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Au cours du XXe siècle, des rapports apaisés, de nouvelles préoccupations Dans la forêt syndicale, une orientation vers la production

ÉVOLUTION DES PAYSAGES ET HISTOIRES DES FORMES D’ACTION SUR LE TERRITOIRE

Chapitre 3. Perceptions des paysages et action sur l’espace L’évolution et la diversification des pratiques durant les deu

II. La politique forestière entre interventions de l’État et résistances de la société locale (XIX e XX e siècles)

4. Au cours du XXe siècle, des rapports apaisés, de nouvelles préoccupations Dans la forêt syndicale, une orientation vers la production

Différentes révisions viennent mettre à jour le plan d’aménagement de la forêt syndicale et l’oriente vers la production de bois d’œuvre. La 8° série, dites des sapinières81,

retient l’attention des forestiers. En 1939, par exemple, des problèmes de régénération (qui ne s’effectue que dans les troués comme dans beaucoup de sapinières pyrénéennes) amènent les forestiers à modifier leur traitement, de futaie jardinée à futaie jardinée par bouquets, et à réviser la possibilité82. Quant aux droits d’usage, ils continuent de s’exercer pour le bois de

chauffage (affouage) au profit des habitants. Les produits des coupes extraordinaires dans le quart de réserve ou pour le bois d’œuvre sont partagés à part égale entre la Commission syndicale et la commune ou le Vic sur lesquels sont implantés les peuplements.

Dans les années 1950, les modifications sont plus radicales. Le recul de la pression pastorale est important, l’enfrichement gagne. La forêt n’est plus indispensable au pacage des animaux et au bois d’affouage des habitants. Ainsi, la commune de Gèdre demande-t-elle l’intervention de l’administration forestière pour le tracé et l’entretien des routes forestières : les sapinières de Coumély, Barbet, Bué et Barada deviennent économiquement exploitables avec routes et engins. Malgré une filière-bois mal structurée et des marchés souvent incontrôlés, une réorientation vers la production de bois est entreprise. La commission syndicale reçoit désormais une subvention de l’État d’un montant égal à la moitié du coût des travaux forestiers, partageant l’autre moitié avec les communes.

Dans les périmètres RTM, de nouvelles préoccupations liées au tourisme

Ces préoccupations ne sont pas nouvelles à Barèges. Dès 1895, les forestiers mettent hors exploitation la partie basse du canton de Trouguet, située en contrebas de l’Allée verte, et en interdisent le pâturage sous forêt. Ils justifient leur décision en signalant qu’elle est réservée aux promenades de la station thermale et ils semblent ne pas rencontrer d’opposition à leur décision83. Dans le cadre de la révision d’aménagement de 1955, l’intérêt touristique de

la forêt de Trouguet est confirmé « Le maintien d’une belle futaie et de chemins et promenades bien entretenus est d’une importance capitale pour Barèges, ses promeneurs et ses touristes »84.

À partir des années 1930, la grande affaire devient la transformation de la station thermale en station de ski. Le 9 août 1946, Barèges se sépare de Betpouey et devient une municipalité à part entière. Le maire de Barèges, Urbain Cazaux, promoteur du ski dont il présidera la fédération en 1952, est à l’origine du développement de la station de ski. Outre les aménagements liés aux sports d’hiver, cette transformation nécessite, paradoxe, à la fois des déboisements et des nouveaux travaux contre les avalanches. Le funiculaire du Lienz est implanté en 1937 sur des terrains appartenant à la Commission syndicale. Il a fallu déboiser les pentes de l’Ayré qui avait été plantées pour stabiliser le versant. Tout cela entraîne une

81 Il s’agit des sapinières de Barada (114 ha), en rive droite du Gave de Gèdre, et de Noubasséoube (219 ha) en

rive gauche.

82 AD65, 7M497

83 AD65, 7M497

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diminution sensible de la surface boisée (12 ha pour l’emprise du funiculaire et des pistes de ski). Les forestiers regrettent qu’il n’ait pas été possible de s’opposer à la création des pistes de ski. Mais, ambivalents, ils ont négocié le libre accès au funiculaire et envisagent de s’en servir pour la vidange des forêts. Quoi qu’il en soit, ils préviennent : il ne faut pas « aller plus loin dans la voie de telles ouvertures de pistes en forêt sans risques pour Barèges de glissements de terrain et d’avalanches »85. Et ils sont entendus, puisqu’en 1954 la municipalité

de Barège réalise l’extension de son domaine skiable sur les pâturages de Collongues.

À Gavarnie, le périmètre RTM du Hount Grane a été institué dans les années 1943-44 pour protéger la RN 21 et plusieurs habitations contre les érosions et les avalanches. L’essentiel des plantations a été accompli de 1949 à 1955. Divers travaux de génie civil ont été réalisés plus récemment.

5. Conclusion

Les investigations montrent que les grands processus à l’œuvre dans la vallée de Barège s’apparentent à ceux qui sont à l’oeuvre ailleurs dans les Pyrénées :

— à la fin du XIXe siècle, on assiste à une reprise en main de l’espace forestier par l’Administration des Eaux et Forêts, non sans résistance de la part de la société montagnarde. — au cours du XXe siècle, la forêt est devenue un espace spécialisé, productif, alors qu’elle avait été longtemps un espace plurifonctionnel.

Pourtant, certains espaces forestiers de la vallée de Barège se distinguent par la mise en place de politique spécifique liée à ce que l’on peut appeler tourisme. Cette fonction nouvelle y est apparue précocement et elle est à l’origine de dispositifs d’aménagement particulier.

Aujourd’hui, la gestion des forêts de montagne se ne discute plus dans les seuls termes du langage économique. La forêt est devenu un patrimoine naturel à protéger et a vu sa fonction récréative reconnu par l’ONF. Mais, une question omniprésente reste encore non résolue : quelle gestion pour demain ? avec quels acteurs ? Répondre à cette question pour les espaces forestiers de la Vallée de Barèges, comme pour les espaces forestiers d’une manière générale, passe par une réflexion qui prend en compte toute la complexité des processus : la forêt est, au même titre qu’un pâturage, un paysage culturel.

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III. Aménagement et industrialisation