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CHAPITRE 2. MATERIELS ET METHODES

III. Site expérimental : plateforme de valorisation d’une ISDND

La quasi-totalité des essais a été réalisée sur la plateforme de valorisation du biogaz issu d’une installation de stockage de déchets non dangereux (ISDND) située dans la région Centre-Est.

Nota : La description générale du site et les données chiffrées correspondent au fonctionnement du site jusqu’à fin 2016. Des travaux de modernisation et d’agrandissement de la plateforme de valorisation sont menés depuis fin 2016 et devraient être terminés courant 2017.

Généralités

Le site ISDND a été ouvert en 1972 et comprend actuellement51 une surface de 71 hectares, avec une capacité de 300000 tonnes de déchets par an. Il accueille essentiellement des déchets non dangereux issus des activités économiques (DNDAE), anciennement dénommés déchets industriels banal (DIB). Les DNDAE correspondent à l’ensemble des déchets non inertes et non dangereux générés par les entreprises, industriels, commerçants, artisans et prestataires de services ; ferrailles, métaux non ferreux, papiers-cartons, verres, textiles, bois, plastiques, etc. A noter que la plupart de ces matériaux sont maintenant généralement triés à la source et valorisés. Ce centre de stockage n’est pas autorisé à enfouir des déchets fermentescibles (présents dans les ordures ménagères).

Le site est composé de 5 casiers d’enfouissement (divisés en alvéoles) d’une surface voisine de 5000 m2 chacune. Le biogaz généré par la dégradation anaérobie des déchets provient de 3 zones exploitées de 1990 à actuellement. Il est récupéré et valorisé depuis l’année 2000. Le gaz est capté (aspiration) par un réseau de 120 puits en PE52 et acheminé vers la plateforme de valorisation où une partie est transformée en électricité. Jusqu’en 2016, environ 8000 MWh/an étaient produits, ce qui correspondait à la consommation de 1550 foyers. L’agrandissement de la plateforme de valorisation du biogaz devrait permettre de multiplier par 3 cette production d’énergie. Le site dispose de torchères de sécurité, utilisées pour brûler le solde de biogaz en cas de surproduction ou lors des opérations de maintenance de la plateforme de valorisation.

Les lixiviats sont récupérés dans le fond des casiers et dirigés par pompage vers l’installation de traitement de lixiviats in situ (3 tonnes/h de lixiviats traités). Celle-ci dispose d’un traitement par évaporation à 120-140 °C. L’eau est évaporée, la fumée est filtrée, et les résidus solides restants (1 % de la masse entrante) sont récupérés après séchage dans des big-bags et envoyés en traitement/élimination. Une partie du biogaz capté est utilisé comme source d’énergie pour faire fonctionner le procédé. A noter également que ce système de traitement utilisant l’énergie de combustion du biogaz est en cours de remplacement et conduira à l’utilisation de l’énergie de cogénération provenant des moteurs.

51 Au moment des travaux de thèse (2014-2017).

Les eaux de ruissellement (eaux de pluie qui n’ont pas été en contact avec les déchets) sont récupérées dans des bassins étanches. Après vérification de leur qualité, elles sont rejetées dans des zones d’infiltration. La Figure 34 montre une vue générale de l’ISDND.

Figure 34.Vue générale de l’ISDND où la plateforme expérimentale a été installée (image prise en 2015).

Valorisation énergétique du biogaz produit

Nota : les données qui suivent sont celles qui étaient valides pendant la majeure partie du travail expérimental sur le site (jusqu’à fin 2016).

III.2.1 Qualité du biogaz

La « qualité » du biogaz est différente selon le casier d’origine (ancienneté et nature de déchets enfouis). Le site dispose d’un système de captage (puits, conduites, vannes) réglable selon la quantité de méthane. Au moment de la thèse, l’ensemble du biogaz était utilisé pour la production d’électricité par l’intermédiaire d’1 moteur à gaz et pour le traitement des lixiviats par un procédé d’évapoconcentration. Des mélanges des biogaz provenant des différentes zones du centre d’enfouissement technique et dérivations vers les 2 utilisations peuvent avoir lieu à certains moments, avec, entre autres, comme conséquence une variation de la teneur en H2S.

Depuis 2016, ce fonctionnement est en cours de modification en raison de la volonté de valoriser la quasi-totalité du biogaz produit avec 3 moteurs à gaz avec récupération de chaleur.

III.2.2 Traitements du biogaz

Au total, environ 1900 Nm3/h de biogaz sont captés (depuis les différentes alvéoles) et dirigés vers la plateforme de valorisation de biogaz et traitement des lixiviats : environ 600 Nm3/h sont utilisés pour

la production d’électricité, le reste est utilisé pour l’évaporation des lixiviats et le système d’anti panache. Un moteur d’1 MWe53 est installé et relié à un transformateur. L’électricité produite est vendue au réseau EDF. Le biogaz utilisé pour la production d’électricité passe par une série de traitements avant d’entrer dans le moteur, car tel quel il n’est pas valorisable (Figure 35). Une vue générale de la plateforme de valorisation du biogaz est illustré par la Figure 36.

Figure 35. Schéma des traitements subis par le biogaz d’ISDND pour le rendre valorisable [légende : CA (charbon actif) ; CAI (charbon actif imprégné)].

Figure 36. Plateforme de valorisation du biogaz à côté de l’unité de traitement des lixiviats de l’ISDND (image prise en 2015).

Le biogaz est saturé en eau (à la température ambiante) en sortie des alvéoles. A l’arrivée sur la plateforme, sa pression relative est de l’ordre de -40 mbar. Une partie de l’eau est éliminée par un sécheur, par refroidissement à un point de rosée de 4 °C (théoriquement). Ensuite, le biogaz passe par un surpresseur qui le compresse à +160 mbar, afin de surmonter les pertes de charges associées au procédé de traitement (d’environ 50 mbar). En sortie du surpresseur la température du biogaz est d’environ 15 °C. Le biogaz généré par cette ISDND est principalement chargé en H2S, COVSi et COV ; un système d’épuration de ces composés est donc nécessaire. H2S (et d’autres composés soufrés) est éliminé par un traitement avec du charbon actif imprégné (CAI) ; les COVSi (et COV) sont éliminés par du charbon actif (CA). Les adsorbants se trouvent dans deux réacteurs de 9 tonnes de capacité (utile) en série, l’un est rempli complètement par du CAI et l’autre avec 50 % de CAI et 50 % de CA « standard ».

Caractéristiques du biogaz utilisé pour les essais

Le biogaz utilisé pour la majorité des essais est le biogaz séché non traité. Un point de prélèvement équipé d’une vanne a été installé sur une partie de canalisation située après le sécheur, entre le surpresseur et l’entrée du premier réacteur de traitement épuratoire du biogaz. Un tuyau en polypropylène a été installé pour amener le gaz jusqu’à l’unité pilote.

III.3.1 Composition du biogaz pendant la période d’essais

Une fourchette de la composition moyenne du biogaz issu de l’ISDND est fournie dans le Tableau 16, de même pour les températures extrêmes du gaz. Cette composition est issue d’analyses réalisées sur le biogaz séché non traité de manière ponctuelle (COVSi) ou en continu, pendant des périodes longues de plusieurs mois, entre les années 2014 et 2016. Les techniques analytiques de suivi sont précisées dans le §IV.2.3

Tableau 16. Composition et température du biogaz séché (fourchette de valeurs) pendant la période de la thèse (2014-2016). Composition du biogaz CH4 (%v) 35-47 CO2 (%v) 20-39 O2 (%v) 1,5-6 H2O (%v) 0,4-3,5 H2S (ppmv) 500-3000 COVSi (mg Sitotal/m3) 19-34 Température (°C) 7-40

III.3.2 Variabilité du biogaz

Le suivi analytique in situ pendant de longues périodes et en continu nous a permis de noter la forte variabilité de la composition du biogaz, notamment pour H2S (des teneurs très fortes, de plus de 6000 ppmv, ont été détectées ponctuellement). Cette variabilité est essentiellement due à des phénomènes intrinsèques à la « respiration » du centre d’enfouissement technique, aux aléas climatiques (température, pression, périodes sèches ou pluvieuses) ou à des actions menées pour l’exploitation du site et la gestion du biogaz. Voici un exemple du suivi de la composition du biogaz sur une période de 52 jours (entre octobre et décembre 201454) : CH4, CO2 et O2 (Figure 37) et H2S (Figure 38).

Figure 37. Teneur de CH4, CO2 et O2 dans le biogaz séché non traité (période Octobre-Décembre 2014). Mesures en continu.

Figure 38. Teneur d’H2S dans le biogaz séché non traité (période Octobre-Décembre 2014). Mesure en continu. Les concentrations élevées d'O2 (i.e. le 18/11/14) correspondent à des arrêts du moteur à gaz. À ce moment, le biogaz provenant du centre d’enfouissement technique est dérivé vers les torchères, il n'y a donc pas de biogaz allant vers la plateforme de valorisation.

Concernant la teneur en eau et la température du biogaz séché, elles dépendent de la température ambiante et de l’efficacité du sécheur. Des cycles jour-nuit sont identifiés par le suivi du biogaz pendant plusieurs périodes. 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 0 10 20 30 40 50 60 14/10/14 18/10/14 22/10/14 26/10/14 30/10/14 3/11/14 7/11/14 11/11/14 15/11/14 19/11/14 23/11/14 27/11/14 1/12/14 5/12/14 [O 2 ] (% v) [CH 4 ] et [CO 2 ] (% v) Date CH4 (%) CO2 (%) O2 (%) 0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 14/10/14 18/10/14 22/10/14 26/10/14 30/10/14 3/11/14 7/11/14 11/11 /14 15 /11 /14 19 /11 /14 23/11/14 27/11/14 1/12/14 5/12/14 [H2 S] (p p m v) Date

La Figure 39 montre un exemple du suivi pendant 5 jours (automne 2014) de la teneur en eau (%v), la température et l’humidité relative (HR) du biogaz séché non traité55.

Figure 39. Teneur en eau (en %v), température et humidité relative (HR) du biogaz séché non traité (automne 2014, 5 jours). Mesures en continu.

Pendant la journée, quand il fait plus chaud, le biogaz contient plus d’eau (voir diagramme de Mollier de l’air dans Annexe 6). En conséquence, l’humidité relative du biogaz fluctue aussi. Si nous constatons de telles variations après le sécheur qui est censé réguler l’humidité du biogaz (point de rosée théorique à 4 °C), c’est que celui-ci n’a pas la capacité suffisante pour traiter le biogaz chaud et saturé en eau pendant les périodes les plus chaudes.