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dans I-MEP2 (Ingénierie- Matériaux Mécanique Energétique

CHAPITRE 1: ÉTAT DE L’ART DES DEEE ET DES PROPRIETES

2.3. Solubilité des espèces

Une bonne solubilité des sels ou des molécules organiques est indispensable pour un grand

nombre d’applications telles que l’électrodéposition, les batteries lithium et dans le cas

présent la lixiviation. Le liquide ionique doit permettre la mise en solution d’une quantité

significative d’espèces complexantes afin d’abaisser le potentiel de corrosion du métal.

De même, l’oxydant doit être suffisamment concentré pour favoriser un haut potentiel

d’oxydation et une forte extraction des métaux précieux. L’aspect quantitatif et cinétique est

fondamental en vue d’un processus industriel.

Pour les raisons évoquées précédemment (cf. Choix des liquides ioniques) et du fait du

nombre important de combinaisons (liquide ionique + Oxydant (sel métallique)

+ complexant), nous avons principalement concentré notre étude sur les systèmes qui ont,

par le passé, démontré leur faisabilité en milieux aqueux ou liquides ioniques.

Ainsi, on retrouvera la thiourée ou le thiosulfate comme agents complexants et le Fe(III)

comme oxydant. La perspective de régénérer l’oxydant durant le processus

d’électrodéposition du métal nous a conduit à identifier des couples redox qui pouvaient

également être envisagés, tels que : Mn2+/Mn3+, Co2+/Co3+, Cr2+/Cr3+, Cr3+/Cr6+, Ti3+/Ti4+,

V4+/V5+, Pd0/Pd2+, Sn2+/Sn4+, Ag+/Ag2+, Cu+/Cu2+ et Ru4+/Ru8+, Ox1/Red1.

Soulignons que pour des raisons de confidentialité, le couple Ox1/Red1 restera sous cette

dénomination.

Les potentiels d’équilibres de ces couples doivent être suffisamment hauts, sans atteindre la

fenêtre anodique de nos liquides ioniques. Enfin, ces espèces doivent impérativement

subsister sous forme ionique dans leurs deux états d’oxydation et être peu toxiques.

Ces critères nous amènent à considérer plus spécifiquement les oxydants suivant :

Fe(III)/Fe(II), Co(III)/Co(II), Ox1/Red1.

Dans le souci d’être au plus près des conditions industrielles, nous avons volontairement

effectué ces tests de solubilité à l’air ambiant (cf. Annexes p236 section 3.2.1), en induisant la

présence d’une quantité d’eau inhérente et susceptible d’influer sur la fraction d’espèces

solubles. Compte-tenu des concentrations visées ( > 0,2 mol.L-1), nous pouvons dans un

premier temps, négliger la concentration en sel dissout dû à la présence d’eau (noté « sans

H2O », cf. Tableau 2.7). Parallèlement, la même expérience a été réalisée avec l’ajout d’une

quantité d’eau afin de considérer la variation de solubilité des espèces et la miscibilité des

liquides ioniques à l’hydratation controlée (noté « avec H2O », cf. Tableau 2.7). Dans ce

dernier cas, les espèces ont été préalablement dissoutes dans l’eau avant d’être introduites

dans le liquide ionique. La quantité d’eau introduite est variable et dépend de la limite de

solubilité de l’espèce considérée en milieu aqueux. Les résultats de solubilité pour les liquides

ioniques sont présentés dans le Tableau 2.7.

Tableau 2.7 : Solubilité à 80°C sous conditions atmosphériques avec et sans ajout d’eau pour

différentes espèces complexantes (Tableau A) et oxydantes (Tableau B) en milieu liquide ionique

[BMIM][CH3SO3], [BMIM][HSO4] et [BMIM][Cl].

Tableau A : Complexants Solubilité en milieu liquide ionique à 80°C

[BMIM][CH3SO3] [BMIM][HSO4] [BMIM][Cl]

Réactifs Formule

chimique Sans H

2

O Avec H

2

O Sans H

2

O Avec H

2

O Sans H

2

O Avec H

2

O

Thiourée SC(NH

2

)

2

oui oui oui oui oui oui

Thiosulfate

d’ammonium (NH

4

)

2

S

2

O

3

non faible non faible non faible

Thiosulfate de

sodium Na

2

S

2

O

3

,5H

2

O non oui non oui non oui

Chlorure de

sodium NaCl non oui non oui - -

Chlorure de

potassium KCl non oui non oui - -

Iodure de sodium NaI non oui non oui - -

Bromure de

sodium NaBr non oui non oui - -

Tableau B : Oxydants Solubilité en milieu liquide ionique à 80°C

[BMIM][CH3SO3] [BMIM][HSO4] [BMIM][Cl]

Réactifs Formule chimique Sans

H

2

O

Avec

H

2

O

Sans

H

2

O

Avec

H

2

O

Sans

H

2

O

Avec

H

2

O

Fer(III) FeCl

3

,6H

2

O oui oui oui oui oui oui

Fer(III) Fe(SO

4

)

2

(NH

4

),12H

2

O oui oui faible faible oui oui

HSO

5-

2KHSO

5

,KHSO

4

,K

2

SO

4

non oui non oui non oui

Co(III) [Co(NH

3

)

6

]Cl

3

non faible non faible non faible

Ox

1

Ox

1

O

y

non non non non non non

Ox

1

Ox

1

X

1

non non non non non Non

Ox

1

Ox

1

X

2

non faible non faible non faible

Ox

1

Ox

1

X

3

non faible non faible non faible

Ox

1

Ox

1

X

L

oui oui non oui oui oui

Oui = Solubilité égale ou supérieure à 0,2 mol.L

-1

(Tab A) et 0,1 mol.L

-1

(Tab B). Non = Solubilité inférieure à

0,01 mol.L

-1

. Faible = Solubilité inférieure à 0,02 mol.L

-1

.

La solubilisation des ions métalliques en milieu liquide ionique peut être séparée en deux

processus, impliquant i) la simple dissolution du sel métallique (au travers la coordination

avec l’anion du liquide ionique) et ii) la dissolution du métal avec son complexe de

coordination, dans lequel la sphère de coordination du métal reste intacte.

Dans la première dissolution, on retrouve la solubilisation de sel métallique chloré dans des

liquides ioniques avec des chlorures tels que FeCl3.6H2O dans [BMIM][Cl]. L’anion du LI est

une base de Lewis qui doit permettre la coordination du sel métallique par un mécanisme de

complexation. Ce système de solubilisation a largement contribué à la mise en solution de

divers sels métalliques, notamment pour l’électrodéposition de cuivre [56] à partir de CuCl ou

de fer [57] à partir de FeCl3. Bien que le chlorure de fer soit soluble pour chaque liquide

ionique, on peut s’attendre à ce que le mode de dissolution et les complexes résultants

diffèrent pour chacun d’entre eux.

Il apparaît clairement en Tableau 2.7, qu’à l’exception du FeCl3.6H2O, et de Ox1XL,

la solubilité des composés est très largement insuffisante. Ceci montre bien la difficulté des

liquides ioniques à rompre les interactions électrostatiques dans les sels métalliques.

La solubilité est supérieure lorsque l’anion du LI permet la coordination avec le sel métallique

([BMIM][Cl] et FeCl3.6H2O). Du reste, l’insolubilité de l’oxyde Ox1 (Ox1Oy) était prévisible,

bien que certains travaux aient montré une relative solubilité de quelques oxydes métalliques

en milieu liquide ionique [33]. À défaut d’une bonne solubilisation en l’absence d’eau, une

pré-dissolution en milieu aqueux a permis d’accroître, pour les trois liquides ioniques, la quantité

d’espèces en solution (complexant ou oxydant). L’utilisation d’un co-solvant peut néanmoins

être sujet à discussion. En effet, l’ajout d’une forte quantité d’eau (ex : 20% massique)

entraînera la perte de certaines propriétés physico-chimiques telles que la stabilité

électrochimique. Une alternative consisterait à retirer le co-solvant (ici l’eau) après la mise en

solution. Bien que cette démarche ait été réalisée avec succès dans des liquides ioniques, elle

est d’un faible intérêt industriel (aspects économiques).

Comme il a pu être discuté précédemment, l’utilisation de liquides ioniques incorporant des

groupes fonctionnels pourrait s’avérer extrêmement efficace pour la dissolution des sels

(TSILs). Toutefois, leurs coûts est un frein majeur et cette catégorie de liquides ioniques n’est

à ce jour pas disponible commercialement.

Néanmoins, les problèmes de solubilité des sels d’halogénures (NaCl, KCl, NaI, NaBr)

peuvent être surmontés par l’utilisation du liquide ionique comportant l’anion ciblé

([BMIM][Cl], ([BMIM][Br] ou [BMIM][I]).

Cette approche a l’avantage i) d’induire l’espèce active en forte concentration,

ii) d’éliminer le coût de l’espèce complexante et iii) d’éviter l’étape de pré-dissolution

(et évite ainsi l’utilisation d’un co-solvant). Néanmoins, la fenêtre de stabilité des halogénures

est réduite et décroît suivant l’anion tel que (cation BMIM+) [49, 58] :

Cl- (ΔE= 2,9 V) > Br- (ΔE= 2,7 V) > I- (ΔE= 2 V)

Compte-tenu du fait que les espèces Cl- présentent la plus importante limite anodique,

nous souhaitons en priorité évaluer le pouvoir de dissolution du liquide ionique [BMIM][Cl].

Une fenêtre anodique trop faible entraînerait la dégradation du liquide ionique ce qui est

incompatible avec nos objectifs industriels et environnementaux. L’anion iodure rentre dans

cette catégorie avec une limite anodique voisine de 0 V vs. Fc/Fc+, soit 400 mV plus basse

que la limite des anions Cl- [49]. Bien que l’introduction sous forme de sel puisse être

envisagée (NaI, KI,..), cela nécessite l’introduction d’une importante fraction d’eau qui

causerait une forte diminution de la limite anodique et cathodique du liquide ionique.

Il résulte de cette étude que, quelque soit le liquide ionique, la présence d’un co-solvant

permet d’accroître la teneur en espèces dissoutes. En l’absence d’eau, c’est la Thiourée,

FeCl3.6H2O, et Ox1XL qui montrent les meilleures solubilités pour les liquides ioniques.

Enfin, on constate également que la solubilité a varié suivant la nature de l’anion.

Tandis que les liquides ioniques [BMIM][Cl] et [BMIM][CH3SO3] ont des solubilités

semblables, le liquide ionique [BMIM][HSO4] a montré une très faible capacité de

solubilisation vis-à-vis de différentes espèces considérées. A ce stade, d’autres milieux

peuvent être considérés, mais rappelons qu’il est avant tout indispensable d’écarter les

systèmes inactifs et d’évaluer la ou les limitations vis-à-vis du processus de lixiviation de l’or.