils présentent des traces d’usages (stigmates significatifs: les stries et les polis). Il s’agit souvent de « baguettes abrasives » (Fig. 113). On suppose que ces outils

ont été employés pour l’abrasion, l’aiguisage et l’affûtage de pointes et de petits tranchants

(hameçons par exemple). La structure granulaire se caractérise par des grains plutôt fins.

Fig. 113: Outil provenant de Tirynthe (Péloponnèse), caractéristique du TYPE 2 (© N. Thomas).

1 cm TYPE IB « barre-gomme » TYPE IA perforé TYPE IC Bloc- fragment Taille moyenne TYPE IB « barre-gomme » TYPE IA perforé TYPE IA cannelé

C. Type 3 : Les « pierres à rainures »

Ces outils de forme « graine de café » ou rectangulaire oblongue, font état d’une rainure

d’usage (Fig. 114). De par leurs stigmates et leurs formes, il s’agirait d’une abrasion de type

va-et-vient, avec comme résultat l’affinement et le rendu tranchant d’une lame (?). Les grains sont grossiers.

Fig. 114: Outil « pierre à rainure » provenant du site de Malthi (Péloponnèse), caractéristique du TYPE 3 (© N. Thomas).

D. Type 4 : Les « polissoirs »

Ces outils, présents dès le Néolithique ancien, perdurent au cours de l’Âge du Bronze et peuvent jouer un rôle complémentaire à celui des pierres à aiguiser et à affûter. Ces outils

étaient destinés à des actions d’abrasion légère, fine, en phase finale de l’abrasion pour des travaux de finition. Si l’on tient compte de leur aspect morphologique, il s’avère que les bords apparaissent comme plus arrondis que ceux des pierres à aiguiser et à affûter. On note qu’un polissoir peut présenter une surface plus unie et parfois moins accidentée, qu’une pierre à

aiguiser et à affûter. Ces outils sont de formes variées (triangulaire, rectangulaire, à tendance discoïde parfois) et ressemblent souvent aux pierres à aiguiser, à affûter (Fig. 115).

Les stigmates d’utilisation qui les caractérisent sont des polis très significatifs en surface. Il s’agit souvent, pour la plupart des exemplaires relevés, d’une utilisation « immédiate », l’outil n’ayant pas été mis en forme au préalable, d’où une certaine confusion avec les galets

naturels. Leurs surfaces sont lisses. Concernant la granulométrie de cet outillage, celle-ci se caractérise par la présence de grains fins à très fins.

Fig. 115: Exemples de polissoirs, caractéristiques du TYPE 4 (© N. Thomas). 1 cm

E. Type 5 : Les outils de l’abrasion « non identifiés »

Il s’agit par exemple d’outils à facettes multiples présentant une forme irrégulière, qui portent des traces caractéristiques d’actions abrasives, différentes des autres outils mentionnés

ci-dessus (Fig. 116). Les stigmates d’utilisation sont les stries et les polis.

Fig. 116: Outils de l’abrasion « non identifiés », caractéristiques du TYPE 5

en provenance de 3 sites du Péloponnèse : de gauche à droite - Malthi, Zygouries et Midea (© N. Thomas).

F. Type 6 : Les pierres à affûter de taille imposante (longueur > 10 cm) ou les outils dont

l’épaisseur est forte (> à 5 cm : le cube)

Ces outils de morphologie rectangulaire ou à tendance cubique, ont été employés pour

l’entretien de tranchants de grand format, proportionnels à leur taille et/ou épaisseur plus

imposante(s) en comparaison avec les autres outils type référencés par ailleurs (Fig. 117). Leurs grains peuvent être moyens ou grossiers, et compacts. Les stries et polis sont les deux catégories de stigmates relevés en surface des outils. L’utilisation des outils est en mode passif.

Fig. 117: Outils caractéristiques du TYPE 6 (provenant du site de Malthi dans le Péloponnèse) (© N. Thomas).

TYPE 1

Les pierres à aiguiser, pierres à affûter et/ou polissoirs (possible polyvalence) de petit format ou de format moyen

TYPE 1A :