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III.4.1.1!Nature des serpentines

Les minéraux primaires, olivine et orthopyroxène, sont remplacés à différents degrés par de la serpentine. La variété de serpentine majoritairement présente dans les serpentinites du smooth seafloor est la lizardite 1T. Elle a été identifiée par DRX grâce à ses pics majeurs de diffraction placés à 7,3 Å, 3,6 Å et 2,5 Å (Figure III-12A). Les deux échantillons SMS 5-4-17 et SMS 26-2-11 (webstérites à olivine serpentinisées) présentent la variété antigorite (Figure III-12B). Dans ces échantillons, la serpentine est mélangée à de la chlorite et de la trémolite sous forme de larges veines. Du chrysotile est visible en microscopie optique, mais n’est pas distinguable sur les spectres de DRX du fait de sa très faible proportion modale par rapport à la lizardite, dont les pics de DRX sont très proches voire quasi similaires.

Les analyses RAMAN réalisées sur 8 échantillons indiquent aussi majoritairement la présence de lizardite. Nous pouvons distinguer deux types de spectres de lizardite :

1)! les spectres de lizardite pure, montrant des pics majeurs dans la gamme basse à ~ 230, ~ 390, et ~ 690 cm-1 et deux pics dans la gamme haute à 3685 et 3704 cm-1 (Figure III-13) ;

2)! les spectres où les pics à 390 et 690 sont décalés vers 380 et 680 cm-1 , et où les pics de la gamme haute sont décalés vers 3680 cm-1 et 3700 cm-1 (Figure III-13)

Le spectre de type 2 traduit la présence d’une certaine proportion d’antigorite mélangée à la lizardite (Schwartz et al., 2013). Les pics de la lizardite sont alors déplacés vers des positions intermédiaires avec celles de l’antigorite. Néanmoins, les analyses DRX de ces échantillons ne distinguent que la lizardite, ce qui indique que la proportion d’antigorite associée à la lizardite à l’échelle de la roche totale est minime.

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Figure III-12 : Spectres de diffraction des rayons X ayant permis l’identification de la lizardite, l’antigorite, la chlorite, et la trémolite. A) Spectre sur poudre totale de l’échantillon SMS 14-5-1. B) Spectre de lame orientée de l’échantillon SMS 5-4-17. Code couleur: noir=poudre normale, bleu=poudre saturée d’éthylène glycol, rouge=poudre chauffée à 550°C. Abréviations : A=antigorite, Lz=lizardite, Cl=chlorite, Tr=trémolite, Mgt=magnétite.

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Figure III-13 : Spectres RAMAN de minéraux serpentineux des serpentinites du Smooth seafloor, sur la gamme basse (150 à 1150 cm-1) et la gamme haute (3600 à 3750 cm-1), montrant les pics caractéristiques de la lizardite, du chrysotile et d’un mélange lizardite-antigorite.

III.4.1.2!Textures de serpentine

Les serpentinites de la zone du smooth seafloor de la SWIR présentent majoritairement des textures maillées caractéristiques, avec au cœur soit des reliques d’olivine (ex : SMS 7-3-7, Figure III-6 : ), soit de la serpentine. Cette serpentine maillée se compose de lizardite pure (Figure III-13). Les analyses DRX et Raman, ainsi que les formules structurales des serpentines obtenues grâce aux analyses microsonde (2 cations Si et 3 cations Fe+Mg) indiquent une

3600 3650 3700 3750 Chrysotile 150 250 350 450 550 650 750 850 950 1050 1150 Chrysotile 150 250 350 450 550 650 750 850 950 1050 1150 Lizardite + Antigorite 3600 3650 3700 3750 Lizardite + Antigorite 3600 3650 3700 3750 Lizardite 3685 3704 150 250 350 450 550 650 750 850 950 1050 1150 Lizardite 688 386 229 347 692 388 231 342 1101 3699 3690 683 379 225 3701 3681 342 614 620 618 1098

Nombre d’onde (cm-1) Nombre d’onde (cm-1)

Intensité (u.a.)

Intensité (u.a.)

Intensité (u.a.)

Nombre d’onde (cm-1) Nombre d’onde (cm-1)

Nombre d’onde (cm-1) Nombre d’onde (cm-1)

SMS 17-4-32

SMS 14-5-8

107 absence de brucite mélangée à la serpentine (Figure III-12). La texture maillée équante est la plus répandue (Figure III-6 : , Figure III-14A), mais il arrive également de trouver localement la texture rubanée dans un même échantillon (ex : SMS 7-3-7 ou 28-4-10). Deux dunites serpentinisées SMS 14-5-8 et SMS 17-4-2 ainsi que la harzburgite serpentinisée SMS 30-2-2 présentent exclusivement une texture maillée rubanée (Figure III-14B).

La texture bastite est présente en remplacement des pyroxènes primaires. Pour les échantillons peu serpentinisés (ex : SMS 1-2-1), elle se rencontre en fine couronne autour des reliques de pyroxènes et/ou en remplissage des fractures initiales du pyroxène. Elle est dépourvue du réseau de magnétite caractéristique de la serpentinisation de l’olivine. Aux stades de serpentinisation moyen (ex : SMS 28-4-10), le cœur du pyroxène frais est encore conservé, tandis que la couronne de bastite est plus ou moins importante sur les bords du grain. Elle est alors grise à noire en LPA, avec un aspect hachuré dû à la conservation de certains plans de clivage du pyroxène initial (Figure III-15A). Lorsque la serpentinisation est totale (ex : SMS 2-2-17), la bastite remplace totalement le pyroxène de façon pseudomorphique. Les mélanges de lizardite et antigorite observés par spectroscopie RAMAN (Figure III-13) sont localisés principalement dans les textures bastites. Ceci peut venir du fait que la structure de l’antigorite accepte mieux les substitutions du Mg par l’Al, un élément qui est absent dans l’olivine mais présent dans les pyroxènes.

Les veines secondaires de serpentine sont nombreuses dans les échantillons du smooth seafloor. La variété qui les compose est généralement le chrysotile, reconnaissable à ses teintes de biréfringence élevées en LPA et présentant une extinction droite caractéristique de l’orthochrysotile (Figure III-15A à C), mais de nombreuses veines de lizardite sont également

Figure III-14 : Textures de serpentine des serpentinites de la zone du smooth seafloor (SWIR) en lumière polarisée analysée. A) Lizardite maillée équante (mesh) remplaçant l’olivine et texture bastite (B) couronnant une relique d’orthopyroxène (opx) (LPA). B) Lizardite maillée rubanée avec microveines de magnétite (Mt) (LPA).

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présentes (Figure III-15C et D). Leur taille varie de 50 µm à 0,5 mm. Les veines de chrysotile sont majoritairement fibreuses, mais les veines rubanées ne sont pas exclues (Figure III-15C), les veines de lizardite sont à la fois rubanées et fibreuses (Figure III-15D). Dans l’échantillon SMS 15-3-16, certaines veines de chrysotile présentent des déformations en torsades ou tire-bouchons (Figure III-15B), que l’on peut interpréter comme des veines ouvertes en contexte cisaillant (Fagereng et al., 2010) puis compressées.

Les textures de recristallisation sont peu nombreuses dans notre sélection d’échantillons. Aucune texture en sablier (hourglass texture) n’a été observée, les textures les plus abondantes sont les textures entremêlée et interpénétrative (Figure III-15C et D). Elles sont particulièrement abondantes dans les échantillons SMS 15-3-16 et 29-5-41.

Figure III-15 : Microphotographies en LPA des différentes textures de serpentine dans les serpentinites du smooth seafloor. A) Veines secondaires fibreuses de chrysotile (Ct) (LPA). B) Déformations en tire-bouchon des veines de chrysotile (LPA). C) Veines rubanées et fibreuses de chrysotile, et lizardite recristallisée entremêlée (E) (LPA). D) Veines recristallisées sphérolitiques et interpénétratives de serpentine (LPA). E=serpentine entremêlée, Vf=veine fibreuse de serpentine, VI= veine de serpentine recristallisée interpénétrative, Vr=veine rubanée de serpentine, Vs=veine sphérolitique de serpentine, B=bastite.

109 III.4.1.3!Composition chimique

Dans les serpentinites du smooth seafloor, la serpentine au sens large a des gammes de compositions en SiO2, MgO, Al2O3 et FeO assez variables : le SiO2 est compris entre 34,2 et 45,0 pds%, le MgO entre 26,0 et 44,4 pds%, le FeO entre 1,5 et 14,8 pds% et l’Al2O3 entre 0 et 6,5 pds% (Figure III-16), des compositions classiquement rencontrées au niveau des péridotites abyssales (Andreani et al., 2013; Bonifacie et al., 2008; Kodolányi et al., 2012; Rouméjon et al., 2014). La serpentine lizardite formant la texture maillée a une composition moyenne (Fe0,2Mg2,8)Si2O5(OH)4, elle peut atteindre des concentrations en FeO plus élevées que la serpentine des autres textures (au-delà de 10 pds% jusqu’à ~15 pds%), mais ceci reste exceptionnel (seulement 5 points analysés). Le polymorphe antigorite (SMS 5-4-17 et 26-2-11) peut incorporer plus d’Al que la lizardite, sa formule structurale varie entre celle de la lizardite et (Fe0.3Mg2.7)(Si1.9Al0.1)O5(OH)4.Les plus fortes proportions en Al2O3, supérieures à 4 pds%, se retrouvent dans les bastites, qui peuvent également contenir jusqu’à ~2 pds% de CaO, (Ca0– 0.1Fe0.1–0.4Mg2.5–2.9)(Si1.8–2Al0–0.2)O5(OH)4). Les compositions en NiO et Na2O sont faibles dans toutes les serpentines sans distinction entre les différentes textures (NiO 0-0,7 pds% et Na2O 0-0,25 pds%). Les veines de chrysotile peuvent être plus pauvres en MgO que la serpentine de la texture maillée (jusqu’à 25 pds% minimum), mais ceci n’est pas systématique. Les veines secondaires de lizardite ne présentent pas de différences de compositions par rapport à la serpentine de la texture maillée. La serpentine recristallisée (toutes textures de recristallisation confondues) peut être légèrement plus riche en Al2O3 que celle des textures maillées (max 3,5 pds%).