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6. Chapitre 6 Conclusion

6.1 Sommaire des résultats de la recherche

Nos résultats montrent qu’il est possible de regrouper nos répondants selon qu’ils aient ou non élaboré une représentation des services d’eau. Il y a le groupe très majoritaire des indifférents qui n’ont aucun intérêt particulier pour ce service parce qu’ils en sont satisfaits : un service sans intérêt parce qu’il est somme toute correct et que, conséquemment, rien de ce qui s’y passe ne les touche. Le deuxième groupe est formé des répondants qui assimilent les services d’eau à l’environnement et qui pensent le service comme une partie d’un vaste écosystème. D’autres en font une question de santé/sécurité de l’eau et le comprennent comme un important déterminant de leur santé physique. Finalement, pour d’autres encore, le service et les infrastructures prennent, pour l’essentiel, la forme des coûts et de la corruption qui sont, selon eux, presqu’invariablement associés aux travaux. Globalement et indépendamment de leur système représentationnel, nos répondants sont conscients du mauvais état des réseaux d’eau et sont d’accord pour que la Ville s’occupe de remédier à la situation. Cet élément fait partie du système périphérique de chaque représentation.

Étant donné le caractère restreint de notre échantillon (91 répondants), il n’a pas été possible d’expliquer statistiquement quel type de répondant a une plus grande propension à adhérer à l’une ou l’autre des représentations. Toutefois, le regroupement des répondants ayant une représentation des services d’eau (ceux qui ne sont pas indifférents) a permis de repérer au moins une relation significative. Ainsi, lorsque l’occupation des répondants du groupe « avec représentation » a été comparée à celle du groupe de ceux qui y sont indifférents, il a été possible de constater que ce premier groupe contient un nombre plus élevé de retraités qu’attendu et un nombre de travailleurs inférieur au nombre attendu. Corollairement, le groupe des indifférents contient un nombre de travailleurs plus élevé qu’attendu et un nombre de retraités inférieur au nombre attendu.

Malgré qu’une seule relation se soit avérée significative, il a été possible de faire ressortir quelques liens statistiquement non significatifs, entre certaines représentations (ou éléments représentationnels) et certains groupes de répondants :

 les répondants dont la représentation du service est centrée sur les coûts/la corruption sont majoritairement des hommes (4/6, soit 67%) et des personnes de plus de 55 ans (4/6, soit 67%) ;

 Les répondants qui adhèrent à la représentation environnement ressemblent à monsieur madame Tout-le-monde ;

 les répondants dont la représentation s’articule autour de la santé/sécurité de l’eau sont majoritairement des femmes (6/7, soit 86%) et elles ont plus de 55 ans (5/7, soit 71%) ; En somme, la représentation que se font les répondants du service d’eau semble varier selon le genre : les hommes sont plus coûts/corruption et les femmes plus santé/sécurité de l’eau. La retraite est source de temps et semble contribuer à une implication citoyenne plus importante ainsi qu’à une prise de conscience des enjeux liés à l’eau. Lorsque les répondants sont des travailleurs, engagés dans une période active de leur vie aux plans professionnel et familial, ils n’ont élaboré aucune représentation du Service d’eau et cela se traduit par une absence d’intérêt pour une implication dans sa gestion : le service est bon, l’eau est bonne à boire et je n’ai pas vraiment le temps de m’en mêler. Si ces répondants décident de s’impliquer ponctuellement, c’est pour un enjeu qui les touche directement dans leur quotidien et impacte leur qualité de vie. Avec le retrait du marché du travail et le temps libre qui en découle, les répondants se forgent une représentation qui incite davantage à la prise de position et à l’action. Malgré que les services d’eau soient perçus par les répondants comme des objets techniques, spécialisés et souterrains, plusieurs d’entre eux seraient intéressés à participer à leur gestion. Cette participation s’articulerait autour des domaines qui sont associés aux représentations qu’ils se font du Service : environnement, investissements et gestion financière, santé/sécurité de l’eau, et viserait, dans tous les cas, une implication au niveau de la planification stratégique. Par exemple, participer à l’identification des enjeux prioritaires plutôt que participer aux décisions techniques concernant le choix des sites d’intervention ou encore la sélection des matériaux à utiliser dans les interventions. Loin d’eux donc l’intention de se mêler de la technique, grande crainte des gestionnaires publics qui ne semblent pas enclins à faire beaucoup d’efforts pour vulgariser et discuter des enjeux de la gestion des infrastructures, car «[d]éclarer d’un dossier qu’il est technique, c’est en effet le soustraire à l’emprise du débat public; reconnaître sa dimension sociale, c’est au contraire lui redonner une chance d’être discuté dans des arènes politiques» (Callon et al 2001, 45).

Quant à leur perception des savoirs ou compétences qu’ils pourraient mettre à contribution dans la gestion des services d’eau, plusieurs citoyens ont identifiés différents types de contributions dans lesquelles leurs expertises pourraient être pertinentes et utilisées. Ce sont d’abord des savoirs d’usage « la connaissance qu’un individu ou un collectif a de son environnement

immédiat » (Nez 2015, 54) : «L’eau pourrait être un facteur influençant la qualité de vie des citoyens, alors si on était touché par l’eau, je serais impliqué, oui ». Également des savoirs professionnels diffus «des savoirs professionnels sont mobilisés par des individus qui réinvestissent dans les dispositifs participatifs des compétences techniques issues de leur pratique professionnelle » (Nez 2015, 56) : «Faire des petits projets, comment recueillir l’eau, mettre en place des petits projets d’aménagement presque sculptural ». Et, finalement, des savoirs militants «savoirs et savoir-faire politiques – typiquement bien connaître les rouages de la machine […] réinvestis dans les dispositifs participatifs » (Nez 2015,58) : « Je trouve que c’est vraiment intéressant la démocratie. J’ai toujours été impliquée, toujours. […] Une participation citoyenne dans la gestion de l’eau ? […] exiger la transparence. S’ils faisaient de l’information, j’irais c’est sûr ».