C. La voie de signalisation Sphingosine-1-phosphate (S1P) est régulée par la voie de
IV. La signalisation JAK/STAT est requise pour la morphogenèse de plusieurs
Au cours du développement, la voie de signalisation JAK/STAT est essentielle pour la morphogenèse
de structures très variées. Elle est requise par exemple pour le développement des alvéoles de la
glande mammaire, pour la migration du mésoderme axial et l’extension convergente du mésoderme
latéral chez le poisson zèbre, ainsi que pour le processus d’extension convergente dans l’embryon de
drosophile qui a déjà été décrit dans le chapitre II (section B-2b) (Hombría and Sotillos, 2008). Chez la
drosophile encore, la voie de signalisation JAK/STAT est également requise pour la morphogenèse de
l’intestin antérieur et postérieur, ainsi que pour le remodelage des spiracles (Hombría and Sotillos,
2008). Ces derniers exemples seront abordés dans ce chapitre.
A. Les composants, les fonctions et la régulation de la voie de signalisation JAK/STAT
Des recherches sur la transcription induite par l'Interféron ont mené à la découverte de la voie de
signalisation JAK/STAT (Janus Kinase/Signal Transducers and Activators of Transcription) au début des
années 90. La signalisation JAK/STAT est une voie de transduction de signaux activée par plusieurs
cytokines et facteurs de croissance. Elle est très conservée chez les métazoaires et elle implique : un
ligand diffusible, un récepteur transmembranaire, une tyrosine kinase Janus (JAK) et un facteur de
transcription STAT (Figure 16). Chez les vertébrés, il existe plusieurs ligands incluant des cytokines, des
facteurs de croissance et des interférons; plus d’une dizaine de récepteurs de cytokines; quatre
59 STAT4, STAT5a, STAT5b and STAT6) (Pfeifer et al., 2008). En revanche, chez la drosophile, cette voie
de signalisation est beaucoup plus simple à étudier puisque dans son génome il n’y a que trois gènes
codant des ligands cytokines Unpaired (1, 2, 3), un seul récepteur (Domeless ou Dome), une seule
tyrosine kinase (Hopscotch ou Hop) et un seul facteur de transcription STAT (Stat92E).
La voie de signalisation JAK/STAT est nécessaire au maintien de l’homéostasie et au développement
en jouant un rôle sur la régulation de processus aussi variés que la prolifération, la différenciation, la
migration, la survie et la mort cellulaire (Arbouzova and Zeidler, 2006; Harrison, 2012; Stark and
Darnell, 2012). Ceci explique aussi pourquoi une dérégulation de la voie JAK/STAT est associée à
plusieurs pathologies humaines. Par exemple, l’activation constitutive de STAT3 et STAT5 a été
détectée dans de nombreuses tumeurs solides de grave pronostic et une mutation ponctuelle qui rend
JAK2 constitutivement active (l’échange d’une Valine pour Phénylalanine V617F) a été associée à une
variété de maladies hématologiques (Thomas et al., 2015). Ceci fait de JAK une cible pour la thérapie
génique. Divers inhibiteurs de JAK2 ont été testés dans des essais cliniques sur de patients présentant
des risques de développer ces maladies hématologiques et certains d’entre eux ont déjà été
approuvés (Quintás-Cardama and Verstovsek, 2013).
1. La voie JAK/STAT canonique
La voie de signalisation canonique de JAK/STAT commence par l’activation du récepteur de membrane
qui ne possède pas une activité enzymatique intrinsèque. L’union du ligand dans le domaine
extracellulaire du récepteur conduit à un changement dans la conformation du domaine
intracellulaire. Ceci génère une homo- ou hétéro-dimérisation du récepteur qui permet le
recrutement et l’activation des protéines JAK. Ces protéines s’activent par transphosphorylation puis
phosphorylent à leur tour le récepteur. La phosphorylation du récepteur génère des sites d’union pour
des protéines cytoplasmiques avec des domaines SH2 (Src homology 2) telle que les protéines STAT.
61 récepteur activé et sont phosphorylés par JAK. Ensuite, les monomères actifs de STAT se détachent du
récepteur, se dimérisent (en homo- ou hétérodimères) et sont finalement transloqués au noyau. Dans
le noyau, les dimères de STAT se lient à l’ADN sur la séquence consensus (TTnnnGAA) et activent la
transcription de gènes cibles spécifiques (Figure 16) (Arbouzova and Zeidler, 2006; Chen et al., 2014;
Harrison, 2012).
Des modifications post-traductionnelles (phospho- et déphospho-rylation, acétylation/déacétylation,
ubiquitination, sumoylation, entre autres) de STAT sont cruciales pour la dimérisation, la translocation
nucléaire, la liaison à l’ADN et pour moduler son activité transcriptionnelle (Lim and Cao, 2006). Les
facteurs de transcription STAT peuvent également être activés par d’autres types de récepteurs qui
présentent une activité tyrosine kinase comme c’est le cas du récepteur à l'EGF, EGFR (« Epidermal
Growth Factor Receptor »). Ce récepteur a été associé à l’activation de plusieurs STAT dans divers
cancers (Quesnelle et al., 2007).
La voie JAK/STAT canonique est régulée négativement par différents mécanismes ; 1) par des
phosphatases cytoplasmiques et nucléaires qui déphosphorylent les récepteurs ainsi que les JAK et les
STAT activés (Böhmer and Friedrich, 2014) ; 2) par l’expression d’un groupe de protéines non
inductibles PIAS (Protein Inhibitors of Activated STAT) qui se lient sur les STAT et induisent leur
dégradation par sumoylation (Arbouzova and Zeidler, 2006) ; 3) par l’expression de protéines SOCS
(Suppressors Of Cytokine Signalling) et CIS (Cytokine-Inducible SH2-containing). Ces protéines se lient
aux JAK et aux récepteurs de cytokines phosphorylés via leur domaine SH2 (Gisselbrecht, 1999), ce qui
engendre leur dégradation impliquant une activité Ubiquitine E3 ligase (Kile et al., 2002).
2. La voie JAK/STAT non canonique
Les protéines JAK et STAT peuvent également contribuer à la signalisation selon un mode non
conventionnel ou non-canonique. Cette voie JAK/STAT non-canonique a été découverte chez la
drosophile (Shi et al., 2006, 2008). La suractivation de Hop (l’homologue de JAK) réprime l’expression
62 Figure 17. La voie de signalisation JAK/STAT est requise pour le remodelage du proventriculus dans l’intestin antérieur chez la drosophile. A) Illustration du développement du proventriculus entre les stades 13 et 15 de l’embryon. Le proventriculus a une forme de serrure au stade 13 et passe à une forme de cœur au stade 15. Le mésoderme viscéral est en rouge. L’expression du ligand de la voie JAK/STAT, Unpaired (Upd) est montré en bleu. B) En haut, une larve L1 contrôle nourrie avec de la levure teinte en rouge. En bas à gauche, un proventriculus d’une larve contrôle composé d’une couche interne (flèche blanche), d'une couche intermédiaire (flèche grise) et d'une couche externe endodermique (flèche noire). En bas à droite, un proventriculus d’une larve mutante pour dome dans laquelle les couches interne et intermédiaire ne sont pas invaginées et la couche endodermique est désorganisée. D’après Hombría and Sotillos, 2013; Josten et al., 2004.
63 (Shi et al., 2006). Cette perturbation de l’état hétérochromatinien se fait en présence d’une proportion
de STAT non-phophorylés localisés au noyau et associés à la protéine HP1 (Heterochromatin Protein
1) (Shi et al., 2008). Par ailleurs, des études conduites dans des cellules humaines de l’hippocampe
ont suggéré un rôle cytoplasmique de la protéine STAT3 indépendamment de son activité
transcriptionnelle, pour la plasticité synaptique des neurones, ce qui représenterait une autre forme
non-canonique de la voie de signalisation JAK/STAT (Nicolas et al., 2012, 2013).