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La Société auprès des pouvoirs publics : hygiénisme et ordre public

III - VERS LA RECONNAISSANCE DES MEDECINS

1) La Société auprès des pouvoirs publics : hygiénisme et ordre public

A travers la question de l'hygiène et de l'ordre public, il est possible d'étudier les rapports qu'entretient la Société des sciences médicales du département de la Moselle avec les pouvoirs publics représentés notamment par la Mairie, la Préfecture ou l'Etat. Il s'agit de voir comment et pourquoi cette fondation privée et locale, la Société des sciences médicales du département de la Moselle, peut développer une prétention d'action sur la sphère publique et entretenir un dialogue avec les autorités publiques.

Ces deux acteurs que sont l'Etat et l'association entrent-ils en concurrence, ou leurs rapports s'organisent-ils au contraire sous la forme d'un dialogue dont chacun tire profit ?

a) Origine et enjeux de la collaboration

conditions de sa préservation. C'est naturellement que cette société savante suscite et agrège des travaux portant sur l'environnement et les conditions de vie des populations qu'elle entend servir.

L' « hygiène publique » naît d'un raisonnement politico-économique à la fin du XVIIIe siècle, alors que l'on cherche à influer sur la longévité des populations pour accroître le nombre des hommes, et fonder la puissance d'un pays ou d'un territoire479. Cette doctrine invite naturellement les notables à répercuter les mesures préconisées par les médecins.

L'hygiénisme est la forme que prend au XIXe siècle ce souci à la fois des médecins et des responsables politiques d’œuvrer dans le but de rendre plus saines les villes transformées par la révolution industrielle480. Un tel projet passe par alors une meilleure connaissance des maladies et des moyens par lesquelles elles se propagent (un meilleur contrôle de l'air, de l'eau, la réorganisation de l'espace urbain), et donc sous-entend une action décisionnelle de la part des pouvoirs publics, appuyée par l'expertise dont se voit investi le corps médical.

La question de la santé est alors, selon cette vision, la chose des autorités publiques autant que la politique est la chose des médecins.

Basée à Metz, la Société des sciences médicales dialogue localement avec une administration municipale consciente du rôle historique de l'Etat dans le maintien de l'ordre public, et dans l'organisation sanitaire de la vie en communauté. Le pouvoir qui lui est délégué dans ce domaine est rappelé régulièrement dans les arrêtés au travers de la loi du 24 août 1790, titre XI, article 3 : « Les objets de police confiés à la vigilance et à l'autorité des corps municipaux, sont... 5°. Le soin de prévenir par les précautions convenables, et celui de faire cesser par la distribution des secours nécessaires, les accidents et fléaux calamiteux, tels que les incendies, épidémies, épizooties481 ». L'expertise des membres de la Société des sciences médicales est sollicitée afin d'éclairer la municipalité dans sa mission, afin de l'aider à définir le caractère « convenable » et « nécessaire » des actions mises en œuvre.

C'est à travers le comité de vaccine réuni par le maire de Metz de Turmel en 1819482 que les membres de la Société des sciences médicales entament le dialogue avec les autorités municipales dans des formes qui restent identiques jusqu'à la fin de la période : sur invitation des détenteurs de

479 NOURRISSON (Didier), Le buveur du XIXe siècle, Paris, Albin Michel, 1990, p. 186.

480 FAURE (Olivier), « Patrice BOURDELAIS [dir.], Les hygiénistes : enjeux, modèles et pratiques, Paris, Éditions Belin, 2001, 540 p. », Cahiers d'histoire [En ligne], 47-1 | 2002, mis en ligne le 29 juillet 2008, consulté le 02 avril 2015. URL : http://ch.revues.org/450

481 AMM 5 I 2, Arrêtés du Maire (1805-1822), Arrêté du Maire de la ville de Metz qui prescrit des précautions pour

arrêter les progrès de la petite-vérole, 11 octobre 1819, p.1.

482 AMM 5 I 2, Arrêtés du Maire (1805-1822), Arrêté du Maire de la ville de Metz qui ordonne l'impression et la

publication d'un rapport et d'une instruction du comité de vaccine sur la pratique de la vaccination, 2 octobre 1819,

la puissance publique, il leur est demandé de formuler un avis d'expert au travers d'un rapport qui adopte une forme constamment reprise par la suite. Après avoir rappelé la légitimité et l'importance de la demande qui leur est adressée, et avoir adressé des remerciements pour la confiance qui leur est accordée, les membres de la Société des sciences médicales chargés de l'écriture du rapport fournissent un ensemble de conseils sur la base de statistiques et d'observations médicales. Le rapport est signé Willaume, Desoudin, Rampont, Fristo et Morlanne483, membres de la Société des sciences médicales du département de la Moselle.

On perçoit ainsi les contours de la participation de la Société à l'hygiène publique. Son rôle est toujours circonscrit, elle se doit de renseigner et d'éclairer, de fournir des informations d'ordre strictement médical sur les causes de l'émergence et la propagation d'un mal, sans pour autant diriger les décisions du maire et du conseil municipal.

La Constitution médicale que la Société fait parvenir chaque année à la Mairie constitue un bon exemple de ce conseil suscité et reçu par le pouvoir municipal.

b) Un rapport régulier : la Constitution médicale et la mortalité de la ville de Metz

La Société des sciences médicales de la Moselle expose dans sa déclaration d'intention vouloir « éclairer l'autorité sur les mesures hygiéniques d'intérêt local ; de la tenir au courant des constitutions atmosphérique et des maladies régnantes, et de lui fournir, relativement aux maladies épidémiques qui surgissent, les moyens prophyactifs et curatifs.484 ».

A cette fin, elle fait chaque année parvenir à la Mairie une publication qui vise à tenir les pouvoirs publics informés de l'état sanitaire de la ville. D'abord ponctuelle et liée au contexte de lutte contre la variole en 1819 et 1820, cette publication devient plus fréquente à partir des années 1830. La Mairie prie alors chaque année la Société des sciences médicales de lui faire parvenir ce travail d'observation485. Ce rapport statistique s'inscrit alors dans un contexte de développement des études statistiques en France, et dont les travaux d'Adolphe Quételet constituent un exemple dans les années 1820 et 1830486. Les données recueillies par les experts sont présentées aux pouvoirs publics, soucieux de mieux définir l'état de la société et d'empêcher les soulèvements ou les

483 AMM 5 I 2, Arrêtés du Maire (1805-1822), Ibid., 2 octobre 1819, p.11.

484 COMTE (J. Achille), Annuaire des sociétés savantes de la France et de l'étranger, Paris, Victor Masson, 1846, p. 733.

485 AMM 5 I 125-128, Correspondance diverse (1820-1850), Lettre du Maire au Président de la Société des Sciences médicales, le 1er février 1831.

486 Mathématicien et statisticien belge, Adolphe Quételet (1796-1874) réalise des enquêtes sur un certain nombre de faits sociaux (mendicité, pauvreté, criminalité...) en vue de mieux les connaître et les maîtriser.

révolutions. C'est également au cours des années 1830 que se développe avec les travaux d'Ange Guépin une conception plus marquée du pouvoir que devrait se voir conférer le groupe des « capacités »487. Son ouvrage, publié en 1835 sous le titre Nantes au XIXe siècle, expose une certain nombre d'objectifs de participation politique et de diagnostic social qui peuvent également être ceux de la Société des sciences médicales de Moselle.

La Constitution médicale est réalisée par une commission permanente de quatre à cinq membres. Elle est parfois présentée dans l'Exposé sous forme de multiples tableaux dans lesquels sont organisées des données relatives aux différentes maladies présentes à Metz pour l'année passée. Sa structure et sa composition sont fixées définitivement à partir des années 1840. Elle est constituée d'une série d'observations, de descriptions et d'appréciations médicales ainsi que de données statistiques. Le rapport portant sur l'année 1855 présenté par le docteur Didion488 cherche ainsi à mesurer l'influence des variations météorologiques, pluviométriques et atmosphériques sur la propagation des maladies mois après mois. Il contient également une présentation du nombre de décès classés de différentes manières : selon l'appareil fonctionnel atteint, selon l'âge, selon la maladie... Par un tel travail, la Société des Sciences médicales pose le constat de l'inégalité des populations devant la mort, et s'attache à isoler scientifiquement (soit, par l'hypothèse et l'observation) l'origine de la misère populaire dans un but sanitaire.

A ce titre, le Constitution est d'abord un rapport statistique visant à rendre compte d'un état objectif de la situation sanitaire. Selon la conception de l'époque, l'opinion est dissociée des faits en matière de statistique489. Les prescriptions qui résultent de son examen ne sont pas délivrées par la Société elle-même, mais sont définies par la Municipalité à la lumière des données qu'on lui présente.

L'influence de la Société des sciences médicales reste malgré tout importante grâce à ce type de rapport, car comme le signale le docteur Didion : « si les chiffres se prêtent souvent à ce qu'on veut leur faire dire, il est des cas où les nombres sont des faits si évidents que rien ne peut en ébranler la valeur, et qu'ils demeurent comme l'expression de la vérité »490. En prétendant ne délivrer

487 LE MAREC (Yannick), Le temps des capacités. Les diplômés nantais à la conquête du pouvoir dans la ville, Paris, Belin, 2000, p. 211.

488 5 I 52-57, Fondation, correspondance, membres (1820-1870), Rapport statistique sur la constitution médicale et la mortalité de la ville de Metz pendant l'année 1855, par le docteur Didion, 1856.

489 LE MAREC (Yannick), Op. cit., 2000, p. 210.

490 5 I 52-57, Fondation, correspondance, membres (1820-1870), Rapport statistique sur la constitution médicale et la mortalité de la ville de Metz pendant l'année 1855, par le docteur Didion, 1856, p. 6.

que des faits objectifs, recueillis grâce à une méthode scientifique et présentés au moyen d'un talent d'exposition académique, la Société confère un pouvoir important à ses prescriptions.

En communiquant ses observations la Société des sciences médicales participe à sa façon à l'instruction du pouvoir public, qu'il veut informer de vérités scientifiques. Est-ce là la seule participation des membres au pouvoir politique à l'échelle de la ville, ou peut-on remarquer une implication plus directe des membres à la vie publique ?

c) Les membres de la Société au sein du conseil municipal

Un certain nombre d'études montrent que la présence des médecins s'est affirmée dans certaines institutions représentatives à la fin du XIXe siècle. On peut ainsi établir qu'en 1881, 62 députés sur 560 sont médecins, ce qui représente près de 11% des députés491. Avant l'avènement du régime républicain, certains membres du groupe social des « capacités », bourgeois cultivant les lettres, arts et sciences et pour nombre d'entre eux, membres de sociétés savantes, tentent déjà d'intégrer les institutions492.

Le Conseil municipal est un lieu important de la décision à l'échelle de la ville. C'est en particulier au sein de celui-ci que les « capacités », et plus précisément les médecins membres de la Société des sciences médicales, peuvent chercher à promouvoir leur groupe social et à faire reconnaître leur talent493.

D'après une étude menée sur la composition du conseil municipal de Metz au XIXe siècle494, au total dix membres de la Société des sciences médicales sont présents au conseil municipal entre 1800 et 1872. Cela correspond à 10% des membres titulaires de la Société, et à un peu moins de 5% des conseillers, soit un effectif assez réduit.

491 CHARLE (Christophe), Histoire sociale de la France au XIXe siècle, Paris, Seuil, 1991, p. 275. 492 LE MAREC (Yannick), Op. cit., 2000, p. 71.

493 Ibid, 2000, p. 71.

494 AMM, MULLER (David), Les conseillers municipaux de Metz de 1814 à 1871, mémoire de maîtrise d'Histoire, Université de Metz, 2000, 77 p.

Membres de la Société des Sciences médicales présents au Conseil municipal, 1800-1872.

On remarque que pour sept d'entre eux, cet investissement s'étale sur plus d'une décennie, si bien que deux d'entre eux ont également exercé d'autres fonctions : le docteur Chaumas est adjoint durant cinq ans, et Félix Maréchal assure les fonctions de Maire de la ville pendant dix-sept ans. Si l'on exclut le docteur Gorcy (qui n'est plus conseiller à partir de 1814), on compte au total neuf membres de la Société des Sciences médicales présents au Conseil municipal.

L'implication des membres de la Société des sciences médicales au sein du Conseil municipal peut s'expliquer de plusieurs façons. On constate que la majorité d'entre eux, soit six personnes, exercent leur mandat durant la période de la Monarchie de Juillet, entre 1830 et 1848. Ce régime est marqué par une implication plus importante des « capacités » et des membres de sociétés savantes dans les institutions politiques495 que par le passé Ils s'investissent notamment de manière directe au sein des Conseils municipaux ou généraux, mais aussi par l'élection de représentants496. A ce titre, l'implication des membres de la Société des Sciences médicales est plus marquée d'abord en raison du changement de régime et de la libéralisation de la vie politique. Effectivement, les membres de sociétés savantes reconnues par la loi sont comptés comme électeurs municipaux à partir de 1831497.

495 LE MAREC (Yannick), Op. cit., 2000, p. 66. 496 Ibid, p. 67.

497 CHALINE (Jean-Pierre), Sociabilité et érudition. Les sociétés savantes en France, Paris, CTHS, 1998, p. 111.

Autres fonctions Chaumas 1831-1843 Adjoint (1835-1839) 1865-1872 1800-1814 1835-1837 1820-1824 Maréchal 1830-1855 Maire (1854-1871) 1852-1865 1845-1848, 1852-1864 1835-1837, 1840 1830-1848 Membre de la SSMM Années au Conseil municipal Gehin Gorcy Lallement Levert P. Monard Puel Scoutetten Sido

Effectifs comparés des conseillers municipaux et des membres de la Société des Sciences médicales, 1840-1870498.

Cet engagement hors de la structure associative concerne une fois encore une portion très réduite des membres ; il s'agit d'un engagement local, essentiellement municipal, et il est généralement le fait des membres titulaires. On peut postuler que tous n'ont pas le temps à consacrer à une telle activité du fait de leur carrière médicale, et que seuls les membres les plus éminents de la Société des Sciences médicales, jouissant d'une fortune, d'une culture et d'une formation suffisantes sont attirés vers l'exercice d'un mandat politique.

Toutefois, certains membres de la Société s'illustrent dans une carrière politique plus poussée, qui dépasse la seule vie politique locale. L'exemple le plus significatif est celui d'Edouard Bamberger, docteur en médecine et membre titulaire depuis 1858, qui devient député de la Moselle en février 1871499. Il est possible de formuler la même remarque au sujet des carrières nationales : la société savante est un lieu de sociabilité qui n'a pas pour objectif l'édification et la formation aux carrières politiques de ses membres. Très peu d'entre eux décident de solliciter un mandat électif, et cela relève d'un choix personnel indépendant de leur participation à la Société des sciences médicales, même si cette dernière a pu leur permettre de tisser des liens d'amitié voire des affinités politiques en dehors des séances régulières.

La Société des sciences médicales de la Moselle est une structure collective qui n'empêche pas les trajectoires individuelles. De même que tous les membres de la Société ne cherchent pas à briguer un mandat au Conseil municipal, il se trouve au cœur de ce dernier des médecins qui ne sont

498 D'après l'Annuaire Historique et Statistique du Département de la Moselle, Metz, Verronais, 1819-1857 et La

Moselle Administrarive, Metz, E. Sauer, 1857-1871.

499 EL GAMMAL (Jean) (dir.), Dictionnaire des parlementaires lorrains de la Troisième République, Metz, Serpenoise, 2006, p. 42. Années 1840 31 (2) 1845 35 (1) 1850 30 (1) 1854 1860 32 (2) 1865 26 (1) 1870 32 (2) Conseillers muncipaux (membres de laSSMM)

pas membres de la Société des Sciences médicales500.

Si le pouvoir des médecins s'affirme davantage dans la ville au cours du siècle, on peut l'observer autrement que dans la composition des institutions.

d) La Société des Sciences médicales et l'extension de la parole médicale

Par les diverses formes que prend sa collaboration avec les autorités, par la communication de la Constitution médicale ou sa participation aux institutions, la Société des sciences médicales de la Moselle contribue à défendre un certain rôle politique des médecins501. Plus que par leur participation aux institutions, la Société contribue surtout à renforcer le pouvoir d'injonction des médecins en fournissant des prescriptions sur de nombreux domaines de la vie en société, et en faisant porter cette parole aux détenteurs de l'autorité.

Par exemple, la Société des sciences médicales met en place en son sein dès les années 1830 et sur invitation de son président une commission permanente d'hygiène publique. Il s'agit d'affecter certains membres de la Société à une tâche précise : élaborer des rapports et des travaux portant sur la police sanitaire et l'hygiène publique, car ceci est considéré comme une prérogative essentielle de la Société.

En dépit de sa mission affichée de simple conseil et d'expertise aux côtés des autorités, cette commission sait par moments se montrer revendicative. Elle fournit par exemple le 4 août 1868 un rapport sur l'état des fossés de la place de Metz502, dont il faut remarquer qu'il n'a pas été commandé par la municipalité, mais qu'il fait suite aux remarques adressées à la Société des sciences médicales par l'un de ses membres, le docteur Warin. Ce rapport est adressé par la suite aux « autorités compétentes » afin d'attirer leur attention et appeler à une action, mais dans ce cas précis il est à noter que l'initiative vient de la Société, s'appuyant sur l'observation de ses membres, leurs travaux antérieurs, et les « réclamations incessantes » du comité départemental d'hygiène. Deux appuis essentiels viennent finalement fonder l'autorité de ce rapport, outre la valeur scientifique de leurs auteurs : le fait que cette commission a été créée spécifiquement par le pouvoir auquel elle s'adresse, mais aussi le poids de l'autorité militaire à Metz qui pourrait pâtir de l'insalubrité des

500 AMM, MULLER (David), Les conseillers municipaux de Metz de 1814 à 1871, mémoire de maîtrise d'Histoire, Université de Metz, 2000, p. 32-33.

501 FAURE (Olivier), Histoire sociale de la Médecine (XVIIIe-XXe siècles), Paris, Anthropos-Economica, 1994, p. 114-115.

502 CBBr 8 g 8, Rapport de la commission permanente d'hygiène publique sur l'état de quelques fossés de la place de

fossés entourant la caserne Chambière.

On peut voir à travers cet exemple comment s'opère l'extension du domaine de la parole médicale vers d'autres secteurs de l'organisation de la vie en société. La Société des sciences médicales, reconnue à travers son rôle de commission permanente comme compétente sur les questions d'hygiène publique se prononce ici sur l'aménagement urbain de la ville de Metz. Ce n'est pas une exception à l'échelle de la ville où organisation urbaine et hygiène sont naturellement liés, car les services de la mairie en charge de l'hygiène et la salubrité font part systématiquement au bureau d'Architecture et de Voirie de leurs réflexions. Aussi la Société des sciences médicales se prononce parfois sur l'aménagement urbain, comme à travers les débats autours de la question du jardin botanique503 dont un membre réclame un temps la translation ou le réaménagement.

Le projet de la Société des sciences médicales se rapproche ainsi de celui qui est présenté dans les Annales d'hygiène publique et de médecine légale. Celles-ci annoncent dans leur prospectus inaugural de 1829 que « La médecine n'a pas seulement pour objet d'étudier et de guérir les maladies. Elle a des rapports intimes avec l'organisation sociale : elle aide le législateur, éclaire le magistrat, veille avec l'administration au maintien de la santé publique.504 »

La parole « politique » des médecins de la Société des sciences médicales, si l'ont considère son existence d'après ce qui a été dit précédemment, n'est pourtant pas subversive ou révolutionnaire, mais bien davantage morale et conservatrice. On peut lire à travers les prescriptions hygiénistes de la Société une dénonciation des comportements individuels505 conduisant à la maladie, qui à son tour provoque la dégénérescence morale, et réciproquement.

La Société des sciences médicales ne prend pas part aux décisions de politique municipale ou locale, mais ne fait qu'éclairer et fournir un avis qui se veut expert. Cet avis est librement construit par la Société au terme de débats au sein de la commission chargée de le rédiger, mais il demeure commandé par les pouvoirs publics qui en disposent comme ils l'entendent.

Lorsqu'il est dirigé vers les populations, leur discours sur la vie en société prend