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Le secteur de l’électricité

Dans le document EDP Open (Page 192-196)

Quelles priorités et quelles échéances ?

2.6 Le secteur de l’électricité

Ce secteur ne représente que 6 à 7 % des émissions de CO2 du pays. Suivi de charge, maintenance, intermittence, échanges transfrontaliers, minimisation des émissions de CO2, garantie de capacité, moyens de stockage, effacements des consommations, gestion saisonnière : l’électricité est un bien à très haute valeur ajoutée, qui a porté une grande partie des progrès technologiques et du confort.

Le développement du programme nucléaire s’est accompagné d’une croissance du chauffage électrique qui a eu pour conséquence une sensibilité saisonnière qui est moins constatée dans les pays voisins 122. Cet impact a été géré de manière efficace en programmant en saison chaude l’essentiel des arrêts pour maintenance/rechar-gement en combustible des réacteurs : leur taux de charge moyen passe de 64 % en été à 92 % en hiver.

Figure 2 Contribution mensuelle des divers moyens de production en 2014 (puissance moyenne en MW).

122. Cette sensibilité accrue ne peut être attribuée au seul chauffage électrique, les chauffages d’appoint aux chauffages fioul et gaz lors d’épisodes froids ayant très probablement une influence notable, mais qui n’a pas été évaluée par RTE et ENEDIS.

2. La transition énergétique, sortir de l’échec. Quelles priorités et quelles échéances ?

La sensibilité journalière résulte essentiellement du secteur tertiaire et la sensibilité hebdomadaire de l’ensemble tertiaire/industriel.

Figure 3 Impact sur une journée des différents secteurs de consommation : importance du tertiaire.

Le mix actuel, hérité d’une décision forte des années 1970, bénéficiait jusqu’à très récemment d’une garantie de fourniture de qualité reposant pour l’essentiel sur le nucléaire (75 %) et l’hydraulique (12 %), avec un appoint important, même si quantitativement mineur (6 à 10 %), des énergies fossiles pour gérer les pointes de consommation.

Or la LTECV vise à modifier profondément cet équilibre en ramenant le nucléaire à une contribution en base et semi-base (50 %), tout en lui imposant un rôle vital de compensation des fluctuations de l’électricité intermittente, ce qui est contradic-toire. En introduisant des puissances très importantes de solaire et éolien, il faudra gérer de nouvelles contraintes. À titre d’exemple la consommation horaire française d’électricité en hiver (environ 80 GWh), période la plus critique dans notre climat, peut être comparée à la production horaire de nos 18 GW d’éolien et solaire pen-dant une période normale de 10 jours (production variant de 300 à 5 300 GWh).

Figure 4 Consommation horaire d’électricité de la France (en haut) et production des énergies intermittentes (en bas avec une puissance installée de 18 000 MW) : MWh horaires pendant une période de 10 jours en hiver.

– Le solaire sera inefficace en hiver, avec une production quotidienne en moyenne 5 fois inférieure à celle de l’été 123, et l’éolien très variable et aléatoire toute l’an-née (de 2 à 70 % de la puissance installée).

– Le solaire introduira des fluctuations journalières de puissance considérables et rapides, qui vont solliciter les centrales pilotables, l’été en particulier.

– La garantie de fourniture ne sera plus assurée du fait du caractère de plus en plus aléatoire de la source de production, sauf en maintenant une puissance presque nominale de moyens pilotables (essentiellement nucléaires si les centrales fos-siles sont progressivement arrêtées). Ces moyens pilotables, en concurrence avec une électricité lourdement subventionnée et très protégée, produiront moins et seront plus couteux. L’effacement pourrait atténuer cette difficulté, mais il restera limité. À titre d’exemple le développement considérable de l’éolien et du solaire n’a pas permis de réduire la puissance pilotable 124.

123. De plus la fluctuation quotidienne, liée à la nébulosité est d’un facteur 4 environ. Entre un jour hiver maussade et un jour d’été ensoleillé l’écart peut être d’un facteur 20 à 25.

124. En Allemagne fin 2017 la puissance installée électrique est de 202 GW alors que la puis-sance appelée maximale est de 80 à 85 GW. Cette dernière était seulement de 115 GW en 2002.

La puissance des centrales fossiles est passée dans le même temps de 74,6 à 84,5 GW pour com-penser la baisse de 12 GW du nucléaire. Le surinvestissement est considérable pour un résultat nul sur les émissions de GES.

2. La transition énergétique, sortir de l’échec. Quelles priorités et quelles échéances ?

– Le développement du stockage de masse de l’électricité, seul susceptible de contribuer aux suivis mensuel et saisonnier, ne peut s’appuyer sur les technolo-gies actuelles (Li-ion, super capacités, systèmes inertiels). Quelles R&D à long terme mettre en place ? Développement des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), de batteries Na-ion : des paris sont à faire sur l’avenir avec des financements dédiés à la transition énergétique.

– La voie électrolyse et production d’hydrogène, peu probable à un niveau massif à moyen terme, pourrait devenir un moyen d’écrêtage de la puissance intermit-tente en convertissant son énergie en excès en hydrogène. Celui-ci serait injecté directement dans le réseau gaz ou sous forme de méthane (méthanation). Se servir de cet hydrogène pour produire de l’électricité dans des PAC ne semble pas d’intérêt vu le mauvais rendement global du procédé.

– (30 à 35 %). Tout reste à démontrer, du point de vue technique comme du point de vue économique.

Il y a donc contradiction entre les orientations à donner à notre politique énergé-tique, avec une électrification accentuée, et la vision de la LTECV, qui impose une priorité à la réduction de la consommation d’électricité. Les objectifs de la LTECV devraient être révisés profondément :

– Conserver le niveau de puissance du nucléaire 125 tant que des solutions massives de stockage d’électricité et d’effacement n’auront pas été démontrées, la consom-mation devant probablement croitre si la RT 2012 est modifiée dans l’intérêt climatique,

– Développer le solaire et l’éolien au seul rythme requis par l’augmentation des besoins, une réduction forte du parc nucléaire étant peu probable d’ici 2035, sauf fragilisation de notre réseau, en particulier si les centrales à charbon et les groupes fuels sont définitivement arrêtés vers 2024/2025. Sinon les surinvestisse-ments deviendront insupportables, les capacités intermittentes ne se substituant pratiquement pas aux capacités pilotables et contribuant peu au suivi de charge.

– Le solaire et l’éolien, qui sont potentiellement des apports de ressources pour l’agriculture, doivent d’une part ne pas occuper des terres agricoles et, pour une acceptabilité suffisante, respecter leur voisinage. Les grandes éoliennes ne devraient pas être implantées à moins de 1,5 km d’un habitat, comme recom-mandé par l’Académie de médecine.

– L’avenir de l’industrie française dans les énergies intermittentes, des entreprises comme Edf et ENGIE ayant des compétences très affirmées dans ces domaines, ne portera probablement pas sur les équipements de base, nacelles éoliennes et modules solaires, déjà totalement importés, mais sur l’ingénierie des centrales et de leur intégration aux réseaux. Son développement reposera essentiellement sur l’exportation car des limites apparaitront vite à leur développement en France si la maitrise des émissions de CO2 devenait réellement prioritaire en France comme en Europe.

125. Sous réserve d’une autorisation de prolongation du fonctionnement des réacteurs par l’ASN.

– Un deuxième domaine d’excellence devrait se développer en France, celui des réseaux intelligents. Il souffre cependant d’une erreur qu’il faudra corriger ; les compteurs Linky (ou équivalents) ouvrent de larges possibilités (temps réel, plus de plages horaires pour optimiser l’équilibre offre/demande) mais rien n’est encore fait pour qu’ils soient reliés au tableau électrique des usagers, afin de leur permettre d’organiser leur consommation. C’est une option à mettre en place le plus rapidement possible car elle seule pourrait faciliter la multiplication des plages horaires et le lissage des consommations.

Dans le document EDP Open (Page 192-196)